Cela faisait plusieurs jours que Bago n’était pas revenu aux dortoirs des Wonsungis et il se disait que les autres devaient se demander où il était passé. Heureusement il avait pris soin de prévenir Naoji de son absence à durée indéterminée, il avait au départ sorti comme excuse qu’il devait aller voir sa mère qui avait choppé la galle mais, en mauvais menteur, s’était rétracté au dernier moment pour avouer qu’il allait voir Percy le mannequin des Sangos. Le maknae et lui entamaient depuis quelques jours déjà une relation amoureuse qui avait démarré un peu par hasard. Mais comme on aime dire, les rencontres les plus improbables sont les plus fortes. Peu de gens étaient à ce jour au courant que ces deux là sortaient ensemble mais ils ne se cachaient pas pour autant. Néanmoins, la situation était encore trop délicate, et de ce fait, Bago avait demandé, même supplié son meilleur ami de se la fermer et de trouver un petit mensonge à dire aux singes au cas où ils s’inquièteraient.

Donc, par une fin d’après-midi, alors que les tourtereaux avaient longuement passé la journée au lit, le blondinet se leva avec effort, embrassant une dernière fois son homme avant de se mettre debout, enfilant un bas de pyjama trouvé dans le foutoir par terre. Il fit quelques pas avant de dire de manière élégante qu’il avait « envie de pisser. » Après s’être soigneusement gratté la fesse droite, il sortit de la pièce pour se soulager et quand il revint, il entendit un portable vibrer. Le petit s’approcha du son et y remarqua le portable de Percy. Il n’eut pas à s’écouler quelques minutes pour voir Bago débarquer dans la chambre complètement furaxe, jetant le téléphone à la figure de l’homme en face de lui.

« Tranquille, tu vas bien niquer ce soir dis donc ! »

En effet, le message était très exactement écrit de la sorte : -salut Percy, c’est ******, on s’était rencontrés y a une semaine et demi et faut dire que tu m’as mis cher. J’ai envie de passer chez toi ce soir, tu y seras ?- Morbide. Tout simplement morbide. Et le maknae avait déjà les larmes aux yeux, comme frappé par la foudre.

La situation était des plus critiques et Percy semblait des plus chamboulés par ce changement de situation, et il est facile de comprendre pourquoi. Pourtant, il va devoir s'y habituer. Bago n'est qu'un gosse, un gosse qui essaye de faire l'adulte, mais un gosse après tout, et il est assez imprévisible. Il resta sur l'encolure de la porte alors que le vert tentait de se justifier par tous les moyens. Le petit croisa les bras après s'être douloureusement essuyé les yeux à l'aide de ses fines mains. Il fixait son pauvre copain qui n'avait pas l'air de comprendre plus que lui.

"La seule fois où j'ai perdu la tête c'est quand je suis tombé amoureux de toi, mais la c'est toi qui va la perdre si je vois ce mec se pointer ici ! Capito ? Je pourrais même te la déchirer maintenant pour ce que tu as fait !"

Percy devait faire bien attention, à employer les bons termes et effectuer la bonne gestuelle car, en grand observateur, le maknae des singes faisait extrêmement attention à ce genre de détails. Peu de choses pouvait le faire craquer mais peu de choses pouvait le faire revenir il fallait seulement calculer un minimum ses actes. Naturellement c'était un des principaux défauts du garçon car il était complexe. Il fallait jouer entre sincérité et réflexion pour lui plaire. Et, pour l'instant, disons que c'était mal parti. Il arqua un sourcil.

"Traîner tu dis ? Traîner ... C'est trop fort, et c'est assez ambigu pour que tu te permettes de niquer ailleurs !"

Bago grogna, pour la énième fois, et furieux, il partit en deux temps trois mouvements dans la cuisine pour tourner en rond, réfléchissant à ce qu'il devait faire. Il frappa finalement le mur de ses petits poings, profondément atteint avant de se diriger droit dans la chambre pour attraper quelques affaires lui appartenant.

"Tu aurais pu me prévenir. Tu comptais me foutre où ce soir ? Chez une nounou ?"

Le petit avait juste envie de sauter sur le lit pour étrangler Percy. De le couvrir de baisers mais de l'assassiner lui, pour tous les mecs et filles qu'il a pu défoncer. Creuser une fosse commune pour tous ces gens ne lui semblait pas une mauvaise idée.

C'était absurde pensait le jeune garçon. Pourquoi est-ce que Percy lui demandait une chose pareille ? Il devait cruellement manqué de jugeote pour demander un truc pareille. Bago râla sans discrétion et agita la main agacé avant de fermer nerveusement les yeux. Il se questionnait pour savoir de quelle manière son petit copain retournait la faute sur lui. Peut-être que s'il posait la question c'était que lui regrettait vraiment ses sentiments envers le maknae. Non, non ce n'était pas concevable, même pas trouvable. Mais d'un côté, peut-être que le sango, comme leur réputation l'indique, voulait simplement tirer son coup et qu'il y était parvenu à la perfection puisqu'il y avait réussi à faire en sorte que Bago tombe amoureux de lui.

"T'es con. Comment je pourrais penser un truc pareil. Tu y penses toi c'est ça ?"

Le petit savait pertinemment que l'homme en face de lui allait répondre que non, qu'il l'aimait mais tout ce que désirait maintenant Bago, c'était sentir la sincérité de ses paroles.

Percy lui saisit le poignet, sans que le blondinet ne se débatte, tenant simplement les vêtements entre ses petits ongles pointus. Vêtements que le vert retira aussi doucement que possible. Pris d'un excès, le jaune tenta de mordre les longs doigts anguleux de la personne qu'il aimait. Il ne parvint qu'à mordiller le bout de son index avant d'être bousculé sur le lit. Le jeune garçon haussa les épaules, ne retenant à chaque fois, qu'une partie de la phrase.

"Alors en plus tu veux que je vous regarder baiser par dessus le marché !"

Il ne commenta en aucun cas, la seconde partie de la phrase mais il l'avait retenu. Un point pour Percy dans ce cas. L'adolescent l'écouta alors parler, ne grognant seulement qu'en sentant sa main se poser sur sa joue humide des précédentes larmes. Non, il ne voulait pas se calmer, il n'avait qu'une envie c'était de prendre son téléphone et d'aller envoyer ce connard se faire mettre par quelqu'un d'autre. A la fin de son speech, Bago secoua la tête pour enlever la main du sango. Il se recula dans le lit pour échapper à son emprise, réfléchissant à ce qu'il pouvait dire. Il ne savait pas, il était désemparé. Il se leva alors d'un bond, les larmes lui étouffant la gorge et il s'enferma dans la salle d'eau en criant.

"Comment tu peux me mentir comme ça ! Si tu voulais seulement tirer un coup je serai jamais venu te voir ! Je suis certain que tu as calculé tout ceci. Mais moi je t'aime à en être malade ! Pourquoi tu m'as fait ça !"

Le petit prit appui sur la cuvette des toilettes, la nausée dans sa poitrine petit à petit naissante. Non, ce n'était pas le moment d'être malade, pas le moment de laisser son anorexie apparente prendre le dessus, il n'en était pas encore imprégné. Mais il avait le don de tout dramatiser. Il avait trop peur, trop peur que Percy se lasse de lui, et l'abandonne.

On aurait pu faire une scène de film avec ce qui était en train de se passer, sauf que Bago aurait pu jouer le rôle de la fille. Il était maintenant assis sur les toilettes, tentant de se calmer, tremblant comme une feuille. La voix de Percy s'entendait de derrière la porte puis un silence prit place entre les deux. Le maknae soupira de douleur, et sursauta quand il entendit son aimé s'exciter sur la porte. Le petit ferma les yeux de force, et ses larmes dévalèrent sur ses joues. Il n'avait pas la force de répondre, pas le courage ni la voix. Percy allait craquer, il le savait mais il ne le souhaitait pas. Bago savait qu'il allait prendre peur de lui, si violent qu'il pouvait se montrer, et tout le monde savait pertinemment comment ça allait se terminer : le petit allait être terrorisé, et il allait foutre le camp. Le sango s'énerva et pourtant Bago ne broncha pas.

Il attendit quelques minutes avant de se lever finalement et de coller son front contre la porte de la salle de bain. Le garçon tourna la clé et ouvrit lentement la porte. Il devait être en piteux état : la peau grise, les yeux rouges et la peur, la bile et les larmes lui tiraillant la gorge. Il tenta de sortir des mots de sa bouche mais rien, rien ne voulait se dégager. Il ferma les yeux une nouvelle fois, s'essuya les lèvres et fixa Percy de ses yeux foncés. Le petit serra ses poings et commença à frapper aussi forts qu'il le pût dans le ventre de son compagnon. Il cria de toutes ses forces.

"Si ! Tu ! M'aimes ! Envois ! Le ! Chier ! Une bonne fois pour toute ! Je te hais ! Je te hais ! Je te hais ! Tu n'as pas intérêt à me détruire !"

Il se laissa finalement tomber dans ses bras, cherchant l'étouffement, cherchant sa chaleur. Il s'effondra par terre. Pleurant à chaudes larmes, ne se retenant plus.

"Je n'ai plus que toi. Plus que toi. Me laisse pas."

Ses mots n'étaient plus qu'un murmure. Bago soupira, se roula en boule et recommença à trembler, s'épuisant à petits feux. Il chuchota alors.

"Laisse moi. Laisse moi. Mais j'ai besoin de toi. Me laisse pas. S'il te plait. Je t'aime."

Ça n'était pas la première fois que le couple se prenait la tête ou se querellait. Pourtant aucun ne connaissait les limites de l'autre. Bago savait simplement que Percy avait des excès de violence mais jamais il n'en avait été victime. Pourtant il savait qu'un jour, ça allait lui tomber dessus, et, comme un gosse il jouerait la carte de l'égoïsme avant de revenir pleurnicher entre ses bras. Le maknae est susceptible et impulsif, il a besoin de savoir que les gens sont là pour lui, c'est ainsi que je l'ai fait, c'est ainsi que je l'ai créé. Mais il n'est pas rancunier.

Les mots que prononça le sango suffirent à achever le petit. Sa voix était rauque, grave, rassurante et sexy. Mais il n'avait pas la force d'ouvrir les yeux pour le regarder, pourtant il avait de voir son visage. Bago se laissa porter, accrochant ses bras autour de son cou, et ne se sentit mieux qu'une fois allongé. Il adorait quand Percy le dorlotait de cette façon. Il le trouvait juste parfait. Les autres se seraient énervés contre le blondinet pour un millième de ce qu'il aurait fait ce soir. Mais pas lui. Lui qui était si différent, lui qui était bien au dessus des autres. Il comblait exactement l'affection dont le jeune garçon manquait. C'est étrange vous me direz, il doit être la personne à qui on fait le plus de câlins, mais, personne ne peut combler le manque affectif de deux parents, des deux personnes qui lui ont donné la vie. Percy seul le pouvait, il avait un lien des plus forts évidemment c'était son petit ami. Et c'est avec lui qu'il parvenait à différencier l'amitié de l'amour.

Donc, Bago ferma les yeux et, au contact de ses lèvres avec celles du mannequin, il n'avait plus envie de les lâcher. Il frémit. Et il se tut. Ravalant tant bien que mal sa tristesse qui disparaissait au profit d'une envie d'amour. Mais il l'écouta. Le blondinet adorait entendre son copain parler. Il avait une manière de tourner ses phrases, qui rendaient le garçon complètement accroc. Il aimait l'écouter quand il lui faisait l'amour ou quand il le berçait dans son sommeil. Un maigre sourire apparu sur son visage, les larmes remontèrent mais ça n'était pas les même qu'il y a cinq minutes. Le petit s'empara de la main de Percy et le tira contre lui, dégageant la couverture pour que ce dernier s'installe au dessus de son maigre corps. Il le serra alors, de toute la force qu'il lui restait, jusqu'à en étouffer le vert. Il déclara en serrant les dents.

"Promets moi qu'il n'y a que moi. Je suis vide sans toi."

Oui c'était ça. Sans le jeune homme, Bago n'était plus qu'une coquille vide. Il avait besoin de lui. Il était sa drogue, celui qui le ferait sombrer mais surtout celui qui le rendait heureux. Une dépendance. Il entremêla ses doigts aux siens et caressa quelques mèches de ses cheveux, le fixant avec un air de pitié ridicule ou de détresse sérieuse qui disait "aime moi. aide moi."