Lorsqu'on devient aveugle, ou que l'on naît aveugle les autres sens sont décuplés. Il faut pouvoir être capable de se débrouiller uniquement avec ceux qui restent, c'est pour ça que tu as appris petit à petit à mieux t'en servir. Ils sont aujourd'hui très aiguisés et c'est peut-être pour ça que tu t'entends bien avec les animaux. Tu les aimais déjà avant ça bien évidemment, mais maintenant le feeling passe encore mieux. Généralement, tu arrives à adoucir les plus sauvages d'entre eux et ça a surpris plus d'une personne. Depuis quelque temps maintenant, tu te rendais dans un refuge animalier, mais celui-ci a finit par fermer, faute d'argent. Ils n'avaient plus assez de revenus pour s'occuper de tous les animaux alors ils ont dû les distribuer aux autres refuges alentours et ont mis la clé sous la porte. Mine de rien ça t'as brisé le cœur pour toutes ces pauvres bêtes qui ont une nouvelle fois du changer de lieu de vie, tout ça pour quoi ? Parce que personne n'en a voulu, et leurs propriétaires initiaux les ont abandonnés. La vie est injuste pour ces pauvres animaux et c'est pour ça que tu étais bénévole là-bas. Ils avaient au début un peu rechignés de te prendre à cause de ta cécité, mais voyant ta côte auprès des animaux leur avis avait fini par changer.

Aujourd'hui, tu as donc décidé de te rendre dans un autre refuge, qui a par ailleurs récupéré certains des anciens animaux de celui où tu allais avant, pour devenir bénévole de nouveau. Comme tu ne parviens pas à trouver de petits boulots à cause de ton handicap, tu trouves des occupations comme tu peux en plus des cours pour ne pas t'ennuyer. Si en plus de ça, tu peux aider, quoi de mieux ? Le chemin à été un peu compliqué vu que tu ne le connaissais pas, donc tu as demandé aux passants de te guider, mais finalement, tu y es parvenue et tu pousses la porte d'entrée. Un petit "ding" se fait entendre pour indiquer ta présence et tu peux entendre dans le fond de nombreux animaux, principalement des chiens qui aboient à en perdre la tête. C'est peut-être l'heure de la nourriture, ce qui explique qu'ils sont encore plus bruyants que ce que tu as déjà pu entendre. Ou alors ce refuge est simplement plus grand que l'ancien et loge donc plus d'animaux, ce qui est en soi, fort probable. Comme personne ne semble venir t'accueillir, tu essaies d'avancer doucement vers une autre pièce, mais ne connaissant pas le bâtiment ta canne rencontre juste des murs. C'est peine perdue. « Excusez-moi ? Il y a quelqu'un ? » Finis-tu par demander, légèrement ennuyée de ne pas pouvoir t'orienter correctement. Peut-être qu'ils sont tous occupés avec les animaux et que la secrétaire n'est pas là... Si c'est le cas, tu repasseras un autre jour.

tu t’étires en te levant de ta chaise de bureau tout en baillant. tu es fatiguée et en même temps tu n’as pas sommeil. c’est une fatigue mentale parce que tu as bossé tes cours toute la matinée. il te faut une pause et ton estomac te l’a rappelé. tu sors donc de la chambre que tu partages avec bona et ta cousine pour aller dans la cuisine. tu cherches quelque chose à faire et il n’y a rien à manger. tu soupires en prenant ton téléphone et tu hésites à demander à quelqu’un de partager mais en fait tu veux être seule. tu composes donc le numéro de ton restaurant préféré de poulet frit et tu commandes ce que tu veux manger. quand c’est fait, tu n’as plus qu’à attendre que ça arrive. tu détaches tes cheveux que tu avais remonté en un chignon imparfait avant de t’asseoir sur le canapé de la salle commune, la capuche de ton sweat sur la tête. tu joues avec ton téléphone pendant quelques minutes avant de finir par aller ouvrir au livreur et payer. le poulet dans les mains, tu remontes dans ta chambre pour ouvrir les fenêtres et manger sur ton lit tout en regardant une série. tu dois décider de ce que tu vas faire de ton aprem, parce que tu risques sinon de la passer dans ta chambre, sous les draps et c’est pas vraiment ce que tu avais en tête pour aujourd’hui. tu finis de manger et pendant que tu ranges tout pour retourner à la cuisine et tout foutre à la poubelle pour venir ensuite nettoyer comme il faut la chambre, tu décides de ce que tu vas faire. c’est au refuge que tu jettes ton dévolu. tu avais envie de passer du temps en compagnie des animaux après une semaine de travail acharné autant pour l’animalerie que pour tes cours. tu te diriges là-bas le cœur et le pas légers. tu n’as qu’une hâte c’est de pouvoir les couvrir d’amour tous autant qu’ils sont. l’après midi se passe relativement bien et tu vas d’animal en animal pour les caresser et leur apporter de la tendresse et de l’amour. tu caresses même distraitement un chat qui est venu se lover contre toi. d’ordinaire, tu ne laisses pas ces boules de poils venir vers toi parce que tu es allergique, mais depuis que tu prends des médicaments pour ne plus ressentir les effets de ton allergie, tu peux les prendre dans tes bras et les caresser à ta guise et c’est ce que tu fais depuis qu’il est venu près de toi. « meekyung, tu peux leur donner à manger s’il te plait ? » tu relèves les yeux vers l’autre bénévole qui est avec toi aujourd’hui et tu lui souris tandis que tu caresses une dernière fois le chat avant de te lever. « oui pas de soucis. » tu va dans la réserve pour aller chercher les croquettes pour les chiens et les chats et quand tu arrives, tu as à peine le temps de leur donner que tu es assailli par les animaux. tu n’entends même pas le ding de la sonnerie et encore moins la jeune femme qui te parle. « mais laissez moi respirer. » que tu dis en riant tandis que tu t’extirpes de là-dessous et que tu poses ton regard sur la nouvelle venue. « oh je vous avais pas vu désolée. je peux faire quelque chose pour vous ? » demandes-tu d’une voix douce.

Cette situation ne t'est pas inconnue, il t'arrive bien trop souvent d'avoir du mal à te repérer seule dans un endroit dont tu ne connais rien. C'est justement un des points compliqués de ce handicap que tu portes depuis ton adolescence, tu n'aimes pas avoir cette impression d'être dans le besoin, attendre que quelqu'un vienne t'aider. Toi, tu n'aspires qu'à l'indépendance la plus totale, malheureusement ce n'est pas possible et ça fait longtemps que tu le sais. Tu n'as jamais voulu l'accepter cependant. Oui, il est arrivé que tu te prennes des poteaux, oui, tu es rentrée dans des gens, oui, tu t'es perdue à de nombreuses reprises... Mais ce n'est en aucun cas une raison de baisser les bras et de végéter. Tu appris à tes dépens que la vie ce n'est pas ça, se laisser abattre ne t'apportera rien si ce n'est une tristesse quotidienne. Être une battante, voilà ce à quoi tu as toujours aspiré. Au moment où tu t'apprêtes à sortir du bâtiment, tu entends des voix, couvertes par les aboiements, apparemment, tu n'es pas seule, mais les personnes doivent se trouver dans une autre pièce. Tu décides de ranger ta canne et t'asseoir sur l'unique siège que tu as pu trouver jusqu'à maintenant, mais une voix se démarque soudainement. C'est même à toi que l'on s'adresse, alors tu souris gentiment. « Bonjour, ne vous en faites pas, j'ai bien entendu l'entrain des petits foufous derrière, c'est normal que vous ne m'ayez pas entendu ! » Tu ris doucement avant d'enchaîner. « Eh bien il s'avère que oui, vous devez sans doute pouvoir m'aider. Je viens ici, car je souhaite devenir bénévole dans votre refuge. »

Tu te relèves alors de ton siège et te diriges maladroitement vers l'endroit d'où provient la voix. La jeune femme qui te parle semble être une personne tout ce qu'il y a de plus gentil, si tout ceux qui travaillent ici sont comme elle, les aider va être plaisant. Soudainement, alors que tu t'apprêtais à lui annoncer ta cécité, pour qu'elle comprenne l'enjeu, tu te retrouves fesses contre terre, une grosse boule de poil te léchant allègrement le visage. Tu aimes les animaux, mais te faire recouvrir de bave, c'est pas non plus ta tasse de thé donc tu essaies de le repousser doucement en riant et en le caressant. « Dis-donc gros lourdeau, tu sais que tu m'écrases un peu là ? Je n'avais pas prévu un bain de bave aujourd'hui ! » Toujours en riant, tu finis enfin par le repousser, sans doute aidée par ton interlocutrice que tu remercie en te relevant avec toujours autant de maladresse. « Ce gros pépère à l'air adorable.. » Le museau du chien est toujours collé contre ta cuisse ce qui t'arrache un énième sourire et qui lui vaut encore de grosses gratouilles qui semblent le ravir. « Donc, avant qu'il ne me saute dessus, je voulais vous prévenir d'une chose, je suis aveugle, mais ça ne m'empêche pas d'être débrouillarde et de bien m'occuper des animaux. Ce n'est pas la première fois que je fais du bénévolat. » Un peu d'anxiété grimpe en toi, tu espères que ça ne sera pas un frein pour qu'ils t'acceptent.