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Happy Little Pill

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Happy Little Pill | Dim 9 Sep - 0:49
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PLAY | Y a plus rien qui compte. Y a sûrement rien qui ait jamais compté toute façon. Et voilà. La voiture. Le pont. L'humain et sa conscience. Nous quatre en tête en tête. Quelque part coincés entre  Séoul et sa banlieue. Peut-être bien que c'est Séoul. Peut-être bien que c'est juste la banlieue. Peut-être bien que c'est même pas la Corée. Sortir de la voiture par la porte du conducteur puis marcher le long de la barrière. Pour sauter ? Non. Pour pisser. Pour uriner ouais. Tout cet alcool, tout ces produits ingurgités, faut évacuer Jae. Faudrait peut-être aussi qu'on se tue aussi, ça serait pas une mauvaise idée. Mais ça fait trop drama. On mérite mieux que ça pas vrai ? Puis la mort c'est de la merde. La mort c'est de la merde autant que la vie. Puis le suicide par-dessus un pont c'est devenu trop mainstream. Tellement popularisé que y a des caméras partout prêtes à venir nous arrêter d'un moment à l'autre. Comme si on nous interdisait de mourir. C'était quoi encore cette loi à la con, interdiction à la mort. Retarder l'inévitable, à quoi ça servait ? On était mort il y a deux jours de toute façon. A  ce moment précis. A ce moment précis où elle avait sorti...c'était quoi déjà ce qu'elle avait sorti ? Les consommations ont sûrement du  effacer cet instant de notre mémoire. Alors voilà qu'on pleure. Depuis deux jours. On pleure sans s'arrêter. Elle est bien cette détox ? Cette détox technologique je veux dire. Plus de portable, plus personne à contacter. Seul entre nous. Moi et toi. Toi et moi. Nous. Nous au fin fond de ton esprit Jae In. Encore des pleurs. On a jamais autant pleuré. Même le jour où on a pas reçu le dragon ball z qu'on voulait on pleurait pas  à ce point. Pourquoi autant de larmes ? Qu'est-ce qui fait si mal ? Ce sentiment d’inexistence ? Ou ce sentiment de ne pas être aimé par l'être aimé ? Attendez stop. Ne serait-ce pas exactement la même chose ? Ne serait-ce pas un léger sentiment d'indifférence ? Un abandon précoce et inattendu ? Une personne ayant baissé les bras ? On a peur de ça là haut pas vrai ? A quoi bon sert-il de vivre si c'est pour vivre en étant rien. Pas vrai ? Rien. C'est ce qu'on est. Hein Jae In qu'on est rien ? On est rien aux yeux du monde. Rien. R.I.E.N. Le Néant. Le trou noir. La matière. Le temps. Rien. On est rien. Et le monde continueras de tourner après nous. Et quand les étoiles auront explosées, quand le soleil se sera éteint, on sera encore moins que rien. Des moins que rien. On est des moins que rien Jae In. Nous les premiers. Ça fait quoi d'être un moins que rien alors ? Ça nous donne goût à la vie ? Ça nous excite ? D'être rien. Rien. Aux yeux de personnes. R.I.E.N Rien. Ni pour Ae Yeon, ni pour Tae In, ni pour Na Yeon. Ni papa. Et encore moins pour elle. Ça fait mal pas vrai ? Ça fait mal d'avoir mal hein ? Ça fait longtemps qu'on a pas eu mal comme ça ? Ah bah on veut pas s'en rappeler ? On préfere crier ? Allez crions. Crions et donnons des coups de pieds contre des piliers en métal. Allez faisons-nous mal. C'est ce qu'il faut. Se faire mal. Se faire mal pour délivrer le mal. Ça consomme pour oublier mais ça se fait qu'empirer pas vrai ? Les effets inverses. Ça commence. Ça monte doucement. On préfère donc se laisser tomber par terre. C'est bien. On a toujours rêvé de dormir sous un pont, rêve réalisé Jae. Dormir ou giser au sol. On sait pas trop ce que c'est. On entends des klaxons non ? Es-ce que c'est la voiture qui dérange ? Est-ce qu'on va venir nous arrêter ? Est-ce qu'on va venir nous  sauver ? Des klaxons, encore des klaxons. Et si on nous écrase ? Et si on meurt ? Et après ? Est-ce que si notre cœur s'arrête est-ce que les leurs aussi s'arrêteront ? Est-ce qu'on est liés par le cœur ? Et si y a rien de l'autre côté ? S'il fait tout noir ? Et si en nous tuant on les assassine ? Maman sera pas contente. Maman sera pas contente. Après tous les efforts qu'elle a fait. Mais elle sera peut-être mieux aussi. Sans nous. Juste nous, pas eux. Juste nous. Ils seront peut-être tous mieux.

*


La lumière aveuglante. On nous oblige à garder les yeux ouverts. Les yeux explosés.  «Je veux mourir... » Et les larmes qui recommencent. Ce sont des pleurs de supplices on dirait. Un uniforme fait face à nous. Pitié pas papa.C'est peut-être là où on va finir ? Au trou. Frisson de peur. Pas la taule. Pas la taule. « Je veux appeler...S'il vous plaît laissez-moi appeler quelqu'un... je vous jure que j'ai tué personne...j'ai besoin d'un téléphone...» Encore des larmes. Des larmes puis le mucus qui l'accompagne. Y en a plein. Partout. On nous balance un mouchoir. La detox est deja finie ?  «Pour prévenir quand t'as plus de yaourt tu connais ce numéro ? » c'est ce qu'on vient de nous demander ? Est-ce que la question pourrait être répétée. « Je veux appeler... » Appeler qui ? Quel numéro connais-t-on ? Celui de Tae In. Oui. Celui de Tae In on connait. C'est le seul car il fini avec un 007. C'est le plus simple. Hochement de tête lorsque le téléphone se retrouve contre notre oreille. « Allo Tae In ? » Eclater en sanglots. C'est ce qui se passe d'un coup. Des eclats, des vrais. De sanglots. Accompagnés de spasmes ou de trucs qui y ressemblent. On est pas bien Jae In. On est pas bien ici. « Tae In...je veux plus...je veux plus vivre. C'est de la merde ! Je sers à rien, je sais rien faire Tae In...tu m'entends ? Je veux plus je veux plus....je veux mourir maintenant...mais si je meurs...si je meurs et que vous êtes pas là...et si y a rien là bas ? Et puis tu meurs pas hein ? Vous mourrez pas hein ? Je suis pas fait pour aimer les humains Tae. Ae Yeon elle l'a dit ! Elle a dit que je savais pas...alors ça sert à rien...Je suis désolé...je suis désolé d'être moi je veux plus...c'est de la merde...c'est trop dur...» spasme un. Spasme deux. Spasme trois. Et puis un cri ou deux. Et la crise existentielle qui reprends depuis belle. Les frissons qui reprennent le dessus. « je suis rien. Tae...c'est nul. Tout est nul. Je veux plus vivre comme ça...je veux plus être...les gens m'aiment pas... et elle m'aime pas...elle m'aime pas Tae...tu m'entends...et... » « Bon ça suffit reprenez lui le téléphone, allo ? On vient de retrouver un certain Kwon Jae In qui était allongé près de sa voiture sur le p... » Et si c'était la mort le truc trop mainstream ? Si vivre c'était le nouveau truc d'hipster Jae ? Si on était les premiers à vivre? A vivre loin de tout. Loin d'eux, loin d'ici. Juste loin. On ira vivre autre part. On vivra seuls au monde. Juste moi et toi. Juste toi et moi. Juste nous.
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Re: Happy Little Pill | Dim 9 Sep - 2:06
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« Je sais que ça peut faire peur parfois, changer d’environnement, mais tu verras, ça se passera bien. Tu vas pouvoir rencontrer plein de nouvelles personnes, te faire de nouveaux amis. » Le ton aussi rassurant que possible, je lève les yeux vers mon écran, fronçant les sourcils en entendant les paroles à l’autre bout du fil. « Non, je ne vois pas pourquoi ils s’en prendraient à toi, s’ils ne te connaissent pas. De toute façon, si quelque chose se passe mal, n’hésite pas à rappeler ici pour en parler, surtout. Oui. » Ces étudiants qui craignent le changement d’école… Un classique. « Bonne nuit à toi aussi ! » Satisfaite de ma prestation, et souhaitant sincèrement que cette fille s’en sortira dans son nouvel établissement, je raccroche avant d’ôter le casque qui se trouve encore sur mes oreilles. Une longue soirée. Je glisse une main dans mes cheveux en soupirant légèrement. Sincèrement, la dernière était mignonne avec ses inquiétudes, mais j’aurais pu me passer de cette mégère qui appelait juste pour râler sur le dos de son mari. Le pauvre gars doit être névrosé avec une femme pareille, si vous voulez mon avis. Le problème, c’est qu’on ne peut pas lui dire qu’on n’est pas d’accord avec elle. On doit l’écouter, essayer de la conseiller ou, si elle ne demande aucun conseil, fermer notre gueule et attendre qu’elle ait terminé sa comédie. Je récupère ma veste pour aller pointer, saisissant au passage une conversation entre un collègue et son interlocuteur du bout du fil. Un passage qui me serre le cœur malgré moi. Je reconnais ces paroles, ce ton. Il attend que ça soit terminé. Un frisson court le long de mon dos. Par chance, je n’ai jamais eu à supporter une conversation comme celle-là. Vous voulez que j’appelle une ambulance ? l’entends-je encore dire alors que je m’éloigne, les lèvres pincées. Au moins, celui-ci ne partira pas complètement seul. C’est ce qu’il faut se dire, quand on reçoit un tel appel. C’est ce que je penserais, si je devais être là, à continuer à parler jusqu’au dernier moment. C’est notre travail aussi, après tout.

Vérifiant que je n’ai rien oublié, je me dirige vers la station de métro la plus proche afin de prendre la route de la maison. Il ne faudra pas que j’oublie de préparer le travail que je dois rendre à cet imbécile de Kwang Oh. Votre petit air effronté ne me fait pas rire du tout, mademoiselle Kwon. Évidemment. Je n’ai pas l’air de la petite étudiante modèle, parfaite sous toutes les coutures. Enfin, si ça lui plaît de penser comme ma « mère », qu’il le fasse. Ça ne change pas grand-chose, de toute façon.

Je suis en train de descendre les marches qui me mèneront à la station quand je sens mon téléphone vibrer contre ma taille, à l’intérieur de mon sac. « Hm ? » Un appel ? À cette heure ? J’ai oublié quelque chose au bureau ? Je fronce les sourcils et j’extirpe l’appareil de mon sac, après avoir un peu fouillé. Un numéro inconnu… J’hésite un instant avant de décrocher, surprise d’entendre une voix familière. « Allô ? » Jaein. Je ne suis pas certaine, pour le coup, mais j’ai trop peur de l’interrompre, alors je l’écoute. Un réflexe. J’avais envie de nouvelles, mais je ne pensais pas qu’elles arriveraient à cette heure. Et pourquoi il me prenait pour Taein ? Je ne me demande pas pourquoi il dit des choses pareilles. Je ne sais pas exactement quelles difficultés il a, mais je sais qu’il en a. On en a tous. Certains plus que d’autres, et j’en sais un morceau.

Je suis tirée de mes réflexions par une bande de jeunes qui passent à côté de moi en manquant de me bousculer.  C’est une autre voix qui me parvient. « Oui, je suis une amie à lui. » réponds-je par réflexe. S’ensuit un blabla traditionnel de policier. Aussi connus comme des gars qui sont censés recevoir une formation psychologique pour apprendre à gérer des cas pareils, mais qui ne sont parfois pas plus doué qu’un mec bourré avec un balais dans le cul quand il s’agit de gérer les gens. Il m’indique où ils sont. Pas sur mon chemin, visiblement. Tant pis.


Pourquoi est-ce qu’il s’est retrouvé là ? Pourquoi est-ce qu’il était sur un putain de pont ? J’ai bien une idée, mais elle ne me plaît pas vraiment. On aura beau dire ce qu’il veut de lui, ce mec nous a organisé un voyage, s’investit pour la fraternité depuis des années, et même s’il un peu bruyant parfois, je suis convaincue qu’il se donne un genre. Tu ne fais pas des études en aéronautique quand t’es un kéké des plages pas foutu d’aligner deux phrases sans faire une phrase. Évidemment, je peux me tromper, mais j’en doute fortement dans son cas. Je pousse un soupir en m’approchant du bâtiment. À croire que je passe ma vie au commissariat dernièrement. Entre les histoires avec ma tante et ça, maintenant. Enfin, au moins, on ne va pas m’interroger cette fois. Du moins, je ne pense pas. Je m’approche de l’accueil sans attendre. « Kwon Naeun. On m’a appelé au sujet de Kwon Jaein. » J’attends qu’on accepte de m’emmener le voir. Parfois je me dis qu’en étudiant la psychologie, on s’expose au risque de regarder les autres se détruire sans rien faire. Comme quand on reçoit ces putains d’appels et que quelqu’un vous dit qu’ils vont se tuer, que vous n’avez pas d’autre choix que de l’écouter et d’accepter la dure réalité. L’esprit est le plus vicieux des conseillers. Un conseiller qu’il vaut mieux faire taire, par moment. Mais ce n’est pas une chose facile pour tout le monde. Pour personne, je crois.

On me laisse enfin approcher de ces deux mètres de bêtise concentrée. « Bonsoir Jaein. » Je m’assieds quelque part et je pose les yeux sur lui, mon sac sur mes genoux. Il a pleuré. Ça se voit tellement. « Je suis pas Taein, mais je suis venue te chercher. » Ouais, la vie c’est parfois compliqué, tu crois que t’appelles ton frère mais en fait t‘appelles la meuf que tu nies depuis des jours alors qu’elle prenait de tes nouvelles. C’est pas ironique ? « Du coup, maintenant que je suis là, j’espère que tu vas au moins m’expliquer comment t’as fini allongé sur un pont à une heure du matin ? » Pas de jugement de valeur. C’est la première chose qu’on vous apprend, en psychologie. Tu dois écouter, pas juger ce que l’autre te dit. Je ne suis pas venue pour le juger ou pour lui faire la morale. Je crois bien que c’est la dernière chose dont il a besoin actuellement.
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Re: Happy Little Pill | Mer 12 Sep - 9:59
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She'll kill you | Un temps. Puis deux. Puis même peut-être trois temps de réaction. Il nous en faut beaucoup pour comprendre ce qui nous arrive. Ou du moins essayer de le comprendre. V'la qu'une nana arrive. On la connait pas vrai ? C'est notre copine à nous Jae In. Elle aussi elle veut mourir ? Ou alors elle est venue ? Pourquoi elle vient quand on appelle le frère ? Ils sortent ensemble c'est ça ? Il veut encore taper dans notre territoire le frère ? «Non...Je veux pas laisse-moi tranquille » On émet alors des sortes de gémissements plaintifs, on veut partir d'ici. Mais c'est pas vraiment possible, pas pour le moment. On sait pas trop ce qu'ils attendent. Et notre tête qui vient frapper contre la table en face de nous. C'est froid contre notre joue. Ça fait mal à la tête. Ça fait pleurer. Encore et encore. «Pourquoi vous en finissez pas? » Ils attendent quoi putain ? Ça fait tant de temps que tu demandes. Pourquoi ils te laissent pas crever ? Ça serait tellement plus simple. «ça sert à rien... » On relève notre visage pour faire face à la revenante. Ou peut-être que c'est nous le revenant ? Est-ce qu'on moins on est déjà parti pour pouvoir revenir ? Et est-ce que....hein ? « ...quoi ? » On la regarde, l'air hébété, un sourcil haussé, la lèvre supérieure relevée, le temps que la question monte au cerveau. Ça on a bien entendu, mais est-ce qu'on a compris c'est une toute autre histoire. On s'étire d'un coup en baillant. Baillement qui ressemble plus à un rugissement de lion agacé. «je faisais pipi...sur le pont. J'ai rien fait ok ? J'ai tué personne. Sauf moi. Moi je vais me tuer. Je vais me tuer moi et moi. Je vais tous nous tuer ! Je faisais pipi sur le pont c'est tout... okay ?» On la fixe. On aimerait un mouchoir mais les gars en uniforme ils ont pas l'air de capter ça. Ils attendent quoi ? Je veux dormir. Je veux un lit. Je suis qu'au moins chez les morts y a des putains de lits et y a personne pour nous interdire quoi que ce soit. Y a pas de choses mal ou bien. Et y a que des gens qui vous aiment. «Je veux pas retourner là bas » On secoue la tête. À la maison. Chez nous. «Ils vont me dire que je suis méchant. Et que je suis egoîste. Ils vont dire que je pense pas à eux...que je pense jamais à eux, mais c'est eux qui m'aiment pas. Ils m'aiment pas...regarde j'appelle Tae In et c'est pas lui qu'est là, tu vois ? Il s'en fout! Ils m'aiment pas et ils m'aimeront jamais. Pourtant j'ai donné tout ce que je pouvais...mais ils m'aiment pas quand même. Et maman non plus elle m'aime pas. Elle se sert de moi mais elle m'aime pas. C'est peut-être elle... » C'est peut-être elle qui devrait crever. Si elle crevait tout irait mieux. Si on la tuait bien comme il faut. Mais après on nous priverait encore de notre liberté. Alors ça sert à rien. Vaut mieux se tuer. Au moins y a plus personne pour vous faire chier une fois que vous êtes morts. Y a plus personne pour vous juger non plus. C'est mieux. C'est tellement mieux.

*
La lumière aveuglante de nouveau. Cette fois elle provient du soleil. On la reconnaîtrait entre mille cette lumière. Peut-être que finalement j'ai fini comme Frodon après qu'il ait été confronté au mordor à la fin du Retour du roi. Mais moi je suis pas un putain d'hobbit. J'ai pas besoin d'un Sam pour me sauver la peau. J'ai pas besoin d'un Sam pour me ramener chez moi. (top là si t'as capté la ref des Sam lolol). D'ailleurs je suis pas chez moi... Soupir de soulagement. Peut-être que je suis bel et bien mort après tout. S'ils sont pas là c'est que je vais pouvoir vivre enfin sans cet énorme fardeau sur ma tête. Je me lève soudainement, la trique entre les jambes. Je crois pas que je suis mort, sinon ce machin là marcherait plus. Je vais ouvrir la fenetre, en plissant les yeux parce que la lumière me tue. Y a pas assez de vert pour être sur la Terre du Milieu. Je crois que je suis toujours dans cette ville de merde. Comment j'ai fait pour revenir là ? Je regarde où je mets les pieds, en trainant ces derniers jusqu'à la porte. J'ouvre celle-ci, l'autre main déjà fourrée dans mon calbut. «Y a quelqu'un ? » La soudaine peur d'être seul. Si je suis seul je pourrais plus jamais parler à personne. Je sais pas où je suis ça me fait peur. Je retourne dans l'autre pièce pour chercher mon portable sous mon oreiller. Il est pas là. Ni en dessous du lit. Ni a côté, ni entre les lattes. Je relâche d'un coup le matelas avant de pousser une sorte de rugissement. Je me rallonge, je remets la couette sur moi. Je me rendors. Je veux dormir. Je veux que ce mal de tête me foute la paix. Je veux une meuf. Je veux baiser. Je veux une putain de meuf oui. Une belle meuf avec des beaux seins, et des belles fesses. Je veux qu'elle me grimpe dessus et qu'elle me dise qu'elle m'aime. Je veux la prendre devant, derrière partout, je veux qu'elle se souvienne qu'elle est à moi. Je veux me sentir vivant en elle. Juste en elle. Je veux qu'elle me dise qu'elle m'aime jusqu'à ne plus en pouvoir. Je veux qu'elle crie. Je veux qu'elle vienne. Je veux qu'elle existe. Grâce à moi. Je veux qu'elle m'aime. Qu'elle m'aime moi. Juste moi.
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Re: Happy Little Pill | Jeu 13 Sep - 20:46
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Que fais-je là, exactement ? J’aimerais me dire que je sauve une vie. On a tous ce syndrome du héros, je crois ? Ce plaisir d’entendre qu’on a aidé quelqu’un, qu’on a été là pour lui, au moment où il en avait besoin. Mais je sais aussi que ce n’est pas vraiment ça. Je n’attends pas qu’on me remercie pour être venue dans ce foutu commissariat. Je n’attends pas qu’on me dise, hey Naeun, c’était vachement cool, ce que t’as fait hier. Je crois que je m’inquiète juste énormément à l’idée que Jaein puisse en vouloir à la vie au point d’ôter la sienne. Parce que c’est une pensée préoccupante, et que, même si c’est une chose qui arrive très souvent dans notre pays, on change facilement d’opinion lorsque cela touche une personne de notre entourage.

Parce qu’en toute honnêteté, je ne le connais pas si bien que ça, Jaein. Je sais que son frère bosse au secrétariat de l’école parce que j’ai eu la savante idée de perdre un livre, ce qui m’a poussée à aller le chercher. Je sais qu’il a une sœur chez les Pyo, qui ne me supporte absolument pas, au point de refuser de me répondre quand je lui demande des nouvelles. Mais à part ça, je sais quoi ? Qu’il vole mes yaourts à la fraise, ouais. Qu’il est DJ à l’Epsilon, aussi. Qu’il a l’air de ce genre de personnes qui sourient, mais seulement au dehors. Ça, je l’ai surtout appris ce soir, en l’entendant au téléphone. Je ne sais même pas s’il ne me considère pas juste comme la meuf relou qui passe son temps à lui reprocher de voler ses yaourts.

La vérité, c’est que malgré moi, je m’habitue aux gens. On le fait tous, plus ou moins. Vous savez, c’est comme cette grand-mère que vous croisez parfois, dans votre banlieue, sur le pas de sa porte, et qui observe les enfants qui jouent dehors, sur le trottoir d’en face. Vous ne lui avez jamais parlé, vous ne savez rien d’elle, à part ce que les rumeurs racontent. Puis un jour, elle disparaît, et vous ne pouvez pas vous empêcher d’éprouver un sentiment de vide, quand vous regardez le seuil de la porte où elle se trouvait. Parce que vous vous êtes habitué à elle. Parce qu’elle a commencé à faire partie de votre environnement, de vos points de repère, d’une façon ou d’une autre. Ça va d’autant plus vite, quand vous n’avez pas beaucoup d’amis et que votre entourage se résume à quelques étudiants dans votre fraternité universitaire. Alors non, je ne pouvais pas le laisser comme ça. Je m’inquiète, et cette inquiétude est sincère.

« Tu préfères rester là avec eux, peut-être ? » Les flics, évidemment. Je ne sais pas s’il est en mesure de comprendre quoi que ce soit, à l’heure actuelle. Il a l’air d’un fou. Et voilà qu’il chouine. Je soupire malgré moi. « En finir avec quoi ? » Avec les questions ? Il est confus, de toute évidence. Il ne faut pas être Einstein pour le remarquer. Ma foi, c’est en dégrisement qu’ils auraient dû l’enfermer un moment, pas là. Je ne répète pas ma question, il va sûrement percuter. Enfin, j’espère. Je ne sais pas si j’arriverais à lui faire comprendre quoi que ce soit, là, tout de suite. Je le laisse bâiller, s’étirer, tout ce qu’il veut. Ce n’est pas en m’énervant que j’aurai le dessus. Puis, aussi, je suis fatiguée. Après tout, je viens de sortir du boulot. « Je n’ai pas dit que tu avais fait quelque chose de mal. Mais tu ne vas tuer personne, d’accord ? » C’était sûrement inutile. Je soutiens son regard sans rien ajouter. Parce que oui, je suis sérieuse. Je veux bien croire qu’il allait pisser si ça lui chante, mais alors qu’il ne raconte pas qu’il va se tuer après. On appelle ça niquer ses arguments, vulgairement parlant. Et voilà qu’il recommence. Méchant, égoïste. Je n’en sais rien. Je ne le connais pas assez. Mal en point, ça, oui. J’en suis même persuadée. Je l’écoute en silence, sans détourner les yeux, cherchant à comprendre le problème.

« Jaein. » Je l’interromps sans savoir s’il compte continuer. Ça ne sert à rien de raisonner avec un type pété, s’il est persuadé d’avoir raison. Ça risque juste d’empirer des choses, de l’enfoncer dans son raisonnement malsain et de le convaincre encore plus qu’il a raison. Parce que j’ai aucune preuve qu’il a tort, j’ai aucune preuve qu’il a raison. Je ne peux pas juger d’une situation que je ne connais pas. « Si je ne te ramène pas chez toi, t’es d’accord de venir avec moi ? Tu me fais confiance ? » Une chose est sûre, dans tous les cas : il ne peut pas rester tout seul ici, et encore moins tout seul tout court. Il suffirait d’un rien pour qu’on le retrouve en bas d’un pont ou pendu à une branche. Si ce n’est pire. Enfin, c’est peut-être juste un comédien, ça existe aussi, mais généralement, les comédiens, ils hurlent à tout bout de chant qu’ils veulent crever et ils le montrent ostensiblement. Pour le plus grand malheur des vrais dépressifs.


Ça va faire vingt minutes que j’ai commencé à travailler, sur la table de la salle à manger, avec une tasse de café pour me réveiller. Jaein dort encore en haut. Du moins, il dormait quand je suis remontée pour chercher mes livres de cours, après m’être réveillée sur le canapé en pensant que j’avais fait le cauchemar le plus bizarre de ma vie. Mais visiblement, ce n’en était pas un, alors je vous passe les détails de la nuit chaotique que je viens de passer, à essayer de faire grimper Jaein dans un taxi pour le ramener à bon port. Enfin, à la maison. Parce que je vais être honnête avec vous, je ne sais pas si c’est vraiment le meilleur endroit où quelqu’un voudrait être. Pas moi, en tout cas. Je suis plongée dans mon cours de neuroanatomie structurelle et fonctionnelle quand j’entends enfin du mouvement à l’étage. La marmotte est en mouvement, je répète, la marmotte est en mouvement. Faut dire que ça ne m’étonne pas vraiment, vu l’état dans lequel il était cette nuit. Je referme mon livre pour me redresser, repoussant ma chaise avant de prendre une gorgée de café et de me diriger vers ma chambre, où j’ai fait crécher monsieur je-faisais-pipi-sur-le-pont-c’est-tout-okay-?, avant de frapper deux coups sur la porte et de la pousser. Il s’est recouché. Ce n’est pas possible. « Fais pas genre tu dors, je t’ai entendu. » Je croise les bras sous ma poitrine, les yeux posés sur la montagne qu’il forme avec le drap sur la tête. Je ris un peu. Sérieusement. « Allez, si t’as envie de bouffer quelque chose, ça se passe en bas. » Parce que ça ne lui rendrait pas service, si je lui apportais tout, pas vrai ? Je l’ai déjà ramené ici, qu’il s’estime heureux. Alors j’attends qu’il bouge. Et il bougera.
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Re: Happy Little Pill | Sam 2 Fév - 16:40
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On pourrait être content d’entendre cette voix grave. Après avoir passé plusieurs heures dans les limbes de notre cerveau, revenir à la réalité devrait être une chance, pas vrai ? Non. Pas vrai. Peut-être que finalement c’est beaucoup mieux d’être seul. Seul. Ils disent qu’on né seul et qu’on meurt seul. Peut-être bien que c’est vrai. Peut-être bien que c’est faux. Peut-être qu’il y a quelque chose après. Peut-être qu’il n’y a rien. Peut-être que tout en fait. Peut-être que c’est mieux si on me laisse loin de tout pour le moment. Je, on, nous, nous, on, je. Je sais plus. Juste arrêter de penser. Dormir. Dormir. Juste dormir et oublier tout ça. Oublier cette voix. Et puis un cri. Le nôtre. Un rugissement dans notre tête. Tout se passe dans notre tête. Peut-être qu’on est vraiment mort. Ou peut-être pas. Peut-être qu’on vit toujours. Et la transpiration qui commence à naître sur le front et sur le bout du nez, un trop peu d’oxygène confiné sous cette couverture. Froid. Chaud. Chaud. Froid. Jour. Nuit. Nuit. Jour. Fermer les yeux. Les ouvrir. Les ouvrir. Les fermer. Beaucoup trop d’incertitudes pour un seul homme.

Puis cette fois du bruit extérieur. Et une voix. Féminine. Qui semble s’adresser à nous. C’est pas violent. C’est pas doux non plus. C’est juste une voix. Puis des mots. Et mon corps qui y répond de façon modérée. Un estomac qui semble gargouiller inconsciemment. Un cœur qui se met à battre un peu trop vite. Et notre tête qui sort finalement de sa cachette. La voilà la voix féminine. En face. A attendre. Et des frissons qui hérissent les poils des bras. Juste nous contenter de la regarder sans rien dire. C’est donc elle qui nous a sauvé hein ? C’est grâce à elle qu’on est là. C’est elle qui nous, qui m’a sauvé. Pas vrai ? Parce que elle, elle doit sûrement savoir gérer les relations humaines.

Le cœur bat toujours autant. Feignant la tachycardie. Il vaudrait mieux la suivre. Mais si jamais ils sont là en bas ? S’ils sont la pour crier et dire « on a eu peur » ça sert à rien. S’ils avaient eu peur je serai chez eux à l’heure actuelle. Et je ne suis pas chez eux. Je suis tout sauf chez eux. Alors je dois être chez elle. Une fois installé à table je fixe le livre ouvert en plein centre ce celle-ci, comportant une page sur ce qui semble être une coupe de cerveau. Mon cerveau a moins, il a comme oublié son nom. Pourtant je l’ai sur le bout de la langue. Mais des prénoms féminins j’en ai beaucoup trop sur le bout de cette dernière. Alors je l’appellerai pas. Je connais son nom. Je vous dis que je le connais. Na. Na quelque chose. « … » Je fixe tour à tour le livre et la coréenne. C’est elle qui lit ce genre de trucs ? « T’as jamais eu envie de juste…te tuer ? » je demande soudainement, la main fourrée sous mon boxer. « Je veux dire, juste comprendre que vivre ça servait à rien ? On naît…plus ou moins en bon état, plus ou moins dans une bonne famille avec plus ou moins d’argent…Ensuite on nous mets à l’école. On nous apprends des trucs plus ou moins intéressants… On nous apprends ensuite à faire plus ou moins un métier plus ou moins intéressant lui aussi pour gagner plus ou moins d'argent. Tout ça dans le but d'être plus ou moins heureux. Et ensuite, on nous dit de se trouver quelqu'un, pour fonder une famille mais de pas trop attendre, parce qu'après c'est compliqué. On nous dit de bien choisir, mais de pas trop essayer partout. On nous dit de choisir le mieux pour nous mais on nous engueule parce qu'apparemment ce qu'on pensait être le mieux, n'est pas bon. On fait ce qu'on pense nous rendre heureux pour au final s'entendre dire que c'était le mauvais choix. » commencé-je , les yeux devenant humide de nouveau. Sûrement la fatigue. Ouais. La fatigue. « On nous apprends à l'école comment compter, comment écrire, on nous apprends des noms de cités perdues à l'autre bout du monde pour enrichir notre culture, mais on nous apprends pas à...être. On nous apprends pas à être en tant qu'humain et ça.... » dis-je en pointant le schéma du cerveau imprimé sur le livre devant moi « ça. C'est ce truc qui nous rend comme ça, et c'est ce truc qu'on nous apprends pas. On nous apprends pas à vivre. On nous apprends pas à survivre. On nous apprends pas comment vivre. On nous apprends juste sois-disant le meilleur chemin pour avoir une vie que tout le monde nous enviera. Alors ils commencent dès petit. Car quelqu'un qui réussi. C'est quelqu'un bon en maths. Et quelqu'un bon en maths il sera fort. Il aura pas de vie mais il ira loin. Il finira dans une des trois grandes universités. Et ensuite il se trouvera un boulot. Un petit boulot dans une grosse entreprise puis là il passera sa vie à gagner de l'argent pour s'acheter sa super maison dans laquelle il ira jamais puisque de toute manière il sera beaucoup trop fatigué pour rentrer chez lui. Avec un peu de chance il rencontrera une fille rencontrée par un site de rencontre et ils trouveront bon de se cajoler un peu parce qu'un humain bon en maths, reste quand même un humain et qu'il faut bien qu'il se vide un peu. Un peu trop parfois au point où il engrossera la bonne femme. Mais vu que c'est mal vu alors il l'épousera, peut-être bien qu'il l'aimait même pas. Mais s'il l'épouse pas, ça sera un déshonneur sur sa famille. Alors il va l'épouser. Puis un enfant, puis deux, et la vie continue. Il retournera bosser 100 heures par semaine et il finira dépressif car c'est comme ça qu'on fini tous. Car un moment y a Tata la maladie qui vient sonner à la porte. Elle dit qu'elle vient pas seule car y a Cousine La Morte qui arrive. Et c'est d'elle qu'on parle pas assez. On nous apprends à oublier qu'elle existe. Et...[.b] » Des spasmes en veux-tu en voilà. Des larmes encore des larmes. « [b]Peut-être qu'on aurait voulu la croiser plus tôt, ou plus tard, ça dépend des gens. Mais on nous en parle pas assez. Et tout le monde fait tout pour la retarder. Alors que peut-être qu'il faut juste vivre avec elle et la laisser venir quand c'est le bon moment. » Mal de tête qui continue. «J'ai passé 24 ans à me mêler des affaires de mon frère...parce que je m'inquiétais. Mon frère aime les hommes. Enfin non, il aime tout. Il pourrait baiser un arbre s'il fallait, mais, il aime les femmes, il aime les hommes, il a cette....ouverture d'esprit que j'ai pas. Il est capable de faire des choses que moi, avec mes deux bras et mes deux jambes j'arrive pas. Et j'ai passé des journées à l'engueuler et à le rabaisser pour ce qu'il faisait...Parce que j'avais peur qu'il lui arrive un truc. Qu'il se fasse taper. Ou tuer ou je ne sais pas. C'est tellement mal vu....Toute sa condition est mal vue ici... Ma sœur a passé sa vie à lutter contre des tas de dialyses et compagnie, elle a pas eu la chance d'avoir les études que j'ai eu, elle a pas eu l'occasion de faire du sport comme je l'ai eu... mais je lui ai donné une partie de moi pour la sauver. Parce que je.... Parce que j'aurai pas supporté une vie sans elle et que je préférerai me sacrifier plutôt que de la regretter tous les jours. Et mon autre sœur...Elle ne semble pas avoir grand chose. Mais je sais qu'elle va pas bien non plus, que.... » je cogne ma tempe de mon doigt. « Que dans sa tête il y a quelque chose qui cloche. Et...je sais pas quoi faire pour qu'elle soit totalement heureuse. De mon côté, on me critique toujours pour ma manière de faire, ou ma manière d'être, ou pour les gens avec qui je traîne. Et je crois...je crois que ce sera toujours comme ça en fait. » dis-je en secouant la tête. « Je trouverai jamais quelqu'un qui m'aime pour la totalité de ce que je suis... à part moi-même. Je pensais que ma mère le pourrait. Mais j'ai finalement compris que non. On a beau faire un enfant, on peut pas s'obliger à aimer l'enfant. On peut pas s'empêcher d'en avoir des préférés. Et d'un côté on veut pas les perdre. Mais c'est pas pareil. Parce que si Tae In meurt ça sera une victime. Il sera mort à cause d'un accident. Ou peut-être d'un suicide, mais lui c'est compréhensible. Si Aeyeon meurt ça sera pour des soucis de santé. Parce que ça s'est aggravé. Et parce que Aeyeon elle, elle se sera battue toute sa vie pour ça. Aeyeon c'est une battante hein ? Aeyeon elle a le droit d'avoir tous les problèmes du monde. Elle a le droit d'insulter son frère qui s'est sacrifié pour elle. Si NaYeon meurt. Si Nayeon meurt on dira qu'on a été con, de pas s'inquiéter avant. On dira qu'elle a du avoir des blessures qu'on a jamais vu. On trouvera des excuses, qu'elle était sûrement anorexique, que c'est pour ça qu'elle mangeait peu. Et si je meurs. Si je meurs on dira que je l'ai bien cherché. On dira que j'avais été prévenu. Je suis sûre même que maman sera soulagée. Si je meurs ça sera ma faute. Parce que j'avais tout pour réussir apparemment. Parce que j'avais les jambes, la santé et l'école parfaite. Alors j'ai pas le droit. J'ai pas le droit d'avoir des problèmes. J'ai pas le droit de me plaindre. J'ai pas le droit d'être plus à plaindre que d'autres. Et vu que je trouverai jamais quelqu'un qui m'aime pour tout ce que je fais parce que personne ne se ressemble, et que personne n'est moi je préfère être seul. Je veux personne pour m'empêcher de penser. Je veux personne pour m'empêcher de faire ce que je veux faire. Et d'être ce que je suis. J'ai pas demandé à être ici. J'ai pas demandé à être sur cette putain de planète de merde, dans ce pays de merde, ni dans cette famille. J'ai rien demandé. Alors je veux juste, qu'on me foute la paix, et toi t'es là. T'essayes encore de me sauver alors que tu vois bien que y a rien à faire. Alors je te remercie d'être venue. Je te remercie de m'avoir emmené je sais toi. Je sais pas ce que tu veux en échange mais... Je veux plus. Je veux plus essayer de m'intégrer à cette société de merde, avec des gens qui critiquent chaque fais et gestes. Je suis pas quelqu'un capable de gérer. Je suis pas quelqu'un capable de penser à l'autre, elle l'a dit. Je suis pas quelqu'un qui puisse gérer une quelconque relation humaine. Alors essaye pas de... me raisonner ou je sais pas quoi s'il te plaît. Je suis très bien tout seul, d'accord ? » finis-je avant de plonger ma tête dans les bras pour venir éclater en sanglots soudainement entre ces derniers.
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Re: Happy Little Pill | Mer 20 Fév - 15:49
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Dans le fond, on se connait pas vraiment, Jaein et moi. C’est un gars de la même fraternité, ce genre de type dont tu peux dire sans le connaître qu’il se donne un genre, mais qu’il est pas si con qu’il en a l’air. Du moins, c’est ce que je vois. Je suis peut-être dans le faux, mais c’est le sentiment que j’ai quand je le regarde, quand je vois l’énergie qu’il dépense pour aider la fraternité, pour nous rendre heureux, organiser des activités. Et ça doit être tellement, tellement épuisant. J’ai mieux choisi mon rôle, quand on y pense : la meuf populaire qui doit rien à personne, qui emmerde le monde et que les gens détestent. Des conneries. Je suis incapable de rester indifférente devant une personne qui va mal. C’est sûrement ma vocation qui s’exprime, ce besoin d’aider les autres, de ne pas être une de plus qui ferme les yeux sur le mal-être d’un de mes semblables. Et le mal-être de Jaein, c’est difficile de passer au-dessus, là, tout de suite. Faudrait vraiment ne pas avoir de cœur.

Alors, je l’écoute. Ça sert à rien de lui dire d’arrêter. S’il a des trucs sur le cœur, s’il a besoin de parler pour mettre de l’ordre dans ses pensées, c’est mieux qu’il le fasse. Je suis pas là pour juger ce qu’il dit, ce qu’il pense. On est tous différents, avec nos sensibilités. Ne pas poser de jugement de valeur, c’est une des premières choses qu’on nous ordonne, quand on entre en psychologie. Pourtant, c’est humain. On juge forcément, à un moment ou à un autre. On se dit « non, t’as tort ». Et c’est là qu’on voit les bons psys et les mauvais. Ceux qui font la différence entre leur ressenti et celui des autres. Ceux qui comprennent, et ceux qui essaient d’imposer leur façon de voir les choses. Je ne suis pas de ceux qui vont ordonner aux autres une façon de penser. Ce que les gens disent, ce qu’ils montrent, ce n’est jamais que la face visible de l’iceberg. Et comme les icebergs, on part tous à la dérive, à un moment ou à un autre.

« Je veux rien en échange. Et j’essaierai pas de te raisonner. » Je fronce les sourcils en secouant la tête, les bras croisés devant moi. J’étudie pas la psychologie pour devenir une donneuse de leçon. « Mais si t’as besoin de parler encore, tu peux le faire. Je suis pas là pour te juger ou pour te dire que t’as tort de penser comme ça... » Je soupire un peu, songeuse. « Si ça te fait du bien, tu peux jurer, tu peux dire tout ce que tu veux. Ça sera mieux dehors que dedans. » Je n’irai rien répéter. C’est pas mes affaires. Là, tout de suite, je suis surtout préoccupée par ce qu’il raconte. « Préviens-moi juste si t’as besoin de quelque chose, d’accord ? » Je lui adresse un petit sourire bienveillant. Il a beau dire qu’il est bien tout seul, j’ai comme un doute. Quand on est bien tout seul, on pleure pas comme ça. Je suis pas très bien placée pour comprendre sa situation familiale, mais je sais ce que ça fait, d’avoir une mère qui nous accorde pas beaucoup d’attention. « Je suis pas là pour t’enfoncer, Jaein. Et même si t’es mieux tout seul… Je suis là au besoin. » Il ne s’en sortira pas, tout seul. Je peux juste croire ce qu’il me dit, mais malgré tout, j’ai du mal à croire qu’il aille parfaitement bien.
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