Écouteur sur les oreilles, musique à fond, un coin du parc vide sans personne pour me déranger. Voilà ce qu'il me faut pour l'instant. Juste pour remettre mes idées aux clairs. Après tout depuis mars, je suis dans un autre monde. Je découvre la vie autrement, plus de voiture, moins de bateau. Trop de bruit, chose qui m'agace. Ou plutôt une des choses qui m'agace. Je vois des jeunes, vu leur uniforme, des lycéens fumer en cachette pas loin d'un mur. Je les surveille du coin de l'oeil depuis cinq minutes tout en regardant mes ongles. Ça aussi ça me fait étrange, du vernis mauve fluo. Je crois que je n'aurai jamais osé. Oh j'ai dû en mettre du rouge avant, ou même du transparents mais ça va pas avec mon éducation. Je reste plongés dans la différence entre ce que je prenais pour acquis et ce qui change en vrai. Quand le son des sirènes de polices me fait relever la tête. Le son me fait toujours peur, peur qu'on m'arrête même si je n'ai rien à me reprocher. Et pourtant, je me leve, quand même, tirer par la curiosité pour savoir ce qui a pu pousser ceux qui font respecter la loi dans cette ville à se déplacer.

TAG + Je venais tout pile de mettre la touche finale à ma dernière œuvre quand j’aperçus la voiture de police tourner au coin de la rue. Un sourire narquois aux lèvres, je fourrais mes bombes de couleurs dans mon sac à dos, issant le tout sur mon dos. Je commençais à descendre du bâtiment sur lequel j’étais grimpé pour exprimer mon art. Plusieurs jours que j’avais aperçu cet immeuble abandonné qui allait se faire détruire dans la semaine à venir. Un art éphémère mais si pur. J’avais voulu lui donner une seconde peau, comme un dernier adieu avant sa disparition définitive. Un dernier hommage silencieux à son honneur. J’avais signé de C qui caractérisait la plupart de mes graffitis. Maintenant, venait la partie sportive. Course poursuite avec les flics. Hors de question que je me fasse attraper, Il Sung m’avait prévenu qu’il ne viendrait pas me chercher au poste cette fois. Principalement parce qu’il travaillait cette nuit et qu’il ne pourrait pas venir avant le petit matin. Le premier agent de sécurité sortait de la voiture quand je posais pied à terre. Capuche relevé sur ma tête, je jouais avec les ombres pour qu’on ne reconnaisse pas mon visage. Et la course commenca… je ne fis pas plus d’une cinquantaine de mètres que je heurtais une jeune femme. N’ayant pas le temps avec les futilités de la politesse, je l’attrapais au vol, la tirant à ma suite. Je ris aux éclats, nous offrant une mélodie qui donnaient des ailes à nos jambes.

C'est idiot, je me mets au milieu du chemin comme ça. Pire, mes pieds sur leur pointe comme si je pouvais voir mieux dans la pénombre.
Chose qui n'a pas fonctionné, vu que quelqu'un me percute. Juste le temps de tout faire pour ne pas perdre l'équilibre qu'une main se saisie de mon bras. Pas de question maintenant, je comprends qu'il faut fuire, courir pour ne pas se faire attraper. Sans hésiter, je suis la silhouette qui me tire dans les dédales des rues et ruelles. Ça me rappelle des souvenirs pas si lointain et pourtant si loin. Nos poursuivants ne nous lachent pas, tant mieux. Si besoin je peux les mettre K.O avant de me rappeler que non, je n'ai pas le droit. Arrive le moment où on se retrouve dans un cul de sac, je fais lâcher mon poignet à la silhouette. Avant d'enlever mes chaussures que je lance de l'autre côté du mur. Avant de prendre de l'élan pour sauter, mes mains aggripe le haut pour me hisser sans problème. En califourchon, une jambe d'un côté du mur et l'autre de l'autre côté. Je tends ma main à la personne qui porte toujours sa capuche.Tu viens? avant de regarder où on atterrit mes chaussures et de grimacer. Bah, je retournerai au dortoir à pieds nu, car y a pas moyen que je porte des choses tomber dans une poubelle. Alors pas du tout.

Une course poursuite lors d’une fraiche nuit d’été. Il n’y avait rien de mieux que pour sentir l’adrénaline pulser dans nos veines. Le vent fouettait mon visage, mais je ne ralentissais pas la cadence pour autant. Étonnement, la jeune femme que j’avais embarquée dans ma course folle parvenait à me suivre sans grande difficulté. Peut-être était-elle une grande sportive ? ou quelqu’un qui aimait courir ? Dans les deux cas, il était rare de trouver quelqu’un qui pouvait suivre l’ouragan Camille sans broncher. Il était peut être fort de dire qu’elle commettait un exploit, mais presque. Jusqu’à ce fameux cul de sac où elle n’hésitait pas une seule seconde à grimper sur ses immenses barrières pour m’aider à la passer. Ce n’était pas la première fois que je passais par ici, je connaissais les rues du quartier quasiment par cœur en moins de trois ans. J’avais mes habitudes, mais une fois n’était pas coutume n’est-ce pas ? J’éclatais de rire face au tempérament vif que j’appréciais particulièrement de la jeune femme. Je jetais un coup d’œil à alors derrière nous alors que deux policiers peinaient à se frayer un chemin dans l’obscurité bousculant les poubelles sur leur passage. « Et comment que je viens ! » m’exclamais-je un sourire aux lèvres. Je pris mon élan, sautant sur le mur pour faire tremplin de mes pieds, j’attrapais la main qu’elle me tendait, me hissant à mon tour sur la barrière. Je me laissais glisser de l’autre cote, me laissant tomber au sol. J’aperçus ses chaussures tombées dans la poubelle. Je fis une grimace face à la scène. Si j’étais elle, je toucherais plus à cette paire, d’autant plus qu’une masse liquide non identifier s’agglutinait autour d’elles. J’attrapais mon sac à dos, faisant tinter mes bombes de couleurs, j’en sorti une paire de basket. Je les lui donnais. « Je prévois si jamais j’avais un soucis. Prends-les, elles te serviront plus à toi qu’à moi. » Je jetais un coup d’œil derrière nous à la hâte, les pas lourds des flics se rapprochant dangereusement.

Au-dessus du mur, ma main se tend vers l'inconnu qui est une inconnue vu son timbre de voix. Un sourire appréciateur sur mon visage en la voyant prendre son élan pour me rejoindre. Quelques instant après, je la rejoins de l'autre côté, me préparant à courir pied nue. Sauf qu'elle me tend une paire de basket que je prends dans hésité. Merci Je sais même pas si je le dis ou le le pense alors que je les enfile. Puis ni une ni deux, on se remet à courir. Il faut qu'on aille sur une voie publique. Il nous suffira après de faire croire que nous faisons du shooping.

Cinq minutes après on tombe sur un marché nocturne. J'arrête de courire et me retourne vers ma camarde d'infortune pour lui enlever sa capuche. A cet instant les policiers arrivent, et je nous emmène vers un stand de t-shirt. Alors la couleur pour moi? Oui ou non? J'espère qu'elle va suivre le jeu. Il faut pas qu'on se fasse remarquer.

Heureuse d’avoir pu aider ma nouvelle partenaire du crime, qui s’était principalement retrouvé dans cette situation par ma faute, je souris satisfaite qu’on fasse la même pointure. La course folle reprenait. Je pensais sincèrement qu’elle m’aurait abandonné à la première occasion comme l’aurait fait toute personne normale. Apres tout, une étrangère l’avait embarqué dans une aventure qui n’était pas la sienne. Et pourtant, elle ne quittait pas le navire. Elle usait de la même technique de ruse que j’utilisais pour me sortir de ce genre de course poursuite. C’était d’ailleurs ainsi que j’avais rencontré mon petit ami que j’avais embrassé sur un coup de tête pour faire croire que nous étions un jeune couple sur le point de nous envoyer en l’air dans une ruelle sombre. Ce qui avait fait fuir les policiers qui n’avaient pas demandé leur reste. Ici, l’idée du marché nocturne était du même concept. Jouant le jeu dans lequel elle m’embarquait à son tour, j’attrapais un t-shirt d’une autre couleur, le flanquant sur son buste. « Je trouve que le bleu te correspond mieux. » Les policiers passaient derrière nous, cherchant leurs fugueurs du regard. J’entendis un pester, insultant l’autre de son incapacité, ajoutant qu’il devait arrêter les donut’s pour un moment. Je me retiens de pouffer de rire, redéposant le t-shirt sur le stand une fois la menace passée. « Bien joué. » la félicitais-je avant de lui tendre une main, saisissant de la sienne sans vraiment lui demander son avis. « Je m’appelle Camille, j’ai eu de la chance de tomber sur toi ce soir. » Jetant un coup d’œil aux alentours, je cherchais un étalage qui proposait de la nourriture. Je la tirais à ma suite. « Tu as faim ? Je mangerais bien comme quatre. »

Je m'attendais pas à devoir un jour courir pour ne pas être arrêter. Pas que j'avais fait quelque chose de grave, juste que je me suis retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment. Logiquement, j'aurai pu fausser compagnie à celle qui avait quelques soucis avec l'autorité du pays. Sauf que ça me rappelait mes etudes, quand je faisais le mur avec le meilleur ami de mon frère. Bon, cette fois-ci je n'ai pas l'uniforme de l'étudiant militaire sur le dos. Mais la technique est la même. Devant le stand de vêtement, j'en prends un et le pose devant moi attendant une réponse sans la regarder. Sa réponse me fait sourire. Bleu? Tu es certaine. On voit les policiers passer derrières nous, et je payes le t-shirt avant de regarder l'inconnue qui ne l'est plus. Eun Sil dis-je d'une voix surprise ne comprenant pas pourquoi elle me tend la main. Puis c'est là que je constate qu'elle n'est pas coréenne. Je cligne des yeux encore une fois. Manger pour quatre? Mon regard descend sur son sweat essayant d'imaginer la raison. Tu es enceintes et tu cours. Oui, y a des expressions sur j'ai du mal à comprendre encore. Tu devrais plutôt te reposer. Je cherche un endroit où elle pourrait s'assoir en tournant sur moi-meme. Mais y a trop de gens, ce qui m'arrache une grimace contrarier. Haa mais ils arrêtent pas de marcher partout. Je saute à pied joint pour essayer d'appercevoir un lieu où la future maman pourra se reposer.

Les policiers une fois distancée, plus question de jouer au chat et la souris. Etonnée de voir ma nouvelle amie payée le t-shirt dont je lui avais conseillé la couleur lors de notre couverture me fit sourire. Elle devait vraiment bien l’aimer ce t-shirt. Deux pierres d’un coup comme dirait l’autre. Je lui proposais de lui payer un repas pour la remercier de sa complicité. Geste qui aurait pu surprendre, mais ce qui la dérangeait parut être le fait que je dise pouvoir manger pour quatre. Pour ma part, ce fut la réaction qu’elle n’eut pas la suite. Je baissais les yeux sur mon ventre, ne comprenant pas toute de suite. Je lisais mon sweatshirt avant d’enlever le haut et de tirer sur mon dessous vers le bas. « Tu trouves que je suis grosse ? » demandais-je sérieusement choquée, fixant toujours sur ventre sur lequel se perdait d’infimes bourlets qui semblaient être énormes. Je relâchais le tout, gonflant les joues. « Il Sung me disait que j’étais parfait, pas un gramme en trop. Quel goujat ! Menteur ! Merci de m’avoir dit la vérité. » Souriais-je quelque peu complexé face à son corps qui me semblait si parfait à côté du bien. « Tu peux arrêter de te moquer de moi maintenant. Je ne suis pas enceinte, mais merci d’avoir d’abord penser à cela plutôt que je pouvais être naturellement grosse. » Au sourire aux lèvres je la regardais sautiller sur place. « Je pense que je vais plutôt te regarder manger. Tu as envie de quoi ? »

Y à des expressions dont j'ai vraiment du mal, manger pour quatre. Dans ma tête, ça veut dire qu'elle est enceinte. Je la regarde surprise, cherchant la preuve tout en lui posant la question. D'accor, mon côté social est à retravailler vu que je suis confuse à sa question. Grosse ? Mais elle est pas grosse. Puis, elle se met à me parler d'une personne inconnue pour moi. Je sautille pour chercher après une place où elle va pouvoir se reposer quand la vérité tombe. Oh ! Et je lui souris, croisant les bras comme l'adolescente que je devrais être. Tu n'es pas grosse du tout et désolée, je connaissais pas l'expression. Puis à ce que je veux manger, je lui montre du doigt un restaurant de poulet frit. Ça mais tu manges avec moi.. Eunie. Et sans lui laisser le temps de protester, je lui attrape la main et la tire jusqu'à l'intérieur du restaurant. Dis, tu faisais quoi avant notre rencontre?

Alors que je ruminais encore sur Il Sung qui ne faisait que me mentir depuis tout ce temps, je ne remarquais pas que la jeune femme était confuse. Je lui jetais un coup d’œil avant de remarquer sa posture. Je tournais la tête sur le côté, me demandant un instant ce que j’avais raté. « L’expression ? » demandais-je à mon tour tout aussi surprise qu’elle. Qu’est-ce que j’avais dit qu’elle n’avait pas compris. Je réfléchis un instant avant d’éclater de rire. « Sorry, je viens d’Amérique, il m’arrive parfois d’oublier qu’on ne parle pas forcement de la même manière ici. Il est fréquent que j’invente des mots aussi qui n’ont pas de similitude. Je suis désolé pour cette confusion. Ca veut juste dire que j’ai énormément faim. » La suite se déroula assez rapidement, car la jeune femme ne me laissa par répliquer qu’elle me tirait déjà à sa suite vers un stand de poulet frit. Mmmmmmh, j’en connaissais un qui allait être jaloux. Je répondis à sa question alors que nous faisions la file. « Disons que j’embellissais les murs de Séoul. » déclarais-je sur un ton théâtral, faisant un geste du bras pour désigner les bâtiments entourant. Je ris à la vue de sa tête avant d’ajouter. « Je pratique l’art de la rue plus communément connue sous le nom du tag. »