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nawei + all cupcakes and rainbows

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nawei + all cupcakes and rainbows | Ven 14 Avr - 12:54
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Nawei & Lei
this is a story about happiness

13 AVR. Il y a une règle tacite chez les No. Qui choque et déçoit Lei mais visiblement, personne ne se soucie tant de son avis sur le sujet. Une règle tacite donc : les douze travaux des copains de Lei. Éprouvés tels Hercule, jaugés, pesés et bien sûr, jugés insuffisants. Tous. Sans exception. Elle n'en est pas du tout amère (du tout), pas même lorsque ses frère et sœurs eux ne sont pas soumis à la même règle (bon, un peu amère) et se voient même autorisés sans grand éclat à ramener leur +1 au domicile familial quand bon leur chante (d'accord, très amère). "On" lui dit grandis un peu, Lei ! mais "on" ne fait pas confiance à ses jugements et "on" s'estime plus à même qu'elle de déterminer si ses choix conviennent ou non, et le pire, sans doute, c'est que Lei ne peut s'empêcher d'attendre cette approbation avec anxiété ; comme un passage obligé, une nécessité. Ce n'est pas arrivé si souvent, parce qu'elle s'est simplifié la vie en limitant les histoires au strict minimum, bercée par ses incertitudes autant que par la crainte de la pression à venir. Mais elle garde le souvenir vivace de toutes les étapes par lesquelles Tasyr, notamment, a eu la veine de passer sitôt qu'ils ont franchi le cap de l'amitié (et le soutien de Nuo perdu) ; à commencer par le face à face avec les mamans (l'une au sourire faux et crispé sonnant comme "toi et nous, on a un problème je crois", et l'autre fermée comme une porte de prison dont le regard fixe disait clairement "est-ce que je prétends être polie dix secondes ou on passe directement à l'étape torture") en guise de passage obligatoire au tout début de la relation. L'ambiance fraîche (glaciale), leur interrogatoire en bonne et due forme sur ce qu'il avait pu faire de sa vie durant le temps où elles ne l'avaient plus vu. La question quant à ses ambitions, dont la réponse s'était vue solder par des mines sceptiques accompagnées d'un charmant "Toi. En médecine. Vraiment." — et Lei avait eu beau s'empresser de répondre vous savez bien qu'il en est capable, elles savaient surtout qu'il était autodestructeur et ne plaçaient plus deux grammes de confiance en lui.

Elle se souvient très bien aussi de la tentation inavouée de se faire Juliette Capulet des temps modernes et de tout arrêter, jeter au feu leur couple naissant pour ne pas se retrouver en guerre avec ses proches ; mais ç'eût été se passer le cœur à la moulinette, le hacher menu et le jeter en pâture à des poneys carnivores — elle avait préféré faire la brave et affirmer fermement "t'inquiète, peu importe leur avis, on n'en a pas besoin pour être ensemble". Sans tout à fait mesurer le fait qu'elle signait pour des appels quotidiens lui ordonnant de le quitter, tout autant de disputes, et Tasyr au cœur de tout ça — assis à regarder une famille se déchirer et être malheureuse, sous prétexte qu'il avait choisi d'être heureux. Elle avait quand même ajouté plus tard "et puis tu sais quoi, tu n'auras plus à venir à la maison, plus à les recroiser, jamais. On se verra ailleurs, on sera bien." et il avait fait semblant de ne pas comprendre qu'elle avait reçu l'ordre de ne plus le laisser franchir le perron. Il est néfaste, elles disaient ; néfaste comme la Peste, comme un mal séculaire et ravageur, le garçon qu'elle aimait.

Avec tout ça à l'esprit, autant le dire : tomber nez à nez avec Na Wei dans la vaste cuisine ouverte en arrivant chez les No la fait piler net. Elle cligne des paupières. Cligne. Cligne encore. Mais ce n'est pas une hallucination : il est toujours là. Elle ne lui a jamais vraiment fait face avant ça — a tout juste vu une porte se refermer sur sa silhouette, une ou deux fois à peine, et trébuché sur ses chaussures dans l'entrée, très rarement aussi. Mais une confrontation ? Non. Nuo est discrète, en parle peu et jamais en présence des mamans. A vrai dire, cette fois est forcément une histoire de mauvais timing : il n'y avait supposément personne à la maison ce soir, du moins avant que Fei ne lui dise qu'elle et Aiko rentreraient plus tôt que prévu, et que Lei ne décide d'en profiter pour passer. Elle ouvre la bouche, prête à le prévenir du retour imminent, et puis y'a ce truc qui la titille. Ce et pourquoi je l'avertirais ? qui se manifeste d'une voix d'enfant revancharde, à l'arrière de ses pensées. Après tout, si les rôles étaient inversés, Nuo aurait été la première à monter sur ses grands chevaux à base de "c'est qui lui ? Tu es sûre qu'il est fiable ? Fais attention", et elle n'aurait pas été la seule.

Et puis Nuo passe beaucoup de temps avec ce garçon. Genre, beaucoup. Elle n'est pas jalouse. Pas du tout. Même s'il lui vole sa sœur, un peu — pas du tout jalouse.

Du coup, elle ravale sa mise en garde et lève le nez bien haut en lui tournant le dos, quittant la pièce sans un mot et sur un hairflip en bonne et due forme pour lui faire sentir sa Désapprobation™. L'espace de trois pas, elle est presque fière d'elle, et puis au quatrième c'est le dilemme, parce que- well. Quand Nuo en parle, de ce gars-là, elle a du mal à prétendre ne pas être complètement mordue, si sobre qu'elle essaye d'être. Et si Nuo l'aime-
(En plus ce n'est pas franchement poli de partir comme ça.)
Dilemme, dilemme, dilemme.
Lei se retrouve plantée là, à assassiner (sans douleur) du regard la première marche menant aux chambres, pesant le pour et le contre : elle ne veut pas qu'ils croient qu'ils vont devenir amis ou quoi, mais bon, c'est pas comme si elle veut qu'il la déteste non plus, et en même temps, est-ce qu'elle a vraiment envie de lui faire face à nouveau alors qu'elle vient tout juste de se comporter comme une gamine sans manières ? Le visage plongé dans les mains, Lei cogite, mortifiée, mais finit par trancher pour retourner sur ses pas, dépitée et honteuse comme il faut. Ce qu'elle ne ferait pas pour Nuo...

L'instant d'après (soit une petite minute à tout casser après sa sortie Dramatique™), la voilà de retour devant le comptoir de la cuisine, plantée devant lui tête basse avec une moue très bougonne et les mains croisées derrière le dos ; il n'a pas encore dit un seul mot, mais on jurerait voir une fillette qui vient de se faire gronder.

En même temps, il a un peu une allure inquiétante. Un peu. Euphémisme : disons que si elle le croisait un soir dans la rue, elle sourirait, mais presserait quand même le pas (Nuo lui répète toujours "fais attention", donc. Voilà.).

Bonsoir, elle se force de mauvaise grâce en regardant tout sauf lui, puis inspire. Je suis Lei. Silence.

Et silence.

Et encore silence ; ça s'annonce douloureux. Elle a du mal avec les silences, ils lui font dire des choses inutiles.

Et tu es Nawei, je suppose, elle complète à sa place, puisqu'il n'a visiblement pas remarqué que c'était à son tour de parler. ça la fait céder à la pression imaginaire- parce qu'un tel silence a forcément une raison d'être non ? D'accord, d'accord ! Je suis désolée pour tout à l'heure ! Je ne le referai plus. Et j'ai des- brochettes d'agneau. Tu en veux ? elle propose en levant enfin de grands yeux vers lui, brandissant d'une main le sachet avec lequel elle est rentrée, à l'intérieur duquel se trouvent les fameux (et précieux) lamb skewers (s'il dit non à des lamb skewers, deux choix : soit il a vraiment mauvais fond, soit il est végétarien ; la deuxième possibilité est excusable, il arrive aussi à Lei de l'être parfois).

Une petite réponse rapide