Mon Nah était à l'hôpital pour un énième examen. Cela faisait déjà plusieurs semaines que les médecins lui demandaient de venir à répétition, et la petite blonde n'était pas dupe ni née de la dernière pluie : elle comprenait tout à fait ce que les non-dits qui pesaient lourds chez le personnel médical signifiaient. Enfin, ça ne la dérangeait pas plus que ça de devoir se retrouver coincée entre les murs blancs de sa chambre, pour une fois. Au moins, elle n'aurait pas à aller en cours ou à se présenter à son agence de mannequinat. Ce n'était pas là un soudain élan de fainéantise de sa part, mais seulement de l'incompréhension et le sentiment d'être un fardeau pour les autres. A l'école, elle avait décrochée depuis un moment puisqu'elle n'assistait qu'à un cours sur deux en plusieurs mois, et à l'agence, son manager commençait à être vraiment contrarié du fait qu'elle n'arrive plus à bouger consciemment. Mon Nah ne lui en voulait pas de lui faire des reproches de temps à autres, car il était aussi stressé qu'elle concernant sa maladie. Il ne le montrait pas ouvertement, mais il était très concerné de son état physique, comme il la surveillait depuis ses débuts à la télévision.

Pour ne pas s'ennuyer aujourd'hui, elle avait suppliée son jumeau de lui donner quelque chose qui l'amuserait, comme un jeu de cartes ou une plante qu'elle pourrait observer grandir. Mais Mun Nih avait fait encore mieux que tout cela : il lui avait carrément glissé dans les mains un des polaroids de sa collection, qu'il conservait précieusement comme des reliques du passé. Il ne laissait jamais personne y toucher, même sa propre sœur était interdite de poser rien qu'un bout de ses ongles dessus. Mais il semblait lui aussi avoir été touché par le mauvais pressentiment qui semblait flotter autour de la malade, et qui touchait son entourage comme une infection. ❝ Comment est-ce que ça marche ? ❞ s'enquit-elle à voix haute en tournant l'appareil photo dans tous les sens, curieuse et intriguée par l'appareil volumineux. A vrai dire, elle n'avait pas eu le temps de demander à son frère comment fonctionnait un polaroid, et comme elle n'en avait jamais touchée un de toute sa vie, elle n'avait aucune idée de comment l'allumer. Après avoir touchée plusieurs boutons sans succès, la petite blonde poussa un soupir frustré, en fronçant les sourcils. Ce n'était tout de même pas si compliqué ! La porte de sa chambre s'ouvrit, révélant un médecin qu'elle ne connaissait que trop bien et aussitôt, avec une moue boudeuse au visage, Mon Nah lui tendit l'appareil photo. ❝ Hyo', aiiiiiide-moiiii ❞se plaignit-elle en insistant pour lui donner le polaroid. Elle n'avait pas la moindre idée de l'expérience de Hyo Jin avec les appareils photo, mais elle devait bien essayer.

Depuis le tremblement de terre, en plus de mes stages pour mes études de médecine aux urgences, je venais travailler bénévolement à l’hôpital en tant qu’infirmier. N’étant pas encore diplômé en tant que médecin urgentiste, je ne pouvais être que là que comme aidant, prenant en charge les fonctions d’infirmier. Mon aide n’était pas de refus avec toutes ces personnes à soigner. Il n’y avait pas assez d’aide-soignant et ça se faisait ressentir. Certains étaient morts dans la tragédie, d’autres étaient gravement blessés. Le service était donc fort diminué et les patients ne cessaient d’augmenter. L’envie de devenir médecin m’avait gagné à l’âge de 16 ans quand j’avais vu périr ma mère devant mes yeux d’adolescent perdu. Je m’étais promis que plus jamais je ne voulais être à la place de ceux qui ne pouvaient rien faire en voyant leur proche mourir. Je voulais au moins être capable d’aider et de savoir de quoi on parle. Je voulais pouvoir faire quelque chose, n’importe quoi, mais ne plus rester les bras croisés à attendre. C’était le pire. Au moins tenter de les sauver jusqu’au dernier moment, même si on me dit souvent qu’il est trop tard. Encore maintenant, j’ai du mal à lâcher prise et à accepter qu’il soit trop tard pour un patient. Je crois … je crois que je revois ma mère partir pour un monde meilleur à chaque fois que l’un d’entre eux meurt. J’ai l’impression de ne servir toujours à rien et d’être le pire des idiots de penser le contraire dans ces moments-là. J’ai parfois du mal à m’en remettre, surtout quand il s’agit des enfants. J’ai beau savoir qu’on a fait tout ce qu’on a pu, qu’on ne pouvait plus rien y faire, que ce n’était pas notre faute. J’ai toujours tendance à me porter garant et une petite voix dans ma tête qui ne cesse de me répéter que je ne suis qu’un incapable. Pourtant, je n’ai pas de plus grand bonheur de voir une personne se réveiller après une opération qui s’est bien passé, que grâce à nous, elle peut continuer sa vie alors qu’elle devait s’arrêter prématurément.

Aujourd’hui, alors que je faisais ma tournée des chambres pour vérifier les états de santé quotidien de chacun, j’aperçu un nom que je connaissais plus que bien : Mo Mon Nah. Une jeune femme dont je m’étais lié d’amitié assez facilement avec sa mignonne petite bouille et dont je m’étais pris d’affection. Je fus étonné de voir encore son prénom sur cette liste. Que faisait-elle encore à l’hôpital ? Elle était revenue plus que de raison ces derniers-moi. ça n’annonçait en général rien de très bon. Je fronçais les sourcils, me jurant d’aller interroger les médecins après ma visite. Je n’avais pas acces à son dossier en tant qu’infirmier, mais les autres savaient à quel point je tenais à m’occuper d’elle personnellement, et ils ne pourraient pas me refuser cela. Je finis par pousser la porte de sa chambre et d’entrer. « Bonjour ma princesse, qu’est-ce que… ? » A peine avais eu-je le temps de dire bonjour qu’elle me fourra un objet sous le nez en hurlant de l’aider. Je baisais les yeux vers l’appareil avant de reporter mon attention vers elle. « Qu’est-ce que c’est ? » J’avais posé la question plus par automatisme que pour son véritable sens. Je déposais mes feuilles sur la petite table à côté de son lit avant de me saisir de l’objet et quand je compris de quoi il s’agissait mes yeux se mirent à briller. « Un polaroid. Ca fait des années que je n’en avais pas vu. » Je le plaçais juste devant mon regard, fermant un œil pour regarder à l’intérieur et trouver mon objectif. « Souris Mon Nah ! » Click. Et un papier noir sortit de l’appareil. Je l’attrapais et le secouais dans les airs, attentant quelques instants que les ténèbres de la photo laissent place à la lumière éblouissante émanant du sourire de la gumiho. « Tiens, regarde comme t’es toute belle. » En tentant la photo à la patiente.

La tête de Hyo Jin lorsqu'elle s'empressa de lui sauter dessus avec le polaroid lorsqu'il entra dans sa chambre était hilarante. Mon Nah pouffa de rire derrière ses mains, incapable de rester de marbre face à une telle expression. Il devait s'attendre à tout sauf se faire agresser de la sorte en venant travailler, le pauvre. Il alla déposer ses feuilles sur la table de la chambre d'hôpital, ou reposait également le dossier médical de la jeune Gumiho, avant de prendre le polaroid dans ses mains. ❝ Mon frère me l'a prêté avant que je vienne, pour éviter que je m'ennuie. Tu sais, comme il est passionné de la photographie, il en a tout plein des comme ça ! ❞ expliqua-t-elle avec un sourire aux lèvres, les yeux brillants. C'était toujours comme ça lorsqu'elle parlait de son jumeau, sa langue se mouvait d'elle-même et elle finissait par raconter la vie de Mun Ni de a à z, à des gens qui n'en avaient absolument rien à faire. Elle prit la pose lorsque Hyo Jin braqua l'appareil dans sa direction, son petit nez plissé et ses doigts levés en v en direction de l'objectif. Le flash ne la surprit pas, et elle remercia un bref instant son expérience de mannequin pour ça. Elle le regarda secouer la photo dans les airs pour permettre aux couleurs d’apparaître, s'accrochant à son bras en se haussant sur la pointe des pieds pour suivre le processus de ses propres yeux. C'était quelque chose qui la fascinait, comme les peintres qui posaient leurs pinceaux sur une toile et faisait apparaître tout un paysage sur quelque chose de blanc et vierge. ❝ Ouah. Donne, je vais en faire une de toi !❞

La petite blonde retira le polaroid des mains du docteur, pour échanger les rôles et le viser de l'objectif. En coinçant sa langue au coin de sa bouche, elle appuya sur le bouton sans le prévenir, pour le prendre au naturel ou le surprendre, elle-même n'en savait rien. Une grimace déçue apparut sur son visage lorsqu'elle constata sur la photo qu'on ne voyait que le coté gauche du visage de Hyo Jin, et que le reste de son visage disparaissait hors du cadre. Comme quoi, mannequin et photographe ne devraient pas échanger leurs rôles. ❝ Tiens, garde-les toutes les deux. Un souvenir.❞ Mon Nah lui glissa les deux photos dans les mains, avant de retourner sur son lit, assisse au bord. Elle jeta un coup d’œil à la table, ou se trouvait les feuilles de Hyo Jin. ❝ Tu as beaucoup de travail aujourd'hui ? Et les amours, comment ça se passe ? Oh, et tu compte faire quoi après ton stage ici ? ❞ Le bombarder de questions n'était pas très poli, elle en était consciente. Mais tous les moyens étaient bons pour éviter d'en venir au sujet qui fâche, c'est-à-dire son état, sa présence ici aujourd'hui.

Je finis de secouer la photo dans les airs pour faire apparaître les couleurs avant de la montrer à la jeune fille. Elle etait tellement enthousiasme et maintenant qu'elle avait compris comment le polaroid marchait, elle passait à l'attaque et me flashait. Je fermais les yeux sous la lumière vive, mais restait docile pour faire plaisir à Monnah. Je ris doucement en voyant le cadre de la photo. "Je pense que tu dois encore t’entraîner un peu avant de pouvoir te dire photographe." Je hochais le tête en prenant les photos qu'elle me tendait. "Je les garderais précieusement." J'attrapais une nouvelle fois l'appareil, me rapprochant de la gumiho assise sur le bord de son lit. "Viens, on va prendre une photo de nous deux."  lui proposais-je, déjà entrain de tendre le bras en avant, me penchant vers elle pour rentrer dans le cadre de la photo. Je produis le même geste qu'avec la photo précédente. "Regardes ! Elle est pas mal celle-là." Je reposais l’appareil photo sur la petite table avant de me faire bombarder de questions par la petite blonde. "Mmmh, depuis le tremblement de terre, le nombre de patient à augmenter, mais pour de petites blessures. Les gens stressent plus facilement et souvent, pour pas grand chose." Je haussais les sourcils, amusé quand elle me demandait pour mes amours."Je pourrais te retourner la question, jeune fille, il ne me semble pas encore avoir vu un prince voir sa princesse !" Je n'avais franchement pas envie de parler de ma relation avec Su Nah, ni de m'y attarder. Depuis cette nuit là, la veille de Noel, tout avait changé et je ne savais plus trop où on en était. On s'était rapproché, ca, c'était certain, mais à quel point ? "Apres mes stages de médecin urgentiste, je serais en stage en chirurgie." Lui expliquais gentiment. Je suivais un double cursus entre urgentiste et chirurgien. Je n'avais su choisir un des deux, alors vu que j'arrivais à suivre les deux, autant les faire.