2009 ☾ allongée dans ton lit, tu fixes le plafond. une soirée banale, vivant une vie où banale est synonyme d'horrible. tu as dix-huit ans déjà, tu n'es plus une enfant, mais tu n'as jamais eu d'enfance. c'est fini, maintenant, ton père t'a tout volé. il t'a volé ton enfance, il t'a volé ton bonheur, pire que ça, il t'a volé ta virginité. pourtant, il y a cet ange près de toi. un garçon que tu as rencontré il y a un mois à peine. un mois, et tu l'aimes déjà comme une folle. serait-ce le destin qui te l'envoie ? une chance pour toi d'avoir une vie meilleure ? oui, t'y crois. pourtant, partir, signifie laisser ton frère derrière toi. chose que tu ne ferais jamais. ton petit-frère, c'est tes deux yeux, ta raison de respirer. est-ce que tu pourras le laisser derrière toi ? avec le monstre qui te sert de père ? mais le destin t'offre une chance inouïe... est-ce que tu rejoindras cet ange tombé du ciel ce soir pour t'enfuir avec lui comme prévu ? oui, une partie de toi te déteste à l'idée de laisser ton frère, mais tu sais que tu le feras, que tu ne pourras plus jamais laisser ton père te toucher.

« je suis désolée ken, j'suis vraiment désolée. j'te demande juste de pas m'en vouloir, je reviendrai, j'te le promets, dans quelques mois ou peut-être semaines... je t’emmènerai avec moi, j'te le promets p'tit loup_. je peux juste pas rester... j'peux vraiment plus rester ici, mais je t'abandonnerai jamais. tu le sais ça ? je reviendrai. je t'aime, pardon... je suis désolée~ »

une lettre tâchée de larmes, tu la relis une dernière fois. tu te détestes autant que tu es soulagée. tu ne sais plus quoi penser. ton cœur se resserre alors que tu quittes ta chambre, partant acheter quelques petites choses. comme d'habitude, tu ne passeras pas la journée chez toi, en fait, tu n'étais pas censé revenir mais tu voulais serrer p'tit loup dans tes bras une dernière fois. seulement, tu étais loin de te douter qu'en rentrant chez toi, ta vie prendrait un autre tournant. que tu allais assister à.. ça. que tu allais en finir pour de bon avec ton père.

non, ton père ne te touchera plus jamais, il ne pourra plus jamais essayer de toucher ton frère. tu as tué ton père, tué ton avenir avec cet ange. tu t'es tué ce jour-là, sans en avoir réellement conscience. tu ne seras plus jamais la même, maika. mais tu l'as fait pour ton petit-frère, et jamais tu ne pourras sincèrement regretter ton geste.


2012 ☾ allongée dans ton lit, tu fixes le plafond. tu aurais dû être morte depuis 15 jours. tu aurais dû quitter cette planète. doucement, tu lèves ta main face à ton visage, scrutant le bandage qu'il y a autour de ton poignet. c'est tellement facile de se procurer des choses en taule... et toi tu as pu avoir ces lames de rasoir. tu étais prête à en finir mais non. on te veut encore sur cette putain de terre. pour une raison qui t'échappe totalement cela dit, mais t'es encore là. c'était égoïste de vouloir fuir avec clyde. tout comme c'était égoïste de vouloir fuir ce monde. tu aurais abandonné ton frère, encore une fois... mais t'en pouvais plus. et t'en peux plus. coincée entre quatre murs, tu ne cesses de te poser les mêmes questions. est-ce que ken va bien ? est-ce qu'il est heureux ? est-ce que le monde extérieur a beaucoup changé ? est-ce que ça vaut le coup de continuer de te battre ? est-ce que clyde t'en veut ? est-ce que le destin t'envoie un énième signe, te demandant d'être patiente et qu'un jour tout ira mieux ? tout ira jamais mieux... ça n'ira jamais mieux, maika.


2017 ☾ allongée dans ton lit, tu fixes le plafond. un goût amer dans la gorge. encore une fois, tu t'es salie, encore une fois, tu as vendu ton corps pour quelques billets. mais t'as pas le choix, maika, t'as pas le choix. tu ne supportes pas de devoir demander de l'argent à ton petit-frère, tu préfères y passer, te salir. de toute façon, t'es foutue.. pour maintenant. tu te lèves, passant sous la douche, comme la pute que tu es, tu aurais dû déguerpir après qu'il ait fait sa petite affaire mais pas avec manhee. il est différent des autres, peut-être pas à tes yeux mais son attitude avec toi l'est. après une bonne douche, tu enfiles un peignoir avant de revenir dans la chambre. un petit déjeuner, sûrement lui qu'il l'a apporté. tu t'installes, te mettant à grignoter. tu manges comme quatre, depuis toujours. tu as cette chance de ne pas prendre un gramme, c'en est presque un miracle lorsqu’on voit tout ce que tu manges... quand tu peux manger. « bien dormi? » manhee apparaît dans la pièce, s'installant à côté de toi. tu hoches positivement la tête sans réellement répondre. ouais, ça pourrait aller mieux si t'étais pas obligé de vendre ton cul pour garder ton petit appartement pourri. « dis... j'me disais, on pourrait partir un petit week-end, tous les deux ? ça te changerait les idées, non? je paye. » tu relèves tes yeux vers lui, arrêtant de manger. quoi... ? non, ça dépasse tout ce que tu pouvais imaginer. « pourquoi? » demandes-tu presque un peu trop neutre. tu veux juste savoir pourquoi il fait ça, pourquoi il te demande ça. « j'suis qu'une pute manhee, j'vois pas c'que t'attend de moi. » tu prends le bol de café, l'apportant à tes lèvres. tes mots sont durs mais tu as appris à l'accepter. tu ne fais que dire la vérité, pas vrai ? qu'est-ce qu'il cherche ? « arrête de dire ça.. » tu ne dis rien, qu'est-ce que tu devrais répondre au juste ? il sait tout comme toi que tu as raison. il ne veut seulement pas l'admettre, mais toi tu sais pourquoi. « tu m'vois pas comme ça parce que t'es amoureux de moi. » tu ne cherches pas à le regarder, certaines personnes disent de toi que tu es bizarre. parfois beaucoup trop sauvage mais tu n'y peux rien, tu ne sais juste pas comment t'y prendre avec les gens, t'es maladroite. mais cinq ans entourée de prisonnières, ça se paye. manhee ne dit plus un mot. il ne t'a jamais clairement dit qu'il l'était, mais toi tu le sais. « comment tu... » il ne termine même pas sa phrase. tu bois une gorgée de ton café avant de reprendre quelques petites choses à manger. « parce qu'on m'a déjà regardé comme ça. une fois. » sinon, on te regarde comme la pute que tu es, ou comme la meurtrière que tu es... ou seulement comme la femme étrange qui cache quelque chose ou qui ne sait pas approcher ni parler aux gens. rien de flatteur en soit... tu reposes ton regard sur manhee. « on ferait mieux de plus se voir... » tu dis ça pour lui, il a bien compris que son amour n'était pas réciproque. c'est méchant, c'est cruel, mais t'es pas une fille bien. ça de plus ou ça de moins... alors tu tentes de le préserver un minimum. il est si gentil, il ne mérite pas ça. manhee baisse le visage, sachant pertinemment que tu as raison dans ce que tu dis. un long silence s'installe, tu ne parviens même plus à manger. « j'ai... un petit appartement. je comptais le mettre en vente mais.. » il se lève alors que tu le suis du regard, il sort des clefs de sa poche avant de revenir vers toi et de te les donner. tu les saisies, hésitante. « prend-le, s'il te plaît. » c'est ce qu'il veut ? que tu habites dans cet appartement alors que tu viens de lui faire comprendre que ce n'était pas possible entre vous ? t'as du mal à parler aux autres, mais aurais-tu été si peu clair ? « tu auras un toit, au moins. » alors avant de te laisser, manhee t'offre ce petit appartement. parce qu'il est trop gentil. tu ne devrais peut-être pas accepter mais tu acquiesces d'un geste de la tête. avoir un appartement pour toi veut dire que tu ne vivras plus dans la peur d'être mise dehors. tu auras ton chez toi, tu ne peux pas refuser cette offre. ta vie est déjà un réel cauchemar. décidément, tu es tout sauf une fille bien... mais on finit par s'y faire.