Le ridicule ne tue pas. Ce qui ne tue pas rend plus fort. À ce qu'il paraît. N'empêche qu'elle se trouve sacrément stupide dans cet accoutrement. Une poubelle de tri, ils sont sérieux dans cette fraternité ? Qu’on ne lui dise pas que c’est pour le bien de la communauté, de la cause soutenue du groupe ou autre excuse bidon ; Maeng sait parfaitement que c’est un bon moyen de les bizuter sans mettre le mot bizutage sur le fait. Une mise à l’épreuve, mon œil. Une corvée, plutôt. Enfin, c'est toujours mieux que le récurage des chiottes ou la lessive de tout le dortoir pendant un mois. Heureusement, l’étudiante a ses patins aux pieds ; sa seconde peau qui rend tout un peu moins douloureux, qui fait passer le temps un peu plus vite. Elle préférerait nettement utiliser ce temps précieux pour s'entraîner, ranger ses cartons ou faire un ménage total de sa chambre. mais soit, s’il faut cela pour faire parti des Baekje alors elle sacrifie non-volontairement une demi-journée de sa vie. Prospectus dans la main, la voix forte et les pieds rapides sur ses roulettes, elle zig-zag entre les étudiants pour refiler ses bouts de papier en priant pour que la journée se termine au plus vite. Jusqu’au drame. Le drame. Sous les yeux, alors qu’elle explique les démarches sur recyclage à une élève de 1ère année, un emballage aluminium tombe doucement au sol sous l’air désintéressé de son propriétaire. « Putain, il se fout de ma gueule lui ? » râle-t-elle en fronçant les sourcils. Ce n’est pas le faire de choses qui perturbe Mae normalement, cela a dû même lui arriver deux trois fois. Mais – oui parce qu’il y a toujours un mais – jeter un déchet au sol alors même qu’il y a une personne qui se casse le cul à promouvoir le tri – déguisée en poubelle – à côté… C’est trop. Les dents serrées, elle laisse un prospectus dans la main de la jeune femme avant de patiner jusqu’au criminel. Sprintant pour se placer devant la personne, elle ne le laisse pas prononcer un mot avant d’attaquer. « Il y a des poubelles pour jeter tes déchets, t’es au courant ? » sa voix siffle alors qu’elle croise les bras sur sa poitrine dans un air mal aimable. Ses pupilles font des allers-retours entre le coupable et ce détritus abandonné sur le sol ; endroit où il n’a rien à faire. Ce n’est pas l’envie de lui faire bouffer par les narines ou de lui faire astiquer la poubelle du coin qui lui manque. « Ramasse. Et poubelle. » dit-elle dans une voix qui ne laisse pas de place à la discussion, ses yeux fatigués mais assassins fixés sur le délinquant de l’environnement et de la propreté. Franchement, elle n’a pas le temps pour ça, elle a mieux à faire. Mais c’est sa mission du jour et la poubelle est à quatre mètres. Par pitié un effort pour la société et pour sa patience, bon dieu.

Bien trop absorbé par les notes de musiques sur sa partition que par ce qui l’entourait, Jinhwan ne faisait pas attention aux étudiants qui se pressaient dans les couloirs de la faculté. Il était perdu dans ses pensées, tentant de trouver le meilleur enchainement pour son devoir, devoir qu’il devait rendre dans la semaine. Il était encore large, il le savait, mais comme il travaillait et avait besoin de passer du temps avec son petit ami, il ne voulait pas prendre de retard. Le jeune homme passait donc plus de temps les yeux sur son morceau de papier qu’à regarder autour de lui. Il ne vit donc pas la jeune femme habillée en poubelle roulante expliquer la propreté et le fait qu’il fallait recycler. Jinhwan ne vit pas non plus qu’un morceau de son emballage de bonbon avait quitté sa poche quand il avait mis sa main à l’intérieur pour en sortir un stylo afin d’écrire les notes qui lui venait en tête. Il continuait donc d’avancer, sans se préoccuper de ce bout d'aluminium à terre. De base, il avait prévu de le mettre dans une poubelle, le soir venu quand il mettrait ses affaires dans le bac de linge sale. Cependant, c’était sans compter sur le fait que distrait par son devoir, il n’avait pas fait attention et l’avait fait tomber. Une jeune femme se planta alors devant ses yeux et il sursauta de surprise et lâcha un petit cri. Il voulut lui demander ce qu’elle voulait et surtout lui faire part du fait qu’elle l’avait effrayé, mais il n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche, qu’elle l’attaqua. Aussitôt, il fronça les sourcils, ne sachant pas de quoi elle parlait. Il la détailla des pieds à la tête, surpris de la voir déguisée en poubelle avec des rollers. Ce n’était pas quelque chose d’habituel, même si les bizutages dans ce genre étaient devenus monnaie courante avec l’arrivée des nouvelles fraternités. Était-elle en train d’en faire un ? Il sursauta une nouvelle fois quand à la force de sa voix et se tourna vers la source du problème. « Oh merde ! J’avais pas vu ! » Jinhwan se dépêcha d’aller récupérer le papier et avisa une poubelle plus loin. Il revint alors vers la jeune femme tout penaud. « Je suis vraiment désolé ! j’avais la tête ailleurs. » Il lui montra sa partition de musique et continua de parler. « J’ai pris un stylo dans ma poche et le papier est sorti. J’ai tout le temps des papiers dans mes poches que j’oublie de mettre à la poubelle, donc je le fais le soir avant de mettre le linge dans le panier de linge sale. » Le jeune homme parlait bien trop, presque intimidé par la jeune femme et son regard perçant. A cause de ça, elle penserait sûrement que c’était un baratineur et qu’il lui mentait éhontément. Ce n’était absolument pas le cas. Jinhwan ne faisait que dire la vérité. « En tout cas, je suis vraiment désolé… » Il lui adressa un sourire désolé avant de regarder une nouvelle fois sa tenue. « C’est pas trop chiant de porter ce genre de choses ? Et t’as pas mal aux pieds ? » Parce que lui savait qu’il aurait mal à peine cinq minutes à les porter.

Chacun était responsable de ses actions, bien que cela la saoule légèrement de voir l’état du quartier après une soirée ou de voir un vieux laissé tomber sa cigarette au sol… Elle fait ses bonnes actions à elle et après, elle se dit que ce n’est pas son job de coller au cul des autres pour qu’ils fassent leur part du travail. Aujourd’hui est différent, parce que c’est son job de la journée de ‘sensibiliser’ les gens à la gestion des déchets. Alors quand elle voit un étudiant volontairement ou non laisser traîner un emballage, elle câble. Maeng ne retient pas ses mots – elle ne le fait jamais – en attaquant verbalement le petit con qui vient d’abandonner ce papier. Le pire, c’est que le jeune homme met un temps fou à réagir. « Ouais, c’est ça… » râle-t-elle dans sa barbe inexistante en le suivant des yeux jusqu’à la poubelle. À la surprise de la future baekje, l’étudiant revient vers elle comme si cette conversation n’était pas finie alors que le déchet est bel et bien à la poubelle et c’est tout ce qui importe à Mae. Elle fronce les sourcils quand il commence à lui raconter sa vie. Super. Un grand soupir de fatigue lui échappe alors qu’elle passe une de ses mains sur son visage. « Oula, je t’arrête tout de suite. Je m’en branle de tes excuses, tu fous tes putains papiers à la poubelle point. ». C’est la conclusion de cette conversation, ou presque. « Ou au moins, fais-en sorte qu’il n’y en ait pas un qui atterrisse sous mon nez. ». Bref pas merci, aurevoir. La jeune fille compte bien retourner à sa mission de sensibilisation et ne plus jamais revoir ce délinquant d’une minute. Mais non, à priori lui en a décidé autrement. Sur son visage, la lassitude extrême doit se lire quand elle écoute les questions de l’étudiant. « Non, j’adore me promener en poubelle, mon passe-temps du moment. » fait-elle sur le ton le plus sarcastique du monde, avant de rouler des yeux. « Réfléchis trois secondes, s’il te plait. ». Oui, non, la patience et la sympathie ne sont pas ses plus grandes qualités ; mais il faut dire que la journée a été longue aussi. La dernière de ses volontés à l’heure actuelle est de taper la discute à un inconnu, qui pose des questions idiotes. Elle soupire un instant avant de regarder ses patins, pourtant ça se voit que la jeune femme est à l’aise avec, mais bref. « Mes patins sont bien les seules choses qui rendent cette journée passable, c’est un peu mon métier. » répond-t-elle en levant un pied devant le garçon, avant de le reposer. Enfin, c’est plus ou moins son métier ; sa chaine youtube, son évolution sur les circuits de derby. C’est en partie comme cela qu’elle gagne sa vie ou qu’elle essaie en tout cas. « T’as jamais fait de roller ? ». Maeng ne sait pas pourquoi elle demande ça parce que vraiment, elle s’en fiche pas mal. Mais bon, est-ce que ce n’est pas mieux que de se faire refuser ses prospectus sur la propreté du campus, peut-être que si.

Jinhwan était bien trop tête en l’air. Quand il était concentré sur la musique, plus rien autour n’avait d’importance à ses yeux. Il ne faisait pas attention à ce qui se passait près de lui, pas plus qu’il ne vit le papier sortir de sa poche au moment où il récupéra un stylo pour écrire des notes sur sa partition. Le jeune homme n’avait pas fait exprès et ne s’était pas attendu à se faire agresser de la sorte par une poubelle à roulettes. La jeune femme ne semblait pas de bonne humeur et il ne se rendit compte que quelques secondes après de son erreur. Il s’excusa et alla le remettre à sa véritable place, dans une poubelle près d’eux. Jinhwan revint ensuite vers elle pour s’excuser à nouveau et lui expliquer la raison de cette erreur. Il n’eut pas réellement le temps de finir, qu’elle le coupa pour lui dire qu’elle se moquait bien de ce qu’il faisait. Le baekje se ratatina sur lui-même et la regarda légèrement mal à l’aise. « J’ai vraiment pas fait exprès… » répéta-t-il espérant qu’elle arrête de le prendre pour un grand criminel. Si encore, il lui avait volé quelque chose à cause de sa kleptomanie, il aurait pu comprendre. Mais là, ce n’était qu’un pauvre bout de papier qu’il avait fait tomber par inadvertance et qu’il avait fini par mettre à la poubelle, même si c’était elle qui lui avait demandé avec toute la gentillesse du monde. Jinhwan en vint ensuite à lui parler de son costume et une nouvelle fois, sa réaction ne se fit pas attendre. Il se sentit rétrécir encore si c’était possible à cause de ses mots. Elle n’était pas très agréable avec lui et il mordit dans sa lèvre à cause de la nervosité. « Je sais pas !! Tu pourrais faire partie d’une association pour la propreté de la fac et en être la mascotte. » C’était totalement plausible non ? Nana n’en savait rien. Après tout, il ne s’intéressait pas vraiment à la vie étudiante, faisant son petit bout de chemin seul dans son coin. Il la regarda curieux quand elle parla du patin comme de son métier. « Ton métier ? Tu fais quoi pour avoir des patins aux pieds toute la journée ? » Il était curieux Jinhwan. C’était un vilain défaut, il le savait, mais il avait envie de savoir. La jeune femme lui posa ensuite une question et il secoua la tête. « Je pense pas non.. Petit j’avais pas le droit de faire de choses dites dangereuses pour éviter de me blesser… Donc le roller en fait parti. » Surtout, il ne fallait pas qu’il blesse Jinah, cette soeur dont il avait pris l’apparence pendant des années après la mort de la vraie. Sa mère aurait très mal vécu de le voir blessé à cause d’une activité. Donc, il n’avait jamais fait de roller de sa vie. « T'en fais depuis longtemps toi ? » lui demanda-t-il, admiratif.

L’agacement et la fatigue pèsent un peu plus sur les épaules de Maeng qui ne se gêne pas pour le montrer à travers sa réponse. Non, vraiment non, elle ne se promène pas en poubelle pour le fun. Pourquoi tombe-t-elle toujours sur les plus débiles ? Sale karma, décidément. Elle se fiche pas mal de rendre nerveuse la jeune femme, si jamais cela lui fait plaisir d’avoir une certaine emprise sur les autres – une force qui impose, fait peur. S’il y a des années, c’était un genre qu’elle se donnait volontiers, c’est à présent presque une seconde nature. « C’est le bizu baekje je suppose que c’est la même merde qu’une association. » répond-t-elle, pas gênée de son vocabulaire ni de sa façon de parler de la fraternité qui vient de l’accueillir. Elle a peut-être un peu son bizutage en travers de la gorge, il est vrai. Heureusement qu’elle a ses patins, dieu merci. Et c’est bien le seul sujet sur lequel elle est ouverte à la discussion, alors quand l’étudiante lui en parle, Maeng laisse glisser plus facilement quelques informations la concernant. « Pas toute la journée… Mais je suis skateuse pro – youtube, mv, pub, doublage tout ça tu vois. » et elle laisse volontairement de côté le fait qu’elle gagne aussi sa vie de façon illégale au roller derby. Personne n’a besoin de savoir ça. Et pour être sûre que la petite brune ne capte pas son hésitation, la baekje change de sujet faisant semblant de s’intéresser à elle. Et la réponse lui fait rouler des yeux. Maeng n’arrive même plus à considérer le roller comme un potentiel danger donc cela la fait bien rire, mais soit. « Depuis le lycée. » ou un truc dans le genre. C’est son frère qui lui a offert ses premiers patins pour à se déplacer entre les établissements et ses petits boulots, un moyen de transport pas cher devenu une passion. « Petite princesse à ses parents donc. » reprend-t-elle en se moquant ouvertement. « Je suis pas vraiment étonnée, ça se lit sur ton visage de bébé. », sachant pertinemment que cela peut être totalement faux et qu’il y a des milliers d’autres raisons existantes. Mais ce n’est pas comme si elle en avait quelque chose à faire de la blesser avec ses mots. Tant qu’elle ne se met pas à pleurer au milieu du campus, auquel cas Maeng n’hésitera pas à se tirer sans état d’âme. Très peu pour elle les gamines qui chialent, ce n’est pas une babysitter. « Mais tu devrais peut-être essayer un jour ? Prendre la liberté et le risque d’exister mais bref ce ne sont pas mes affaires. » pas ses affaire mais elle se retient pas de quand même donner des conseils qu’on ne lui a pas demander.