Tout enfant aspire à une vie heureuse, pleine de belles choses, de découvertes plus surprenantes les unes que les autres et des moments privilégiés avec ses parents. Malheureusement, ce n’est pas le cas de tout le monde et encore moins de Chul hei.

Né le 18 septembre 1993 dans un hôpital miteux de Seongnam, le petit Chully venait à peine de voir le jour qu’il perdait déjà son père d'une pneumonie mal soignée. Obligé de grandir seul avec sa mère, il devint rapidement un enfant mature et débrouillard n’en perdant pas pour autant sa joie de vivre et sa gentillesse. Ce qui ne fût pas le cas de sa mère, qui elle dut rapidement prendre le rôle de père et de mère tout en enchaînant de nombreux petits boulots à droite et à gauche pour leur permettre de vivre à leur faim. Malheureusement, au fur et à mesure que le jeune garçon grandissait son insouciance s’envolait pour laisser place à l’inquiétude. L’inquiétude de voir sa mère se fatiguer toujours un peu plus uniquement pour son bien. Lors de sa dernière année de collège, le petit garçon rayonnant avait presque disparu et à la place se tenait un adolescent rongé par la culpabilité. Peut-être aurait-il mieux valu qu'il ne naisse pas, peut-être que comme cela, sa mère aurait pu vivre une vie moins compliquée ? Trop de questions qu’un jeune de cet âge ne devrait pas avoir à se poser tournaient en boucle dans sa tête. Sa mère lui répétait sans cesse qu’il était son fils et que pour rien au monde elle ne regrettait sa venue et jamais devant lui, elle ne montrait sa fatigue, mais il arrivait parfois le soir que Chul hei entendre pleurer alors qu’elle le pensait endormi. Un beau jour, n’en pouvant plus il se résigna et décida de faire quelque chose pour l’aider. Une décision qui au final finira par détruire son monde et sa vie.

Dans le quartier des bas-fonds de Seongnam où il vivait, se trouvaient beaucoup de groupes de jeunes adultes vraiment peu recommandables. Ceux-ci s’arrangeaient pour enrôler des jeunes au collège et au lycée leur promettant ce qu’ils voulaient bien entendre en échange de quelques services.. pas très légaux. Ce qu’ils ne précisaient pas explicitement bien entendu. Jeune et naïf, il pensait que ces hommes pourraient l’aider à soutenir sa mère et finit par se laisser berner par leurs belles paroles et leurs belles promesses. Ainsi s’enchaînèrent les erreurs et il était trop tard pour regretter, ils ne comptaient pas le laisser s’en aller, leur étant bien trop utile. Vols de voitures, vols à la tire, vols dans des magasins la nuit.. Chul hei n’en finissait pas de s’enfoncer dans les problèmes et la police n’allait pas tarder à lui tomber dessus s’il n’arrêtait pas. Ce que bien évidemment, il décida de ne pas faire. Grâce à cet argent qu’il amenait à sa mère, elle n’était plus obligée de travailler autant. Si au début, elle se demandait d’où ces sommes venaient et ce que pouvait bien faire son fils, il la rassurait bien vite, lui disant qu’il avait trouvé un petit travail dans une boutique de la rue commerçante. Il mit du temps à ne plus s’en vouloir d’avoir menti à sa mère, jamais il n’avait menti comme cela auparavant et si elle se rendait compte qu’il avait trahi sa confiance.. il ne donnait pas cher de sa peau. Sa mère n’avait jamais rigolé avec la confiance et avait toujours insisté pour qu’il ne lui mente jamais. Elle autorisait bien sûr les petits mensonges pour des sorties entre amis, ou s’il trouvait une petite copine, n’étant pas non plus trop sévère avec lui. Mais dès que cela concernait d’importants sujets, ou des graves, c’était une autre affaire.

Lors de sa première année de lycée, ce qui devait arriver arriva et une nuit venue, les hommes qui contrôlaient dorénavant tous ses faits et gestes l’envoyèrent voler des bijoux de valeurs dans une bijouterie proche de chez lui. Cette fois-ci, il sentait que cette affaire n’allait pas bien se finir et leur demanda à plusieurs reprises s’il était possible de faire autre chose, mais rien n’y fit. Ils le menacèrent même de s’en prendre à sa mère s’il ne faisait pas ce qu’ils voulaient. Aussitôt la menace posée, il se résigna et se dirigea vers la boutique avec le strict minimum. Il n’avait même pas eu le temps de se préparer, car ils ne le lui avaient pas laissé. Peu de temps après se dressait devant lui l’enseigne. Une envie folle de partir lui vrillait l’estomac, mais que pouvait-il y faire ? Le choix ne lui était pas laissé.

Il brisa la vitre. Bêtement. Cela paraissait pourtant évident que ce n’était pas une bonne idée et que le bruit risquait d’alerter des gens, mais c’est comme cela qu’il avait toujours fait et s’en était toujours sorti. Une alarme ne tarda pas à se déclencher et il prit la fuite. Il rentra en panique chez lui, où sa mère l’attendait, arrivée plus tôt que prévu du travail. « Où t’étais Chully ? » lui demanda-t-elle un brin en colère. Évidemment, il était supposé travailler après les cours, mais pas la nuit alors elle se demandait ce qu’il pouvait bien faire dehors à une heure pareille. « Désolé maman.. J’ai fait n’importe quoi, j’aurais pas dû, j’suis désolé.. » Chul hei s’effondra, n’en pouvant plus. Cette mascarade avait trop duré et mentir à sa mère lui brisait le cœur. En plus de ça, ce soir, il venait d’échouer et le « gang » n’allait pas tarder à l’apprendre. Comme ce vol devait être un de leur plus gros casse, ils risquaient de ne pas être contents et les représailles allaient tomber. Une fois toute l’affaire révélée à sa mère, celle-ci entra dans une colère noire et l’obligea à lui dire qui était ces gens. Il n’eut pas besoin de le faire, ils étaient apparemment déjà là et extrêmement mécontents. La porte vola en éclats et un des gros bras du groupe fit son apparition, une arme à la main. « T’as merdé morpion. T’es au courant que le boss est pas très content ? Si j’suis là, c’est pour ta mère. Comme promis. » Le rictus qui était apparu aux commissures des lèvres de l’homme provoqua des sueurs froides à Chully tandis que sa mère avait déjà empoigné une poêle et un couteau de cuisine, prête à les défendre. Le gros bras avança alors rapidement jusqu’à sa mère et lui asséna un coup-de-poing dans l’estomac. Son sang ne fit qu’un tour et il se jeta sur leur opposant peu importe s’il devait en mourir, jamais il ne laisserait sa mère se faire frapper une nouvelle fois ou même tuer par cet homme. Le combat était perdu d’avance, que pouvait faire un adolescent de seize ans contre un adulte entraîné au combat ? Malgré cela, il n’abandonna pas et se défendait comme il le pouvait, encaissant les coups. Soudain, l’homme pointa son arme sur sa mère et tira. Si Chul hei n’avait pas réagit immédiatement, la balle aurait probablement atterrît en plein dans le crâne de sa mère. Au lieu de cela, le coup de pied qu’il avait jeté avait fait tomber l'arme et avait dévié le projectile qui avait tout de même heurté l’épaule de celle qui l’avait élevé et aimé. Tout se bousculait dans le crâne de ce jeune garçon, mais la rage dominait tout et il saisit à une vitesse folle l’arme que le gros bras avait fait tomber. PAN. Plus rien. Plus d’agitation. Plus de cris. Il n’entendait même plus son propre cœur battre. Venait-il réellement de tuer quelqu’un ? Pris de tremblements, il se laissa tomber au sol, tandis qu’une tâche rouge carmin apparaissait sous le corps de l’homme.

Le voisin du dessous, qui avait tout entendu avait alerté la police et lorsque celle-ci arriva sur les lieux, tout était déjà fini. La scène qu’ils découvrirent ce jour-là n’était pas belle à voir. Une femme, au sol, saignant abondamment de l’épaule. À ses côtés un jeune garçon, amorphe, une arme à la main et devant eux, un homme mort. Il avait reçu une balle en plein dans son œil droit ce qui ne lui avait laissé aucune chance de survie.

Dans l’esprit de Chul hei, le temps s’était figé. Perdu entre deux mondes, il ne réagissait plus et resta dans un état de choc durant plusieurs jours. Lorsqu’il reprit petit à petit conscience du monde qui l’entourait, on lui apprit qu’il allait devoir passer devant un juge pour répondre de son crime. Cette révélation ne lui fit ni chaud ni froid, seul lui importait sa mère. Il devait la voir et s’assurer qu’elle allait bien. Pour son plus grand soulagement, elle avait survécu, mais se trouvait encore à l’hôpital. Le jour du tribunal arriva bientôt et l’angoisse grimpait petit à petit chez Chully. Allait-il finir en prison pour le restant de sa vie ? Où même être condamné à mort ? Il ne pouvait pas abandonner sa mère après tout ça. Il venait juste de la retrouver et tous deux avaient pleurés longuement dans les bras de l’autre.

Son jugement fut plus rassurant que ce à quoi il s’attendait : deux ans en foyer de correction pour jeune. Le juge avait été clément. Le seul détail auquel il ne prêta pas attention s’avéra être le pire. Sa mère allait devoir payer une amende bien trop élevée pour les pauvres moyens qu’ils avaient. La culpabilité refit rapidement surface, écrasante. Il était toujours coupable d’un meurtre et venait d’infliger à sa mère une amende qu’elle ne pourrait jamais rembourser. Son départ pour le foyer arriva plus vite qu’il ne s’y attendait et les aux revoirs plus difficiles qu’il ne l’aurait imaginé. Le souvenir de sa mère en larme restera pour toujours gravé dans sa mémoire. Deux mois après son arrivée en foyer, on lui apprit qu’elle s’était suicidée. Le directeur qui le lui annonça ne prit pas de gants et laissa Chul hei dans une torpeur qui dura de nouveaux plusieurs jours. En vue des événements, sa peine dura moins longtemps que prévu. Il resta un an dans ce foyer où il était traité comme un moins-que-rien.

A sa sortie, il était dorénavant un garçon âgé de dix-sept ans et resta un an dans une famille d’accueil douteuse. Le jour même de ses dix-huit ans, il quittait cet endroit pour la grande aventure.