ashlei + for the past couple weeks I've felt kind of great
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ashlei + for the past couple weeks I've felt kind of great | Mer 10 Mai - 10:10 Citer EditerSupprimer
(THEN) Elle était peut-être encore trop vulnérable ce soir-là.
C’était une période compliquée comme Lei en connait peu ; tout ce qu’elle évite assez aisément généralement : tracas de grands, débâcle de sentiments. Tasyr enraciné au creux de son cœur, tatoué jusqu’à l’âme et pourtant ; l’ombre d’un autre subtilement esquissée derrière ses paupières, un sourire étranger de plus en plus présent dans ses pensées. La peur – non, la panique, l’horreur, parce qu’il n’est pas naturel qu’un palpitant s’affole pour deux visages, n’est-ce pas ? Les questions sans réponses – Papa, pourquoi je ressens ça ? Est-ce que je suis comme toi ? Pourquoi tu réponds pas ? Pourquoi t’es pas là quand j’ai tellement besoin d’toi ? –, miasme de culpabilité, détresse muette, étouffée. Tous liens coupés avec l’autre, et la perte cuisante vécue telle une peine de cœur. Déjà une trahison en soit. Il y avait eu ça et, pour ne rien arranger, les silences au sein de son couple, et elle s’était sentie tout sauf à la hauteur : à peine capable de soutenir son ami et amant face aux démons contre lesquels il luttait sans jamais rien vouloir lui dire. Laissée désemparée par ses absences. Toujours trop faible pour relever, réparer sa carcasse décharnée. Alors elle avait perdu confiance (en elle, en eux) et cessé de lutter. L’avait laissé partir. Laissé dire en fait, on a sûrement confondu amitié et amour, non… ? et avait même souri calmement, puis soufflé, incertaine : Je crois, oui. Sûrement, tu as raison, alors qu’il lui évidait la poitrine et la saignait à blanc. Elle l’avait laissé décroiser leurs mains liées et poser sur son front un baiser léger, avec la tendresse d’un meilleur ami, alors que ses lèvres brûlaient encore de l’emprunte passionnée qu’il y a avait gravée. Rupture.
Elle était probablement vulnérable ce soir-là.
Ça faisait un mois déjà et le poids lui opprimant la poitrine ne s’apaisait pas. Les draps étaient froids, les silhouettes nocturnes menaçantes, la solitude lancinante. Le manque, déchirant. Il était encore là, dans sa vie, Tasyr, mais plus vraiment ; à sa portée, mais plus totalement. Et elle n’avait pas ressenti une telle peine depuis l’abandon de son père, vraiment. Chaque jour était un peu plus pesant que le précédent, mais elle forçait des rires qui râpaient désagréablement contre le nœud de sa gorge, étirait ses commissures sans que leur joie feinte n’atteigne ses yeux éteints. Réapprendre à vivre sans Tasyr, c’était se noyer à l’intérieur. Hurler à s’en briser la voix sans que personne ne l’entende.
Elle avait laissé une voix familière tenter d’apaiser sa tourmente ; lui promettre que bientôt, avec le temps, ce serait moins dur. Darren était le seul réceptacle des émotions honteuses qu’elle taisait (la seule, du moins, à laquelle elle avait avoué qu’ils avaient rompu d’un commun accord, mais qu’il était plus d’accord qu’elle) avec soin, et elle avait serré fort sa main au creux de la sienne lorsque Lei avait dit C’est bon, j’ai assez pleuré, maintenant.
Elle était clairement vulnérable ce soir-là.
Mais elle avait accepté de sortir avec des filles de sa fraternité. Paupières fardées par une main amie, puisqu’elle-même ne trouvait pas l’énergie de se faire belle si ce n’était pour lui. Et elle avait simulé l’insouciance ; trempé ses lèvres dans tous les verres qu’on lui présentait, s’électrisant aux saveurs et dansant comme si rien d’autre n’existait. Avec une candeur d’enfant et une soif d’exister à nouveau. Pour, sans crier gare, tomber dans ces yeux là. Bleus et perçants, dans un écrin de cils pâles.
Ça n’avait rien à voir avec les Sentiments qui tiraillaient et effrayaient Lei. C’était son âme esthète qui s’éveillait, simplement. Paillettes rosées sur ses joues pâles tandis qu’elle se surprenait à se retourner constamment pour capter son rire, tandis qu’il s’appliquait à accaparer son regard. Il avait quelque chose d’électrique et d’attirant ; d’insaisissable comme les nuages de fumée qu’exhalait la foule. C’est pas un gars pour toi, quelqu’un lui avait affirmé entre deux battements issus des basses assourdissantes, en remarquant la façon dont elle se détournait, gênée, seulement pour l’observer à nouveau un peu plus tard. Pourtant lorsqu’il l’avait empêchée de trébucher un peu plus tard, il avait semblé candide et charmant et Lei s’était dit qu’avec un tel sourire, il ne pouvait pas être néfaste – si ? Naïve.
(NOW) Lei est un rayon de soleil. Son rire s’égrène comme des éclats de cristal, attirant des prunelles curieuses et faisant naître des sourires attendris sur les visages fatigués qui l’entourent, bref instant de bonheur partagé avec de parfaits inconnus avant que chacun ne reprenne sa routine où il l’a laissée. La nuit rabat déjà son manteau sombre sur le campus et pourtant, les couloirs de la Yonsei sont encore peuplés d’étudiants se pressant vers un cours tardif. Lei, elle n’est là que pour le soutien psychologique : sur le point de se glisser dans une salle de classe qui n’est pas la sienne, pour tenir une amie éveillée durant la prochaine heure à coup de bavardages et de gorgées de café. C’est pour la bonne cause alors elle ne rechigne pas à l’idée d’être coincée au fond d’un amphithéâtre plus longtemps que son propre emploi du temps ne l’exige, mais- comme un vieux remake d’un film un peu oppressant, un mouvement de tête la plonge dans des yeux bleus qui figent le sourire sur ses lèvres et troquent sa joie légère et insouciante contre de la surprise aux nuances de gris, d’angoisse.
Elle bifurque. Sans crier gare, sans s’expliquer, tourne les talons et se faufile en direction de la sortie du bâtiment, cœur pulsant à ses oreilles. Elle a le temps de franchir les doubles portes pour se retrouver à l’air libre, et même de dévaler les marches, avant qu’une poigne ne se referme autour de son poignet, interrompant son élan. Le pire, c’est qu’il n’a rien d’agressif. Ses iris sont toujours teintées d’une innocence trompeuse et sa bouche étirée en un demi-sourire qui l’oblige à lui en rendre un, timide. C’est ce qu’il y a de terrible avec lui : lorsqu’il surgit du néant, il retisse autour d’elle la toile d’une emprise dont elle ne sait se défaire. Ashvin, elle salue d’une voix douce, comme si elle ne venait pas de tenter de le fuir à l’instant, avant qu’il ne l’en empêche. Comme à chaque fois. Ça faisait longtemps… Et ça sonne si faux – comme s’il lui avait manqué, alors que non… n’est-ce pas ? Elle était bien sans lui, elle était mieux sans lui, sûre d’elle et capable d’affirmer que c’était fini, et pourtant la voilà à nouveau clouée sur place par sa simple présence. J’étais sur le point de partir, à vrai dire, elle tente de se défiler, sursaut de courage ou de lâcheté.
ashvin & lei
(THEN) Elle était peut-être encore trop vulnérable ce soir-là.
C’était une période compliquée comme Lei en connait peu ; tout ce qu’elle évite assez aisément généralement : tracas de grands, débâcle de sentiments. Tasyr enraciné au creux de son cœur, tatoué jusqu’à l’âme et pourtant ; l’ombre d’un autre subtilement esquissée derrière ses paupières, un sourire étranger de plus en plus présent dans ses pensées. La peur – non, la panique, l’horreur, parce qu’il n’est pas naturel qu’un palpitant s’affole pour deux visages, n’est-ce pas ? Les questions sans réponses – Papa, pourquoi je ressens ça ? Est-ce que je suis comme toi ? Pourquoi tu réponds pas ? Pourquoi t’es pas là quand j’ai tellement besoin d’toi ? –, miasme de culpabilité, détresse muette, étouffée. Tous liens coupés avec l’autre, et la perte cuisante vécue telle une peine de cœur. Déjà une trahison en soit. Il y avait eu ça et, pour ne rien arranger, les silences au sein de son couple, et elle s’était sentie tout sauf à la hauteur : à peine capable de soutenir son ami et amant face aux démons contre lesquels il luttait sans jamais rien vouloir lui dire. Laissée désemparée par ses absences. Toujours trop faible pour relever, réparer sa carcasse décharnée. Alors elle avait perdu confiance (en elle, en eux) et cessé de lutter. L’avait laissé partir. Laissé dire en fait, on a sûrement confondu amitié et amour, non… ? et avait même souri calmement, puis soufflé, incertaine : Je crois, oui. Sûrement, tu as raison, alors qu’il lui évidait la poitrine et la saignait à blanc. Elle l’avait laissé décroiser leurs mains liées et poser sur son front un baiser léger, avec la tendresse d’un meilleur ami, alors que ses lèvres brûlaient encore de l’emprunte passionnée qu’il y a avait gravée. Rupture.
Elle était probablement vulnérable ce soir-là.
Ça faisait un mois déjà et le poids lui opprimant la poitrine ne s’apaisait pas. Les draps étaient froids, les silhouettes nocturnes menaçantes, la solitude lancinante. Le manque, déchirant. Il était encore là, dans sa vie, Tasyr, mais plus vraiment ; à sa portée, mais plus totalement. Et elle n’avait pas ressenti une telle peine depuis l’abandon de son père, vraiment. Chaque jour était un peu plus pesant que le précédent, mais elle forçait des rires qui râpaient désagréablement contre le nœud de sa gorge, étirait ses commissures sans que leur joie feinte n’atteigne ses yeux éteints. Réapprendre à vivre sans Tasyr, c’était se noyer à l’intérieur. Hurler à s’en briser la voix sans que personne ne l’entende.
Elle avait laissé une voix familière tenter d’apaiser sa tourmente ; lui promettre que bientôt, avec le temps, ce serait moins dur. Darren était le seul réceptacle des émotions honteuses qu’elle taisait (la seule, du moins, à laquelle elle avait avoué qu’ils avaient rompu d’un commun accord, mais qu’il était plus d’accord qu’elle) avec soin, et elle avait serré fort sa main au creux de la sienne lorsque Lei avait dit C’est bon, j’ai assez pleuré, maintenant.
Elle était clairement vulnérable ce soir-là.
Mais elle avait accepté de sortir avec des filles de sa fraternité. Paupières fardées par une main amie, puisqu’elle-même ne trouvait pas l’énergie de se faire belle si ce n’était pour lui. Et elle avait simulé l’insouciance ; trempé ses lèvres dans tous les verres qu’on lui présentait, s’électrisant aux saveurs et dansant comme si rien d’autre n’existait. Avec une candeur d’enfant et une soif d’exister à nouveau. Pour, sans crier gare, tomber dans ces yeux là. Bleus et perçants, dans un écrin de cils pâles.
Ça n’avait rien à voir avec les Sentiments qui tiraillaient et effrayaient Lei. C’était son âme esthète qui s’éveillait, simplement. Paillettes rosées sur ses joues pâles tandis qu’elle se surprenait à se retourner constamment pour capter son rire, tandis qu’il s’appliquait à accaparer son regard. Il avait quelque chose d’électrique et d’attirant ; d’insaisissable comme les nuages de fumée qu’exhalait la foule. C’est pas un gars pour toi, quelqu’un lui avait affirmé entre deux battements issus des basses assourdissantes, en remarquant la façon dont elle se détournait, gênée, seulement pour l’observer à nouveau un peu plus tard. Pourtant lorsqu’il l’avait empêchée de trébucher un peu plus tard, il avait semblé candide et charmant et Lei s’était dit qu’avec un tel sourire, il ne pouvait pas être néfaste – si ? Naïve.
(NOW) Lei est un rayon de soleil. Son rire s’égrène comme des éclats de cristal, attirant des prunelles curieuses et faisant naître des sourires attendris sur les visages fatigués qui l’entourent, bref instant de bonheur partagé avec de parfaits inconnus avant que chacun ne reprenne sa routine où il l’a laissée. La nuit rabat déjà son manteau sombre sur le campus et pourtant, les couloirs de la Yonsei sont encore peuplés d’étudiants se pressant vers un cours tardif. Lei, elle n’est là que pour le soutien psychologique : sur le point de se glisser dans une salle de classe qui n’est pas la sienne, pour tenir une amie éveillée durant la prochaine heure à coup de bavardages et de gorgées de café. C’est pour la bonne cause alors elle ne rechigne pas à l’idée d’être coincée au fond d’un amphithéâtre plus longtemps que son propre emploi du temps ne l’exige, mais- comme un vieux remake d’un film un peu oppressant, un mouvement de tête la plonge dans des yeux bleus qui figent le sourire sur ses lèvres et troquent sa joie légère et insouciante contre de la surprise aux nuances de gris, d’angoisse.
Elle bifurque. Sans crier gare, sans s’expliquer, tourne les talons et se faufile en direction de la sortie du bâtiment, cœur pulsant à ses oreilles. Elle a le temps de franchir les doubles portes pour se retrouver à l’air libre, et même de dévaler les marches, avant qu’une poigne ne se referme autour de son poignet, interrompant son élan. Le pire, c’est qu’il n’a rien d’agressif. Ses iris sont toujours teintées d’une innocence trompeuse et sa bouche étirée en un demi-sourire qui l’oblige à lui en rendre un, timide. C’est ce qu’il y a de terrible avec lui : lorsqu’il surgit du néant, il retisse autour d’elle la toile d’une emprise dont elle ne sait se défaire. Ashvin, elle salue d’une voix douce, comme si elle ne venait pas de tenter de le fuir à l’instant, avant qu’il ne l’en empêche. Comme à chaque fois. Ça faisait longtemps… Et ça sonne si faux – comme s’il lui avait manqué, alors que non… n’est-ce pas ? Elle était bien sans lui, elle était mieux sans lui, sûre d’elle et capable d’affirmer que c’était fini, et pourtant la voilà à nouveau clouée sur place par sa simple présence. J’étais sur le point de partir, à vrai dire, elle tente de se défiler, sursaut de courage ou de lâcheté.