just tell me everything's alright

Journée chargée. Tellement chargée, quand on partait du principe qu’elle avait séché les cours avec Monnah. C’était tout sauf sérieux. Tout sauf elle. Et pourtant elle l’avait bien fait. Elle n’en était pas très fière, évidemment, mais l’espace d’un moment elle avait eu l’impression de s’échapper. Elle avait fui, comme toujours. Elle s’était échappée de l’université comme pour s’échapper de ses problèmes. S’évader. Voler ailleurs. Et elle s’était amusée, oh oui. Mais la retombée sur terre allait être presque douloureuse. Malee avait fait un saut au dortoir, s’était changée avant de ressortir. Comme d’habitude, son maintenant traditionnel tour à l’hôpital pour y voir Jina. Même si elle savait très bien que son amie était en confinement et qu’elle ne pourrait probablement pas la voir. Mais comme chaque jour depuis que la sango s’était réveillée, la wonsungi comptait bien supplier les médecins. Et elle allait bien voir si elle atteignait son but cette fois-là. Mais elle n’était pas partie du principe qu’ils la laisseraient vraiment voir sa camarade. Elle ne s’était pas préparée. Alors quand le docteur l’avait accompagné vers la chambre, la thaïlandaise s’était d’abord figée. Sans savoir quoi faire. Prise au piège. Elle avait peur. Oh bien évidemment qu’elle avait vu l’état dans lequel s’était retrouvé Jina suite à son accident. Après tout ce n’était pas la première fois qu’elle lui rendait visite. Mais la première fois qu’elle la verrait après son réveil. La miss prit une inspiration. Une courte expiration. Et puis elle suivit le médecin. Il lui parla un instant, lui donna quelques indications, mais elle n’écouta rien, le regard fixé sur la porte toujours close. Et puis l’homme partit. Et elle entra. Son regard passa tout en revu, observant un instant les murs, les instruments, s’arrêtant finalement sur la silhouette de son amie, toujours allongée sur le lit. Dans cette position que la thaïlandaise lui avait si souvent vue. Mais cette fois, c’était différent. Parce que la télévision était allumée. Et ses yeux ouverts. « Jina ? » Première question, première réaction. Malee resta un instant les bras ballants. Et puis elle se mit en mouvement. Elle se précipita en avant. « Oh mon Dieu Jina tu vas bien ? » Quelle stupidité, bien sûr qu’elle n’allait pas bien. Il suffisait de voir l’état dans lequel elle se trouvait. Et pourtant. Et pourtant elle était réservée. Et c’était déjà un très bon signe selon la thaïlandaise, qui s’était arrêtée au chevet de son amie.

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Apparemment il n'y avait pas que son corps qui était dans un sale état, sa voie aussi. Mais elle était tout de même en vie. Malee ne put retenir un sourire en constatant la situation. Et quand la sango lui fit un câlin, elle la serra entre ses bras avec grand plaisir gardant tout de même un peu de retenue pour ne pas lui faire de mal. Sait-on jamais, il suffisait d'appuyer au mauvais endroit. Quoique chaque parcelle de peau semblait être le mauvais endroit, pour Jina. Et quand elles se lâchèrent et que cette dernière prit la parole, la thaïlandaise secoua la tête d'un air désapprobateur. « Ne détourne pas le sujet vers moi, c'est toi qui est allongée dans un lit d'hôpital j'te rappelle. » Et puis elle reprit un visage un peu plus agréable, tandis qu'elle allait chercher le fauteuil, le traînant au chevet de son amie. Oui il était hors de question qu'elle reste dans un coin de la pièce. Elle ne comptait pas rester aussi loin de cette fille qu'elle considérait un peu comme sa sœur. Impossible. Elle prit donc place sur le fauteuil et regarda Jina, son regard passant du visage de la demoiselle à sa minerve abandonnée. Puis la wonsungi fronça les sourcils. « T'es sûre que t'as le droit de la retirer ? Song Ji Na, t'as pas intérêt à faire des bêtises ! Je te veux guérie et dehors le plus vite possible moi. » Petite moue. Oh qu'elle lui avait manquée, son amie. Plus qu'elle n'aurait voulu le croire, plus qu'elle n'aurait osé se l'avouer. Elle était comme ça, Malee, elle aimait trop. Probablement trop pour son propre bien. Même en amitié. Malgré le fait qu'elle faisait mine de rien et tentait de rester stoïque et de se tenir droite, elle prenait tout trop à cœur. Quand ses proches étaient touchés, elle devenait folle, presque enragée, une vraie tigresse. Elle aurait pu mourir pour eux. Elle les aimait plus que sa propre vie. Peut-être était-ce ça le principal souci, elle tenait plus aux autres qu'à elle-même, ce qui avait tendance à devenir nocif. Tendant la main, elle attrapa celle de sa camarade, tout en lui adressa probablement le sourire le plus doux qu'elle n'avait jamais fait. « Je suis contente de te voir Jina. » Oh oui, terriblement contente. Surprise. Sous le choc. Mais heureuse. Au point qu'elle se demandait pourquoi elle avait eu peur, seulement quelques instants auparavant. Changement radical de comportement. Elle subissait beaucoup trop d'ascenseurs émotionnels ces derniers temps.

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Relâchant la main de son amie, Male retira discrètement ses chaussures, pour pouvoir poser les pieds sur le fauteuil, les genoux remontés jusqu’au niveau de son menton, le flanc en partie contre le dossier. En diagonal sur l’objet, elle pouvait ainsi faire face à Jina. Même si la position n’était pas la plus agréable possible, elle décida de rester ainsi et adressa un nouveau sourire à son amie en secouant la tête pour la rassurer tout d’abord. Puis en signe de négation. Elle fronça les sourcils, la mine pensive. « Je crois que même si je croisais ton père, je serais incapable de le reconnaître… mais je crois pas l’avoir vu. Il devait passer quand j’étais pas. » Haussement d’épaules. Nouveau sourire. Elle espérait que c’était le cas. Suite au tremblement de terre, les parents Kathaleeya ne s’étaient même pas foulé pour l’appeler ne serait-ce qu’une fois. Néanmoins, après l’incident avec sa génitrice, Malee n’était pas étonnée d’un tel manque de réaction. Elle était lasse de les attendre. Lasse de leur pardonner. Et pourtant, il aurait suffi d’un seul signe de leur part pour qu’elle le fasse. Etouffant un bâillement, la thaïlandaise reporta son attention sur la sango. Elle espérait qu’au moins le père de cette dernière était plus présent que sa propre famille. « Et puis arrête de me regarder comme ça ! J’étais très inquiète pour toi… et puis il s’est passé beaucoup de choses tu sais… mais j’pense que ça peut aller. » Nouveau sourire. C’était toujours sa réponse à tout de toute manière. Elle ne pouvait que dire que ça allait. Parce que sinon elle devait tout dire. Et elle ne s’en sentait pas prête. Ouvrir les vannes, c’était quelque chose dont elle se savait incapable pour le moment. Surtout qu’elle était très bien au courant qu’après avoir commencé, elle n’arriverait pas à s’arrêter. « C’est limite mystique ton histoire », reprit Malee en penchant la tête, quand Jina lui parla de son meilleur ami. « Mais c’est peut-être un signe ? Tu t’es réveillée, si ça se trouve lui aussi. On est jamais à l’abri de deux miracles ! Tu devrais essayer de te renseigner. » C’est que la miss ne perdait jamais son optimiste. Il ne lui restait pas grand-chose. Mais elle avait au moins conservé cette parcelle de sa personnalité. Et au fond c’était tout ce qu’elle désirait. Rester optimiste malgré tout. Même si elle tombait en enfer. Rester persuader qu’un jour elle arriverait à s’en tirer à la force de ses bras. Et peut-être que quand elle se sentirait prête à relever la pente, réussirait-t-elle également à accepter l’aide de son entourage.

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Le regard de Malee se fit surpris. Presque choqué. Jina n’était au courant de rien ? C’était… étonnant. Presque choquant. Oh bien évidemment, les médecins avaient prévenu qu’elle risquait de ne se rappeler de rien à cause du choc. Mais pourquoi ne lui avaient-ils rien dit ? Après tout elle méritait de savoir. Mais la thaïlandaise se demandait s’ils n’avaient rien dit, n’était-ce pas pour une bonne raison ? Peut-être qu’ils avaient peur de la brusquer. Alors la wonsungi observa la sango, la tête légèrement penchée. Regardant. Examinant. Vérifiant si elle était dans un état propice aux révélations. Mais dans tous les cas Malee décida d’y aller petit-à-petit. Pas tout d’un coup, non, elle comptait bien prendre son temps. Elle cala sa tête contre le haut du dossier du fauteuil et laissa son regard se perdre dans la chambre. « Tu sais rien du tout ? Ils t’ont absolument rien dit ? Même pas ce qui t’est arrivé ? » La thaïlandaise se doutait que les médecins avaient probablement d’autres choses à faire mais c’était la moindre des choses que de dire à leur patiente les raisons de sa présence. La miss poussa un infime soupir, avant de décider de se jeter à l’eau. Ou plutôt d’y tremper les pieds. C’était plus sage. Qui sait comment Jina prendrait la nouvelle si on lui avouait tout d’un coup ? Bon elle était solide. Mais ça restait un peu trop brutal. Alors Malee accompagna ses futurs mots d’un sourire à l’attention de son amie. « T’as eu un accident de voiture Jina. Je connais pas les détails, peut-être que Minjee est au courant ? C’est celle qui a été témoin de l’accident. » La thaïlandaise se redressa, dépliant ses jambes pour reposer ses pieds par terre. Le dos bien droit, elle jeta un coup d’œil vers la porte, sans trop savoir pourquoi, avant de reporter son attention sur son amie. « Tu te rappelles de rien ? T’étais avec Ilnam, c’est lui qui conduisait. Et puis il a eu un accident. Et t’es tombée dans le coma. » Lui n’a pas eu cette chance par contre, dit-elle mentalement. Mais comme elle s’était promis d’y aller doucement, elle décida de ne pas dire le fond de sa pensée, gardant ça pour un peu plus tard. Quoiqu’elle se doutait que la coréenne allait lui demander des comptes. « Je savais pas que tu connaissais Ilnam d’ailleurs », ajouta donc Malee, sourcil arqué, mais léger sourire aux lèvres. Après tout elle non plus, elle ne lui avait jamais dit qu’elle le connaissait. Pourquoi est-ce qu’elle l’aurait fait ?

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Malee observait la réaction de Jina, qui triturait son plâtre d’une manière assez étrange. Quoique peut-être normal étant donné la situation. Néanmoins, malgré ça, la miss restait étonnement calme… mais évidemment, ce n’était que le calme avec la tempête. Une tempête qui ne tarda pas à rugir. Malee ouvrit la bouche. La referma. Perdue. En voyant l’expression que de son amie, elle sentit ses propres larmes monter. Même après le tremblement de terre, même après tout ce qui était arrivé, elle ne s’était pas arrêtée, pas un instant, elle avait foncé sans regarder derrière elle ni se laisser submerger par ce qui se passait. Depuis combien de temps n’avait-elle pas pleuré au juste ? Sauf que voilà que la réalité menaçait tout. Pourtant elle eut le courage de se retenir avant même que la première goutte ne sorte. Probablement même que Jina n’avait pas remarqué, trop occupée à pleurer. Alors la thaïlandaise se leva pour de bon cette fois. Elle s’assit du bout des fesses sur le lit de son amie et la prit dans ses bras, posant sa joue sur la tête de la sango, les yeux ouverts, son regard se perdant droit devant elle. Sans rien fixer. Mais elle ne pouvait pas abaisser les paupières, par peur que ce mouvement de fasse couleur les pleurs. Alors elle restait là, les yeux dans le vide, serrant doucement contre elle son amie. « Jina… je suis désolée… je suis désolée… » commença-t-elle. C’était sûrement la meilleure des réponses à la question précédemment formulée, après tout. Sa main caressa lentement le dos de son amie dans un geste d’apaisement. « Je suis là » continua-t-elle. Des paroles creuses, vides de sens, qu’elle laissait pourtant sortir. Elle espérait juste que ses mots parviennent aux oreilles de la sango.  « Ça va aller. » Encore une fois des paroles creuses, qu’elle avait chuchoté d’une petite voix, sans cesser de caresser le dos de son amie. Elle était maladroite. Elle ne savait pas comment s’y prendre. Tout ce qu’elle pouvait faire c’était d’être là, comme elle l’avait dit. D’écouter. D’attendre. De se taire, parce qu'elle savait très bien qu'il y avait des moments où les mots ne servaient à rien. Et puis de câliner et dorloter jusqu’à ce que peut-être elle finisse par aller mieux. Même si elle n’était pas sûre que ça arrive. Elle aurait pu continuer ainsi bien longtemps, plusieurs minutes, plusieurs heures, plusieurs jours pourquoi pas ? C’était une chose qu’on ne pouvait pas lui reprocher. Elle serait toujours là pour ses proches, quoiqu’il fasse faire.