ootd — Plus rien n’avait d’importance autour de lui. Il ne voyait plus qu’elle, un peu trop conscient de chacun de ses faits et gestes. De ses grands yeux qui se plissaient légèrement alors qu’elle écoutait attentivement la personne qui lui parlait. De ce charisme qui émanait d’elle et forçait l’admiration. De cette mèche de cheveux qui était tombée devant ses yeux et qu’elle avait habilement replacé derrière ses oreilles, ce simple geste innocent qui eut l’effet d’un raz de marée chez Hanyul. L’espace d’une seconde, il s’imagina être celui qui replaçait cette mèche rebelle, la sensation de sa peau et la chaleur de sa joue sous ses doigts. Il n’entendait plus son ami qui lui parlait, il en avait oublié la raison pour laquelle il était venu jusqu’au département de stylisme. Elle était tout ce qu’Hanyul imaginait de la femme parfaite dans ses rêves les plus fous, non, elle dépassait même ses attentes. Il n’aurait jamais imaginé qu’elle existait vraiment, qu’une femme si féérique faite de chair et d’os se trouvait à quelques pas de lui, le genre qu’on ne trouve que dans les livres et qu’on n’est jamais destiné à rencontre. Il était venu jusqu’ici pour trouver quelqu’un capable de dessiner les vêtements de son prochain webtoon, mais dès qu’il l’avait vue sortir de cette salle, plus rien n’avait eu d’importance. Il fit signe à son ami de partir seul de son côté pour débuter les recherches, prétextant qu’il avait quelque chose à faire, alors que dans le fond, il se fichait bien de trouver quelqu’un maintenant. Une fois seul, il fut pris de panique lorsqu’il vu la jeune femme s’en aller. Il ne pouvait décemment pas se ruer sur elle et l’entourer de ses bras pour sentir son parfum envahir ses narines, il n’était pas dans un livre, mais dans la réalité, pas vrai ? Pourtant il dû faire appel à tout son bon sens pour se retenir. Il ne devait pas l’effrayer, et l’approcher doucement pour ne pas lui faire peur, mais chasser le naturel et il revient au galop. Hanyul courut jusqu’à elle pour la rattraper et vu le bruit qu’il faisait pour l’appeler, plusieurs regards se retournèrent sur son passage. Il ne ralentit que lorsqu’il fut à quelques pas d’elle, un immense sourire ne quittait pas son visage, il irradiait de bonheur de l’avoir trouvée, elle. « Miss Fairy… » murmura-t-il à son attention.  

ootd — Retenue à la sortie de l’amphithéâtre par une camarade enthousiasmée par la présentation qu’elle venait de donner, la demoiselle répond à son entrain et ses ardeurs avec pondération et douceur, espérant ainsi calmer son excès de sociabilité. Pourtant habituée par l’expérience à orienter le dialogue dans le sens qu’elle désire, l’exercice est plus difficile lorsqu’elle fait face à quelqu’un de spontanée et c’est présentement le cas. Dans ces moments, elle ne peut qu’attendre que sa cadette termine – acquiesçant timidement aux compliments qu’elle lui faisait, elle ramène avec élégance, du bout des doigts, sa mèche rebelle derrière l’oreille et c’est en tournant légèrement la tête, qu’elle le remarque. Son regard se porte surtout sur le bleu électrique de ses cheveux plus qu’autre chose, mais cela ne dure que quelques fractions de seconde car son attention se reporte naturellement sur son interlocutrice. De tout le département d’arts plastiques, visuels, appliqués et design, il est loin d’être le premier à aborder une couleur aussi vive – pour preuve, celle qui se tenait face à elle abordait un blond vénitien, mais peut-être le seul actuellement à la porter. À nouveau, elle tient de ses mains cette pochette qui caractérise des étudiants en art ; elle contenait les illustrations qu’elle avait partagée tantôt, en plus d’autres ébauches non achevées.

Parce qu’elles se tenaient en face des portes battantes et gênaient par conséquent les entrées comme les dernières sorties, Myeongwol proposa alors à sa camarade de poursuivre leur discussion en marchant, jusqu’à ce que leur chemin se sépare à raison de leur destination, différente, car elle envisageait de retourner à son appartement pour le week-end et non rejoindre les gens de sa promotion réunis pour célébrer la fin du projet et le commencement du week-end. Ce fut ni le bruit de ses pas qui attira son attention, ni même les regards tournés vers la même direction, mais plutôt la main de sa cadette posée sur son bras qui l’arrêta. Se retournant pour comprendre l'agitation, elle lui fit finalement face. Elle le reconnut, du moins, en particulier ce bleu ; son visage, aussi agréable pouvait-il être, ne lui disait rien, toutefois cela ne semblait pas être son cas par le sourire radieux, troublant, qu’il abordait. Parce que la foule semblait avoir retenu sa respiration un court instant, les deux mots qu’il murmura résonna avant de se faire aspirer par le bruit ambiant. Son index décrit de petits cercles dans le vide avant de finalement pointer en sa direction, elle ? Elle échange un regard perplexe avec sa cadette qui bredouilla lâchement un « je te laisse, les autres m’attendent, à lundi ».

La jeune femme l’observe silencieusement, elle voudrait bien tourner les talons et l’ignorer, mais quelque chose lui disait qu’il ne comptait pas la laisser partir sans un mot. Passant sa main dans ses cheveux, déjà arrangés, elle incline légèrement la tête et sans détourner les yeux, elle lui demande « je peux peut-être vous aider ? ». Si elle esquisse un sourire poli, réserve et prudence enserrent sa voix, « est-ce qu’on se connait ? ». La réponse était négative pour sa part car à défaut de pourvoir retenir tous les prénoms, il lui était difficile d'oublier un visage qu'elle avait déjà rencontré.

ootd — Comme envouté, il ne pouvait pas détacher son regard d’elle. Si elle l’avait captivé de loin, ce n’était rien à côté de l’effet qu’elle lui faisait d’aussi près. Comment une créature aussi divine et parfaite pouvait exister sans qu’il ne l’ait jamais remarquée ? Hanyul ne connaissait rien de cette mystérieuse inconnue et il savait que ce n’était peut-être pas la meilleure idée du monde de ne se baser que sur le physique pour juger quelqu’un, mais quelque chose de mystérieux et d’inexplicable l’attirait. Outre sa beauté qui surpassait n’importe qui à ses yeux, il y avait quelque chose dans son regard qui l’hypnotisait et le rendait complètement stupide. Ses grands yeux posés sur elle réveillait toute une cascade d’émotion en lui et, l’espace d’un instant, il rêvait de s’y noyer éternellement. Il remarqua aussi l’adorable grain de beauté sur le côté gauche de l’arrête de son nez, une marque considérée comme une imperfection dans les standards de beauté coréen, mais qui sur elle, donnait plutôt l’impression d’une touche finale apportée à une œuvre d’art. Il s’arrêta dans sa contemplation lorsqu’elle s’adressa à lui et il en oublia sa question lorsqu’il entendit sa douce voix. Y avait-il quelque chose d’imparfait chez cette femme ? Était-il en train de rêver ? Hanyul était loin d’être un Don Juan, il n’avait eu que 2 relations qui n’avait pas duré, toujours pour les mêmes raisons : son emploi du temps chaotique et sa personnalité trop différente qui fascine au début, mais qui finit par déplaire ou agacer avec le temps. Il faut dire qu’Hanyul n’avait jamais vraiment mis du siens dans ses relations, à force de lire des livres romantiques en tout genre, son idée de l’amour était très différente des autres. Le lien d’âme sœur était une trame très souvent reprise dans ses livres qui n’existait pas dans la vraie, ou du moins pas de la même manière que dans ses livres, mais il avait envie d’y croire et surtout, il rêvait de le vivre, en sachant pertinemment que c’était impossible. C’était ce manque d’étincelles et de passion qui avait eu raison de ses précédentes relations, il ne ressentait pas ce qu’il lisait dans les livres et il était incapable de faire semblant. Elles n’avaient jamais été sa priorité ce qui les avaient blessées et il le savait, mais il ne voulait pas se forcer et leur donner de faux espoirs, alors ses relations s’étaient naturellement terminées. Mais la femme qui se trouvait devant lui ? Il ne connaissait même pas son nom que tout un flot d’émotions qu’il n’avait jamais ressentis avant le submergeait et il savait qu’il pourrait décrocher la lune pour elle, aussi cliché que c’était. Hanyul savait qu’il avait l’air d’un fou, et lui-même commençait à le penser aussi, mais, là tout de suite, il s’en moquait. Le plus important pour lui était de captiver suffisamment son attention pour en apprendre plus sur elle. « Non, mais maintenant oui, Miss Fairy. » lui répondit-il, son sourire ne quittant pas son visage. « Je m’appelle Seol Hanyul, et toi ? » Il y avait mieux comme façon de démarrer la conversation et il avait envie de lui poser un million de question pour tout savoir sur elle, mais il se retenait pour ne pas la faire fuir à tout jambe et il préféra laisser sa maladresse parler.

ootd — Peut-être avait-elle mal entendu, comment l’avait-il appelé déjà, Miss Fairy ? C’est bien la première fois qu’on lui donne un tel surnom et ces deux mots suffisent à retenir son attention. Intriguée, elle réalise bien vite son erreur et manque le bon moment pour faire comme si « de rien n’était » – troublée, elle l’interroge pas une fois mais deux. Il semble se réjouir d’avoir capté son attention, là où elle le regrette. Loin d’être vilain à observer, bien au contraire, outre la finesse de ses traits et son style vestimentaire excentrique mais pleinement assumé, elle ne peut s’empêcher d’être captivée, un court instant, par les différentes émotions qu’elle pense percevoir dans son regard et qui étire imperceptiblement ses expressions, toute aussi variées. Ce qu’elle retient, c’est surtout cet air béat et abruti qu’il affiche en totale rupture avec sa figure - étrangement, elle trouve ça amusant. À nouveau, il l’appelle par ce sobriquet qu’il lui a donné sans lui avoir demandé son consentement et se présente. Seol Hanyul, un parfait inconnu qu’elle n’avait jamais vu jusqu’à aujourd’hui, et dont elle n’avait jamais entendu parler.

« Ce n’était pas la question », répond-elle avec douceur en esquissant un sourire amusé mais surtout courtois. Délibérément, elle prend le soin de ne pas prononcer son nom car elle est de ceux qui pensent que le partager c’est nouer un premier lien ; or elle n’en veut pas, en particulier lorsqu’elle reconnait dans son regard, ces lueurs qu’elle a déjà vu dans celui d’autres hommes. Amical et un brin ringard dans son approche, parce qu'il semble porter certaines attentes à son égard, cette sensation qu'elle n'arrive à expliquer avec des mots suffit déjà à la mettre mal à l’aise. Toutefois, il serait hypocrite de sa part de feindre de ne pas savoir que son apparence ne laisse personne vraiment indifférent, qu’il lui suffit d’un rien pour captiver volontairement un homme, une femme – si dans d’autres circonstances et lieux, elle en joue, présentement ce n’est pas le cas. Son apparence soigneuse ne résulte que d’un simple désir, sa propre satisfaction, et uniquement la sienne, un plaisir qu’elle prend chaque matin, un rituel pour commencer agréablement une nouvelle journée. Bien que flattée, elle préfère pour autant être honnête et couper court à tout élan, néanmoins avec tact. Cependant il y a une chose qu’elle remarque, là où d’autres tendent à détourner les yeux quand elle les fixe, lui ne le fait pas ; là où certains affichent une certaine confiance, lui semble encore tiraillé. Pour quelle raison ? Elle l’ignore et préfère qu’il en soit ainsi. Chassant les pensées curieuses qui tentent de se profiler dans son esprit, elle ajoute avec ce même timbre de voix « je vais devoir vous laisser alors, bonne journée à vous ». Hochant légèrement la tête et maintenant ses distances par le vouvoiement alors qu'il la tutoyait spontanément, elle n’attend pas d'entendre sa réponse pour tourner sur ses talons d'un mouvement parfaitement maîtrisé et suivre les pas de sa camarade en direction de la sortie du bâtiment. Plus vite elle serait partie, et plus tranquille elle serait – son instinct lui murmurait de ne pas trop s’attarder, qu’il ne fallait pas qu’elle cherche à déchiffrer les vagues d’émotion qu’elle percevait en lui, au risque de finir assaillie et peut-être noyée.

ootd — Bien vite, Hanyul dû descendre à tout allure du petit nuage d’illusion sur lequel il était monté à grandes enjambées. Il n’était pas dans un livre, mais dans le monde réel. Toute femme censée aurait pris la poudre d’escampette dès le moment où il avait ouvert la bouche, mais elle ? Bien que ses yeux lui criaient à quel point son attitude la décontenançait, elle était tout de même restée courtoise et suffisamment polie pour vérifier son identité et lui faire au revoir une fois fait. Hanyul resta planté comme un idiot au milieu du couloir pendant quelques secondes, un arrière-goût amer dans la bouche. Le coup de foudre était une trame universelle utilisée dans maintes œuvres, mais la réalité de son monde frappa Hanyul de plein fouet. Depuis le temps, il devrait avoir l’habitude, mais cet éternel rêveur s’y laissait toujours prendre. Il savait que dans ce monde, la réaction de la jeune femme était la norme et qu’il s’était laissé emporter par ses émotions, mais il n’avait jamais été très doué pour les cacher. Ses jambes bougèrent pour lui au moment où il se souvint de la raison pour laquelle il était venu ici. Hanyul se trouvait dans le département de design et de mode, plus précisément dans les couloirs des cours de stylisme. Il avait besoin de quelqu’un dans son équipe, une recrue qui s’y connaissait bien mieux dans la mode des années 30 que lui et la jolie fée qui lui échappait était justement sortie de l’une de ses salles. En quelques foulées, il la rattrapa bien rapidement, prenant soin de ne pas la toucher pour l’arrêter, il préféra lui passer devant, mais sans lui barrer le chemin, ne voulant pas lui donner l’impression qu’il la prenait au piège. Hanyul resta sur le côté, mais en restant toujours dans son champ de vision. « Je suis désolé d’insister comme ça, mais je suis venu ici dans un but précis. » Il savait, ou du moins, il avait deviné par les réactions de la belle inconnue qu’il n’avait que peu de temps pour plaider sa cause avant qu’elle ne s’éclipse encore avec une nouvelle excuse. Alors Hanyul décida d’être franc et de montrer patte blanche. « Je cherche un ou une étudiante du département de stylisme qui serait intéressé pour dessiner des vêtements dans un webtoon sponsorisé par Naver. » Il se rua sur son sac pour se dépêcher de sortir sa tablette, manquant de la faire tomber dans la précipitation. Il sentait le stress l’envahir et le ronger avec une rapidité déconcertante, Hanyul était terrorisé à l’idée qu’elle ne l’arrête dans son élan et qu’elle ne laisse pas finir. « Hum… et donc, euh… » La panique prenait le dessus et il ressemblait plus à chien perdu sans son maître qu’à un CEO confiant d’une boîte de Webtoon. « Voilà regarde. » dit-il en lui montrant la tablette sur laquelle s’affichait des croquis et des notes en tout genre. Il avait travaillé sur cette présentation de son projet toute la nuit dans le but de convaincre un étudiant de travailler pour eux. « L’idée serait de dessiner les tenues des personnages sur la mode des années 30 et selon leurs personnalités. » Il fit défiler les différentes images explicatives dans l’espoir de suffisamment capter l’attention de Miss Fairy pour qu’elle ne le repousse pas tout de suite. « Bien sûr, ce sera un travail rémunéré dans notre studio et la tablette graphique sera fourni… et… euh… on aimerait prendre un étudiant parce que toute la team est étudiante. Alors c’est l’occasion de se faire la main et de se faire un nom tous ensemble sur un même projet » Ses yeux la suppliait presque du regard de bien vouloir l’écouter et de ne pas le prendre pour un fou… même si c’était probablement déjà fait. « Et là, j’ai regroupé plusieurs dessins d’illustrateurs que j’apprécie pour donner une idée globale du style que l’on veut. » ajouta-t-il en ouvrant une image contenant quelques screenshot de compte instagram d’artiste qu’il avait repéré ou qu’il aimait particulièrement afin de créer un moodboard sur le concept et le style de dessin qu’il voulait pour ce webtoon.

ootd — Un mélange de douceur et de fermeté pour le freiner dans ses ardeurs sans pour autant le brusquer, dès lors qu’elle se détourne de lui et poursuit son chemin, son temps à elle reprend son cours là où il s’est interrompu- naturellement, elle planifie le reste de sa journée maintenant qu’aucune contrainte d’emploi du temps ne la retient en ces lieux, ni cours, ni professeurs, ni groupe de travail désormais. Ses priorités s’organisent et préoccupent son esprit, si bien qu’elle en oublierait presque cet inconnu – cependant ce n’est pas réellement le cas, sinon elle ne s’obligerait pas à maintenir cette cadence de pas. Et même si elle le souhaitait, au moment où sa présence s’apprête à basculer dans les méandres de ses pensées, à être simplement effacé, il réapparait à nouveau dans son champ de vision. Quel timing. La jeune femme qui avait relevé sa manche pour consulter sur sa montre en argent, se redresse en apercevant cette paire de chaussure familière avant que cette voix, cette fois-ci reconnaissable, l’interpelle encore. Plutôt que d’afficher une expression ennuyée, par cette insistance, la surprise se lit à nouveau dans son regard – elle ne s’attendait sincèrement pas à le revoir aussi rapidement ; pour autant ce n’est pas avec le plus grand des sourires qu’elle l’accueille.  Sur la réserve, elle l’écoute sans l’interrompre – quelque peu amusée par sa prudence dans le choix de ses mots, mais surtout par ce souci qu’il avait de respecter cette distance entre elle et lui. Il se faisait gardien de son espace vital, là où d’autres n’y prêtaient guère d’attention et bafouaient cette ligne invisible comme bon leur semblait, indifférents et peu scrupuleux.

Intriguée par la proposition qu’il lui faisait, elle s’apprêtait néanmoins à la décliner pour ne pas lui faire perdre plus de temps car elle n’était pas la personne qu’il recherchait. D’une part parce que ne connaissant rien à l’univers du webtoon, elle n’arrivait pas à percevoir ses attentes et plutôt que de pouvoir l’aider elle ne serait qu’un fardeau ; d’autre part, son dernier travail de groupe venant de s’achever, elle souhaitait profiter de cette liberté fraichement retrouvée pour se concentrer sur ses projets personnels longtemps délaissés. Toutefois, son attention se porte sur la tablette qu’il lui montre et elle s’arrête finalement pour regarder la présentation qu’il commente, ponctuant ainsi les notes brouillonnes mais organisées qu’il faisait défiler. Sans qu’elle ne le réalise, il y a cette petite étincelle qui se fraie son chemin ; et ce n’était certainement pas la tablette fournie qui en était à l’origine mais une illustration, voire plusieurs, qu’elle reconnaissait à sa plus grande surprise. Elle aurait pu être flattée, même si...  « Qu’attendez-vous de moi exactement ? » demanda-t-elle, fronçant les sourcils, après tout ils ne s’étaient rencontrés que quelques instants plus tôt – rien ne pouvait lui indiquer qu’elle était le profil qu’il recherchait. Dans ce bâtiment, il était nombreux à pouvoir répondre à ses critères. L’intuition ou cachait-il des intentions différentes ? Elle n’arrivait pas à le déterminer tant la sincérité dont il semblait faire preuve la troublait, par prudence elle ne voulait pas s’avancer. Jetant un dernier coup d’œil aux illustrations, elle le regarde finalement sans ciller « s’il s’agit de les imiter, je vous conseille de vous mettre en relation avec eux directement, ils seront d'une meilleure aide », il n’y avait rien de pire pour un artiste de voir ses créations imitées et ce sentiment d’impuissance ne lui était pas inconnu. Même si c’était le contre-coup de vouloir donner à ses œuvres plus de visibilité par les réseaux sociaux, il n’y avait rien de plus frustrant et elle refusait d'y prêter son crayon. « Sinon, vous pouvez toujours poster une annonce sur le forum de la Yonsei, je suis certaine qu’il y aura des volontaires, plus qualifiés que je ne le suis, qui correspondront à vos attentes » murmura-t-elle d’une voix, cette fois-ci, plus sèche, sévère - peut-être arrivera-t-elle ainsi à percer ses apparences.

ootd — Hanyul avait peur, non, il était même terrorisé à l’idée qu’elle lui file entre les doigts et il commençait à manquer d’arguments convaincant pour la retenir. C’était la raison pour laquelle il se retrouvait à faire une exposition de fortune au beau milieu du couloir comme un vendeur à la sauvette… il avait clairement l’air d’un illuminé et il ne savait plus comment faire pour rattraper le coup. Au contraire, il avait surtout l’impression de s’enfoncer à petit feu, lentement, mais sûrement. La jeune femme en face de lui, qui le faisait presque rougir à chaque fois qu’il croisait son regard, ne l’aidait pas beaucoup. Hanyul n’était pas dupe et elle non plus, il voyait bien qu’elle n’était franchement pas convaincue par son petit numéro. « Je ne veux pas d’imitation, sinon je les ai aurais déjà contactés, enfin à vrai dire, j’ai déjà contacté Séléné que tu vois là. » dit-elle en pointant du doigt les dessins sur l’écran « Mais il ou elle ne m’a jamais répondu sur instagram. Alors, avec mon équipe, on a décidé que c’était peut-être une meilleure idée de trouver quelqu’un qui soit aussi à la fac, comme nous. Ces illustrations ne sont là que pour donner une idée générale du projet, on ne veut pas de copies. » Quand il parlait de son travail et de ses projets, Hanyul devenait quelqu’un de complètement différent. Il se glissait dans la peau du dessinateur passionné et du leader sérieux qui pouvait soulever les montagnes pour son équipe. Mais ce n’était pas un rôle qu’il jouait, ce changement se faisait sans qu’Hanyul ne le remarque vraiment, c’était plutôt comme une seconde peau, quelque chose de naturelle chez lui. Un peu comme un danseur qui change du tout au tout quand la musique se lance. Son ton était plus sérieux, ses yeux pétillaient de joie et d’ambition, et sa gestuelle était focalisé sur ce qu’il expliquait. Pourtant, il reprit vite une posture de chiot apeuré, frappé par le ton sec qu’elle employait avec lui. Il ne savait plus où se mettre, persuadé que la moindre respiration l’agacerait encore plus. Mais cette surprise laissa bien vite place à de la stupeur ‘’plus qualifié’’, que voulait-elle dire pas là ? Yonsei était la troisième meilleure université de Corée, les étudiants de tout le pays se battent pour intégrer ses murs et le département des arts étaient le plus convoité et prestigieux qui soit. Si elle était étudiante ici, alors elle était forcément plus que qualifié que le reste de la population. « Pourquoi tu penses d’office que tu n’es pas qualifié ? » Il était réellement curieux de comprendre ce qui la poussait à penser ainsi. « Si tu es ici, au sein de la Yonsei et dans ce département, c’est que tu es forcément plus qualifié que 99 % de la population. Quant à pourquoi toi, je ne vais pas te mentir, c’est ton style qui m’a d’abord tapé dans l’œil. » Et pas que son style ni que dans l’œil, mais il se garda bien de lui dire que c’était toute son âme qui s’en était trouvé ébranlé. « Je ne veux pas faire de généralité, mais bien souvent, un artiste incarne ou s’inspire inconsciemment de ses œuvres dans son quotidien et son look, c’est ce qui fait la particularité de chacun. Et ton style correspond exactement à l’idée que je me fais de notre héroïne, il n’y a que l’époque à changer. » Expliqua-t-il en commençant à ranger sa tablette, complètent à court d’idée sur ce qu’il pouvait faire pour qu’elle lui accorder une seconde plus.

ootd — Plus Myeongwol reste et plus il lui semble difficile de partir, habilement le jeune homme la retient en captant sa curiosité puis son attention. Si tout son corps était tourné vers la sortie, voilà qu’à présent elle lui faisant face – tournant presque dos, au fur et à mesure de cet échange, aux portes battantes de bâtiment donnant vers les jardins de l’université. Son masque reste ajusté, même en apercevant dans les références qu’il avait gardé sur sa tablette, ses quelques illustrations postés sur son Instagram - elle accusait le hasard ; il vacille mais tient bon, quand il cite son pseudonyme. C’est la première fois qu’elle l’entend ses trois syllabes vibrées dans les airs. Elle semble indifférente, mais ses cils tremblent de manière presque imprescriptible quand il lui met en évidence un post qui date d’il y a plusieurs mois. Il prétend lui avoir écrit mais la demoiselle n’est pas certaine de l’avoir lu, le message s’était peut-être noyé parmi les autres ou retrouvé bloqué, en attente d’acceptation de sa part. Elle l’ignore mais ne pense pas pour autant consulter sa messagerie, du moins si elle le fait c’est pour vérifier ses propos car son projet ne semble pas, là tout de suite, coller à ses aspirations futures. Parce qu’elle venait tout juste d’en terminer un et ne se voyait absolument pas en commencer un nouveau, elle pensait plutôt reprendre des projets plus personnels qu’elle avait dû mettre de côté. Une question de priorité, avec une année à réussir. Toutefois, un sentiment lui enserre doucement la poitrine, entre embarras et fierté - mais cela ne suffit pas à baisser sa garde…

Ni à désarmer son adversaire, qui ne cesse de revenir à la charge malgré le fait qu’elle tente de lui faire comprendre, en choisissant peut-être trop soigneusement ses mots, qu’elle n’est simplement pas intéressée. « Qualifiée rien qu’en étant déjà intéressé par votre domaine », ce qui semble la disqualifier d’autant plus qu’elle n’a jamais lu de webtoon de sa vie. Ce format lui est étranger au quotidien, plutôt laisser l’opportunité à un ou une étudiante plus impliquée, plus passionnée qu’elle ne saurait l’être. Il perdait son temps avec elle. Si son regard se fait plus froid, quand il commence à lui expliquer, sans mentir, que son choix s’est fait sur son apparence, son style vestimentaire – elle lui laissait trois secondes pour se fuir et s’il ne le faisait pas, elle comptait l’envoyer, une fois bonne pour toute, dans les roses. Mais encore une fois, il la surprend. Un rire cristallin lui échappe, « excusez-moi » réussit-elle à articuler en séchant ses larmes, avant de se ressaisir et ajouter « vous êtes plus naïfs que vous en avez l’air ». Si elle appliquait ses propos, elle ne saurait, à son tenue et façon d’être, deviner le type de webtoon qu’il se plait à dessiner – excentrique, chic, le genre lui échappe. Mais elle, une héroïne d’une époque différente ? L’histoire ne pouvait être que tragique si elle devait se calquer à la sienne… superficielle, futile. Des souvenirs flous remontent, des émotions s'éveillent mais elle les étouffe. Ce n'est pas le moment. Toujours avec calme et patience, elle lui répond. « Faites une annonce, je suis sûre que tapera à l'œil de quelqu'un qui saura être à la hauteur de vos attentes, mais pour l’heure… je dois vous laisser », si aucun cours magistral ne la retenait pour le reste de la journée, elle avait d’autres affaires qui demandaient son attention. Il était sympathique, mais elle ne savait pas comment réagir avec lui, ou dans quelle catégorie le classer, tant il est différent. C'est au final pour cette raison qu'elle fuit.