HERE COME THOSE TEARS AGAIN

Portable confisqué jusqu'à nouvel ordre, telle avait été la sentence finale du professeur de littérature après avoir surpris la pyobeom en train de flâner sur twitter au milieux de son cours. C'était la raison pour laquelle dès le lendemain matin Sunmi s'était faufilée à l'intérieur du bureau du professeur pour réparer cette injustice. Les informations qu'elle avait pu recueillir la veille au sein du dortoir des roses s'étaient avérées véridiques : la petite boite d'objets confisqués la narguait bien au dessus d'une fière armoire en bois de chêne. Résignée, la rousse avait trouvé équilibre sur deux dictionnaires empilées sur une chaise. Sur la pointe des pieds, bras tendus, sa main papillonna quelques secondes dans le vide au-dessus du meuble ; ses doigts tremblèrent plus que de raison. C'était pourtant pas la première fois qu'elle enfreignait ainsi les règles ! Elle senti ses jambes trembler, puis la pile de livres sur laquelle était perchée bouger dangereusement. En moins d'une minute, sans comprendre l’enchaînement logique des choses, la chaise se déroba sous ses jambes et l'étudiante se retrouva à terre. Dans un réflexe inné la rouquine eut juste le temps de relever la tête et de reculer en  arrière avant de voir l'imposante armoire basculer vers l'avant dans un grand « boum » terrifiant. Un voile noir masqua sa vue lorsqu'elle garda les paupières clauses le temps que les secousses cessent. Lorsqu'elle rouvrit les yeux le cadavre de l'imposant meuble gisait à quelques centimètres d'elle et le bureau soigné dans lequel elle se trouvait quelques minutes auparavant n'était plus qu'un désordre sans nom. Sonnée, Sunmi se releva en ayant encore la sensation que la terre risquait à tout moment de se dérober sous ses jambes. Tremblante et méfiante elle fit plusieurs pas à travers les débris jusqu'à se retrouver devant une porte à moitié défoncée qu'elle poussa à l'aide de son épaule jusqu'à pouvoir se faufiler dans le couloir désert. « Y A QUELQU'UN ? » s'époumona-t-elle en lançant des regards furtifs à droite et à gauche. « QUELQU'UN ? » réitérera-t-elle en cédant peu à peu à la panique devant le silence de mort qui régnait maintenant dans toute l'école.  

Ce qu'il venait de se passer était probablement sans précédent dans sa courte vie d'être humain. La terre s'était mise à trembler sous ses pieds, les meubles les plus fragiles tout autour de lui s'étaient effondrés au sol dans un brouhaha effroyable et Junsu aurait juré avoir entendu des pans de murs s'écrouler dans les salles de classe à côté de la sienne. Le destin avait voulu que le coréen soit le seul non-informé que le cours d'histoire de 8 heures avait été annulé et, ainsi, l'étudiant s'était retrouvé seul lors de ce tremblement de terre. Son premier réflexe avait été de s'accroupir au sol et de replié ses bras au-dessus de sa tête en attendant que les secousses cessent. Durant ce laps de temps apocalyptique Junsu avait eu le temps de penser aux quelques personnes à qui le coréen tenait plus qu'à lui-même et à tout ce qu'il aurait aimé accomplir dans la vie plus tard. Mais fallait croire que son heure était loin d'être venue puisque lorsqu'il rouvrit les yeux, il pu se relever sans problème. Par précaution, il prit cinq minutes pour tâter tout son corps et vérifier son état : rien à signaler. Il pu donc bouger  et c'est ce qu'il fit. Doucement. Avec précaution à chaque fois qu'il enjambait un débris de pierre ou une chaise renversée. Dans les couloirs de l'école le silence pesant le frappa de plein fouet. Pourquoi n'entendait-il pas de sirène ? Pourquoi n'y avait-il pas de cries ou de pleures ?  Etait-il le seul survivant ? Impossible ! Le séisme avait été violent mais certainement pas assez pour blesser tous les élèves de cette école. Il ralentit sa marche petit à petit alors qu'une silhouette féminine familière se retrouva à quelques mètres de lui. Elle était dos tournée et ne semblait pas avoir encore aperçu sa présence. Junsu souffla un coup et se força à adopter un air confiant. « T'as fini de hurler dans le vide comme ça ? » Il s'avança pour arriver à la hauteur de sa camarade et la détailla des pieds à la tête ; à part quelques éraflures superficielles aucune trace ne laissait supposer qu'elle était blessée. « T'as l'air d'aller bien. » Il tourna autour d'elle, posa son regard sur ses jambes nues où quelques bleus marquaient sa peau. « Dommage. »

HERE COME THOSE TEARS AGAIN

Pendant un instant Sunmi avait bien cru tout perdre. Sa vie, ses rêves, son futur. Elle avait eu peur comme jamais. D'abord pour elle-même. Puis une fois saine et sauve, une fois que la terre avait cessé ses secousses, sa peur avait pris d'autres visages. Ceux de sa famille, de ses amis, de son copain et même de connaissances dont elle n'arrivait pas à expliquer leur présence dans son esprit. Comment allaient ses proches ? Où étaient-ils ? La scène du tremblement de terre se déroula une nouvelle fois devant ses yeux. En quittant le bureau saccagé du professeur l'étudiante avait bien eu l'idée de récupérer son téléphone. Mais les  débris de l'armoire sous l'armoire l'en avait vite dissuadé puisque son téléphone ne  pouvait donc plus lui être utile. Elle restait donc sans nouvelle de ses proches et ne voyait actuellement aucun moyen de la contacter à distance. Pour cette raison la rouquine s'était résolue à traverser le couloir désert pour atteindre l'extérieur de l'école en espérant tomber sur quelqu'un mais ce qu'elle n'avait pas prévu c'était que, justement, quelqu'un venait de tomber sur elle ! Elle avait sursauté malgré elle en attendant une voix s'élever derrière son dos. Pourquoi lui ? Sunmi se sentie étonnamment furieuse quand le coréen la détailla des pieds à la tête comme à chaque fois qu'il posait les yeux sur elle ou se souvenait de son existence. Junsu lui avait fait vivre un enfer et cet enfer semblait la piéger à nouveau dans ses entrailles à chaque fois qu'elle entendait sa voix. L'aurait-il aidé si elle avait été blessé ? L'aurait-il aidé si elle avait été couverte de sang ? Qu'il la touche avec de bonnes intentions lui paraissait impossible ! Et ça lui était presque douloureux de constater que quelqu'un pouvait autant la détester, la haïr. A tel point qu'elle avait encore du mal à le regarder dans les yeux sans avoir l'impression d'être une moins que rien. « Laisse-moi tranquille, lui intima-t-elle en s'éloignant d'un pas défensif, je croyais que je n'existais plus pour toi ? » Elle recula encore en ayant presque l'impression de franchir une règle interdite. C'était frustrant ! De constater à quel point son autorité sur elle n'avait pas changé ! Elle avait la terrible impression d'avoir été dressé depuis le lycée. Dresser à lui obéir et à le craindre de par ses brimades. Que devait-elle faire ? Que pouvait-t-elle faire ? Elle se sentait bizarrement obliger de rester alors que la logique lui disait de courir. Même si chacun de ses muscles semblait aussi raides que du marbre l'étudiante se força à tourner les talons. Où aller ? Qu'en savait-elle ! La seule intention qui guidait ses mouvements c'était celle de s'éloigner de ce bourreau d'antan ! Mais. Une pensée venait de lui traverser l'esprit. Une pensée folle mais qui lui semblait plausible tellement la situation lui paraissait tout aussi folle. « Tu aurais par hasard... ton portable sur toi ? » lui demanda-t-elle avec le même ton poli forcé qu'elle utilisait pour parler à un professeur. C'était la seule lueur d'espoir qu'elle pouvait cueillir actuellement pour joindre ses proches. Et s'il ne l'avait pas tant pis ! Elle irait elle-même fouiller les dortoirs pour au moins rejoindre Bowon ou Jibok ! Il lui fallait un de ces deux piliers pour parvenir à retrouver un peu de réconfort. « Si tu veux pas... continua-t-elle d'une petite voix, c'est pas grave. Je vais... enfin j'irai... là-bas de toute façon. » Elle se sentait si faiblarde à devoir prendre des pincettes avec le coréen mais Sunmi savait mais c'était le moment où jamais de mettre de sa fierté de côté. L'heure n'était pas à a rébellion.