« Tu vois le truc, c’est qu’on croit toujours que ça n’arrive qu’aux autres. Et le jour où ça te tombe dessus, et bah, tu comprends pas. »

C’est ce qu’elle avait dit, dans ce grand salon, après l’enterrement de son frère. Arizona n’avait jamais imaginé devoir vivre une telle épreuve. C’était son sang, celui qu’elle se devait de protéger et elle avait échoué. Et ce n’était la faute de personne. Ils avaient toujours grandi comme bon leur semblait, des parents un peu trop ouverts, un peu trop laxistes. Et pourtant, ils avaient toujours été bien élevé. Il n’avait que quinze ans. Elle en avait dix-huit. Et à dix-huit ans, on ne met pas dans une boite sous terre son petit frère. Tout comme à quinze ans, on ne doit pas mourir parce qu’on refuse de se nourrir. Juste parce qu’on se trouve un peu trop gros. Elle n’avait rien vu Arizona. Pas à temps. Et même à l’hôpital. Il avait refusé.

« T’es belle comme tu es. Si quelqu’un te dis le contraire, alors prouve lui qu’il a tort. »

Vivre à Los Angeles, c’était accepté ce culte de la beauté et de la minceur. Une chose à laquelle elle n’avait jamais prêté attention. Arizona se sentait bien dans sa peau. Elle avait toujours eu le caractère le plus fort, toujours capable de laisser couler les critiques sans jamais être atteinte. C’était ça vivre dans la ville des célébrités. Une belle connerie. Mais tout ce qu’elle pouvait faire, c’était faire passer ses idées, venir en aide à ceux qui en avait besoin. Pour son frère. Pour lui montrer qu’il aurait pu continuer à vivre. Elle voulait donner confiance aux autres. Et on lui disait toujours que c’était facile pour elle. Parce qu’elle était belle. Alors elle répondait simplement, que la beauté c’était juste subjectif.

« L’amour ça rend con. Tu vois, j’y ai pas cru parce que je pensais que j’étais meilleure que les autres. Au final, je suis juste une nana avec le cœur brisée. Comme n’importe qui d’autre. »

Elle avait eu des petits amis au lycée. Rien de bien sérieux. Jusqu’à ce garçon. Sur internet. C’était idiot, elle n’avait pas besoin d’un écran pour faire des rencontres. Et puis tombé amoureuse d’une image, c’était surfait. Ils ne parlaient pas la même langue, ils ne vivaient pas sur le même continent. Et pourtant. Skype, sms, snapchat. Et tout aurait pu s’arrêter lors de la première rencontre. Mais ça n’avait fait que confirmer ce qu’ils ressentaient l’un pour l’autre. Il avait traversé l’océan. Juste pour la voir. Alors elle y avait cru Arizona. Alors elle avait laissé tomber ses dessins, ses bouquins pour enfin. Elle avait pris ses affaires et elle avait tout quitté. Ses parents, et la tombe de son frère. Pour un homme. Un homme qui avait fini par la quitter quelques mois plus tard.

« J’aime ce que je fais. Mais je tiens toujours à préciser que ce visage, que l’on voit sur des affiches, il est retouché. Que quand je me réveille pas maquillée et les cheveux en vrac, je ressemble pas à Shakira. Non je ressemble à une fille épuisée, juste banale. »

Elle était tombée amoureuse de la Corée. Alors malgré son cœur en miette, elle n’avait aucune envie de partir. Alors elle avait participé à un casting et elle avait continué ses études. A Yonsei. Parce qu’elle en avait le talent, les capacités et qu’elle avait un visa étudiant. Aujourd’hui égérie pour la marque Etude House, elle est fière du chemin parcouru, de ne jamais avoir baissé les bras. Arizona ne compte pas s’arrêter là, parce qu’elle le sait. La vie a encore beaucoup à lui offrir.