Je venais d'arriver à l'opéra lorsque la terre s'était mise à trembler. J'avais tout juste enfilé mes collants et mon justaucorps, et soudain, le chaos. Je dois reconnaître ne pas me souvenir de grand chose. Lorsque j'ouvre les yeux, j'ai mal partout, et nul part à la fois. Je sens du sang couler le long de mon visage, mais je suis bien trop assommée que pour m'en inquiéter. Lorsque j'essaie de bouger, je prends conscience que je suis coincée par un casier métallique, qui a dû s'effondrer. La panique commence à monter, semblable à de la lave dans ma poitrine. J'essaie de reprendre mes esprits, mais je comprends rapidement que j'ai été blessé à la tête, et la douleur n'aide pas à penser de manière rationnelle. Forcément, à cette heure-ci, il n'y avait personne à l'opéra, et j'ai le temps de mourir trois fois avant que les secours n'arrivent. Je ne peux compter que sur moi-même. Tournant la tête vers la droite, je tente d'attraper mon sac, et par la même occasion, mon portable. Après mains efforts, j'y parviens. Tout à coup, je m'inquiète non plus seulement pour moi, mais pour tous mes proches. Moeko. Shûji. Kyungie. Su Jin et Su Nah. Même cet étrange monsieur croisé en soirée, Ironman. La réalité me frappe encore plus durement lorsque je pense à ma mère, et à nos domestiques. J'essaie de contacter le majordome, en vain. Je ne parviens pas à capter la moindre de réseau. Il faut pourtant à tout prix que je sorte de là. Prenant mon courage à deux main, j'entreprends de bouger le casier qui - par chance - est vide. Plusieurs gémissements et cri de douleur plus tard, j'arrive finalement à bouger à peu près librement, compte tenu des blessures qui ont vu le jour ci et là sur mon corps. Mon premier réflexe et de tenter de me mettre debout, et par je ne sais qu'elle miracle, j'y parviens. Difficilement, mais j'y parviens. Une fois debout, le monde se met à tourner autour de moi, et je porte une main à mon front. Cela, en plus de mon dos qui semble avoir subit des dommages importants, j'ai plutôt intérêt à trouver de l'aide et rapidement. L'opéra n'a pas subi énormément de dommages, et j'en sors rapidement. Dehors en revanche, c'est l'apocalypse. Le bruit des sirènes incessant me fait tourner de l'oeil, mais je continue ma progression, prenant appui sur tout ce que je trouve. J'ignore où je suis lorsque mes genoux heurtent le sol, refusant de faire un pas de plus. Il ne faut pas attendre longtemps avant que le reste de mon corps suive le mouvement, comme si un poids insoutenable venait de s'abattre sur moi. Je n'ai le temps de rien voir, le monde devient flou. Puis le calme.

Bizarrement, j'étais bien là. Le monde autour de moi n'avait plus aucune importance, plus rien n'en avait. La vie, la mort, broutilles. Je me sentais légère tout à coup, comme si je flottais dans les airs. Était-ce cela la mort ? Non, j'étais encore en vie. D'une étrange façon, je le savais. Tout à coup, une voix résonne dans le vide, celle d'un homme qui m'est inconnu. Pourquoi est-il en train de m'appeler ? Qu'ai-je fait ? J'essaie de rassembler mes esprits tant bien que mal, et d'ouvrir les yeux. Je n'y vois pas grand chose, seulement des formes, floues, suggérée. Tout à coup, la douleur me reprend, comme si elle n'était partie que pour mieux revenir. Je laisse s'échapper une longue plainte d'entre mes lèvres, refermant les yeux et fronçant les sourcils. J'étais néanmoins consciente du fait que je ne pouvais pas rester là. Et je n'étais pas seule ... Cet homme était-il là pour m'aider ? Il fallait que ce soit le cas, seule je ne risquais pas de faire long feu. Je tentai difficilement de me redresser, appuyant sur mes coudes, tâchant de recouvrer une vision à peu près correcte. « O-Où suis-je ? » Oui, parce qu'avec tout ça, je n'avais pas la moindre idée d'où j'étais ... En vérité, j'étais complètement paumée, comme si tout ce que j'étais en train de vivre n'avait aucun sens. Plus exactement, je n'arrivais pas à lui en donner un. Mon regard se pose sur l'inconnu, que j'essaie d'identifier. Ses traits me disent vaguement quelque chose, je l'ai déjà croisé auparavant, peut-être à l'université ? Au moins, il n'avait pas l'air d'être un détraqué assoiffé de sang. Vous croyez que les vampires existent ? Non parce qu'ils devaient s'en donner à coeur joie si c'était le cas. Quoique le soleil était levé, donc à moins que les Cullen ne soient réels, ils devraient encore attendre un peu avant de sortir de leur cachette. Comment ça, je divague ? « Et qui êtes-vous ? » Non pas que je le prenais pour un vampire, soyons sérieux cinq secondes, mais autant savoir qui était l'inconnu qui me venait en aide. Et s'il décidait de me planter là, j'irai porter plainte pour non-assistance de personne en danger, na.

Les choses retrouvaient leur sens, si tant était-il que la situation en ait un. C'était comme si l'espace d'un instant, le monde avait cessé de tourner, avant de reprendre son mouvement comme si de rien était, laissant pourtant derrière lui des conséquences désastreuses. Je tentai de prendre une inspiration, mais je fus coupée dans mon élan par une douleur lancinante au niveau des côtes. Pas besoin d'être médecin pour savoir que j'en avais plus d'une de cassée. À la question de l'homme, je jetai un regard à mes jambes. Je n'avais pas mal, rien d'alarmant donc. En revanche, la douleur que je ressentais au niveau des côtes était bien plus préoccupante « Une seule façon de le savoir ... » Je rassemblai mes forces afin de me hisser sur mes jambes, et j'y parvins. Si tant est-il que s'écrouler à moitié sur un inconnu pour rester dans une position debout revient à se lever. « Avec de l'aide, il devrait y avoir moyen » Grimaçai-je. Néanmoins, je m'estimais heureuse. Pourquoi ? Mes jambes n'avaient rien, comme si pour une fois, les Dieux avaient décidé de les épargner. J'étais bien prête à tous les sacrifices au monde, s'ils me permettaient de garder mes jambes.

L'inconnu s'appelait donc Jun. Bizarrement, avoir un nom à mettre sur son visage me rassura d'une certaine façon. Pourtant, le fait qu'il me retourna la question me déstabilisa d'une certaine façon. Elle me paraissait évidente et en même temps ... « Hn, Jun. Merci de t'être arrêté pour moi. » J'éludai la question, aussi maladroitement que possible. J'avais l'esprit embrumé, voilà tout, il me fallait un moment avant de revenir complètement à moi. N'est-ce pas ? « En particulier hum ? Les côtes ... et la tête. » Ce n'était pas vraiment une douleur à vrai dire, plutôt l'impression qu'elle avait éclaté en mille morceaux, que plus rien ne coïncidait. Je levai on regard sur Jun, le détaillant un instant, comme si me concentrer sur une chose m'aiderait. « J-je ... heu ... » Plutôt inefficace comme technique pour être honnête. Je pris alors une profonde inspiration, fermant les yeux. Une seule chose me vint à l'esprit, tout le reste était plongé dans l'obscurité. « Je suis danseuse. J'étais à l'Opéra quand la terre s'est mise à trembler, et une armoire m'est tombée dessus. L-Le reste ... Trou noir. » Et ça m'inquiétait bien plus que je voulais bien l'admettre.

J'étais perdue, complètement paumée. Mon coeur s'emballait, me faisait d'autant plus souffrir au fur et à mesure qu'il battait contre ma cage thoracique. Une petite voix dans ma tête me sommait de me calmer, de respirer profondément et de ne pas trop penser. Plus facile à dire qu'à faire quand la moindre parcelle d'air dans vos poumons rencontre un os - au sens propre du terme. Je hochai doucement la tête, tout en serrant les dents. Un mouvement de plus à éviter. Les jours à venir s'annonçaient joyeux ...« J'espère ... » De toute façon, je ne pouvais rien faire d'autre.

Me porter. La proposition n'était pas de nature à me faire sauter de joie (en même temps, j'aurais eu du mal dans mon état). Je comprenais néanmoins la nécessité. Ce n'était pas à l'encontre de Jun, ç'aurait été pareil avec n'importe qui. « Je comprends, tu as raison ... » ça ne m'empêchai pas de faire une légère moue, tout en me demandant comment faire pour limite la casse au maximum. Enfin, vu l'état de mon crâne, je laissai à mon interlocuteur le soin de réfléchir, c'était déjà suffisamment douloureux comme ça de penser ... Sa réflexion me fit néanmoins légèrement sourire, et je ne pus m'empêcher de rajouter un petit « J'espère pour toi que tu l'as terminé au moins ? » Était-ce une tentative d'humour ? ça en avait tout l'air, comme quoi tout n'était peut-être pas perdu ! Néanmoins, j'en revins bien rapidement à des questions d'ordre pratique « Par contre ... le gymnase est loin ? Ma tête me fait vraiment de plus en plus mal ... » et bon, pour le coup ç'aurait été bien de voir un médecin assez rapidement, même si je me doutais que les services de secours devaient être débordés ....

Dans mon malheur, j'avais néanmoins de la chance. De la chance de tomber sur quelqu'un prêt à m'aider, prêt à m'accorder de son temps alors qu'autour de nous, le paysage ressemblait à un jeu vidéo futuriste. Des décombres, de la poussière, des bâtiments effondrés à perte de vue. Pas le genre de décor que j'aimais pour être honnête. Ce que j'aimais alors ? Je n'en étais pas sûre. Un champ de fleurs, ça me paraissait cool. Avais-je toujours raisonné de la sorte ? C'était une sacré question, et pas le bon moment pour me la poser. « Ne t'en fais pas, j'ai dû connaître pire, non ? » Quelque chose au fond de moi me soufflait "oui", mais quoi exactement, je n'en savais foutre rien. « Bon .. au moins ça t'aura fait faire des économies. » À supposer que l'endroit où il vivait ne faisait pas partie des décombres, sans quoi le prix d'un petit déjeuné n'allait pas lui être d'une grande aide.

Je manquai de hocher la tête quand il me présenta son dos, avant de me souvenir que ça me faisait mal. Je me contentai dès lors d'un petit « D'accord » afin de grimper sur son dos, retenant une plainte, grimaçant quelque peu (voir beaucoup). Décidément, je n'avais jamais réalisé à quel point les côtés intervenaient dans tous les mouvements qu'il était possible de faire. « Tu peux y aller ... » Soufflai-je en me préparant à souffrir.

Je voyais bien ce que Jun essayait de faire, à savoir de m'occuper l'esprit. C'était malin, encore une attention pour laquelle il allait falloir que je le remercie lorsque j'aurai récupérer mes facultés mentales dans leur ensemble. « Hum ... sûrement. Il est trop tôt - je crois - pour qu'il y ait des cours, même si en fait, je suis pas sûre de savoir quel jour on est... » Je retins un soupir - ça aussi ça faisait mal - afin d'orienter la conversation sur un autre sujet, moins embarrassant pour moi « Pourquoi ne pas avoir directement rejoins le gymnase ? »