Cela faisait plus de trois mois maintenant. Trois mois depuis le tremblement de terre, depuis que j'avais pris un sacré coup sur la tête. Cela peut ressembler à une métaphore ; ça n'en était pas une. J'avais rendez-vous chez le médecin, mais j'avais peur d'y aller seule. J'avais peur d'entre des mots selon lesquels mon amnésie serait irréversible. C'était peu probable en vérité, j'avais fait quelques progrès. Pas assez selon moi. Ma mère m'avait expliqué que j'étais comme ça : perfectionniste, dure envers moi-même. Je la croyais volontiers. Je n'avais pas voulu demander à un proche qui m'avait connue avant non plus, de peur de le décevoir, de faire de la peine. Makoto était extrêmement présent, mon cousin aussi, mes amis faisaient en sorte de me changer les idées, de faire comme si de rien était. C'était gentil, mais inutile. J'avais alors longuement réfléchis, avant d'attraper mon portable et sonner à Jun. Oui, si j'avais envie que quelqu'un m'accompagne à l'hôpital, c'était bien lui. À mon plus grand soulagement, il avait accepté, et nous nous étions arrêtés en chemin pour aller prendre un café au starbucks. Il fallait croire que mon addiction au sucré était à ce point évidente. J'affichai un sourire ravi en observant ma part de gâteau, réfléchissant à par quel bout j'allais commencer. « Merci d'avoir accepté de m'accompagner, c'est gentil ~ » Après tout, rien ne l'y obligeait, mais ça me faisait extrêmement plaisir.

Cela faisait 3 mois. 3 mois qu'il y avait eu ce tremblement de terre. Qu'il avait rencontré aussi Seong Hee. Qu'il avait aussi décidé qu'il ne finirait probablement pas barman comme il s'y attendait. Non. Ce tremblement avait modifié sa façon de voir les choses. Certes, il était toujours aussi gamin, mais une forme de sagesse s'était immiscée quelque part. Et il avait réfléchi  a tout ça, tout en suivant des cours qui au fond, il le savait ne le ménerait nulle part ou il le voulait. Bref, il était dans l'impasse. Il prenait aussi des nouvelles de Seong Hee, l'amnésique qu'il avait aidée après le tremblement de terre. Il ne savait pas pourquoi, il n'arrivait pas a faire comme il l'aurait fait auparavant, laisser couler. Bref, a sa plus grande surprise elle lui avait demandé de l'accompagner a un rendez vous à l’hôpital. Et il avait accepté. Il était donc venu en voiture chercher la demoiselle, avant de faire un arrêt au starbucks. C'était un passage obligatoire, s'il n'avait pas son café c'était mal parti, et puis, elle aimait le sucré il avait remarqué, alors... Ils avaient prit du café et du gâteau. Il avait envie de rire en la voyant observer sa part comme si elle ne savait pas par quel bout commencer. Il aimait bien la voir, parce que c'était paisible quand il allait la voir, ca ne partait pas dans tous les sens comme a la fraternité, puis il n'avait pas tellement peur non plus de se montrer comme il était. Il hocha la tête avant de lui répondre « C'était normal, t'en fais pas … Et ca me fait plaisir ». C'était exactement le mot. Plaisir qu'elle le voit comme quelqu'un sur qui elle pouvait compter. Il jouait souvent les débiles immatures, si bien qu'on le prenait a moitié au sérieux. Bon d'accord, il l'était, mais ce n'était pas la question . « Tu as rendez vous a quelle heure ? Qu'on ne soit pas trop en avance, sans être en retard... » Il avait totalement zappé l'heure du rendez vous. Et avec un sourire amusé, il levait un bras en tenant son café, pour se gratter derrière la tête avant de reprendre « On devrait prendre des serviettes, on risque de se coller du gateau partout...» Malgré cela, il restait serein, elle lui avait dit que certaines choses étaient revenues, mais sans trop s'avancer. C'était bon signe non ? Puis il ajoutait "Et en sortant, on ira se balader pour fêter ça... Y'a pas de raison" Oui, il était toujours optimiste. C'était un de ses points forts même.

La présence de Jun m'était d'un grand réconfort. Pour être parfaitement honnête, jamais je n'aurais pensé que nous serions restés en contact, et pourtant, il se tenait devant moi, me communiquant son sourire. La vérité était que j'aimais passer du temps avec lui, il me permettait d'oublier mes problèmes, de vivre normalement ne serait-ce que le temps d'un après-midi. C'était agréable. Je finis par couper un petit bout de gâteau avec la fourchette prévue à cette effet, et l'enfournai dans ma bouche lorsque le coréen me demanda l'heure de mon rendez-vous. J'avalais le morceau tout rond, déglutissant par la même occasion " 11h. Mais si on arrive en retard, on pourra toujours dire que j'ai oublié l'heure convenue " plaisantai-je à moitié. Peu de chance que ça fonctionne en vérité, ma mémoire à court terme n'avait pas été touchée, mais ne fallait-il pas trouver de bons côtés à ce foutu coup du sort. " Pas faux ... J'approuvai son idée, tout en regardant les miettes de gâteaux dors et déjà en train de former une société évoluée sur mes genoux tels des lilliputiens comestibles " Bonne idée ! Tu voudrais aller où ? " lui demandai-je en reposant sur lui un regard pétillant.