❥ Ce n’est exactement qu’elle s’est proposée pour accomplir la tâche sacrosainte mais plutôt qu’elle a lâchement été désignée par les Sango pour une virée courses à la supérette. Forcément, c’est toujours quand on part aux toilettes que tous nos intérêts se jouent à la roulette russe. A croire qu'ils aiment encore plus se payer sa tête depuis qu'elle a malencontreusement rejoint la #teamblonde depuis un nouvel an un peu trop arrosé. « Non mais sérieusement… y’a écrit quoi, là ? C’est le hangeul ça ? Vraiment ? On dirait des déjections de mouche, » elle bougonne en poussant son petit panier de course avec le pieds dans les allées du magasin. « Shampooing Jung Hwa. » Elle déchiffre non sans s'y être reprise à plusieurs fois et marque un stop. Juste ça, sans aucune précision ? « Va pour le Toucher Soie & Lumière, » il est rose, il est girly, il est joli. Certes, il n’est peut-être pas dans l’idéal que se faisait Jung Hwa de son shampooing mais elle n’est pas devin non plus. C’était ça ou l’antipelliculaire. « Ok, maintenant. » Elle regarde à nouveau sur sa liste en plissant les yeux parce que l’écriture de Ji Hye est vraiment criminelle. Du coup, dès qu’elle arrive à déchiffrer un truc sous la lumière du rayon frais, elle s’exclame en jetant son poing en l’air. Il n’y a que pour le chocolat qu’elle n’a pas besoin de déchiffrer la plume de son amie, « pffff elle sait vraiment faire des efforts ciblés celle-là. » Le problème maintenant, c’est qu’elle a tellement bien référencé la marque du chocolat que ça fait dix minutes que Na Young elle tourne autour du rayon sans trouver la plaquette demandée. « J’suis sûre qu’il existe même pas son chocolat, » elle lève les yeux au ciel en refaisant tout la déco de l’étage avant de se résoudre à partager la tâche. « Excusez-moi… ? » Elle lève le bras en direction d’une vendeuse qui passe par-là, prête à l’attirer dans ses filets. Ses grands yeux perdus projettent des SOS encore plus criants que  les lumières du phare d'Alexandrie. « Est-ce que vous avez cette marque de chocolat quelque part ? » Elle aurait pu lui demander le même chose pour le papier toilette, le produit vaisselle ou les graines bio bizarres de Mo Yeon… mais commençons par le commencement. Elle relève gentiment la tête d’un air désespéré. La vendeuse lui semble tellement sympathique à lui prodiguer ses conseils qu’elle lui trouve même un petit air familier, un je-ne-sais-quoi de connu. Ah, faire les courses ! Ca rapproche les peuples.

❥ Utilisant une dernière fois le cutter pour ouvrir le carton de ma tournée, je commence à me lasser de ce travail. Il est répétitif, ennuyeux et surtout épuisant d’un point de vue physique. Sans mes gants, mes doigts commencent à souffrir le martyr à force de charger, de déplacer et arracher tout scotch m’empêchant d’accéder aux produits. Heureusement, le travail à la ferme m’a permis de développer une grande force et je n’ai pas peur de la charge mais à la longue, j’aimerais atteindre le but que je m’étais fixée en arrivant ici : aider mes parents de la meilleure des façons qu’il soit, c’est-à-dire vendre leurs produits. Et pour l’instant, ce n’est pas une réussite puisque je me contente encore d’installer des produits industriels dans des gondoles. Par chance, la profession me permet d’être en contact avec les gens. Evidemment, les clients sont du genre pressés mais je tombe parfois sur des perles rares qui ont le don de me faire sourire pour le restant de la journée. Après avoir ouvert mon carton, j’entame pour la énième fois de la journée le remplissage des rayons. Et dieu sait à quel point cela vous coupe l’appétit de voir de telles gourmandises chaque semaine. Enfin bref. Je termine ma journée de travail dans une heure ou deux alors je devrais en finir au plus vite pour voir si j’ai l’occasion de me tourner les pouces ou de faire semblant de travailler pendant un temps. Toutefois, et comme d’habitude, je suis interrompue dans ma démarche puisqu’une jeune demoiselle semble avoir besoin d’aide. Je la gratifie d’un sourire poli, me tâchant à être aimable avec elle. « Bonjour. » Je m’approche d’elle à mon tour et regarde par-dessus son épaule pour savoir de quelle marque elle veut parler. « Hum, oui, ils ne sont pas trop loin. Attendez. » Au moins, je connais la disposition par cœur. Enfin, sauf quand nos chefs décident de réorganiser tout le magasin pour mettre en avant des produits plus accrocheurs selon les périodes de l’année. « Ils se trouvent en haut. Vous voyez ? » Je pointe du doigt la marque qui l’intéresse. « Vous savez quel goût vous voulez prendre ? Celui à la menthe est plutôt bon mais il faut aimer. » Je la regarde, attendant une réponse de sa part avant de remarquer la taille de la demoiselle. A mon avis, aucune de nous deux parviendra à accéder tout là-haut. « Je doute qu’on puisse l’attraper toutes les deux. Je reviens. » Je rigole doucement et pars à la recherche d’un de ces tabourets qu’on croise dans les supermarchés. Il faut dire que je suis un peu ridicule avec mon 1m64. Une fois équipée, je m’attelle à récupérer la tablette de chocolats qu’elle désire.

❥ Elle n’est guère plus grande qu’elle et sautille comme un petit électron libre à hauteur du rayon désigné. Quelle idée d’aller percher des produits aussi haut quand les bières du magasin sont négligemment laissées à portée d’un nourrisson. En plus de ça, elle ne sait vraiment pas pour quel goût opter, il n’y a rien de préciser sur sa liste alors forcément… lui laisser le choix, cette vendeuse ne le sait pas, mais c’est s’encombrer d’une cliente indécise dont on se serait bien passée. Elle se perd un peu dans une réflexion trop active, catapultée d’un bond, pour une fois, par son envie de bien faire. Elle devrait peut-être faire la plouf. « Euh… celui à la menthe ? » Elle la regarde en haut de son tabouret et en vient silencieusement à l’observer. Elle est certaine d’avoir déjà vu son visage quelque part ce qui l’étonne encore plus que ces traits ne sont pas ceux d’une personne que l’on peut facilement oublier. Elle redescend et lui donne la tablette de chocolat à la menthe, Na Young l’examine sous toutes ses formes et puis elle grimace. « Hm, non. Je vais peut-être prendre l’autre, en fait. » Elle hausse les épaules d’un air faussement innocent et s’attarde sur le name-tag accroché à son tee-shirt, Eunhye. Pourquoi ce nom le dit quelque chose et pourquoi son visage lui rappelle quelqu’un, alors qu’elle ne parvient pas à y associer ne serait-ce qu’un seul, qu’un tout petit souvenir. C’est que d’habitude, elle n’a pas une mémoire trop mauvaise. En plus, elle vient si rarement faire les courses dans cette petite surface qu’elle se persuade que ce n’est pas qu’une vague histoire de déjà-vu ou de déjà croisée. « Pardon ! » Elle la rappelle furtivement avant qu’elle ne retourne à son déchargement et, tout naïvement, elle lui demande « est-ce que vous êtes déjà passée à la télé ? J’ai l’impression de vous connaître, » ok c’est inattendu. Elle cesse de la menacer avec la tablette de chocolat qu’elle charge dans son petit caddie portable. Et puis ça lui revient. « L’amie de Choi Rae Won-oppa ! » Très bien cette fois-ci elle la pointe littéralement du doigt comme s’il s’agissait d’un hold-up.

❥ Equipée du tabouret, j'installe ce dernier devant les articles concernés avant de monter dessus pour attraper la tablette de chocolat désirée. Décidément, c'est à se demander si les gérants veulent nous faire faire du sport à longueur de temps. Ils sacrifient même les clients qui, pour avoir une récompense, doivent se tordre dans les sens. Baissant le menton, je regarde la demoiselle avec insistance pour qu'elle puisse m'éclairer. Je veux bien l'aider mais je ne peux pas imiter une statue pendant plusieurs minutes. Le temps, c'est de l'argent et dieu sait à quel point je déteste ce dicton. Mais soit. Son choix se porte finalement sur ma suggestion de tout à l'heure. J'attrape donc le lot de trois tablettes de chocolat à la menthe. A mon avis, cela suffira puisque la jeune femme ne m'a pas donné d'autres consignes à suivre. " Tenez. " dis-je, après être descendu du tabouret sauf qu'elle change d'avis. Ce n'est pas avec ce type de comportement qui m'évitera d'avoir des courbatures, ce soir. Je recommence, tentant de garder le sourire alors que je me sens assez stupide. J'échange les articles sans broncher, répète mon action avant de commencer à m'éloigner de la cliente pour retourner à mes occupations. Toutefois, celle-ci m'interpelle à nouveau. Il lui faut le chocolat à la menthe ? Je me retourne, d'un air faussement surpris: " Oui ? " A sa première question, j'avoue que j'ai envie de rire. D'ailleurs, un grand sourire prend possession de mes lèvres. Il faut dire que mon apparition télévisuelle a été remarquée par les plus grands fans de zappings.  Puis, je la vois me pointer du doigt et j'avoue que je suis réellement choquée par la suite. Arquant un sourcil, les premiers mots que je prononce sont : " Raewon ... Oppa ? " Pourquoi oppa ?! " Tu me connais ? " Je fronce les sourcils et tente d'identifier la jeune femme, me demandant quel est le rôle dans sa vie et si nos chemins se sont déjà croisés. " Ah, je suis désolée. Je ne suis pas du tout physionomiste. J'ai aucun indice contrairement à toi. "  J'agite doucement mon badge et rigole. " C'est pour ça que tu me fixais bizarrement ! "