Nanako savait très bien pourquoi ses parents avaient organisé tout ça, elle pourrait presque en rire si elle ne trouvait pas tout ceci ridicule. Tout ceci était vraiment navrant. Nanako savait que ses parents organisaient ces rendez-vous uniquement pour que l'attention et surtout l'affection de leur fille aille sur un autre garçon que celui qu'elle avait toujours en tête, ils s'en moquaient bien de ce qu'elle voulait tant qu'elle trouvait quelqu'un d'autre. Quelqu'un de mieux. Quelle idée grotesque, si ils connaissaient leur fille, ils devraient savoir que tout ce qu'ils souhaitaient eux ce n'était pas ce que Nako voulait. La japonaise était arrivée il y a peu, sûrement que ses parents penseraient que le choix du restaurant lui plairait mais ce n'était pas le cas, oh elle aimait l'ambiance et les odeurs, mais la raison de sa présence ici gâchait un peu le reste. Beaucoup même. Elle relevait les yeux à chaque fois que la porte s'ouvrait, seulement elle ignorait totalement qui devait venir ce soir alors c'était compliqué pour elle de reconnaître son rendez-vous. Jusqu'à ce qu'un jeune homme soit accompagné jusqu'à sa table par un serveur, il semblait perdu comme surpris par la présence de la demoiselle. Tombé dans un traquenard lui aussi ? « Salut, » Nanako se pencha sur la table après qu'il ait pris place face à elle, posant ses coudes dessus. « C'est toi alors le nouveau prétendant ? » Ses parents étaient motivés. « Désolée te te décevoir mais je suis déjà prise, et je compte pas trouver quelqu'un d'autre, tu peux oublier. » Elle ajouta, lui adressant le sourire le plus faux qu'elle était capable de faire, le pauvre dans le fond il y était pour rien, à moins de savoir et d'être venu quand même ? Nako se laissa retomber en arrière, son dos venant se caler contre le dossier de sa chaise.

Tu savais pourquoi tu étais là. Tu savais aussi pourquoi tes parents avaient eu cette idée, et la pensée te fit doucement sourire. Tu ne leur en voulais pas le moins du monde, appréciant même l'initiative. C'était innocemment mignon, dans un sens. Tu revoyais encore ta mère qui te parlait de ce rendez-vous avec douceur et tendresse, ton père gardant un regard chaleureux sur toi. Tu savais qu'ils faisaient ça pour ton bien – tu savais que t'étais pas là pour trouver l'amour à une table au hasard. Et tu savais que tes parents le savaient aussi. Ils ne pensaient même pas réellement à ça, et toi non plus. Tu te doutais que c'était pour te changer les idées. La greffe était passée maintenant, tout était derrière toi et c'était pour ça que tu avais ce rendez-vous ce soir. Un peu comme pour te permettre de comprendre que tu pouvais prendre un nouveau départ. C'était mignon, vraiment, et l'attention te touchait. Tes parents se faisaient beaucoup trop de soucis pour toi – et ça te réchauffait un peu plus le cœur à chaque fois que t'y pensais. T'étais pas tout seul ; pourtant tu te sentais perdu dans ta peur. Tes pensées te conduisaient à l'hôpital chaque nuit. « Salut » que tu articulas dans un air stupéfait après t'être installé et après avoir remercié le serveur. Tu la fixas sans rien dire, clignant simplement des paupières dans un air penaud. « En toute honnêteté, je suis pas là pour ça », tu lui offris une esquisse, douce aux ombres peinées ou triste aux lignes insouciantes. « Mes parents ont eu cette idée pour me changer les idées mais aussi pour que je rencontre du monde », tu penchas un peu la tête, les lèvres quelque peu pincées. « J'apprécie la franchise en tout cas », tu ris quelque peu, le nez retroussé, le regard pétillant. Tu gardas le silence un instant, les pupilles l'observant, l'esquisse restant posée sur ta bouche. « Est-ce qu'on peut devenir amis ? Ou du moins essayer. Ca rassurerait un peu mes parents je crois », tu fronças un peu les sourcils, songeur. Et tes mots devaient paraître bien étranges. « Je m'appelle Euijoo, enchanté », et ton sourire grandit encore un peu – tu gardais encore cette lumière triste dans les pupilles et cette peur muette qui agitait tes lèvres. « Tes parents t'ont forcée à venir ? », la questionnas-tu, curieux, la tête basculant d'un côté puis de l'autre. « Je suis désolé s'ils t'ont obligée. Et je vais pas te forcer à rester si tu n'en as pas envie. C'est pas très gentil », tu lui laissais la possibilité de s'en aller car ton but n'était pas non plus de déranger les autres.

Nanako avait pleinement conscience qu'elle n'était pas ici pour un simple dîner, un moment pour simplement faire la conversation et apprécier une nouvelle rencontre pour ensuite que chacun reparte de son côté avec un bon souvenir de cette soirée. Sans que ça aille plus loin. Oh non, ses parents avaient d'autres idées en tête et ils se moquaient bien de l'avis de leur fille ou ce qu'elle désirait. C'était ridicule et pourtant Nako était bien présente ce soir, elle n'avait pas pu s'esquiver comme elle avait déjà réussi à le faire à plusieurs reprises ces dernières semaines, les mois précédents. À croire que ses parents devenaient plus rusés avec leurs plans maintenant, comme ça Nanako n'avait plus d'excuses pour ne pas venir. Quand l'heureux élu du jour arriva, Nanako ne perdit pas vraiment de temps pour lui faire comprendre qu'elle n'était pas là pour trouver le grand Amour, son coeur était déjà pris et elle s'était presque attendu à ce que le jeune homme tente sa chance quand même... mais ce ne fut pas le cas. Un 'o' se formant sur sa bouche, elle vient basculer son visage sur le côté. « Ah non ? » Pourquoi était-il ici alors ? On lui avait fait le coup dans son dos ? « Vraiment ? Ils trouvent que tu vois pas assez de monde pour te forcer à venir ici ? » Elle posait peut-être trop de questions indiscrètes. « Enfin t'es pas obligé de répondre. » Nanako s'empressa d'ajouter avant de hocher la tête quand il la remercia pour sa franchise, elle ne s'était pas vue faire miroiter quoi que ce soit. « Merci de la tienne aussi. » Au moins ils savaient tous deux que ça n'irait pas plus loin, en tout cas sur selon le plan des parents de Nanako car ceux du jeune homme semblaient simplement vouloir qu'il sorte. « Bien sûr on peut, je préfère me faire un ami qu'un petit ami. » Nako lui adressa enfin un sourire, un vrai cette fois-ci. « Nanako, enchantée aussi et.. pardon pour mon accueil. » Elle répondit, une grimace venant traverser ses traits à sa question. « C'est juste qu'ils me font tellement le coup, je n'ai plus confiance. » Ils voulaient à tout prix qu'elle change d'avis mais en faisant ça, ça lui donnait encore moins envie de leur obéir. Et pourtant elle les aime ses parents. Mais pas là. « Tu ne me forces pas, t'as pas essayé de me faire changer d'avis en mode mais on ne se connait pas encore assez tu verras... Ça me va de rester. » Il avait l'air gentil, qui sait ça pouvait déboucher sur une belle amitié ?

Tes parents n'avaient pas vraiment pensé à plus loin en te faisant venir ici. Te faire sortir, te changer les idées : ils voulaient que tu rencontres du monde, que tes pensées soient occupées d'une manière différente. Ils voulaient te rendre heureux, te voir sourire – comme avant. Mais rien ne sera plus jamais comme avant. Tout avait changé. « Ah non », que tu répétas en clignant des paupières avant de rire discrètement. « On peut dire ça comme ça », tu lui offris un léger sourire, le regard un brin éteint mais la lumière s'y reflétait comme si elle ne demandait qu'à y briller à nouveau. « Ca me dérange pas. C'est pas comme si c'était un sujet tabou ? Je pense », tu penchas un peu la tête sur le côté, songeur, les sourcils faiblement froncés. « Ils ne voulaient pas que je reste à la maison perdu dans mes pensées... », articulas-tu lentement, un faible souffle t'échappant alors que tu semblais douter de la suite de tes mots. « Disons que je sors d'un long séjour à l'hôpital », tu laissas tes lèvres afficher un autre sourire alors que tu inclinais poliment la tête. « Je comprends. En plus je suis pas sûr d'être le bon candidat pour ça », admis-tu dans un geste des épaules. Tu pouvais pas lui dire que tu savais pas pour combien de temps t'en avais. Tu pensais au pire avant de voir le meilleur. « C'est un joli prénom et t'en fais pas c'est pas grave », tu agitas la main dans un rire. Au moins tu pourras te souvenir de cette rencontre. « Ils le font si souvent que ça ? », tu mimas un air bougon, le nez plissé, compatissant. « C'est pas mon genre », tu ris à nouveau, surtout que toi-même tu n'étais pas là pour ça donc.. « Et si tu leur dis que tu as déjà quelqu'un ? Ca ne marche pas ? Ils t'embêtent quand même avec ça ? », tu fis la moue une nouvelle fois, bougon et déçu pour elle. « Tu peux leur dire que ça s'est bien passé ce soir, peut-être qu'ils arrêteront pendant un petit temps ? », t'en étais pas convaincu cela dit. Tu passas ta paume sur ta nuque, gêné, embarrassé. « Désolé je propose des idées mais je suis pas sûr que ça fonctionne », tu soufflas, les épaules basses, les lèvres pincées. Tu gardas le silence ensuite, les pupilles décortiquant chaque objet, couleur, forme et courbe devant toi. « Est-ce que tu connais le parkour ? Je connais quelqu'un qui... », tu clignas des paupières. « Je connaissais quelqu'un qui en faisait et je crois qu'il m'a donné envie de m'y mettre.. Non, c'est même sûr. Quand le médecin me dira que c'est bon, je testerais. Pour le moment je reste sage. Tu pratiques un sport ? Ou... quelque chose comme ça ? Un art ou tu joues peut-être d'un instrument ? », l'interrogeas-tu, curieux, intrigué, espérant en apprendre un peu plus sur elle.