tu connaissais l’état dans lequel elle était. tu l’avais expérimenté plusieurs fois pendant des années, alors tu savais ce qu’il fallait faire plus ou moins. chaque personne réagissait différemment suivant leur métabolisme et la dose de drogue qu’ils avaient ingéré. la jeune femme dans tes bras avait sûrement pris beaucoup plus que ce que son corps pouvait supporté et tu restes avec elle pour ne pas qu’elle fasse de trucs stupides ou qu’elle se sente mal et que personne ne le voit ou sache. tu ne sais pas exactement combien de temps tu restes avec elle, mais tu la berces essayant de la calmer, lui sortant des paroles rassurantes. tu veux qu’elle se concentre sur ta voix et ça à l’air de fonctionner parce qu’elle se calme lentement. elle se relève même mais elle retombe sur toi et tu la récupères une nouvelle fois dans tes bras. la jeune femme se colle contre toi, la joue contre la peau de ton coup et tu frémis à cause de ce contact. elle est froide parce qu’elle a pleuré. un autre frisson parcoure ton échine quand elle te touche, doucement, presque tendrement. tu n’es plus trop habituée à ça et ça te fait du bien. tu viens enrouler tes bras autour de son corps, ta main se posant sur ses cheveux que tu caresses lentement avec un sourire. « ça va mieux ? » que tu demandes alors que tu la serres un peu plus contre toi pour qu’elle n’ait pas froid. tu n’oses rien dire de plus de peur de la faire repartir dans une crise. tu restes donc silencieuse alors que tu lui donnes la tendresse qu’elle est venue chercher dans tes bras.

Wen Yi tremble contre ce corps chaud et doux. Dans sa torpeur elle ne réalise pas ce qu’elle essaye de faire. Ni cette tendresse qu’elle réclame, ni cette attention dont elle a besoin. Elle frémit contre cette peau douce et grimace à l’idée de devoir se lever. Sonnée et bien trop en bad pour comprendre qu’elle s’agrippait à une inconnue Wen Yi avait presque l’impression de flotter. Bercée dans un nuage de coton elle refusait de voir la réalité, elle refusait de voir à quel point la situation était triste et déplacée, mais surtout triste. Elle aimerait pouvoir changer de vie Wen Yi, changé d’air,  de monde, d’univers, de peau. Elle aimerait tout recommencer à 0 et à la fois rien changer pour ne pas prendre le risque de perdre Rei. Mais si Rei commençait déjà à abandonner, à lâcher prise, qu’était-elle supposé faire ? Il n’y avait rien de plus doux et d’attirant que la mort à cet instant. A quoi bon continuer de se lever tous les matins si c’était pour jouer la même mascarade … Elle était épuisé des faux semblants, des mensonges. La mort ne lui avait jamais paru aussi délicieuse. Elle ne supportait plus de devoir continuer de s’accrocher ainsi … et pourquoi ? Des coups ? Des disputes ? Des déceptions … Dieu qu’elle haïssait sa vie. À la question de la jeune femme qui résonnait en écho elle souffla « Non … ça n’ira jamais mieux. » Sa voix était éraillée et cassée, lointaine et abattu pourtant elle ne gémissait pas, ne  geignait pas, elle avait cette fatalité de gens qui ont décidé d’abandonner … De laisser tomber. Elle tente de se redresser, elle voudrait pouvoir se glisser sous la douche en sachant qu’elle ne pourrait pas se tenir debout sous le jet salvateur. 

tu gardes la jeune femme dans tes bras, essayant de la calmer du mieux que tu peux. tu lui donnes l’attention et l’affection qu’elle cherche et tu comprends parfaitement ce qu’elle ressent, plus que n’importe qui. toi aussi, tu as été dans cette situation un jour. tu as été au fond du trou et tu as été aidé par un organisme et des professionnels. peut-être que tu pourrais l’aider aussi ou faire en sorte de la diriger vers un établissement spécialisé. mais pour le moment, ce n’est pas le moment de parler de ça. elle va mal et vu que tu es là tu ne peux pas la laisser seule. sa réponse à ta question te serre le cœur et si d’ordinaire tu n’aurais même pas lancé un regard à cette inconnue, aujourd’hui c’est différent parce que tu as l’impression de te voir il y a encore quelques années. tu avais besoin qu’on t’aide et cette t’aide t’avait été apporté, alors tu ne peux pas la laisser dans la merde. elle essaie de se relever encore une fois et tu comprends qu’elle n’a plus envie d’être sur le sol froid de la salle de bain. « accroche toi à moi. » tu passes ses bras derrière ta nuque et tu la soulèves en prenant soin de garder ton équilibre. ce serait idiot que tu vous fasses tomber. tu la mènes dans la douche et tu allumes l’eau chaude. elle tombe sur vos corps collés l’un à l’autre. tu pourrais la laisser seule et partir, mais tu n’en as pas la force quand son regard happe le tien. tu peux y lire toute la détresse, toute la solitude, toute la peine qu’elle ressent et tu ne peux pas te résoudre à la quitter. il faut que tu restes avec elle. tu dois rester là.