Ryuhei retrousse un peu le nez dans une mine de dégoût en entrant dans la remise dans laquelle il devait aller porter une boîte. C’était un de ses enseignants qui la lui avait confié en lui expliquant très précisément où était la dite remise, en lui remettant une clé et surtout en lui suppliant mille fois de ne pas faire de conneries. Merci. Comme s’il avait encore 15 ans et les hormones d’adolescent dans le tapis... Il n’en avait rien à foutre de ce vieil endroit pourri et il avait juste une envie : redonner cette clé à son prof et retourner dans son dortoir. Peut-être pour fumer un peu... pas de la cigarette, s’entend. Ryuhei n’arrivait pas à se défaire de toutes ses mauvaises habitudes, malheureusement. Et en fait, il ne voyait pas le mal à fumer un joint de temps en temps... Enfin, à chaque jour le cas présent. Quoi qu’il en soit, là il ne pensait qu’à ça et au fait que ça le faisait décidément bien chier qu’on prenne les élèves pour des ânes, dans les écoles asiatiques !

Il arrive devant la remise quelques quinze minutes plus tard. Elle avait eu la bonne idée d’être à l’autre bout du campus ou quoi ?! Mais alors qu’il jongle avec la boîte et la clé, il en échappe une des deux. La clé, heureusement. Parce que le carton imposant était pour sa part rempli de fioles de chimie qu’il ne devait sous aucun prétexte échapper... C’est un peu à ce moment là qu’une jeune femme se précipite pour l’aider. En ayant bien besoin, Ryuhei ne fait pas attention à qui elle est. Elle déverrouille la porte, puis l’aide à porter le carton à l’intérieur. Le Brésilien a un « merci » un peu bougon mais pas moins sincère devant la façon dont cette fille se dévoue soudainement. Sauf que la clé était restée dans la serrure... et soudainement, la porte se referme un grand coup derrière eux. Des rires se font entendre, la clé est tournée... et ces cons se sauvent en hurlant qu’un Pyobeom et une Gumiho s’envoient en l’air dans la vieille remise. C’est comme ça que les rumeurs commencent ici ? Génial... Une vraie bande de génies, ceux-là.

« Bordel, faut vraiment être con... », marmonne Ryuhei tout en posant la boîte au sol. Il pousse quelques longs jurons en portugais tout en allant jusqu’à la porte... mais visiblement, elle déverrouille de l’extérieur seulement. C’était bien leur chance... Il donne quelques grands coups contre la porte. Il faisait noir ici, en plus !! « EH LES DÉBILES ! OUVREZ !! »

Mais déjà, plus de bruit... et ils étaient assez loin de l’Université... Il se tourne vers la jeune femme et là, dans le peu de lumière qu’il y a, il la replace pourtant. Nouveau juron de la part de l’étudiant en mathématiques. Cette fille, il l’avait rencontré pour la première fois à son lieu de travail. Elle était dans les toilettes... enfermée. Quelle ironie ! C’est lui qui l’en avait délivré. Elle avait été sympa, rien à redire... mais quand il l’avait croisé à l’université, Ryuhei avait trouvé que c’était un bien mauvais tour du destin. Ici, les jeunes étaient souvent de familles aisées. Alors il n’avait pas trop envie que le fait qu’il soit concierge dans une boîte de nuit se sache. Surtout que sa soeur était justement d’un milieu aisé. Les questions allaient fusées et... bref, il n’avait pas envie. Alors il la fuyait et il lui semblait que plus il se sauvait, plus elle cherchait à lui parler ! Satanée sangsue... Elle avait bien réussi là ! Enfin, il savait que ce n’était pas de sa faute mais BON !

« En fait tu m’as aidé de façon intéressée, hein... », maronne Ryuhei, marabout. Si elle pensait qu’il n’avait pas remarqué qu’elle essayait de renouer le dialogue. Il faisait exprès pour que ça n’arrive pas, lui ! « Il faut quand même trouver une façon de sortir d’ici parce qu’on va crever de froid dans l’heure. Putain, cette idée de quitter le Brésil... »

Météo de barbare, oui !! De frustration, Ryuhei donne un coup contre la porte. Elle grince affreusement, mais ne cède pas. Son poing par contre lui fait un mal de chien soudainement et jurant toujours dans sa langue natale, il le secoue un peu. C’était bien sa chance !

Ce qui se passait ? Des petits cons avaient eu la brillante idée d’emmerder le peuple, voilà ce qui se passait. De façon probablement tout ce qu’il y a de plus gratuit, puisqu’il n’avait jamais rien fait pour mériter ça. Pas encore, du moins... parce que Ryuhei savait être un bagarreur et donc se faire quelques ennemis ! Mais en deux semaines, alors qu’il essayait de ranger un minimum la tempête que représentait sa vie, il ne s’était mis personne à dos. Vraiment, s’il croyait que les étudiants universitaires avaient plus de maturité que la moyenne, il s’était sévèrement planté... Par contre soudainement, la jeune femme s’énerve. Elle avait mal compris. Et même si dans la même situation qu’elle, Ryuhei aussi aurait élevé le ton, là ça l’agace prodigieusement ! En même temps, il n’avait pas beaucoup de patience là. Si habituellement il était plutôt tempéré à ce niveau, présentement c’était franchement difficile de se contenir ! Il ne fait toutefois que manifester son agacement en claquant sa langue contre son palais, jetant un regard sombre à la demoiselle.

« Non, je ne crois pas que tu as décidé de monter cette petite mise en scène. Encore heureux, parce que ce serait effectivement bien puéril. », marmonne le Brésilien tout en glissant ses mains dans ses poches. Son regard quitte la jolie dame pour commencer à analyser un peu la situation, observant la remise dans laquelle ils étaient emprisonnés. Putain, il avait déjà froid... Il venait d’un pays chaud, lui ! Il n’avait pas encore l’habitude du climat coréen et là il devait être enfermé dans un endroit sans chauffage dans la période la plus froide de l’année. Génial ! « Je parlais simplement du fait que tu m’ais approché pour m’aider... Cherche pas la petite bête noire. »

Oui, c’était un reproche. Ryuhei oubliait un peu que c’est exactement ce qu’il était en train de faire, pourtant ! Et le pire c’est qu’en vrai elle ne s’énervait pas vraiment. C’est lui qui était en colère dans son coin et était donc davantage susceptible. Il s’en rend toutefois compte... et prend une profonde inspiration. Là c’est toute sa fierté qui prenait cher, mais s’il se laissait terrasser par la frustration, ils n’allaient pas sortir d’ici de sitôt. Il peste un peu à propos du réseau par contre. N’importe qui aurait fait pareil, non ?

« Pourquoi est-ce que j’aurais une idée ? C’est un vrai piège à rat... », marmonne Ryuhei tout en observant autour de lui. C’était vraiment trop sombre... il avait du mal à distinguer ce qui les entourait. Glissant une main dans la poche de sa veste, il en sort son cellulaire. L’application lampe torche n’avait jamais été aussi pratique... « S’il y avait des fenêtres, on pourrait en éclater une... Mais ils ont pas cru bon d’en mettre, faut croire. »

Non, il n’aurait eu aucune pitié et encore moins de culpabilité ! Mais là c’était de toute façon impossible. Ryuhei soupire, glissant une main contre son visage. Puis lentement, il la dirige vers une de ses tempes, y faisant pression de deux doigts. Il avait mal au crâne. Il avait envie de fumer un joint pour se détendre mais n’avait rien sur lui et lentement, cette idée devient une obsession paralysante. La jeune femme reprend la parole... et elle n’avait pas tort. Ça fait soupirer Ryuhei. Il trouve une chaise et se laisse tomber dessus. Ça grince un peu... mais ça tient bon. Vraiment, les trucs ici n’étaient pas de la dernière génération...

« Disons que la vie a son propre sens de l’humour, je suppose... », marmonne le métis tout en glissant une main dans ses cheveux. Quant à avoir peur d’elle, ça lui fait lever les yeux au ciel. « Oh oui, je suis terrifié... Tu es si... imposante. »

Surtout à côté de son mètre quatre-vingt-quatre... ou pas !

« Je sais comment vous êtes ici. Généralement riches, pas besoin de vous salir les mains... Je connais ce monde, j’en ai fait partie. J’ai pas besoin que tout le monde sache que je travaille là-bas. Ni quel genre de boulot j’y fais exactement. », marmonne finalement Ryuhei tout en ayant un petit regard de reproche pour la jeune femme. « Mais au pire, je m’en fous... Qu’est-ce que tu voulais me dire de toute façon ? »

Parce que si cette fois ce n’était pas volontaire, comme elle le prétendait, il n’en restait pas moins qu’elle avait cherché à l’aborder d’autres fois, non ? Ah et parce qu’il avait malgré tout quelques manières :

« Moi c’est Ryuhei Hasegawa. »

Oui, il se présentait dans cet ordre. Il était Brésilien avait tout... et le principe des noms de famille avant les prénoms, ça le dépassait encore !