Don't worry, be happy [Libre]
Comme chaque matin, la première chose qu’Andrew fait en arrivant à la tarterie c’est de déverrouiller la porte d’entrée et de retourner le panneau Close/Open pour annoncer l’ouverture. Puis il mettait son tablier et se mettait au travail. Il aimait ces moments de calme. Il n’y avait que lui et sa cuisine. Il avait ses petites habitudes : il sortait du frigo les fruits qu’il avait épluchés et coupés la veille au soir et le beurre pour qu’il ramollisse et les posaient à côté de son café noir sur le plan de travail. Et ainsi commençait sa journée. Il avait une vie simple ici, sans problèmes ni complication et il adorait ça ! Sans s’en rendre compte lorsqu’il pétrissait la pâte il souriait. Un petit sourire en coin presque imperceptible dont seul lui avait le secret, mais quand même un sourire. Une heure plus tard Il Nam arrivait. Il aimait sa compagnie et surtout il aimait lui enseigner ce qu’il savait. C’était un bon élève, attentif et perfectionniste. Il avait l’impression de se voir quelques années en arrière.
Les clients arrivaient peu à peu. Les habitués se permettaient des familiarités avec le pâtissier. Andrew trouvait ça sympathique. Lorsqu’il avait le temps il se penchait sur le comptoir et discutait avec eux, ils riaient et parlait de tout et de rien. Il ne voyait que très rarement des non étudiants. A croire qu’il était le seul vieux dans cette ville. Mais il se sentait rajeunir auprès d’eux. De temps à autre ils lui racontaient ce qu’ils voyaient en cours. Quelques fois il ne comprenait pas bien mais très souvent il trouvait ça instructif. Lorsqu’ils étaient plus enthousiastes il leur donnait des énigmes et ils tentaient de répondre.
C’était une fin d’après-midi. Au fond à droite une table de quatre jeunes filles était prise. Elles riaient aux éclats. Au comptoir, un vieux monsieur prenait un espresso. Il Nam s’affairait en cuisine. Andrew pouvait s’octroyer une petite pause. Il prit une part de tarte à la pêche et à la chantilly avec son café noir habituel et se posa sur l’une des banquettes près de la porte. Quelqu’un entra, il entendit simplement le –ding- que la porte fait en s’ouvrant.
Il n’entendit pas le bonsoir du client qui venait d’entrer, il était trop prit dans ses pensées regardant les passant rentrant chez eux à l’extérieur. Il se disait que le ciel était beau. Il amena la tasse à café à ses lèvres et prit une légère gorgée, le café était encore un peu trop chaud pour lui. Il reprit ses esprits, sollicité par un jeune homme, et tourna la tête vers ce dernier la bouche légèrement ouverte de surprise comme prit en flagrant délit de rêverie. Il ne comprit pas immédiatement ses attentions, un peu lorsqu’on demande quelque chose à quelqu’un qui vient tout juste de se réveiller . Le pâtissier n’avait pas entendu la première phrase du jeune homme. < Hum…> Il regarda son assiette et releva la tête vers le jeune homme. < Oh, vous parlez de la… > le pâtissier regarda à nouveau sa tarte. < C’est une tarte aux pêches et à la chantilly aka la pécheresse. Vous êtes sûr de vouloir celle-ci ou vous préférez choisir autre chose dans la vitrine ? > Il lista le menu pour s’assurer que son client faisait le bon choix.
Le jeune homme était un peu perdu ? Andrew aurait mieux fait de donner directement le menu papier et détaillé à son client plutôt que le noyer dans ses paroles… Il était bien habillé. Ca devait etre un homme d’affaire, il était si chic comparé à Andrew. Il se sentait pouilleux face à lui avec sa tâche de jus de cerise sur le téton. En plus c’était sa chemise préférée… Blanche avec l’intérieur du col et la ligne des boutons bleu marine. Il avait voulu esquiver quelqu’un et avait renversé une partie de sa décoction sur lui-même. Il l’avait pressenti ce matin. Cette journée n’avait pas été la pire de la semaine, ni même du mois mais c’était comme s’il était déphasé par rapport à tout le monde.
< Erm. Ca dépend, vous préférez quand c’est très sucré ? Pour ça il y a celle-ci ? > Il désigna celle au chocolat, un classique même si elle n’était pas vraiment au gout de Andrew. < Si vous aimez le croquant, je vous conseille celle-là. > Celles aux noix de pécan. < Après il y a celle aux fruits rouges, c’est probablement la plus vendue. Mais personnellement, je vous conseille celle-là > Il montra du doigt celle au citron, la préférée d’Andrew. L’amertume du citron avec le sucrée de la pate sablée et l’onctuosité de la meringue, il ne pouvait pas y résister.
Andrew avait trouvé étrange le fait que l’étranger n’ait jamais mangé de pâtisseries occidentales. Il avait cette habitude de créer un passé, un présent et un avenir à tous ses clients. Celui-ci était un jet-setter. Ses parents étaient riches, probablement des banquiers ? Il avait deux sœurs, une plus agée et une plus petite. Il les adorait. Il était fiancé à sa copine de longue date. Ils s’étaient rencontrés à la fac et il n’avait pas été très fidèle. Mais elle avait réussi à lui pardonner et ils coulaient des jours heureux à présent.
Andrew se demandait sur quoi il s’était trompé. Il zieuta sur son annulaire. Pas de bague. Oops, raté.