la sonnerie de ton réveil te tire de ton sommeil. tu bailles, ouvrant lentement et difficilement les yeux. « bon anniversaire min hee » que tu murmures encore ensommeillée à ta sœur. tu sais qu’elle t’entend de là où elle est et qu’elle veille sur vous. alors, tu le dis comme chaque année, parce que c’est aussi son anniversaire et que tu ne veux pas l’oublier. tu bailles à nouveau alors que tu changes de position dans ton lit. tu t’es couchée tard hier soir, pour finir le t-shirt que tu prévois de lui offrir pour son anniversaire. mais ce n’est pas tout ce que tu veux faire pour yury en ce jour spécial. c’est pour ça que tu t’es levée si tôt. il n’est que sept heures et après t’être étirée comme un chat dans ton lit pour chasser les dernières traces de sommeil, tu sors de tes draps. t’attaches tes cheveux dans une queue de cheval à la va vite avant d’enfiler un bas de jogging. tu vas cuisiner, t’as pas le temps de bien t’habiller. tu descends donc dans la cuisine, les écouteurs dans les oreilles alors que tu écoutes les derniers comebacks de tes groupes préférés. tu te dandines sur place, attrapant les ingrédients pour faire le gâteau préféré de yury, un gâteau au chocolat. tu commences la préparation avec le sourire aux lèvres et tu ne mets pas plus de dix minutes à faire la pâte. t’enfournes le tout au four et tu mets le minuteur. quarante-cinq minutes. t’auras jamais le temps de tout faire pendant ce temps-là, mais c’est pas grave. t’entreprends de tout ranger derrière toi. hors de question de laisser de la farine partout ou même de ne pas laver les ustensiles que tu as utilisé. tu passes même un coup de balai dans la cuisine pour ramasser ce que tu as fait tomber. t’as beau être douée de tes mains pour coudre, la cuisine c’est pas vraiment ton fort. mais pour ton grand frère, tu es prête à tout. une fois que la cuisine étincelle, tu te diriges vite fait dans ta chambre pour récupérer tes affaires avant de passer à la douche. tu as toujours un sourire sur les lèvres, même si l’angoisse prend petit à petit le contrôle de ton corps. et si yury n’aimait pas ? et si comme toutes les autres années, il partait et te laissait seule ? tu sais pas si cette fois tu accepterais et arriverait à lui pardonner. cette année, c’est la dernière fois. tu te l’aies promis. certes, tu as besoin de ton frère. mais tu ne peux plus souffrir de la sorte. après sept ans, tu as fini de lui courir après. ton cœur ne supporte plus ses changements d’humeurs à cause de min hee. tu comprends sa douleur, tu la vis toi aussi, mais t’as appris à faire avec. yury dans son malheur, il a de la chance, t’es là pour lui. toi, tu as perdu ton frère et ta sœur ce jour-là. tu pousses un soupir en secouant la tête. « reste positive jin hee. » que tu te dis alors que tu chasses toutes les pensées parasites de ton esprit. tant que yury ne t’aura pas rejeté encore une fois, ou accepté de passer son anniversaire avec toi après sept ans, tu dois garder espoir. tu vas passer une bonne journée, une très bonne journée même. tu le sens. une fois ta douche finie, tu enfiles rapidement une des robes que tu as crée et tu brosses tes cheveux doucement et avec précision. tu ne veux pas ressembler à une guenon pour l’anniversaire de ton frère. tu les remonte en un chignon élégant. lavage de dents et un peu de maquillage et le tour est joué. encore une fois, tu prends le temps de ranger derrière toi. tes vêtements sont mis dans les corbeilles de chaque couleur et les cheveux présents sur ta brosse dans la poubelle. c’est bon tu as fini. c’est avec un sourire que tu sors de la salle de bain, passant dans ta chambre pour récupérer le cadeau emballé avant de te diriger vers la cuisine. le gâteau est prêt et tu le sors du four. tu le démoules pour le poser sur une assiette avant de sortir les bougies que tu as acheté pour l’occasion. vingt-trois, parce que c’est l’âge qu’il a et l’âge que min hee aurait eu. tu les plantes sur le haut de ta pâtisserie. t’es fière de toi. maintenant il ne reste plus qu’à ton frère d’arriver. tu regardes l’heure et il n’est que neuf heures. t’as encore le temps et quand ta mère se réveille elle te regarde admirative. elle t’encourage même et tu souris. elle sait ta mère comment tu te sens à cette période de l’année. elle sait mais elle ne dit rien parce que tu ne lui as jamais parlé de ça. t’as beau être fusionnelle avec elle, ça tu peux pas lui dire. c’est trop personnel, trop ancré en toi pour que tu lui parles de ce que tu ressens par rapport à la situation. « tu vas voir min hee ? » que tu demandes avec un sourire triste sur le visage. elle hoche la tête, répondant par un sourire triste. tu la prends alors dans tes bras. « passe lui le bonjour. » tu ajoutes, comme si elle allait voir une vivante et pas une morte. ta mère embrasse ta tempe avant d’aller mettre ses chaussures. elle est vite rejointe par ton père qui t’embrasses lui aussi. tu souris devant ce tableau. malgré les épreuves, ils sont restés ensemble et s’aiment toujours comme au premier jour. ça te fait du bien de les voir heureux comme ça malgré que ce soit le jour de leur anniversaire. tu les regardes partir main dans la main et tu espères qu’un jour tu trouveras quelqu’un d’aussi bon que ton père et qui te regardera amoureusement, même après des années avec toi. t’entends du bruit en haut. yury est réveillé, mais il ne descendra pas de suite. tu le sais, tu le connais ton frère. en attendant qu’il daigne sortir de sa chambre, tu entreprends de faire un peu de ménage. et ce n’est qu’après quelques heures qu’il pointe enfin le bout de son nez. ton visage s’illumine alors que le sien est tiré. tu te doute qu’il n’a pas dormi. tu t’approches de lui, l’enlaçant en déposant un baiser sur sa joue. « bon anniversaire yury. » que tu murmures alors que tu lui prends la main pour l’amener dans la cuisine où le gâteau trône fièrement à côté de son cadeau. « c’est pas grand-chose, mais je voulais vraiment faire quelque chose pour toi. » et tu souris encore pleine d’espoir pour cette journée.

ça doit bien faire vingt minutes que tu fixes le plafond, vingt minutes que tu as ouvert les yeux. tu n'as même pas bougé, tes dents sont serrés, à croire que tu es en colère mais ce n'est pas le cas, t'es juste triste et très peu courageux d'affronter cette journée qui te sera beaucoup trop difficile. pourquoi cette année est plus difficile que les autres ? t'en sais rien. tu passes toujours son anniversaire seul, loin de tout le monde mais cette année, tu n'as même pas envie d'essayer de fuir ton mal-être. sûrement parce que ta vie a été un sacré bordel ces derniers temps et puis... tu commences à toucher le fond, concernant ta sœur jumelle. t'en peux juste plus de vivre comme ça mais tu ne fais rien pour arranger les choses, déjà parce que tu ne t'en rends pas vraiment compte mais aussi parce que... tu ne peux rien faire. pour toi, la seule solution serait de la ramener mais c'est impossible. tu es condamné à vivre avec ce lourd poids sur le cœur, à passer tes anniversaires seul. parce que oui, tu sembles en oublier ton propre anniversaire. mais après ces longues minutes, tu puises ton courage tu ne sais où pour ne serait-ce que t'asseoir sur le rebord du lit, et tu restes immobile pendant plusieurs longues minutes, fixant ce point invisible sur le sol. tes bras entourent ta taille, une boule au ventre, une envie de pleurer incontrôlable, une envie de disparaître de la surface de la planète car aujourd'hui et comme chaque année, tu ne pourras pas faire semblant. min hee, c'était ta moitié, vous étiez comme le yin et le yang. des inséparables. séparez les et les deux se laisseront mourir, et c'est exactement ce qu'il se passe. tu passes ton temps à repousser l'échéance pour ne pas affronter cette difficile vérité : ta moitié s'est éteinte à tout jamais. tu souffres, t'as mal, mais tu sais que tu n'affrontes pas cette affreuse vérité. t'as pas fait le deuil, pas encore. et puis, c'est quoi faire le deuil ? accepter la mort de ta sœur ? soyons honnête, tu ne l'accepteras jamais. alors oui, aujourd'hui et comme chaque année, tu as besoin d'être seul. pour toi mais pour tout le monde aussi, tu ne seras qu'une épave aujourd'hui, il vaut mieux que tu partes. alors tu te diriges dans la salle de bain, y passant une bonne heure à l'intérieur comme à ton habitude sauf que cette fois, tu es d'autant plus long, sûrement parce que tu n'as pas envie d'affronter cette journée qui n'a rien de joyeuse, c'est pourtant ton anniversaire mais ça, tu l'oublies. en même temps, tu n'as pas très bien dormi... pour le peu de temps que tu as fermé l'oeil, cette boule au ventre et cette envie de vomir t'en empêchait, ton cerveau fonctionnant un peu trop aussi. tu retournes alors dans ta chambre, attrapant ton casque déjà prêt à partir avant de daigner descendre les escaliers, tu déposes ton casque près de l'entrée avant de chercher ta veste du regard, ton regard se pose alors sur ta petite sœur. ton visage noyé de tout ce mal-être, même un sourire ne pourrait pas cacher l'émotion que tu ressens face à cette journée. pourtant, ta petite sœur vient t'enlacer en déposant un baiser sur ta joue. « bon anniversaire yury. » oui, c'est vrai, c'est ton anniversaire aussi. tu souris discrètement, un sourire presque invisible, qui se veut sincère mais tu n'y parviens pas, tu te sens bien trop mal et tourmenté par tous ces sentiments affreux. t'es quand même content de voir ta petite sœur même si tu sais que tu auras besoin d'être seul, comme d'habitude. jin hee t'attrape alors la main pour t'emmener dans la cuisine où tu y vois un gâteau à côté d'un cadeau. « c’est pas grand-chose, mais je voulais vraiment faire quelque chose pour toi. » ça te touche, ça te fait vraiment plaisir. comment tu pourrais rester insensible face à la bonté de ta petite sœur ? heureusement qu'elle est là, tu ne sais définitivement pas ce que tu ferais sans elle, mais bon sang, tu ne remarques même pas que tu agis de la pire des manières avec elle. tu souffres et tu l'embarques avec toi. « c'est gentil jin hee... » dis-tu sincèrement, ta voix trahissant également ton état. oui, tu es sincère mais ça t'attriste encore plus, dans un sens. tu sais que tu ne pourras pas rester et malgré ce qu'on peut croire, c'est difficile pour toi de la repousser. tu ne le fais pas par plaisir, pour preuve : tu ne t'en rends pas compte. elle a l'air si contente d'avoir tout préparé, et tout ça juste pour toi. ouais, ça te déchire le cœur de t'avouer que tu ne peux définitivement plus passer un anniversaire en compagnie de quelqu'un, mais surtout de ta sœur. tu ravales difficilement ta salive, posant ton regard sur elle. ça ne devrait pas être un effort surhumain pour toi de lui sourire, mais ça l'est pour toi aujourd'hui. tu te laisses submerger par toute cette tristesse au lieu d'essayer de la confronter, sans doute parce que tu es persuadé que ça sera un combat sans fin. tu as envie de partir, parce que tu sais les efforts que tu devras faire si tu restes ici et tu en as pas la force. mais t'es partagé, tu ne peux pas partir comme un voleur, pas tout de suite, tu le refuses. « c'est mon préféré ? » lui demandes-tu d'un ton qui se veut innocent mais encore une fois, vite effacé par ta mine de mec assommé par la douleur. tu t'approches du gâteau, tu sens cette prison se resserrer autour de toi, tu sais que tu ne pourras pas rester longtemps ici, avec ta famille qui pourtant, est le centre de ton monde. tu es seul, et inconsciemment, c'est uniquement de ta faute. et là tu es avec ta petite sœur, ton petit soleil comme tu aimes l'appeler, qui s'est démené à faire un gâteau pour toi. alors non tu ne partiras pas tout de suite, tu attendras la dernière minute bien que tu sais qu'elle arrivera plus tôt que prévu, t'es beaucoup trop sensible aujourd'hui, et tu te laisses facilement noyé par cette douleur qui te hante depuis des années. pour preuve : tu n'oses même pas prendre place sur une des chaises et t'installer ici, tu ne sais pas quand tu arriveras au bout de tes forces, tu es déjà si proche d'éclater de peine. t'as pas envie de le faire au visage de ta petite sœur. tu tournes ton visage dans sa direction, regard rapidement dévié sur une mèche de ses cheveux qui a encore un peu de farine. tu ne tardes pas à approcher ta main pour lui retirer. tu la trouves mignonne, c'est une petite femme maintenant. le temps passe vite... « t'as encore de la.. » tu te stoppes, ton visage se fige. tu pensais d'abord que c'était une mèche de cheveux mais ce sont les lettres que tu parviens à lire sur la peau de ta petite sœur qui te paralyse. t'as du mal à comprendre, tu fronces les sourcils et ton cœur lui, commence à s'agiter. de panique ? sûrement. tu la vois partout, c'est ça ? mais c'est quoi ça ? un tatouage ? pas possible, tu l'aurais vu. tes pensées débitent, t'as même pas le temps de te rendre compte que c'est tout à fait possible puisque tu ne la vois pas souvent ses cheveux détachés, mais t'as peur de comprendre... non, tu ne veux pas comprendre. « c'est... quoi ? » lui demandes-tu, ton regard encore rivé sur ce qu'il te paraît être un tatouage, tu crois rêver car aujourd'hui, t'as bien du mal à tout assimiler, mais non, tu ne rêves pas, et ton cœur se resserre davantage dans cette prison qui te sert de cage thoracique.

tout est prêt. tu y as mis tout ton cœur et tu espères que cette fois, tu arriveras à toucher le sien de cœur. tu sais que cette journée est difficile pour yury, comme elle l’est pour toi. mais ça fait sept ans. tu ne lui demandes pas d’oublier min hee, ce serait trop cruel et toi-même tu ne peux pas le faire. mais tu veux juste qu’il avance, avec toi main dans la main, vers le futur. sauf que c’est sûrement trop demandé. tu le connais ton frère. il est trop coincé dans le passé. mais cette fois, tu pries pour que ce ne soit pas le cas. c’est pour ça que tu as peu dormi cette nuit et que tu t’es levée si tôt pour préparer son gâteau. t’es pas la meilleure cuisinière mais tu sais au moins faire ça. ta mère t’a montré de nombreuses fois. alors, maintenant t’as plus qu’à prier pour qu’il arrive et qu’il reste avec toi. tu le sais que ce ne sera pas facile pour lui, mais tu veux essayer encore une fois, une dernière fois. ouais c’est la dernière fois que tu fais un pas vers lui. tu en as marre de souffrir toute seule dans ton coin. tu as besoin de ton grand frère, plus que de n’importe qui d’autres dans ta vie. mais il ne semble pas s’en apercevoir. alors, c’est le dernier pas que tu feras dans sa direction. après, tu le laisseras tranquille, tu n’essaieras plus. tu es épuisée par toute cette lutte silencieuse que tu fais depuis sept ans maintenant. parce que tu as du te reconstruire toute seule, sans l’aide de yury qui était présent sans réellement l’être. tu as grandi sans lui, devenant cette femme forte à l’extérieur mais totalement brisé à l’intérieur. il suffirait d’un mot, d’un geste de la part de yury pour que tu craques, ouvrant les vannes de ton malheur. tu attends donc que ton aîné daigne se montrer et quand il le fait, ton cœur se serre devant l’image que tu as sous les yeux. il a son casque de moto dans la main. comme tu le pensais, il allait partir, te laissant une nouvelle fois seule. tu ravales les larmes qui pointent à tes yeux pour afficher un sourire enjoué sur ton visage. avec les années, t’as appris à jouer la comédie, même si tu ne sais toujours pas mentir. mais tu arrives plus ou moins à prétendre que tout va bien. tu prends donc yury dans tes bras, déposant un baiser sur sa joue pour lui souhaiter bon anniversaire. tu sais qu’il voudrait partir maintenant, mais tu ne lui en laisses pas le temps. tu n’as pas fait tout ça pour rien. alors, tu lui prends la main le menant dans la cuisine, toujours un sourire aux lèvres alors que tu lui présentes le cadeau que t’as préparé spécialement pour lui et le gâteau au chocolat, son préféré. sa voix se fait enfin entendre et tu vois le bout du tunnel, l’espoir qu’il reste avec toi. tu sais que ce n’est qu’une illusion et qu’il fait ça pour être gentil. parce que tu vois bien dans ses yeux toute la douleur qu’il ressent et cette envie irrépressible de quitter la main. ça te fend le cœur de le savoir si près de toi et en même temps si loin. tu te rend bien compte que ça le touche que t’aies fait des efforts, mais ce n’est pas assez pour le faire revenir près de toi. rien n’est jamais assez pour le récupérer. tu sens une boule se former dans ta gorge alors que tu vois les rouages de son cerveau. il est sûrement en train de se demander comment il va faire pour partir sans te blesser et c’est justement ça qui te blesse le plus. t’aurais presque préféré qu’il s’en aille directement plutôt qu’il essaie. ça aurait été plus facile à supporter, comme un pansement qu’on arrache d’un coup sec. la voix de ton grand frère te sort de tes pensées et tu souris, posant sur tes lèvres se faux sourire que tu arbores souvent depuis la mort de min hee. « oui c’est celui au chocolat. maman m’a donné la recette qu’elle faisait. je pense pas qu’il soit aussi bon que le sien. mais je voulais le faire moi-même pour l’occasion. » parce que c’est son anniversaire, parce que tu veux le toucher et l’avoir près de toi pour cette journée. tu ne remarques pas les yeux de yury qui se posent sur ton tatouage, tatouage que tu as pris soin de toujours lui cacher et ce n’est que lorsqu’il avance sa main dans cette direction et qu’il le touche presque que tu recules comme s’il t’avait brûlé, la paume contre le tatouage. tu défais alors rapidement tes cheveux pour le cacher encore une fois à sa vue. pourquoi aujourd’hui ? ça fait des mois que tu l’as, depuis le mois de février, depuis ton anniversaire et sa mort. tu avais jusqu’à maintenant réussi à lui cacher parce que tu ne voulais pas qu’il souffre. mais pourquoi aujourd’hui, t’as fait cette erreur de remonter tes cheveux ? tu pousses un soupir quand il te demande ce que c’est et tu baisses les yeux, évitant son regard. tu ne peux pas mentir, il l’a vu. « c’est un tatouage. » que tu murmures, sachant très bien qu’il va redire quelque chose. « avant que tu t’enflammes, papa et maman sont au courant, ils l’ont payé. et c’est aki qui m’a aidé à trouver le salon, tout était safe. » tes parents n’avaient pas été enchanté à l’idée que tu te fasses un tatouage, mais vu que c’était quelque chose de discret et en rapport avec min hee, ils avaient cédé t’offrant ce lettrage pour ton anniversaire, pour tes dix-neuf ans. cependant, malgré tes mots, tu sais que ce n’est pas parce que tu t’es faite tatouée qu’il dira quelque chose. c’est parce que ça a un rapport avec elle, avec min hee la personne tabou dans la maison. tu sais qu’il a vu les lettres, qu’il en a compris le sens. pourtant, tu n’en fait pas mention. toi plus que quiconque sait que prononcer son nom revient à dire au revoir à yury. et tu ne veux pas qu’il parte, pas aujourd’hui, pas alors que t’as besoin de lui. alors, pour changer de sujet tu te retournes, attrapant les allumettes et tu allumes les bougies sur le gâteau une à une, les mains tremblantes alors que tu te mors la lèvre inférieure, le visage caché par les mèches de tes cheveux détachés. « souffles les toutes d’un coup après ton vœux et ouvre ton cadeau. » que tu dis, relevant les yeux pour fixer un point au-dessus de son épaule. t’évites son regard et ton sourire sonne de plus en plus faux. tu n’arrives plus à jouer la comédie et tu viens placer tes mains dans ton dos pour essayer d’en calmer les tremblements.

« oui c’est celui au chocolat. maman m’a donné la recette qu’elle faisait. je pense pas qu’il soit aussi bon que le sien. mais je voulais le faire moi-même pour l’occasion. » tu souris un peu trop discrètement, tristement, mais c'est un sourire naissant qui se trouve sur tes lèvres parce que oui, ça te touche. tu as bien envie de lui dire qu'il sera aussi bon sans aucun doute puisqu'il est fait avec amour, car non, tu ne restes pas insensible face à tout ce que ta petite soeur a fait pour toi, ô combien c'est difficile pour toi d'affronter cette journée qui s'avère être une des plus difficiles que tu n'aies jamais vécu. pour preuve, ton sourire vient très vite s'effacer lorsque tu aperçois sa peau tatouée. tu es d'abord surpris, tu as du mal à croire que tu vois réellement un tatouage. jin hee tatouée? tu serais au courant tout de même, non? tu t'es tant éloigné que ça? ouais, ça, tu ne t'en rends pas compte, mais les initiales de ta sœur jumelle, tu les lis distinctement. « c’est un tatouage. » te confirme t-elle après avoir défait ses cheveux de manière à ce que tu ne le vois plus, mais toi, t'es comme paralysé par ce que tu viens de voir, t'as du mal
à y croire. « avant que tu t’enflammes, papa et maman sont au courant, ils l’ont payé. et c’est aki qui m’a aidé à trouver le salon, tout était safe. » tu étais bel et bien le seul à ignorer que ta petite sœur avait un tatouage. le pire? tu ne peux même pas lui reprocher ça, tu le sais au fond de toi, quand ça concerne ta sœur jumelle, ta famille fait très attention. sans doute parce qu'ils savent que tu n'as pas encore fait ton deuil, contrairement à toi. pour preuve, tu restes encore sans voix, ça t'en fait froid dans le dos. tu plisses les yeux, t'as l'impression d'avoir reçu un coup en plein cœur. ce n'est qu'un tatouage oui, et tu ne sais pas ce qui te fait le plus mal là. de savoir qu'ils t'ont tous cachés l'existence de ce tatouage ou qu'il soit en rapport avec min hee, peut-être un peu des deux mais dans les deux cas, ce n'est pas de sa faute. c'est même plutôt de la tienne, alors la frustration s'y mêle que trop facilement alors que ta petite sœur tente en vain de changer de sujet, peu discrète cela dit, elle ne veut sans doute pas que ça gâche tout mais comment pourrais-tu fermer les yeux sur ce que tu viens d'apprendre? tu restes toujours immobile, tes yeux posés sur le gâteau mais ils sont plutôt perdus dans le vide, tout comme tu es perdu dans tes pensées. « souffles les toutes d’un coup après ton vœux et ouvre ton cadeau. » tu restes de nouveau silencieux avant de daigner replonger ton regard dans le sien, enfin, c'est ce que tu croyais, elle t'évite du regard... sans parler de son sourire qui se fait de plus en plus faux, ou plutôt non, mal à l'aise. « tu n'allais pas me le dire? » lui demandes-tu alors qu'une boule se forme au fond de ton ventre. peut-être parce que tu te rends compte que tout ne se passe pas aussi bien que tu le pensais entre jin hee et toi. tu marques une courte pause, submergé par l'émotion alors que cette cage invisible t'emprisonne un peu plus. « c'est... » un court instant d'hésitation. « c'est les initiales de min hee? » tu ne prononces jamais son nom, tu sais très bien l'effet que cela peut avoir sur toi, à quel point ça peut te rendre au plus mal. mais soyons honnête, aujourd'hui, rien ne va, tu ne vas même pas essayer d'aller bien. à quoi ça sert ? c'est son anniversaire. tes paroles résonnent dans ta tête et sont le déclencheur, puisque tu finis par te reculer brusquement, prenant une profonde inspiration. « je vais faire un tour. » tu ne reviendras pas, pas avant ce soir et ça, tu le sais. mais tu commences à étouffer dans cette douleur, en plus d'avoir appris l'existence de ce tatouage, tu commences à te faire beaucoup trop de films. alors tu quittes vivement la cuisine, comme si tu tentais de t'échapper d'un vilain piège, on peut même y ressentir la panique dans tes gestes mais là, tu es à deux doigts d'exploser de chagrin.

toi qui voulais éviter tout faux pas, tu en as commis un en remontant tes cheveux. tu savais qu’il réagirait mal en le voyant. tu sais que ce serait fini à l’instant même où il poserait les yeux dessus. il n’a pas fait le deuil de min hee et tu le savais. cependant, t’as fait une erreur monumentale alors que tu détaches tes cheveux pour cacher ce tatouage. pourtant ça fait des mois que les initiales romanisées de ta grande sœur ornent ton cou, derrière l’oreille. des mois que tu les caches à yury. en plus t’as longtemps hésité avant de le faire, parce que t’as la phobie des aiguilles. tu t’es toujours cachée derrière ton grand frère quand tu devais faire une prise de sang, pleurant toutes les larmes de ton corps. il le sait que tu as peur. mais tu voulais quelque chose de min hee ancré en toi. pas que tu aies peur de l’oublier, mais c’était quelque chose que tu rêvais de faire. vous aviez même parlé de tatouages à faire en commun parce qu’elle en voulait un min hee. mais toi t’étais pas chaude du tout à cause de ta peur. du coup, c’était une façon d’honorer cette promesse que vous vous étiez faite malgré ton jeune âge à l’époque. alors tu rassures yury sur le fait que ça a été fait avec l’accord des parents et que akiko votre cousine t’as aidé à trouver le salon. tu essaies de noyer le poisson, de lui faire penser à autre que ce « m » et ce « h » entrelacé mais ça ne sert à rien. tu vois bien qu’il est figé et que tu vas le perdre. alors, tu changes de sujet, revenant sur son anniversaire. mais t’arrives plus à le regarder dans les yeux. t’as peur de ce que tu pourrais y lire. et tu souris, mais c’est faux. tout sonne faux maintenant qu’il a découvert ce lettrage. tu te maudis intérieurement alors que les larmes commencent à poindre au coin de tes yeux. yury te pose une question, et tu poses ton regard sur lui après avoir ravalé les larmes qui menaçaient de couler. « non, je n’allais pas te le dire… pas avant que tu sois prêt. » tu murmures essayant de te montrer tendre, même si tu sais que ça n’aura aucun effet. il n’a pas fait le deuil de votre sœur et ne le fera probablement jamais. et toi, toi tu seras là à souffrir parce qu’il ne veut pas de toi dans sa vie, pas quand tu veux l’aider avec sa jumelle. yury reprend la parole et tu grimaces légèrement quand il prononce son prénom. même si tu arrives à parler d’elle, que tu peux librement prononcer son prénom, il n’empêche que ça te fait mal. ta blessure a cicatrisé, mais elle reste quand même encore présente. « oui… » tu souffles, lui disant la vérité parce que ça ne servirait à rien de mentir. il les a vu. tu vois dans ses yeux qu’il veut s’enfuir et tu ouvres la bouche pour parler d’autre chose, mais il te coupe l’herbe sous le pied alors qu’il tourne les talons une nouvelle fois, s’enfuyant et te laissant seule. c’est un nouveau coup de poignard que tu reçois de sa part alors que tu fixes son dos. mais cette fois c’est la dernière fois. cette fois, tu vas lui dire ce que tu as sur le cœur. « attends ! » que tu lances d’une voix forte pour le faire arrêter. tu sais déjà que ce que tu vas dire ne va pas lui plaire, mais t’as besoin que ça sorte. t’as besoin qu’il comprenne la solitude dans laquelle tu as été pendant ces sept dernières années. il était là physiquement près de toi, mais mentalement ce n’était pas le cas. « j’en ai marre yury. » ta voix est ferme, déterminée malgré l’émotion qui te bloque la gorge et qui s’entend clairement. « ça fait sept ans qu’elle est morte. sept ans que tu te barricades dans ton malheur et que tu laisses personne t’aider à aller mieux. pas même moi. » et c’est ça qui te fait le plus mal. c’est ça qui t’empêche de respirer à cet instant. parce que tu aurais voulu être l’épaule sur laquelle il s’appuie, celle qu’il l’aurait aidé à aller mieux… au lieu de ça, il t’a rejeté, comme il a rejeté tout le monde autour de lui. « mais putain yury est-ce que tu t’es déjà demandé ce que papa, maman et moi on ressentait par rapport à tout ça ? est-ce que tu t’as laissé ta douleur de côté cinq secondes pour prendre en compte ce qui se passait autour de toi… » tu parles de plus en plus vite parce que tu ne veux pas qu’il te coupe et encore moins que tu perdes le fil de tes pensées. « j’avais douze ans quand min hee est morte. j’étais qu’une gosse. j’avais besoin de mon grand frère. mais t’étais pas là… quand elle est morte, c’est pas qu’elle que j’ai perdu… je t’ai perdu toi aussi. j’ai du me reconstruire toute seule parce que tu n’étais pas là. alors qu’on aurait pu affronter ça ensemble. à deux on est plus fort… c’était toujours ce qu’elle disait. » t’es obligée de te couper parce que tu ne peux pas continuer à parler parce que tu sens que tu vas pleurer. tu prends une grande inspiration avant de reprendre. « si tu pars aujourd’hui, j’arrêterai d’essayer yury. j’arrêterai de vouloir me rapprocher de toi, de vouloir t’aider. tu feras ta vie et moi la mienne. » ça te comprime le cœur et t’as qu’une envie vomir avant de te mettre en boule dans ton lit et ne plus jamais en sortir. « alors s’il te plait ne pars pas… me laisse pas encore une fois toute seule… j’ai besoin de toi. » tu sais pas si ça va fonctionner. mais si c’est pas le cas, tu ne sais plus quoi faire. t’effaces rapidement les traces de larmes qui avaient commencé à couler. tu retiens le reste parce qu’il est hors de question que tu pleures. oui tu veux qu’il reste, mais parce qu’il l’aura décider, pas parce que tu pleureras.

elle n'allait pas te le dire, pas avant que tu sois prêt, dit-elle. ça te tord le cœur mais une partie de toi ne parvient pas à lui reprocher les choses. peut-être parce que tu sais pourquoi tu n'as pas ton mot à dire, la réaction que tu aurais eu n'aurait pas été bonne, un peu comme à l'heure actuelle sauf que là, la frustration s'est invité parmi tous ces autres sentiments atroces. tu l'as bien vu, même si elle a tenté de camoufler son tatouage à la dernière seconde, tu as reconnu les initiales de ta sœur jumelle et pourtant, comme pour t'en rendre compte, tu lui poses directement la question. tu sais déjà que la réponse ne te plaira pas, parce que la réponse, tu la connais. alors oui, tu commences à étouffer sous tout ce chagrin mais si tu fuis, c'est parce que tu ne sais jamais comment le gérer, ce chagrin t'effraie et aussi idiot que cela puisse paraître, tu essayes de le fuir lui aussi. alors même si ta petite soeur te crie d'attendre, tu ne t'arrêtes pas, tu te diriges vivement vers la porte d'entrée avant d'y récupérer ta veste que tu jettes sur le dossier du fauteuil, le temps pour toi d'y récupérer ton casque sans te douter un seul instant, que tu allais être coupé par une tempête qui te menace depuis des années maintenant. « j’en ai marre yury. » même si le ton qu'elle emploie devrait te surprendre, car tu n'entends que très rarement ta petite soeur dans cet état, ça ne t'arrête pas tant ce mal-être prend de l'ampleur. « ça fait sept ans qu’elle est morte. sept ans que tu te barricades dans ton malheur et que tu laisses personne t’aider à aller mieux. pas même moi. » même si tu le voudrais, ton corps refuse de faire le moindre mouvement. ses mots t'ont paralysé alors que tu tournes doucement ton visage vers elle pour la regarder, les sourcils froncés. t'as du mal à encaisser ce qu'elle vient de dire, sans doute parce qu'elle ne t'a jamais parlé comme ça, aussi franchement, elle sait ce que ça provoque chez toi mais si tu savais, yury, ce qu'il t'attend. « mais putain yury est-ce que tu t’es déjà demandé ce que papa, maman et moi on ressentait par rapport à tout ça ? est-ce que tu t’as laissé ta douleur de côté cinq secondes pour prendre en compte ce qui se passait autour de toi… » tu restes toujours aussi silencieux, saisi, bien que tu as envie de lui répondre que oui. peut-être pas au début, tu n'étais qu'un gosse qui venait de perdre une part de lui-même qu'il ne retrouvera jamais mais si, tu as déjà pensé à eux, et ça te fait d'autant plus mal de te dire que tu ne peux même pas être là pour eux, c'est tellement difficile pour toi que tu ne peux même pas aider tes proches, ta famille, et c'est dur pour toi. seulement, tu ne te rends juste pas encore réellement compte à quel point ta soeur dit vrai, tu t'es renfermé sur toi-même, tu continues sans le vouloir à faire n'importe quoi. à te faire souffrir, toi, jinhee, tout le monde. le ton qu'elle utilise ne t'aide en rien, non, ça te brise le cœur dans tous les sens du terme. ses mots, son état, cette putain de réalité. « j’avais douze ans quand min hee est morte. j’étais qu’une gosse. j’avais besoin de mon grand frère. mais t’étais pas là… quand elle est morte, c’est pas qu’elle que j’ai perdu… je t’ai perdu toi aussi. j’ai du me reconstruire toute seule parce que tu n’étais pas là. alors qu’on aurait pu affronter ça ensemble. à deux on est plus fort… c’était toujours ce qu’elle disait. » ta bouche s'entrouvre légèrement, réflexe idiot mais tu espères par là y trouver assez d'oxygène car là, tu en manques cruellement. après ce tatouage, ses paroles, ces pensées qui se bousculent dans ta tête, minhee, son anniversaire, la culpabilité, voilà que tu dois affronter une jinhee dévastée, une jinhee détruite tout en acceptant cette réalité, le fait que ça soit de ta faute et uniquement de ta faute. que tu n'as pas su être là pour elle bien que tu tentes toujours de te convaincre du contraire, sans doute pour te protéger mais elle te montre bel et bien que tu as tort. tu la quittes du regard un court instant, le posant sur un point invisible sur ce mur, tu fuis son regard parce que là, tu souffres. tu as du en subir des choses que tu ne supportes pas ces sept dernières années, comme ces gens qui prononçaient son nom, qui parlaient d'elle alors que toi, tu ne voulais pas faire remonter tous ces souvenirs à la surface... Ouais, mais cette discussion te brise plus que n'importe quoi. « si tu pars aujourd’hui, j’arrêterai d’essayer yury. j’arrêterai de vouloir me rapprocher de toi, de vouloir t’aider. tu feras ta vie et moi la mienne. » d'essayer ? ça veut dire quoi ça ? tu as cette horrible impression que tout te tombe sur la gueule, tu n'as rien vu venir et tu ne sais pas gérer tout ça, ça te pousse davantage à fuir loin d'ici, comme si tu pouvais aussi y fuir tes problèmes. « alors s’il te plait ne pars pas… me laisse pas encore une fois toute seule… j’ai besoin de toi. » tu te détestes d'avance, mais tu ne peux pas rester ici. tu ne fais pas ça que pour toi mais pour les autres aussi, tu n'es qu'une épave en ce jour horrible et avec tout ça, ça ne t'aide pas. t'as besoin de fuir mais ses dernières paroles résonnent dans ton cerveau. elle a besoin de toi? toi aussi, tu as besoin d'elle. tu t'en rends compte puisque tu ne serais pas parti si les circonstances étaient différentes. « quoi... » ta voix se casse sous l'émotion et soyons clair, tu as vraiment du mal à assimiler tout ce qu'il vient de se passer, ce qu'elle vient de te dire, des mots plus déchirants les uns que les autres. « je vais juste faire un tour, je t'abandonne pas! tu ne m'as jamais perdu. » reprends-tu aussitôt, tu ne t'en rends pas compte en réalité mais là, tu cherches juste à te rassurer, comme si prononcer ces mots allait t'aider à te prouver que non, tu n'as jamais abandonné ta petite soeur. soyons honnête, tu t'en relèverais jamais si c'était le cas. mais oui, ça te chamboule littéralement en plus de ça, sans doute parce que tu étais loin de te douter qu'il y avait un souci avec jin hee, une quelconque distance ni même qu'elle n'allait pas bien. mais là, tu ne gères rien du tout, ses paroles te heurtent beaucoup trop, le prénom de ta soeur jumelle résonne encore dans ton cerveau et au plus les secondes défilent, au plus tu te sens compressé. tu sens ton cœur se resserrer dans ta poitrine, s'affoler aussi. elle a raison, ouais, il est peut-être encore un peu tôt pour que tu puisses te remettre de tes émotions mais oui, yury, tu te barricades dans ton malheur. ta réaction le prouve à nouveau. tu fais quelques pas en arrière, lui lançant à nouveau ce regard, tes sourcils toujours froncés. « pourquoi tu me dis tout ça maintenant? » pourquoi maintenant, pourquoi aujourd'hui, pourquoi ça éclate après tant d'années. tu ne sais même pas comment réagir, ni quoi faire, tu veux juste fuir. les secondes s'écoulent et l'envie de t'échapper s'accroît, sans doute parce que tu commences peu à peu à assimiler tout ce qu'elle vient de te dire. « tu ne m'as pas perdu. » répètes-tu, d'une voix plus douce, tu espères simplement entendre ce que tu veux entendre, qu'elle te dise que ses propos ont dépassés ses pensées, que tu n'as pas été lâche au point qu'ils puissent croire que leurs malheurs ne t'importait peu, parce qu'au contraire, ça te tuerait de savoir que ta soeur a souffert plus que tu ne l'imaginais sans que tu n'aies rien vu. ce n'était qu'une gosse, oui, une gosse. « j'suis désolé... » désolé de ce qu'elle a subi, désolé d'avoir pu être un si mauvais frère, à cette pensée, ta gorge se resserre, on peut l'entendre lorsque tu reprends la parole. « j'ai juste besoin d'être seul. » ça devient de plus en plus compliqué à cacher ton état... enfin, non, tu n'y arrives même plus.

ce n’est clairement pas le bon moment pour laisser tout ça exploser et sortir. tu t’es retenue pendant sept ans, tu aurais pu te retenir encore un petit peu, parce que tu sais que min hee n’aurait pas voulu de ça, pas le jour de leur anniversaire. pourtant, tu sais que si tu ne le dis pas maintenant, si tu gardes encore tout en toi, tu risques de ne jamais rien dire. parce que ce n’est jamais le moment avec yury. dès que ça a quelque chose à voir avec sa jumelle, il se braque et se ferme comme une huître. la preuve, plus tu parles, plus tu mets des mots sur ces sentiments qui t’oppressent depuis pas mal de temps maintenant, tu vois son cœur, son esprit et son corps se tendre. tu devines aisément les pensées qui l'habitent et tu regrettes tout ce que tu dis. sauf que ça continue de sortir, parce que t’as besoin d’en parler avec lui. t’as trop souffert toute seule dans ton coin pour ne rien dire, pour encore une fois encaisser un départ de sa part les bras croisés. tu veux bien souffrir et l’attendre jusqu’à ce qu’il soit prêt, mais tu ne le feras pas éternellement. pas cette fois. comme tu lui dis, c’est la dernière fois que tu fais un pas vers lui. après, tu le laisseras faire sa vie, rester seul s’il a envie. toi tu ne feras rien de plus pour aller vers lui. quand yury prend la parole après ton monologue, t’as l’impression d’halluciner. est-ce qu’il est si stupide que ça pour ne pas voir le mal qu’il fait autour de lui quand il réagit de la sorte ? tu ne sais pas qui il essaie de convaincre en disant que tu ne l’as jamais perdu, mais toi t’es pas convaincue, absolument pas. certes, il était là physiquement et mentalement avec toi mais dès que ça touchait min hee il n’y avait plus que son enveloppe physique. son esprit lui était déjà parti à des années lumières de toi. et tu n’avais plus que tes yeux pour pleurer. ton frère te pose alors une question et tu n’arrives pas à cacher ta surprise. il ne s’en était vraiment pas rendu compte ? est-il aveugle de ce qui se passe autour de lui à ce point ? tu pousses un soupir à t’en décoller les poumons, signe que tu lâches prise, que tu abandonnes. « pourquoi maintenant tu demandes ? » tu répètes d’un ton las en secouant la tête de droite à gauche, un léger sourire contrit sur les lèvres. « parce que j’en ai marre de courir après un fantôme yury. je suis fatiguée d’être toujours cette gamine qui collait ses frangins… j’ai besoin de mon grand frère, pas d’une pâle copie. » parce que c’est clairement ce qu’il est. une copie de lui-même, pas même fidèle à l’originale. tu te souviens de toutes les fois où tu étais contente qu’il soit là près de toi quand ta grande sœur était encore en vie. tu te souviens de vos jeux, de vos rires, de vos pleurs, de tous ces moments qui avaient fait de toi une enfant heureuse. et puis il y avait eu sa mort et tout avait disparu. la première année, t’étais restée en retrait comprenant qu’il avait besoin d’espace pour accepter son absence et puis plus les mois étaient passés, plus les années s’enchaînaient et plus tu te retrouvais seule, terriblement seule. tu avais appris à te construire seule. t’étais devenue une femme indépendante et malgré les apparences forte. certes, tu sais qu’il ne suffirait qu’un seul mot de la part de yury pour que tu tombes et éclates en sanglots. parce que t’es pas si forte que ça mentalement. tu es brisée jin hee et personne ne le voit. ton frère répète que tu ne l’as pas perdu et tu ne peux pas t’empêcher de ricaner jaune. « je sais pas qui t’essaie de convaincre yury mais ça ne fonctionne pas. t’es tellement aveuglé par ta douleur que tu ne vois pas à quel point j’ai été seule pendant toutes ses années. tu n’as pas vu à quel point je souffrais en silence, à quel point je désirais ta présence, tes bras pour me réconforter. » tu marques une pause alors qu’il s’excuse et t’as envie de lui arracher les yeux. « arrête de t’excuser yury parce que rien ne changera. t’es pas le seul à avoir perdu min hee. maman et papa ont perdu leur fille et moi j’ai perdu ma grande sœur. t’es pas le seul affecté par sa mort. » tu sens les larmes qui menacent à nouveau de couler alors que tu le vois encore une fois te tourner le dos, disant qu’il a besoin d’être seul. et là, tu exploses. « ça fait sept ans que tu as besoin d’être seul yury. sept ans que tu passes vos anniversaires et les miens loin de ta famille, loin de ceux qui pourraient t’épauler et alléger ta peine. sept ans que tu me tournes le dos, me laissant toute seule. » tu hurles parce que tu n’arrives plus à gérer cet excédent de sentiments qui t’oppresse la poitrine et fait que tu as du mal à respirer. tu halètes même comme si tu venais de courir un marathon alors que tes pieds n’ont pas décollé du sol. « j’en ai marre. marre que tu me jettes dès que min hee est mise sur le tapis. marre d’être relégué au second plan quand tu vas pas bien. » tu cries toujours pour laisser échapper ta frustration, ta colère, ta peine et ta solitude. « tu sais quoi, vas t’en. j’abandonne, je baisse les bras. » que tu lances d’un ton dur, te surprenant toi-même. tu déposes les armes encore une fois et tu ne les reprendras pas. il veut être seul, tu le laisseras seul, même si t’as l’impression que ton cœur t’es arraché. « j’ai toujours été seule depuis sept ans. ça changera pas grand-chose que ce soit encore le cas aujourd’hui. j’arrête d’essayer yury… je suis fatiguée de tout ça. » t’enchaînes sans lui laisser le temps de dire alors, que tu te sens prête à éclater en sanglots.

encore une fois, ça te montre à quel point tu as toutes les raisons de détester ce jour maudit, comme tu l'appelles. et dire que c'est le jour de ton anniversaire.... c'est triste, quand on y pense, mais justement, tu ne penses même plus à ton anniversaire, juste le sien. pourtant, jinhee y a pensé, jinhee a voulu te faire plaisir, comme d'habitude de toute manière. ta petite sœur, c'est ton petit soleil et là... tout a explosé, tout. tu ne comprends strictement rien à ce qu'il se passe, tu as du mal à enregistrer tous ces propos, du moins non, tu les enregistres, c'est juste difficile pour toi à encaisser, très difficile. « pourquoi maintenant tu demandes ? » qu'on te comprenne, tu ne t'attendais pas à vivre une telle tornade... non, tu aurais dû la vivre bien plus tôt, ta petite soeur n'a jamais rien dit. parce qu'elle est comme ça, elle prend sur elle, jusqu'au jour où ça explose. « parce que j’en ai marre de courir après un fantôme yury. je suis fatiguée d’être toujours cette gamine qui collait ses frangins… j’ai besoin de mon grand frère, pas d’une pâle copie. » tes sourcils sont toujours froncés, tu ne sais même plus si c'est dû au mal-être que tu ressens ou face à cette culpabilité incontrôlable qui envahit tout ton être. non parce que soyons honnête, si tu as fait du mal à jin hee, tu ne te le pardonneras jamais. une pâle copie ? non, tu ne comprends strictement rien, tu sais que la mort de ta sœur jumelle  t'a réellement atteint mais tu fais de ton mieux pour t'en sortir, tu t'y prends si mal. simplement non, fuir le sujet, éviter le problème, vivre dans ton déni n'est clairement pas la meilleure solution, tu évites le deuil, tu évites la chose qui te permettra d'avancer. t'es saisi, littéralement, tellement que tu lui répètes qu'elle ne t'a pas perdu. c'est ce que tu penses, non... elle ne t'a pas perdu. « je sais pas qui t’essaie de convaincre yury mais ça ne fonctionne pas. t’es tellement aveuglé par ta douleur que tu ne vois pas à quel point j’ai été seule pendant toutes ses années. tu n’as pas vu à quel point je souffrais en silence, à quel point je désirais ta présence, tes bras pour me réconforter. » seule. jin hee a été seule. et même si pendant les secondes qui suivent ses paroles tu te mets à chercher une preuve du contraire, tu dois avouer qu'elle a sans doute raison, et à cette pensée, ton cœur se resserre, tu te sens compressé dans ton propre corps. tu le sais bien, tu n'es pas égoïste au point de dire ni de penser que tu as été le seul affecté par la mort de min hee, loin de là... mais tu n'étais pas présent, tu n'as pas réussi à l'être, tu as été, comme elle le dit si bien, aveuglé par ta douleur. mais c'est trop tard pas vrai? tu ne peux plus rien faire, tu t'excuses, tu t'excuses simplement parce que là, tu ne sais pas quoi faire d'autre. aujourd'hui, tu n'as pas la force de lutter, et puis, ses mots viennent de t'assommer comme un coup de massue. « arrête de t’excuser yury parce que rien ne changera. t’es pas le seul à avoir perdu min hee. maman et papa ont perdu leur fille et moi j’ai perdu ma grande sœur. t’es pas le seul affecté par sa mort. » « je sais! » lâches-tu, tu aurais bien voulu lui hurler ces mots en espérant évacuer ta peine mais même ça tu t'en sais incapable, ta voix se brise à ces mots, se brise sous l'émotion, se brise par les larmes qui habitent ta gorge, ce nœud qui t'étrangle. tu le sais, oui, tu le sais, tu sais aussi que tu n'as pas pu être présent, te le rappeler te fait souffrir plus que jamais. « ça fait sept ans que tu as besoin d’être seul yury. sept ans que tu passes vos anniversaires et les miens loin de ta famille, loin de ceux qui pourraient t’épauler et alléger ta peine. sept ans que tu me tournes le dos, me laissant toute seule. » tu sens tes forces te quitter, c'est de plus en plus difficile pour toi ne serait-ce que de faire acte de présente, tu t'en sens incapable, ces mots te déchirent, ils te détruisent. ce n'est pas jin hee qui te fait du mal, c'est de te prendre la réalité en pleine face, de réaliser les choses, de te mettre à réfléchir aux réels soucis, de sortir de ta bulle, du déni. « j’en ai marre. marre que tu me jettes dès que min hee est mise sur le tapis. marre d’être relégué au second plan quand tu vas pas bien. » ton dos vient se coller contre le mur derrière toi, tu perds définitivement toutes tes forces, ton visage devient pâle. « jin hee... » souffles-tu, t'as même plus la force de parler, tu voudrais lui demander d'arrêter, bien qu'elle soit en droit de te balancer tout ça, c'est juste que là, tu as du mal à tout encaisser que c'en devient une réelle torture. de toute façon, elle ne peut pas t'entendre par dessus ses cris, ses cris de rage et de douleur qui te font mal, eux aussi. « tu sais quoi, vas t’en. j’abandonne, je baisse les bras. » tu n'as plus le choix, de toute façon, tu te sens tomber au fond du trou, cette peine qui t'habite à chaque anniversaire que tu passes sans ta soeur jumelle et aujourd'hui, tu réalises que tu perds ta seconde sœur. celle pour qui tu ferais tout et n'importe quoi. tu n'as plus de force, plus de cœur, t'es littéralement perdu. tu n'arrives pas encore à avaler ses mots, c'est difficile, beaucoup trop difficile. « j’ai toujours été seule depuis sept ans. ça changera pas grand-chose que ce soit encore le cas aujourd’hui. j’arrête d’essayer yury… je suis fatiguée de tout ça. » un énième coup de massue, tu souffres tellement, ton cœur hurle tellement dans ta cage thoracique qu'au final, tu ne parviens pas à réaliser la gravité de la situation. oh bien-sûr, tu sais que l'heure est grave sans quoi, tu ne serais pas dans un tel état mais... à ce point? et là, un silence s'installe, t'as la gorge noué, la voix coupé, tu ne sais même pas quoi dire. t'excuser? elle t'a bien fait comprendre que ça ne servait à rien. tu ne penses qu'à fuir, t'isoler mais malheureusement, ça lui donnerait encore raison. parce que oui, elle a raison et tu le sais, elle a raison dans tout ce qu'elle vient de te dire et c'est bien pour ça que tu as si mal. pourtant tu essayes, tu entrouvres la bouche comme pour reprendre la parole mais aucun son ne sort, t'es abattu par la souffrance. tu ne peux même plus réfléchir, c'est sans doute pour ça que tu agis rapidement, tu uses des peu de force qu'il te reste pour te décoller brusquement du mur, tu ne penses même pas à prendre ta veste ni ton casque, rien, tu ouvres simplement la porte et tu fuis. tu fuis. tu ne veux pas être ce grand frère qu'elle vient de décrire, cette pâle copie, tu ne veux pas l'abandonner, c'est contradictoire, et tu t'en voudras à nouveau pour ça mais là, tu as besoin de digérer ses mots, tu as besoin de réfléchir, tu as besoin de te ressaisir, de craquer un bon coup. mais peut-être que non, tu n'as pas besoin d'être seul pour une fois. décidemment, jin hee aura eu raison sur toute la ligne.

tout sort sans que tu ne le contrôles réellement. toutes ses années de solitude, de peine refoulée et de non dits, font que tu exploses. ce n’est pas le bon moment, tu le sais. aujourd’hui c’est l’anniversaire de min hee, et le sien accessoirement. tu le savais qu’il ne serait pas réceptif. et pourtant t’avais tout préparé pour yury. tu t’étais promis que ce serait la dernière année, la dernière fois que tu essaierais de briser cette carapace dans laquelle il s’enferme chaque fois que votre sœur est mise en cause. t’aurais voulu que ça fonctionne, tu le voulais réellement. mais alors, qu’il se ferme encore une fois tu ne vois plus d’espoir à votre relation. tu pensais que faire tout ça t’aiderait à voir le bout du tunnel, à voir la lumière dans le noir. mais ce n’est pas le cas. yury se braque de plus en plus et tu baisses les bras. tu laisses tomber. tu ne peux plus rien faire pour lui, s’il ne prend pas la main que tu lui tends. tu voudrais du plus profond de ton cœur qu’il le fasse, qu’il laisse tout derrière lui pour se concentrer sur toi, sur sa petite sœur en vie. mais tu vois bien que ce n’arrivera jamais. tu t’en rends compte maintenant que tes espoirs et efforts sont vains. jamais il ne fera le deuil de min hee, jamais il n’arrivera à se faire à l’idée qu’elle est morte, qu’elle ne reviendra plus. tu  lui as dit que tu avais aussi perdu ton grand frère ce jour là et tu n’es pas loin de la vérité. tu n’entends même pas ton prénom soufflé par yury. tu ne vois pas la tristesse qui habite son regard parce que le tien est le reflet du sien. tu souffres toute seule depuis des années. jusqu’à présent tu n’avais rien dit parce que tu comprenais qu’il ait besoin de temps. mais après sept ans, tu en as marre, tu es fatiguée. et c’est ce que tu lui dis. t’as fini d’essayer, t’es épuisée de lui courir après. tu dois penser à toi cette fois-ci. tu dois te protéger et essayer de ne pas souffrir. alors tu reprends d’une voix ferme, dure et froide. c’est la première fois que tu parles de cette façon à yury et tu le regrettes aussitôt. tu te mords la lèvre alors que tu vois le regard désemparé de ton grand frère. t’as été trop loin, tu t’en rends compte mais c’était nécessaire, pour que tu puisses avancer. ainsi, tu pourras faire le deuil de ton frère. tu l’observes ouvrir la bouche pour s’expliquer et l’espoir renaît au creux de ta poitrine. t’espères réellement qu’il va parler, qu’il va s’excuser et te prendre dans ses bras. mais encore une fois, cet espoir meurt dans l’œuf alors que tu le regardes se décoller du mur, le regard empli de souffrance. et puis il te tourne le dos encore une fois. tu sens ton cœur exploser en mille morceaux dans ta poitrine tandis qu’il ouvre la porte et s’engouffre à l’extérieur. tu le vois être happé par l’air frisquet d’octobre et alors que la porte se referme sur le dos de ton grand frère, tu laisses ton chagrin exploser. tu ouvres toutes les vannes que tu gardais fermées pour le moment et les larmes commencent à couler sur ton visage de porcelaine. lentement d’abord, comme pour créer le sillon pour celles d’après, jusqu’à ce que ce soit un torrent. tu ne cherches même pas à les retenir et tu viens même te retrouver à genoux, alors que tu gémis de douleur. tu devrais lui courir après, lui demander pardon. mais tu n'as pas la force de te lever et tu as décidé que c'était terminé. tu le détestes de te faire subir tout cette peine. mais plus que tout, tu te détestes pour avoir fait ça aujourd’hui. tu t’en veux de lui avoir sorti ces horreurs. tu n’es qu’un monstre et tu sais qu’il ne voudra plus jamais te parler. tu n’as que ce que tu mérites après tout. c’est ça de se montrer égoïste et de ne plus vouloir souffrir. maintenant c’est pire. la plaie de ton cœur est béante et elle saigne énormément, sans que tu ne puisses l’arrêter. t’as envie de mourir, de quitter cette terre. c’est bien la première fois que tu penses à mettre fin à ta vie depuis la mort de min hee. tu sais que tu ne le feras pas parce que tu as promis à ta sœur de vivre pour elle, mais l’idée flotte quand même dans ta tête. tu as perdu yury… définitivement. il ne te pardonnera jamais tout ce que tu lui as dit. jamais. t'en es persuadée.