Les soirées étaient froides, mais il fallait croire que ça ne dérangeait pas tout le monde. Notre géant resterait au chaud pour ce soir, à potasser une multitude de bouquins à s'en niquer les neurones, entre coca et proses vides qui vous foutent la nausée et l'envie de pioncer. Sapé d'un simple jogging noir ample, débardeur du même teint bien long et pieds nus, sa silhouette élancée s'arqua vers l'arrière sur son fauteuil. Café. Un coup d’œil en arrière, Na Eul était en train de bidouiller ses machins dans son coin. Un magazine porno ou des textos à une gonzesse qu'il voulait tirer à coup sûr. L’aîné eut un sourire en coin et se leva, direction la zone collective pour s'extraire un bon café corsé des tétines de notre bonne vieille technologie bénie. Sans sucre, sans lait. Nature y'avait que ça de vrai, quand c'est amer et fort et que tu le sens passer. Il jeta son stylo sur Na Eul en sortant, pour l'emmerder, mais ne se retourna même pas, s'attendant presqu'à prendre un truc en retour. Son petit bro était du genre plus vif que lui. Un nain, mais un nain rapide.

Le dortoir était toujours aussi animé. Il bénissait le dirlo d'avoir créer les piaules en binome, sans quoi, il aurait empalé deux trois petits malins dans les murs un de ces jours. Il avait ses humeurs. Na Eul ça lui suffisait amplement, surtout ses pets. Au moins, il ne dégommait pas ses cactus, c'était pas si mal. Un aller retour pour chopper son café, quand il entendit un mec brailler. La gueule dans le foin, An Seo s'arrêta dans le hall principal, le mug fumant dans la main. Il fixa la porte, s'allumant une clope d'une seule main. Le mouton veut entrer dans la bergerie? C'était quoi ce débile encore? D'une longue traite, le jeune businessman expire une brume toxique, qui ricoche sur les murs, ne bougeant pas. Allez tire-toi. Ils se tirent toujours à un moment. Il avait pas la gueule d'un majordome. Il n'ouvrirait pas. Mais celui-là semblait obstiné. Du KFC? Il était sérieux? Un argument de poids pour des grabataires férus de jeu vidéo ou de téléshopping non? Il fallait qu'il le cogne pour qu'il se casse? Camille. Pas de Camille à l'horizon. Bon, et bien, s'il n'était pas désiré, il allait lui mettre deux trois baffes et le renvoyer dans la fratrie d'à coté.

Quelques mètres et le voilà devant la porte. Clope aux bords des doigts, il ouvrit en buvant son café, histoire de bien rester réveillé quand il lui démonterait la face. Un café qui ne reste pas longtemps dans sa bouche et finit sur la .... le .... bordel c'est quoi ça. Pas la tâche on ne peu plus délicate qu'il venait de faire sur la tenue du .... de la ... drag-queen? Mais plus la drag-queen en personne en fait. Sa clope continuait de cramer au bout de ses doigts et il fixa l'illuminé qui lui arrivait à l'épaule. Il pensait avoir tout vu mais ... là. Il fronça les sourcils. Ok. Un légère toux pour passer son étonnement et son malaise. Il s'avoua à lui-même ne pas avoir la moindre idée de comment il devait réagir. Et si c'était une ruse? Précédant une attaque? Ses yeux se plissèrent. Il allait peut-être bien lui casser la gueule en fait , si c'est le cas. Il se cala la clope dans les lèvres et son bras passa la porte. De l'extérieur, on aurait juste vu une main qui attrapait la dragqueen par le col pour tirer sans ménagement à l'intérieur. Il le rapprocha de son visage, ce nain au cerveau déglingué et lui murmure doucement avec des soupçons de nicotine: "si c'est une ruse pour défoncer nos chambres, je m'occupe de toi en premier. "Il le lâcha et le toisa avec un sérieux implacable, puis jeta un regard dehors. Il ne savait même pas d'où il venait ce dingue. Peut-être se trompait-il, mais il était prévenu. De là, il claque la porte de Neugdae et verrouille, reprenant sa tasse de café presque vide. Et merde, il faut qu'il en refasse... direction la cuisine. Positivons. L'invité est vivant et il lui a épargné de se congeler les testicules dehors par moins... quelque chose. Il laissait le gay à la merci des autres loups. Lui n'était que chien de garde silencieux.