Je traine ma carcasse dans l'un des endroits les plus calmes que je connais, aussi connu sous le nom courant de bibliothèque. Ayant abandonné mon sac dans mon casier, je me contente de trimballer ce dont j'ai besoin dans mes bras, mon ordinateur parfaitement rangé dans son étui de transport en bandoulière. J'ai sorti le grand jeu, on voit tout de suite que mes intentions sont bel et bien de travailler - et non taper une sieste - par le fait que je porte mes lunettes. Il ne me reste qu'à rejoindre le coin isolé que j'ai découvert il y a déjà quelques années et dont pratiquement personne ne s'approche à moins d'être grave paumé. Au fin fond des rangées de philosophie, je trouve les trois tables abandonnées et prend d'assaut celle du fond - aka celle avec la prise de courant au mur. Je m'installe comme si j'étais chez moi, sortant le portable pour le brancher et organise mes livres et cahier pendant qu'il démarre. Prenant un crayon, je commence à scruter le gros livre que je tire vers moi et prends des notes dans le cahier à côté. Des notes que seulement moi peux comprendre puisqu'elles sont un mélange entre le coréen, l'anglais et le français, ce qui donne un amas de phrases assez effrayant. Le tout progresse bien, remontant mes lunettes qui osent glisser le long de mon nez de temps à autre, mais je frôle la crise cardiaque quand un vacarme résonne un peu plus loin. Un individu s'est pris une rangée ou quoi ? On aurait pratiquement juré une apocalypse pendant une seconde - ou je me fait peut-être des scénarios un peu intenses. Un coup d'oeil à l'heure affichée sur l'ordinateur m'indique que ça fait plus de quarante-cinq minutes que j'assimile de l'information. Je mérite définitivement une pause et me lève pour trouver la source du bruit. Je ne risque pas de me faire voler un truc dans un coin aussi désert.

Je ne suis pas vraiment étonné de trouver un lac de livres gisant aux pieds de quelqu'un qui s'est déjà mis à la tâche de les ramasser. Bon, je suis déjà debout et là, autant donner un coup de main. Ramassant le premier livre qui se trouve à proximité d'où j'arrive, je lis le titre à voix haute. « History of medieval philosophy. » Ah beh, en plus c'est une rangée en anglais. « Je pensais pas qu'il y avait encore des gens qui s'intéressaient à la philosophie. » Un peu amusé, même si ce n'est rien de méchant, je détourne le regard du livre que je tiens et pose enfin le regard sur le visage de la personne qui m'est inconnue. Pendant quelques secondes, je fige sans vraiment comprendre, puis m'empresse de poser le bouquin sur la tablette en tournant la tête.

Je grogne intérieurement, posté depuis ma table de travail. La bibliothèque est littéralement comme ma seconde maison, j'y passe le plus clair de mon temps, et pourtant, j'ai l'impression qu'un complot s'est monté contre moi. Jamais je n'ai de chance quand j'y vais : soit ma table habituelle est prise, soit on a emprunté le livre dont j'avais besoin pour un certain devoir, soit, le livre tant désiré se trouve au sommet de l'étagère, hors de ma portée. Ce dernier est un cas bien trop fréquent et ça en est frustrant. On ne pense jamais aux petites personnes bon sang. Je ne peux pas juste prendre une chaise et y grimper dessus pour dénicher ma perle rare. C'est trop la honte. Je cesse alors de marmonner dans ma barbe et m'approche de la tour gigantesque en face de moi et, par sécurité, arpente du regard les alentours pour m'assurer que personne ne regarde. Puis, je tente d'attraper le livre en me mettant le plus possible sur la pointe des pieds, sans réel succès. Je m'agace, de retour au sol. Finalement, la moitié des livres de l'étagère se retrouvent à mes pieds, certains m'ayant heurté dans leur chute, après que j'ai bondi pour essayer d'attraper ce fameux bouquin. Au moins, on peut dire que mission accomplie. Je me penche alors pour saisir le précieux mais sursaute lorsqu'une paire de pieds rentre dans mon champs de vision. Je me cogne dans mon recul contre la maudite étagère et jure silencieusement tout en orientant finalement mon regard vers l'incrusteur. Son visage m'ait familier et je trouve ça étrange puisque concrètement, je ne lui ai jamais fait face. Mon intérêt se dissipe bien rapidement à sa remarque, et autant dire qu'elle ne m'a pas plus. Avec un roulement des yeux, je prends le livre de la main de l'autre et viens l'enrouler de mes bras. « Heureusement, si. » Court, clair, précis. Je ne m'éternise pas. Je le remercie néanmoins d'un signe de tête, puis m'empresse de ramasser les autres livres se trouvant à mes pieds. D'un sourcil arqué, je juge l'autre qui reste juste planté là. « Vous êtes là pour aider ou... ? »

 

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Visiblement, mon humour ne connait pas un franc succès et je me racle la gorge après sa remarque, un peu gêné. J'imagine qu'il s'agit de son champ d'études et je dois avouer personnellement que je déteste quand on passe le moindre commentaire sur ce qui me passionne. Je pars pour ranger le bouquin, mais il me le prend des doigts, me retrouvant la main tendue dans le vide inutilement et je la ramène vers moi. Son commentaire me tire dans la réalité et je marmonne une excuse avant de me pencher pour ramasser trois ou quatre livres et les remettre sur l'étagère. Ma propre docilité soudaine me dégoûte. Où est passé ma confiance naturelle ? Je vais laisser une personne plus petite que moi sur tous les plans m'intimider ? I don't fucking care how cute he is. Je relève le menton fièrement en posant le dernier bouquin que j'ai dans les mains, puis prends les derniers qui trainent pour en faire de même. « Étudiant en philo ? Curiosité comme ça : vous faites quoi dans vos cours ? » Parce que qui n'a jamais voulu poser cette question ? Grâce à mon cousin, je sais ce que font ceux en arts, mais les étudiants de philosophie sont encore un mystère dans mon univers puisque je ne crois pas en connaître un. Faisant comme si de rien était, je pose mon regard vers lui une seconde fois, tentant de rattraper ma piteuse première impression. « Besoin d'un autre livre en hauteur ? » Je ne suis pas géant, mais reste que j’atteins définitivement des tablettes plus hautes que lui.

Mon regard ne m'a définitivement pas trompé la première fois. He's cute as hell.

J'admets avoir manqué d'humour. Même de tact. Et quelque part je me sens désolé pour le pauvre inconnu qui semble bel et bien être venu pour aider plus que pour se moquer - comme beaucoup l'aurait fait à sa place. Je laisse finalement courir en haussant les épaules à ma pensée. Ce qui est fait est fait. Néanmoins je garde un œil sur l'homme, intrigué. Son visage me dit réellement quelque chose sauf que je ne saurais dire pourquoi, et surtout comment. D'autant plus qu'il semble bien plus âgé que moi pour que cela puisse avoir un rapport avec une certaine année d'étude ou un travail de groupe. Je le remercie doucement lorsqu'il replace les derniers livres se trouvant au sol. J'imaginais en rester là pour retourner travailler sauf que mon interlocuteur semble vouloir me faire la conversation. Pas que cela me dérange, je suis simplement surpris. Un discret rire s'échappe de mes lèvres à sa question. Qui se demanderait ça ? Je remets en place une mèche rebelle puis m'appuie contre les étagères, réfléchissant quelques instants pour satisfaire l'être bien curieux. « C'est comme tout. » Rien de véritablement différent comme beaucoup pourrait le penser. « On étudie les pensées des philosophes sur plusieurs notions. Puis on tente de trouver plusieurs éléments de réponses à des questions, en éclaircissant tous ses aspects. » Je hausse une nouvelle fois les épaules, comme si étudier la philosophie était aussi simple qu'enseigner l'histoire ou l'anglais. Mes yeux divergent sur les alentours de la bibliothèque et une réalisation me fait dire qu'on a l'air très étrange, à discutailler comme ça en plein rayon. C'est la proposition du plus grand qui me distrait de mes pensées, et un nouveau rire quitte mes lèvres. Même si c'est gênant c'est quand même gentil de proposer. « J'ai ce qu'il me faut, merci. » Je prends quelques secondes pour vérifier que je n'ai rien oublié, puis retourne mon attention vers l'autre. J'ai du travail à faire mais ça serait bien rude de juste faire demi tour jusqu'à ma table de travail. « J'ai des choses à faire... mais si tu veux venir... » Ce que c'est embarrassant. Je me dépêche de tourner les talons pour regagner mon siège, en espérant - oui et non - que le dit homme me laisserait tranquille, sans quoi je ne verrais pas la fin du jour sans un mini infarctus.

 

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Je termine d'apporter mon aide sans même réaliser qu'il serait maintenant temps d'aller chacun de son côté, mais il faut croire que mon instinct social s'y refuse en posant une question qui me chicotte. La réponse semble logique et je me sens un peu idiot de ne pas l'avoir déduit par moi-même. C'était trop évident, malgré le fait que je croyais qu'il y avait un côté insoupçonné. Ce domaine me donne vraiment l'impression de glander et passer des journées entières à simplement taper la discussion, sauf que j'évite le moindre commentaire pour éviter de paraître encore plus irrespectueux. J'hoche la tête en signe de compréhension. « Je vois. » Je vois surtout que je n'ai strictement rien à ajouter, alors j'enchaine en demandant s'il n'a pas besoin d'un nouveau coup de main plutôt que de renvoyer tous les livres au plancher, ce qui pourrait finir par les briser. Un tout nouveau sourire étire mes lèvres lorsqu'il annonce avoir des choses à faire, ce qui me rappelle que moi aussi je suis venu dans cet endroit dans le but de travailler, non pas de me faire de nouveaux amis. « Je devrais y retourner aussi. » Sans vraiment désigner quelque chose, je tends la main dans la direction supposée d'où sont mes choses sans pour autant accepter ou refuser de m'incruster dans sa bulle. Les élèves en philo sont sociaux ? Remarque, les généralités ne veulent souvent rien dire. Pour un intello, je suis franchement sexy. Je le laisse donc retourner à ses occupations de son côté, non sans involontairement laisser glisser mon regard plus bas le long de son dos. Regard que je lève assez vite vers le plafond en réalisant ce que je suis en train de mater et retourne à ma table. Retrouvant mes trucs qui n'ont pas bougés, je décide de les ramasser vite-fait dans l'optique de les déménager. Le secteur étant désert, trouver la présence de cet inconnu n'est pas chose complexe et je me pose à une distance raisonnable sur la table. « Je viens faire mon Proteus sur ton milieu de travail. » Je rallume mon pc qui s'est éteint entre-temps avant de réaliser que je ne discute pas à Logan ou Dylan et que ce pauvre petit n'a probablement pas la moindre idée de ce dont je parle. Je ris dans ma barbe, passant distraitement une main dans mes cheveux en posant mon attention sur lui. « C'est une bactérie qui envahit les géloses et cache celle en culture. » Mon cours random de microbiologie s'est bien incrusté dans mon cerveau, faut croire.

Le bloc note est ouvert, mais la page est encore blanche. Je devrais être en train de rédiger mon devoir sur la psychanalyse de Freud à cette heure là, mais je suis perdu dans mes pensées. D'où puis-je bien le connaitre ? Peut être la cafétéria ? un des clubs de l'école ? Après tout il aurait bien la carrure à s'investir dans des sports collectifs. Mais après tout, si cela avait été réellement le cas, je pense que je me serais souvenu de lui bien plus facilement que ça. Alors comment. Peut être qu'un ami à moi m'en aurait parlé ? Mais là encore personne ne me vient en mémoire. Je pousse un long soupire et vient cogner ma tête contre la table de travail un peu trop brutalement. Je me redresse alors immédiatement avec un aouch et mes mains plaquées contre mon front. Je ne suis décidément pas doué. Mes mains frottent la zone endolorie au même moment que l'inconnu de tout à l'heure prend place en face de moi. Avec toujours un timing parfait. Je gonfle alors discrètement mes joues, embêté pour la énième fois de cette situation. Chance où es-tu quand on a besoin de toi ? A l'heure qu'il est, mon front doit être tout rouge. J'en suis tellement persuadé que j'en mettrais ma main au feu. Finalement je tente d'ignorer ma bêtise pour écouter le charabia qui s'échappe des lèvres de mon interlocuteur. Les miennes s'étirent dans la perplexité tandis qu'un sourcil s'arque pendant que l'autre se fronce. J'hésite pendant quelques secondes à questionner l'autre sur la définition de ce mot étrange mais il semblerait qu'il veuille me faciliter le travail. « Ah... » Mon regard se baisse de nouveau, et je demeure toujours aussi perplexe. Je dois être stupide ou quelque chose, car je n'ai toujours pas compris, si ce n'est que c'est une bactérie. Je hausse les épaules puis reprends le livre sur les différentes enquêtes de Freud, ne m'attardant pas plus sur l'autre. « Se comparer à une bactérie c'est... assez particulier je dois dire. » Pourquoi un homme voudrait-il se comparer à une bactérie ? Qui en soit possède une connotation négative ? Je trouve ça drôle et intriguant à la fois. « Mais un truc collant me dérange pas. » Si la philosophie me semble aussi simple qu'une partie de jeu vidéo, je ne peux pas en dire aussi facilement des sciences. Le crayon de nouveau dans ma main, je dessine alors le schéma de mon raisonnement pour en ressortir plus clairement mon sujet. Un sourire s'étire sur mon visage en réalisant qu'au moins, j'aurais un cobaye avec qui discuter des questions à traiter pour mon devoir.

 

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Pendant un instant, je considère l'option de me frapper avec mon bouquin volumineux de cours, mais je constate que l'autre individu semble m'avoir devancé par la présence d'une marque rougeâtre sur son front. « C'est bien une bactérie. Enfin, ça dépend lesquels. » Pourquoi je commence à défendre l'existence de microorganismes ? Ils ne font même pas partie de mon domaine. Enfin, si, indirectement. Je devrais plutôt me taire. Ouais, je vais faire ça, ça va m'éviter de raconter n'importe quoi. Plutôt que de continuer à m'enfoncer, j'ouvre à nouveau mon épais livre à la bonne page pour poursuivre mon étude et travail, gribouillant mon charabia sur la feuille en tentant d'ignorer la présence de ce truc mignon qui me fait dire n'importe quoi tout près de moi. Je remonte mes lunettes qui glissent sur mon nez, inscrivant une autre phrase trilingue dans mon cahier dans laquelle je souligne un mot important qui me servira de repère plus tard. Tenter d'oublier que je ne suis pas en mode solitaire s'avère plus difficile que ce que je pensais et risque un regard vers l'autre étudiant qui est en pleine écriture également. « Tu bosses sur quoi ? » Ma curiosité l'emporte sur tout le reste. Ce n'est pas comme si je tentais d'en savoir plus sur lui. Non, voyons. Peut-être juste un peu. Réalisant que je le fixe comme un prédateur depuis plus de cinq secondes consécutives, j'abaisse le regard vers le schéma qui se trouve sous la mine de son crayon afin d'avoir l'air plus intéressé par ce qu'il fait que sa personne. J'ai la désagréable impression que je ne devrais pas chercher à en découvrir davantage, que je devrais simplement prendre mes choses et m'en aller, mais je ne peux pas m'y résoudre.

Cet être est intriguant. D'une part j'aurais grossièrement cru qu'il rentrait dans ce cliché de mec baraqué qui plait à toutes les femelles du campus et qui se serait ouvertement moqué des nerds comme moi. L'ironie, c'est qu'on dirait qu'il l'est presque tout autant que moi tout en ayant un physique de dieu grec et c'est réellement perturbant. À côté le pauvre gus doit être déçu. Je suis bien loin de posséder un corps d'Apollon. Au contraire. Je n'ai concrètement pas beaucoup de muscles, je suis petit, et si on me déshabillait, on verrait que je suis limite imberbe. Si moi je suis content de ça, je suis presque certain que l'autre doit rire dans sa barbe et ne doit qu'attendre de se retrouver devant son miroir pour embrasser et flatter son reflet. Mais là encore si ça se trouve je me trompe complètement. Je tente de le lâcher avec difficulté des yeux pour me reconcentrer sur mon devoir. Après avoir défini les termes du sujet et trouvé une problématique, je m'attaque au plan. Là encore je sors une nouvelle feuille pour en dessiner un nouveau schéma pour imager mes pensées. Je vois d'un coup d'œil rapide que l'homme se trouvant en face de moi a l'air intéressé ou tout du moins curieux par ce que je suis en train de faire. Un sourire s'installe sur mes lèvres, amusé. Je m'etire alors dans ma chaise puis tends mon calepin vers l'autre. « Voilà comment on aborde une étude en philosophie. » Rien de bien extraordinaire en soit mais les expressions ornant le visage de l'autre sont justes trop drôles pour les manquer. Je reprends ensuite mon dû pour continuer ma rédaction. « Je dois te demander quelque chose. » Le crayon prend place derrière mon oreille tandis que je sors de mon sac mon livre d'étude et de quoi boire. Je prends une gorgée de coca tel un drogué puis retourne mon attention sur l'autre. « Ça te dit de m'aider à traiter mon sujet ? Je t'assure que c'est fun. » Mes coudes reposent alors sur la table, ces dernières supportant alors ma tête. Je penche la tête en attendant sa réaction. « Par contre je ne suis pas certain de pouvoir t'aider en retour... J'y connais rien en sciences. »

 

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J'approche le calepin qu'il me tend pour en observer le contenu, fronçant légèrement les sourcils. Ça ne ressemble pas à ma manière de travailler, alors il n'y a rien d'étonnant à ce que je sois un peu perdu dans ses trucs, mais il le serait tout autant si je devais lui tendre une ordonnance médicamenteuse. « Je crois que je préfère encore les cours de chimie. » Lui redonnant son objet, ça ne répond qu'à une petite partie de ma question, sauf que j'hausse un sourcil curieux à ses prochains propos. Hochant la tête dans l'affirmative, je m'attends à littéralement n'importe quoi. J'ai un peu l'habitude qu'on soit déstabilisé entre mon physique et le fait que j'aime trainer à la bibliothèque, je ne serais pas vraiment d'en être questionné. « Demande ce que tu veux. » J'évite le regard suggestif de justesse, étant peut-être trop habitué de l'utiliser avec mes proches. Encore un peu et j'aurais définitivement terminé dans la catégorie des types étranges, mais heureusement pour moi il n'a rien vu puisqu'il cherche un truc dans son sac. J'observe le livre qu'il pose sur la table pendant quelques secondes avant de lever les yeux vers son visage. L'aider à traiter son sujet ? « Je veux bien, mais je dois te prévenir que la philo c'est pas mon domaine. » Après, je dois avouer être intrigué en quoi je peux être utile. S'il faut répondre à des questions, je vais kiffer. L'entendant témoigner qu'il est toutefois dans l'incapacité de me rendre l'aide, j'agite une main pour gesticuler que ça ne me dérange pas. « J'ai pas besoin d'un coup de main, anyway, alors ça va. C'est pas comme si tu connaissais quelque chose à la chronopharmacologie, n'est-ce pas ? » Mes lèvres s'étirent en un sourire puisque mon sujet est à des kilomètres de distance du sien. Gigotant sur ma chaise pour m'installer plus confortablement, je pousse mon ordinateur portable sur le côté pour dégager un peu l'espace et retirer l'impression de séparation. N'ayant plus besoin de ma vision, je retire mes lunettes et les dépose sur mon livre massif toujours sur la table. « Vas-y. Je dois faire quoi ? »

Mes lèvres s'étirent dans un sourire à sa remarque. J'avoue tenir des notes assez particulières, cette manie de constamment faire des dessins un peu partout venant probablement de mes classes d'art. Je n'aime pas ce qui est trop simple, trop structuré, j'ai besoin de fantaisie et d'originalité pour que j'ose même ouvrir un cahier pour réviser. C'est ce qui pourrait expliquer la réaction de mon voisin puisqu'en général les scientifiques apprécient ce qui et clair et concis. Tout mon contraire en soi. « Ça devient pas trop répétitif à la longue ? » C'est une question que je me suis souvent posé comme dans l'enseignement obligatoire il y a forcément des cours de physiques chimie. Même si ces cours n'étaient pas pénibles, j'avais l'impression de tout le temps faire la même chose. Mais après peut être que ce n'est que moi. J'ouvre alors le livre à une certaine page et y colle un post-it en coin pour ne pas avoir à jongler toutes les trois secondes avec les autres qui suivent. Puis, je retourne enfin mon attention sur l'homme me faisant face. Je devrais penser à lui expliquer mon sujet, mais à la place je remarque surtout qu'il ne porte plus ses lunettes. Il reste d'ailleurs toujours assez charmant et je trouve ça perturbant. Je me racle alors la gorge quand je réalise quelques instants après que l'atmosphère est plutôt étrange. Je saisis rapidement le crayon se trouvant derrière mon oreille pour lui écrire le sujet. « Y a-t-il de quoi avoir peur de l'inconscient ? » Je lui tends finalement le bout de papier pour ne pas qu'il l'oublie en cours de route, puis recroise ensuite les bras. « C'est le thème du sujet. Maintenant c'est à nous de faire le tour de la question pour trouver des éléments de réponse. » J'avoue que pour un premier sujet à traiter, je ne lui fais pas de cadeau, mais de toute manière ce n'est pas comme si je le lâchais dans la brousse seul et sans provisions. « Déjà pour commencer, partons sur des ressentis. Qu'est-ce que t'évoque la question naturellement ? De l'absurdité, un sentiment de légitimité, n'importe quoi est cool. »

 

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