Tout le monde me voit comme la « parfaite » petite princesse souriante et pleine de vie mais je sais que c’est faux et que j’ai une part de sombre en moi que je redoute. Néanmoins, Hyo Jin doit s’en douter depuis le temps qu’on se connait, seulement je ne veux pas qu’il voit ce côté de moi. Je veux rester toujours sa douce princesse qui ne voit le mal nulle part et qui vient en aide la veuve et l’orphelin. Je veux qu’il retrouve le sourire qui fait tant chavirer les cœurs des demoiselles et qui me fait sentir en sécurité. Hyo Jin me comprend, me protège et c’est à mon tour de faire quelque chose pour lui. Quitte à le forcer à manger et boire, sa santé physique doit être un début afin qu’il remonte la pente.

« Bien sûr que je te connais, tout comme toi tu me connais. Cela doit remonter à environ 15 ans même si on ne se voyait pas souvent quand j’étais en Chine. Je n’oublie rien comme tes goûts culinaires. »

J’ouvre la moitié des boîtes de conservation et donne des couverts ainsi qu’un verre et une serviette.

« Quelqu’un d’autre qui sait ce que tu ressens, j’étais dans le même état il n’y a pas si longtemps et j’essaie de me ressaisir même si c’est difficile. Ta santé est importante, ne la néglige pas.»

Mes yeux le fixent et je vois que son esprit n’est pas entièrement présent. Il a beaucoup de travail sur la planche, mais je ne peux que l’aider en prenant soin de lui comme une sœur.

« En effet, tu n’es pas assez en forme pour faire les choses parfaitement. »

Il me décoiffe affectueusement comme à son habitude, ce qui me fait sourire davantage.

« Je m’inquiète pour toi, donc je ne te lâcherai pas tant que tu n’iras pas mieux. Tout cela est de la nourriture que j’ai fait pour toi. S’il en a trop tu le mettras dans le congélateur et tu mangeras le reste quand tu veux.»

Ces plats sont ses préférés, je pense que cuisiner cela de mes propres mains allait lui faire du bien au moral. J’ai passé toute la nuit à cuisiner, j’adore cuisiner et faire plaisir aux gens que j’aime d’autant plus qu’il en a vraiment besoin.

« Tu as tout compris mon cher ami donc mange bien sinon je vais être triste et penser que mes plats ne sont pas bons. »

Je le taquine comme toujours et je ris doucement avant de m’assoir à ses côtés en venant l’enlacer timidement.

« Je plaisante, tu fais ce que tu veux tant que tu manges à ta faim. »

Le forcer à se gaver ne sert à rien, tant que cela ne finit pas à la poubelle. Cela serait du gâchis ! Surtout que je pensais que je n’ai rien raté, j’ai fait attention à chaque détail pour ne pas le rendre malade.

« J’ai toujours de la place pour manger, je pense que tu ne l’as pas oublié. Par contre, tu manges et tu bois jusqu’à que tu sois repu. »

Les gargouillis me font rire intérieurement et je lui tends immédiatement une fourchette.

« Tu as vu, ton ventre parle pour toi. Régale-toi ! Sinon tu t’en sors après ce qu’il s’est passé ? Si tu ne veux pas en parler, je comprends. »

La Chine me manque terriblement, j’avais de très bons souvenirs en particulier avec Hyo Jin qui était un de mes seuls et rares amis jusqu’à que j’atterrisse à Seoul. Nos parents se connaissaient avant même qu’on ne soit nés il me semble et j’ai toujours vu Hyo Jin comme le frère que je n’ai jamais eu. Il me sortait de cette cage dorée dans laquelle j’étais enfermée, le fait qu’il était là me donne un peu de liberté et de fraîcheur. Pas d’entrainements, pas de devoirs, ni d’autres tâches à accomplir ! En plus, il était toujours gentil avec moi-même encore maintenant il est. Les rares moments où je pouvais être moi-même et dire des choses sans craintes, c’était avec lui. Cependant j’ai un amour et dévotion sans limite pour mes parents donc le jour où ce drame avec la Triade s’est produit m’a totalement traumatisé jusqu’à m’en faire perdre partiellement la mémoire. Je n’arrive plus à dormir, j’ai encore ces images dans ma tête. Le sang, le bruit des lames et des pistolets, les corps qui gisaient sur le sol. Ma vision du monde s’est écroulée ce jour-là, j’en ai perdu tous mes repères. Pourtant je ne ressens aucune haine et aucun désir de vengeance, chose que peut-être je préfère taire pour ne pas tomber dans le péché. Tout ce que j’avais envie à ce moment-là, c’était de les rejoindre au paradis mais le suicide est une chose impensable. Mon état était déplorable, je ne mangeais plus et ne dormais plus tellement qu’on a dû me forcer à le faire. Un jour, je me suis mise à changer et reprendre ma vie en pensant que c’est que je dois faire sans oublier ma famille décédée. Je veux les attraper par tous les moyens possible afin qu’ils pourrissent derrière les barreaux pour ce qu’ils ont fait à ma famille et à celle de Hyo Jin. Dès que j’ai commencé à habiter à Séoul, je me suis à apprendre comment me servir des nouvelles technologies et à connaitre les transports en commun par exemple, en clair je me suis modernisé de façon assez impressionnante en deux ans. Je pense que j’ai dû choquer Hyo Jin quand je lui ai sorti des couverts et non des baguettes en même temps le trois quart des plats que j’ai apporté était occidentaux. Je lui souris en voyant sa tête face à tous ces mets délicieux. J’avoue que j’y suis allée un peu fort sur ce coup, mais cela m’a détendu de cuisiner, de plus que je n’arrivais pas à trouver le sommeil. Tant qu’il ne jette pas la nourriture et qu’il mange à sa faim, je suis heureuse. La générosité et la bienveillance sont pour moi des vertus importantes et Hyo Jin les a, j’en suis témoin. Il a été toujours là surtout après le décès tragique de ma famille. Il est en mauvaise passe, c’est donc à mon tour d’être là pour lui. Quand je le serre dans mes bras, c’est pour lui montrer mon affection et le réconforter à ma façon. Je ne veux pas qu’il se rend malade comme je l’ai fait auparavant. « Hyo Jin, me force pas à utiliser la manière forte s’il te plait puis je ne te demande pas tout manger mais de manger à ta faim. Il manquerait plus que tu me fasses un malaise. » Ensuite il me caresse la joue, je ferme les yeux en profitant de la douceur de mon frère de cœur et je lui souris. Il parle d’une personne à me présenter, il titille ma curiosité. « Avec plaisir, j’ai hâte de faire sa connaissance. » Cette petite fille me fait penser à moi-même si je trouve qu’elle a encore moins de chance sachant que j’ai eu mes parents pendant un peu plus de dix-sept ans. Je me retiens de me mettre à pleurer comme un bébé quand je l’entends parler de l’histoire de cette petite fille. « Je lui en ferai autant qu’elle le désire, pauvre mignonne petite fille. » Je renifle avant de gratifier un sourire optimiste. « On va lui donner tout notre amour à cet enfant ! Elle aura des gens sur qui elle peut se reposer. » Mon poing levé et mon regard déterminé, j’étais partie pour décrocher des étoiles pour les beaux de la petite Dambi.