Encore un coup, un de plus qui lui bousille le visage, qui l’assomme et l’achève un peu plus. Un coup de plus que Sang Jae ne sent plus. Anesthésié il ne ressent ni le poing de son adversaire sur sa joue ni la douleur que cela lui procure. Il ne ressent rien de spéciale si ce n’est ce vide qui l’englouti un peu plus jour après jour. Il aimerait bien qu’on lui arrache sa vie lui qui n’arrive plus à s’y tenir.  Alors il se noie dans ses combats de rue, frappant toujours plus fort, se faisant assez de thune pour se nourrir et payer son loyer. Il est en train de le crever, il le sait et Chujung aussi. Mais il n’arrive pas à écouter son meilleur ami, c’est tellement électrique entre eux en c moment. Non pas qu’il le déteste bien au contraire, sans lui Sang Jae aurait sûrement rendu son dernier souffle depuis un moment mais il n’arrive pas à l’entendre. Il ne peut pas tenir comme Chujung lui demande de tenir. Il s’est rendu à ce combat contre l’avis de son meilleur ami. Beaucoup lui aurait tourné le dos pour moins que ça et il savait dans le fond que son meilleur ami ne le laisserait pas tomber … pas comme ça. Mais il avait beau se convaincre de ça il ne cessait de le repousser, encore et encore … Il ne se sentait pas capable de l’affronter. Il avait honte de lui, honte de ce qu’il était de ce qu’il devenait. Il se sentait tellement vide à l’intérieure de lui. Il n’y avait que des étincelles qui réussissaient à le réchauffer mais dès qu’il était seul plus que  deux jours d’affilé ce vide revenait. Ce vide revenait et  lui donnait l’impression de crever. Drogue, cachet, lame de rasoir, corde … il avait pensé à tout. Une mort lente et douce, une morte longue, une mort douloureuse. Un pont, un train, des escaliers. Tout lui semblait tellement … attrayant, familier, salvateur … mais il lui manquait ce déclic, ce je ne sais quoi qui lui donnerait le courage de sauter, avaler, couper. Il n’arrivait pas à mourir alors qu’il se sentait déjà mort à l’intérieure de lui. Il s’en voulait presque de lâcher ceux qui l’aimaient, ce qu’il aimait. Mais il n’arrivait plus à trouver ça … suffisant. Sa vie ne tenait qu’à un fil et il tenait les ciseaux dans sa main pour le couper sans jamais réussir à accomplir ce dernier geste. Alors il tirait sur ce fil, de toutes ses forces pour qu’il craque. Il se redresse rempli de rage et latte son adversaire à ce combat de rue avec une férocité effrayante. Il sourit, de ses dents rouges sang et lui vole une victoire écrasante. Le troisième qu’il démonte ce soir. Il est fier de lui, il sent bien que son corps est sur le poing de craquer et ça lui plait … la foule présente est en furie, la cage dans laquelle il se trouve lui parait être un berceau correcte pour mourir. Il est torse nu, le corps couvert d’ecchymose. Le présentateur si on peut appeler ça enrage la foule présente et hurle à plein poumons « Qui osera l’affronter ?! Qui osera entrer dans cette cage pour affronter le champion de ce soir !! » C’était ouvert à tout le monde. Les paris faisaient rage et on pouvait se faire un paquet de thunes. Sang Jae crache du sang par terre et se tient droit, fier, attendant son prochain adversaire sans ciller. Qui serait assez fou pour affronter le fou qu’il était ?

/// une nouvelle nuit à errer dans les rues de séoul. le regard vide, froid, il continue d'avancer vers sa destination. le vent souffle sur son visage sans qu'il ne s'en soucie, il a plus important en tête. les rings, les cris des mecs trop bourrés en train de parier. des bruits qu'il connait par coeur, et qui l'animent, en tant normal. pourtant, ce soir, ce n'est pas pour lui qu'il s'y rend. ce n'est pas pour déverser sa colère, dérouiller quelques gars, se sentir mieux. c'est quelque chose de bien plus important qui l'amène ici. parce que depuis qu'il a mis les pieds sur le sol coréen, chujung fait de son mieux pour aider les autres, commencer le travail de toute une vie. sauver les âmes en peine comme la sienne. et même si parfois, c'est lui qui a besoin qu'on l'aide, il ne laisse jamais rien paraître, préfère s'occuper des autres plutôt que de s'acharner sur son sort. il veut simplement éviter aux autres de souffrir tout comme lui souffre, les empêcher de ressentir ce vide intense, cette douleur si lanscinante qu'elle en devient parfois incontrôlable. un bâton de nicotine glissé entre ses lèvres, il s'arrête une fois arrivé à destination. d'un geste rapide, il allume sa cigarette et observe le monde autour de lui. un monde souterrain, caché, dont beaucoup ignorent l'existence. un lieu où chacun trouve ce qu'il désire. violence, acharnement, alcool, paris. l'un de ces lieux lugubres que peu peuvent se permettre de cotoyer. son monde à lui, son échappatoire. la tête baissée, il tire une taffe avant de la recracher lentement. il peut entendre le bruit de coups donnés, la rage qui provient de cette cage. il sent l'odeur du sang, de la sueur, et s'en accomode, comme une éternelle habitude. « qui osera l’affronter ?! qui osera entrer dans cette cage pour affronter le champion de ce soir !! » la voix du présentateur retentit jusqu'à ses oreilles alors que le chinois relève finalement la tête vers ce spectacle qu'il ne voulait pourtant pas voir. son meilleur ami, celui qu'il aimerait sauver de cet enfer, couvert d'hématomes. un filet de fumée s'échappe d'entre ses lèvres avant qu'il reprenne une inspiration, jette ce bâtonnet au sol et l'écrase du bout du pied. sans un mot, il s'avance, passe à travers la foule, le regard noircit par le tableau en face de lui. il est conscient de sa force, conscient que seul un fou prendrait le risque de se dresser face à lui en cette fin de soirée. mais il sait qu'il n'y a que ça, pour réveiller un tant soit peu le peu d'envie de se battre réellement que sang jae pourrait avoir. il sait pourtant, qu'il risque cher en se retrouvant en face de lui, mais ne se démonte pas, et parvient à l'intérieur de la cage de fer, toujours en silence, la tête baissée. il prend place lentement, fait prolonger les cris des parieurs prêts à tout miser sur son vis-a-vis. mais il n'est pas là pour la victoire, pas pour cette victoire. droit, figé sur place, chujung finit par relever son visage vers celui qu'il considère comme son meilleur allié dans cette vie bien souvent trop misérable. son regard en dit long sur ce qu'il pense, ce qu'il attend de celui qui se dresse en face de lui. mais une chose est sûre, il ne lâchera rien, il encaissera les coups quoi qu'il arrive, et espère bien pouvoir raisonner un tant soit peu cette âme égarée qu'il tente désespérement de sauver.

Il n’a pas envie d’être sauvé Sang Jae, et ça Chujung l’avait compris depuis bien longtemps pourtant le chinois continuait de venir vers lui, de l’aider, de lui sauter dessus, de vouloir l’aider. Sang Jae avait beau lui dire de le laisser, avait beau tenter de le repousser, le chinois restait là, droit, sans ciller. Sang Jae n’arrive plus à le comprendre, si c’était de la pure folie ou du pur génie. Il avait besoin de quelqu’un comme Chujung, de quelqu’un qui soit là quoiqu’il arrive. Mais il détestait l’idée que quelqu’un puisse vouloir le sauver. Il sait, il voit, que Soon Young donnerait sa vie pour lui, il sait, il voit que Bago donnerait ce qu’il a de plus cher pour sauver Sang Jae et il sait, il voit, que Chujung n’arrêtera que lorsque le Coréen aura capitulé. Est-ce que Jae est prêt à ça ? Il est évident que non. Alors quand il voit son meilleur ami grimper sur ce ring le cœur de Sang Jae s’emballe, ni d’inquiétude, ni de surprise, mais d’une colère sourde. Une rage latente qui ne demande à sortir à la moindre occasion. Epuisé des coups, épuisé d’être enivré de cette impétuosité, Sang Jae aurait presque été capable d’abandonner, de lâcher prise, de quitter le ring, pourtant face à ce visage familier, face à l’idée même de pouvoir le frapper en toute connaissance de cause, le coréen se sent pousser des ailes. C’est à la fois malsain et si salvateur. Sang Jae fixe les traits impassibles du chinois. Il semble si déterminé. C’est parfaitement ce qu’il lui fallait. Sang Jae ricane et se met même à rire en levant les bras. Il fait le show, encourage la foule à hurler son nom avec plus de force. Il s’accroche au barreau et les secoues en poussant un râle animal. il sait qu’il pourra frapper aussi fort qu’il le faudra pour que Chujung arrête cette quête stupide. Sang Jae crèvera seul comme il l’a toujours voulu. Il le fera le jour où il trouvera le courage de se barrer. De dire adieu au peu de choses qui le maintiennent encore envie. Il grimpe sur la cage avant de sauter au sol en plantant son regard noir et carnassier de Chujung. Sa surprise a vite laissé place à une assurance débordante. Il crache le sang de sa bouche par terre et se rapproche à nouveau. Il lui fait signe de s’approcher de ses mains, provoquant. Il ricane, se moque ouvertement de  Chujung, qu’il aime pourtant comme un frère. Il se penche en avant, portant sa main à son oreille pour entendre la foule électrique mettre ses sens en feu. Elle est, elle aussi, sous le charme total de Sang Jae et malgré les hématomes sur son corps et son visage bien abimé il se redresse comme un roc prêt à se battre. La cloche sonne et Jae fait un pas en écartant les bras en croix, invitant Chujung à porter le premier coup.