Mari-Kuen essayait de faire de grandes choses, mais avec très peu de moyens. Elle n'était pas riche. Plus riche, disons. Et ce depuis de longues années. La vie était difficile, et elle enchaînait les magouilles pour essayer de joindre les deux bouts. Alors en plus, tenir une boutique en ligne... Ce n'était pas chose facile. C'était compliqué, même. Sa marge était très faible, et les profits lui permettaient tout juste de poursuivre son activité. Elle ne pouvait donc pas se permettre de payer ses mannequins, qui pour la plupart étaient ses amis. Le photographe était souvent elle, ou comme pour les mannequins, une connaissance. Le graphisme du site, tout le reste... Tout, presque tout était fait gratuitement, par elle-même ou grâce à des connaissances. Alors, elle n'osait pas toujours en parler aux gens. Enfin, elle n'osait pas toujours intégrer des gens supplémentaires. Disons qu'elle s'était entourée d'un petit crew, qui restait le même et... Elle n'osait pas, parfois, demander à une personne de le rejoindre, et de consacrer du temps tout en sachant qu'elle ne recevrait aucune rémunération. C'était là ce qui lui était arrivée avec Risae pendant un moment. Belle jeune femme, au physique de mannequin. Mais elle n'avait jamais su que poser l'intéresserait et... Surtout que poser bénévolement l'intéresserait. Elle l'avait fait venir dans son « atelier », chez les Neugdae. Une chambre qu'elle avait réquisitionné. Heureusement que la fraternité se montrait compréhensive. « Venise. Tu sais, le carnaval ? J'y suis allée. Un peu par hasard. En fait j'ai eu droit à un aller-retour gratuit, alors j'ai sauté sur l'occasion. » Elle rit un peu. Mari-Kuen, ou la reine de la débrouille. Elle lui sourit, s'approchant pour boucler les dernières finitions. « Des vêtements tantôt colorés, tantôt sobres, qui contrastent avec le temps maussade et qui restent élégants malgré tout... Plutôt pas mal comme concept, tu ne trouves pas ? En tout cas, ça te va comme un gant. Tu les portes bien. » La tenue qu'avait Risae flattait vraiment sa silhouette. Ou peut-être était-ce la silhouette de Risae qui flattait le vêtement. Mari-Kuen se recula, et sembla très satisfaite du résultat. Elle passa alors derrière l'appareil photo, pour commencer à faire quelques shoots, histoire de faire les premiers réglages, laissant le jeune mannequin libre de prendre les pauses qu'elle désirait.