Insu passe une main dans ses cheveux en soufflant. Depuis qu’il l’avait revu il ne pouvait pas s’empêcher de penser à elle. Culpabilisant de voir que ses sentiments étaient toujours aussi éteint que le jour où il était parti, il ne peut s’empêcher de se voir comme le connard qu’il était. Il avait brisé le cœur de cette fille avec égoïsme … il était bien avec elle, il avait passé les meilleurs moments de sa vie, quand il était encore joyeux et pleins de vie. Il avait l’impression que le Insu de cette époque était mort. Bien loin de ce qu’il avait imaginé devenir … Mais il avait fait des choix de vie et les avais assumé jusqu’au bout … pour le rendre tel qu’il était aujourd’hui. Finalement il avait bien fait de la quitter, lui épargnant cette épave qu’il était devenu, pourtant une part de lui ne pouvait s’empêcher de se dire que s’il était resté avec elle … elle aurait pu le sauver. La vérité c’est qu’au-delà du fait de découvrir qu’il n’était peut-être pas l’homme qu’on attendait qu’il soit, In Su avait une peur bleu du bonheur. De ce qui lui arriverait quand il ouvrira les yeux. Il était ce gosse piégé dans une éternelle insomnie qui préférait lutter contre le sommeil plutôt que de s’y abandonner. Il avait peur de se réveiller et de voir que tout avait changé. Elevé pour devenir un maniaque de l’hyper contrôle Insu n’a jamais réellement su anticiper et prévoir les coups à l’avance. Avoir une longueur d’avance pour lui était bien trop dur, il n’avait pas cette âme de requin. C’était sûrement pour cette raison qu’il s’était totalement laissé submergé autant par sa famille que par ses propres émotions. Alors quand il avait réalisé qu’il était heureux avec Kwang Ja mais qu’il lui mentait au quotidien sans même le savoir, il avait pris peur et avait décidé de la quitter. La décision avait été aussi dure pour elle que pour lui. Mais il s’était montré froid et distant, parce qu’il n’avait pas réussi à lui avouer toute la vérité. Oui on est heureux, on a une belle vie mais je pars. Juste comme ça. Elle ne méritait pas ça … certainement pas elle … Il avait alors décidé de lui parler. Il avait déposé un mot sur son bureau qu’il avait signé. Espérant qu’elle serait là au rendez vous …

un soupir, l'appréhension et la peur. de faire face à cette réalité qu'elle s'était efforcée d'oublier depuis des années. et pourtant, elle en avait besoin. elle avait besoin de savoir pourquoi il était parti, pourquoi il l'avait laissée à son propre sort sans aucune raison valable. parce qu'à ses yeux, ils étaient heureux. pas d'ombre au tableau malgré quelques disputes de couple banales. mais rien de bancal. une relation douce qui s'était terminée de manière trop brutale. puis, il y avait nam suk, cet enfant fruit de l'amour qu'elle avait pu porter à cet homme qui l'avait abandonnée. elle l'avait gardé près d'elle, elle tentait de le protéger au mieux, espérait qu'il devienne un homme bon. et jamais, elle ne lui avait parlé de son père, même si elle savait qu'un jour, il serait assez grand pour poser des questions. coinçant une mèche de cheveux derrière son oreille, elle quittait son appartement, fermant à clé avant de prendre son fils dans ses bras, l'accompagnant chez la voisine qui avait bien voulu le garder. et ce trajet avait semblé durer une éternité alors qu'elle essayait de rester calme, de ne pas se braquer avant même d'arriver. écouteurs dans les oreilles, elle avait marché rapidement pour ne pas être en retard, et ses pensées s'embrouillaient alors qu'elle s'en allait retrouver cet amour perdu. ils avaient tant fait l'un pour l'autre dans cette relation qui semblait parfaite aux yeux de la jeune mère qu'elle ne pouvait s'empêcher de vouloir des explications, même après quatre années sans l'avoir revu. de ses lèvres pincées, son regard s'était finalement posé sur le jeune homme. elle avait même cru sentir son coeur rater un battement alors qu'elle s'était avancée vers lui, lui lançant un simple "salut" en guise d'arrivée. et dans un silence presque assourdissant, elle s'était installée en face de lui, attendant simplement qu'il parle. après tout, elle était simplement là pour ça.

Nerveusement Insu jouait avec cette tasse de café qu’il avait commandé. Il soufflait en frottant sa nuque, regardant l’heure incessamment. Elle n’était pourtant pas en retard, lui-même était à l’heure, même plutôt en avance. Il avait beau retourner le problème dans sa tête il était incapable de savoir quoi lui dire, ni comment … il déglutit et tente de mettre un peu d’ordre dans ses pensées. Il avait coupé son téléphone pour ne pas qu’on les dérange, pendant une seconde il s‘était demandé comment Nam Su réagirait s’il apprenait qu’il était partie revoir son ex-petite amie. Leur relation était tellement tendue et toxique … il ne savait pas s’il pouvait décemment lui parler de cette histoire … mais pour l’instant il voulait se concentrer sur elle, sur Kwang Ja, cette beauté qui s’approchait d’elle le visage fermé. Qui pourrait lui en vouloir. Dès qu’il l’aperçoit il se redresse brusquement faisant trembler la table qui se cogne contre sa cuisse. Il est maladroit, ça au moins ça n’a pas changé. Il se rassoit calmement, tentant de mettre un peu de sérénité dans son regard paniqué et nerveux. Il déglutit et s’apprête à lui dire quelques choses quand la serveuse arrive pour prendre sa commande. Insu se recommande un café, il devrait peut-être éviter mais au moins il aura de quoi se tenir les mains pour les empêcher de trembler. « Salut … » finit-il par répondre en déglutissant. Le silence lourd qui s’installe n’aide en rien à l’apaiser et loin de pouvoir délier sa langue il sent sa gorge se gonfler. T’as merdé vieux et tu le sais, encore plus en croisant son regard dur. Alors aussi piteux que tu pouvais l’être tu souffle un « je suis désolée Kwang Ja … » elle méritait mieux que ça, mais pour l’instant, l’homme minable que tu étais dans ce gros sweat trop large pour toi ne pouvait faire mieux. Tu frottes tes mains moites sur tes cuisses discrètement et triture les fils de ton jean troué aux genoux pour tenter de garder contenance. Tu passes une main libre dans ses cheveux comme t’en as toujours l’habitude et cligne des yeux bêtement en fixant la table. Tu n’as même pas de tes yeux cernés et de tes joues creusées par le temps. Ouais t’as l’air mal en point.

en le voyant face à elle, elle se demandait ce qui était le plus stupide. ce coeur qui s'emballait ou l'envie de sourire face à cette maladresse qu'elle lui reconnu immédiatement. mais ce regard froid à son égard ne la quittait pas, parce que l'amertume était toujours présente au fond d'elle. alors elle s'était simplement assise, avait commandé un cappuccino auprès de la serveuse en tentant d'être un minimum agréable avec cette demoiselle qui n'avait rien demandé. mais elle restait concentrée sur la raison de sa venue ici, et attendait, un geste, une parole de la part d'in su. elle pouvait sentir qu'il était nerveux, et se rendait compte finalement qu'elle l'était aussi, alors qu'elle triturait ses doigts, se rendant compte qu'elle avait encore des traces de feutre sur le dos de sa main. elle avait fini par relever la tête vers lui, alors qu'un léger rire s'était échappé d'entre ses lèvres à l'entendre s'excuser. "désolé ? j'crois que tu t'rends pas bien compte de ce que t'as fait..." qu'elle souffla, tournant la tête pour ne pas montrer cette sensibilité qu'elle cachait pourtant si bien en tant normal. les images de cette matinée ou tout avait basculé reprenait place dans sa mémoire sans qu'elle ne puisse le contrôler. cette sensation que la douleur qu'elle avait ressenti reprenait place en elle. mais elle essayait de rester calme kwang ja, le coeur toujours aussi brisé, mais la force d'avoir continué à vivre sans lui. furtivement, elle pensait à son fils, à cette journée ou elle avait su, qu'il grandissait dans son ventre. pour autant, elle n'avait jamais voulu en parler à in su, ne voulait pas que l'on croit qu'elle aurait été capable de ça pour continuer cette relation. et même encore à ce jour, elle refusait de lui en parler, alors que ce petit avait d'ores et déjà appris à vivre sans un père. "c'était moi l'problème ?" avait-elle finit par demander, le ton monotone, le coeur au bord des lèvres, et l'envie que cette discussion ne s'éternise pas, mais qu'elle lui apporte les réponses dont elle avait besoin.

Oh ça non il ne se rendait pas compte. Parce qu’Insu avait toujours ce problème d’égocentrisme exacerbé. Il ne voyait que ses soucis et ses problèmes, que ses émotions bien trop envahissante et gênante. Il n’arrivait à voir le mal qu’il faisait aux autres que quand on lui mettait sous le nez et là, la peine de la jeune femme était loin d’être facile à ignorer. A vrai dire il ne voyait que ça renforçant sa culpabilité. Il pince ses lèvres et baisse les yeux. Là encore il s’apprête à répondre mais la serveuse, plus rapide que jamais lui apporte déjà son café et le cappuccino de Kwang Ja. Il détourne les yeux vers la fenêtre et secoue la tête. Il ne sait pas comment lui dire, comment lui faire comprendre. Il ravale un soupire avant d’oser enfin affronter son regard. « Je suis gay. » finit-il par dire dans une grimace témoignant qu’il n’était pas encore capable de l’assumer pleinement. « J’apprends à l’accepter. » ajoute-t-il en  faisant tourner sa cuillère dans sa tasse. Finalement tout venait de là … « J’avais l’impression de te mentir … je t’aimais vraiment Kwang Ja mais je savais au fond de moi que ce n’était pas avec moi que tu aurais pu avoir un avenir … » ça n’excusait ne rien la façon qu’il avait eu de partir mais ça pouvait au moins expliquer pourquoi il n’aurait pas pu rester … « c’pas toi … pour le coup c’est vraiment moi … » et non, il ne le savait pas avant de se mettre avec elle, parce qu’il était persuadé que s’il était assez bien avec elle il en oublierait tout le reste … « Tu méritais pas ça … Je suis … vraiment … désolé … » ajoute-t-il, encore, se répétant douloureusement, levant ses yeux vers elle pour croiser son regard.  Il lui devait bien ça, la vérité et un peu de courage pour l’affronter pleinement et lui laisser l’occasion de se défouler sur lui.

sa commande devant elle, ses yeux s'écarquillaient à la révélation que le jeune homme venait de lui faire. ses gestes s'étaient stoppés alors que son regard s'était à nouveau posé sur lui. "t'es gay ?" demandait-elle malgré le fait qu'il venait de le dire. comme si elle ne pouvait pas y croire, comme si tout ça n'était qu'une mauvaise blague qu'on lui faisait. "donc tout c'qui s'est passé, notre relation, tout ça c'était que du vent ?" elle haussait un peu le ton sans même s'en rendre compte. elle sentait des fissures se créer sur cette carapace qu'elle avait formé au fur et à mesure des années, mais tentait de garder un peu de contenance, tant qu'elle le pouvait. elle déglutit, fermant les yeux un instant, elle n'osait même pas attraper cette tasse face à elle, comme si elle avait perdu la force d'effectuer un geste simple. son esprit embué par ce que son vis-à-vis lui avouait, elle ne savait pas comment réagir, quoi dire. "et t'as pas été foutu de m'le dire avant ? c'était plus simple de m'foutre en plan un beau matin je suppose ?" cette haine toujours présente était comme renforcée alors qu'elle se rendait compte de la stupidité de la situation. plusieurs années à ses côtés pour au final, apprendre qu'il aimait les hommes. oh ce n'était pas ça le fond du problème, elle ne jugeait pas les gens sur leur orientation sexuelle. elle ne comprenait simplement pas pourquoi il ne lui avait pas dit avant. cela n'aurait pas atténué la douleur, mais aurait sûrement évité à la demoiselle ces années d'incertitude auxquelles elle avait finalement fait face. "ça suffit pas d'être désolé in su. j'crois que tu t'rends pas compte de l'effet que ça fait de s'faire planter du jour au lendemain. et même avec tout ça, j'te le souhaiterais même pas." soufflait-elle, secouant légèrement sa tête. "après tout c'qu'on a vécu, t'aurais au moins pu me l'dire." continuait-elle, les regrets marqués au fer rouge dans la chair. tout aurait été différent avec simplement trois mots en guise d'explication.

Insu affiche un rictus amer. Peut-être qu’après tout, s’il l’avait quitté ainsi et qu’il avait souffert des années après c’était parce qu’il le méritait … Oh si il avait souffert, il avait connu la douleur d’un cœur brisé, d’un cœur trahi. Il avait souffert, peut-être même plus que Kwang Ja. Il avait connu la descente aux enfers, lente et douloureuse. Il avait connu aussi cette sensation de creuser encore plus dans son malheur. Cette sensation qu’il ne souffrirait jamais assez qu’il y aurait toujours pire, toujours plus. Il avait du mal à supporter sa colère mais subissait ça comme un châtiment. Elle avait le droit de lui gueuler dessus et d’être froide. Il encaisserait sans rien dire même s’il n’avait qu’une envie : lui répondre sur le même ton. Mais In Su était désolé. Alors il serrait juste le poing sous la table et faisait craquer son cou pour tenter de contenir son énervement. « t’comprends pas … » souffle-t-il mais Kwang Ja est trop en colère pour l’entendre. Après tout avait-il réellement le droit de se justifier ? Il détourne le regard et surprend leur voisin de table les fixer surpris, tendant même l’oreille pour écouter leur conversation. Si In Su n’avait pas une once de respect pour Kwang Ja il se serait levé pour foutre son poing dans la gueule de ce mec,  parce que depuis la prison il n’arrivait à s’exprimer que par la violence et l’agressivité. C’était un exploit qu’il supporte autant de la part de la jeune et pourtant c’était si peu … Mais le seuil de tolérance d’In Su avait été si sauvagement rabaissé qu’aujourd’hui il supportait à peine sa propre existence. Il se force alors à boire son café brûlant en grimaçant pour calmer ses nerfs à vifs. Se faire mal pour éviter de faire mal. Il repose sa tasse un peu trop fortement sur la table et lève son regard vers Kwang Ja. Oh ça oui il avait changé. Il n’était plus ce garçon doux et triste, il était cet homme agressif et détruit. Son regard ne brillait plus et ses lèvres sèches ne souriaient plus. « Tout ce que j’t’ai dit quand on a rompu c’était tout ce que je pouvais te dire à ce moment-là. » grogne-t-il de sa voix rauque. « Kwang Ja … quand j’ai rompu avec toi la seule certitude que j’avais c’était que je ne pouvais pas te donner l’amour dont tu avais besoin. J’étais bien avec toi mais ça n’aurait pas suffi à construire une vie à deux. Et ça … ça je te l’ai dit. » Il pince ses lèvres et ajoute avec une voix qu’il essaye de rendre douce « Ça n’aurait servi à rien de continuer dans le mensonge … la vérité je te l’ai dit, je ne pouvais pas t’aimer assez pour continuer même si je tenais beaucoup à toi … Ca n’aurait servi à rien de rester ensemble juste pour éviter de te briser le cœur … » In Su ne sait même pas s’il était trop dur dans ses paroles, il n’avait jamais été vraiment doué pour ça, encore moins maintenant. « Je t’ai pas menti Kwang Ja … mais aujourd’hui j’ai compris ce qui n’allait pas chez moi … Et tu mérites de savoir. Parce que c’est … comme une pièce manquante à un puzzle. Je ne savais pas qui j’étais jusqu’à il y a peu … » et rassure toi on s’est bien chargé de me bousiller le cœur aussi. Il déglutit et regrette de ne pas avoir pris une boisson plus forte. Il ancre son regard dans le sien «  J’ai pas cherché à te faire du mal, mais j’ai conscience de t’en avoir fait. On n’aurait pas pu vivre heureux Kwang Ja et aujourd’hui je sais que le vrai fond du problème c’est juste que … j’aime les hommes. » Alors non je n’aurais pas pu te le dire avant, je n’aurais pas pu le comprendre avant de sortir avec toi et non j’aurais rien pu faire d’autres avec le Insu que j’étais avant. Mais il se sent incapable de lui dire ça sans laisser transparaître son agressivité et sa colère.