Qu'est-ce qu'une famille ? Une mère qui n'a pas réussi à le garder à ses côtés mais qui avait espoir qu'il la fasse gravir les échelons. En vain. Parce qu'elle a toujours été la deuxième. Une simple maîtresse vers qui l'homme riche et puissant se déversait quand il en avait marre de son ennuyante femme. Une idiote. Nova entend souvent parler d'elle, à quel point elle l'a réellement voulu. Pourtant, sa mémoire reste vierge de cette femme. Un visage inconnu qui l'a mis au monde avant d'en être rapidement éloigné. Son père a pu accepter d'avoir un autre fils, mais pas le poids d'une mère en plus.

Poings et pieds liés par une société qui l'étouffe. Un mode de vie qui ne lui sied pas. Nova n'est qu'un enfant et pourtant il a un regard d'adulte. Fatigué. Las. Déjà à bout. La rage coule dans ses veines aussi, devant l'indifférence à laquelle il a toujours eu droit.
Le bâtard n'a pas droit à l'amour. Ni à la reconnaissance. Jamais invité aux dîners de famille, jamais pris en considération. C'est une étoile éteinte qui file entre les couloirs de la grande maison. Le cœur vide. Le compte en banque rempli.

Alors il ouvre grand la bouche. Il veut crier et se faire entendre. Il veut juste un mot tendre ou une étreinte. Peut-être même qu'un regard suffirait. Mais il est la personne en trop. Cette pièce de vieux puzzle qu'on range malencontreusement dans une boîte différente.

Par tous les moyens.

Il tombe dans tous les vices et se noie. C'est limpide. L'odeur forte d'alcool et de cigarette desquels il empeste, sa manière de marcher, son regard hagard et les dessins sur son corps. Un aveugle sentirait son désespoir. Et ses parents y restent de marbre.
Il dit qu'il s'en fout. Il n'a pas besoin d'eux pour vivre. Il prend même son indépendance, plus ou moins. Il quitte juste la maison de son enfance et s'installe dans une ville plus loin.

Les couleurs sur le bout de ses doigts forment un arc-en-ciel. La peinture est un autre de ses exutoires. Le seul non toxique, contrairement à tout ce qu'il s'inflige d'autre. À l'université, il est un des meilleurs. Et il a presque espoir de voir un jour un regard fier de son paternel se poser sur sa personne.

Espoir. Il rit.

Les néants lui brûlent les rétines. Mais il ne ressent rien. L'alcool dans le sang, il est aveugle, sourd. Trop vite. Il le sent à peine, l'impact, quand sa voiture percute un arbre. Son corps entier expulsé. Il se à peine, quand sa vie dérape à nouveau alors qu'il se calmait à peine. Il s'est toujours senti étouffé par la ceinture de sécurité. P’tit con.
Culpabilité. Qui lui prend la gorge, lui serre le cœur à vif, le griffe jusqu'au sang. Une rage plus profonde, cette fois envers lui-même, quand il pose ses yeux noirs sur ses mains tremblotantes. Les larmes. Les cris. La colère.

Il se hait.

Tremblements essentiels. À un stade peu avancé encore mais il sait que cela ne fera que s'empirer. Il ne pourra plus peindre comme avant. Les tremblements arrivent de nulle part, souverains, et ruinent une œuvre sur laquelle il s'applique depuis des semaines. C'en devient une routine.

Nova quitte de l'université. Il se terre encore plus. Les séances de rééducation ne feront rien pour lui. C'est inévitable.

Il s'est cassé lui-même.

Il boit plus, fume plus. Papillon de nuit dans des lits d'étrangers. Il tait le moindre élan d'espoir par une piqure. Il ne veut plus de ça.

Cet espoir renaît presque à travers l'autre. Le blond. Cet homme dont il ne sait que penser, qu'il hait autant qu'il aime. Qu'il répugne autant qu'il chérit. Il veut le serrer contre lui de tout son cœur, puis lui tordre le cou.

Parce que ça fait encore plus mal que tout le reste.

Nova le veut. Et il est déjà à lui.

Merde.