Son histoire commença dans la chambre parentale à Tokyo, par un solstice d'hiver. La mère n'eut pas le temps d'aller à l'hôpital. Pour autant, l'accouchement se passa sans soucis. Son frère jumeau naquit en premier, hurlant et pleurant, tandis qu'elle sortit dans le calme et sans un bruit, si bien qu'on se demanda si elle n'était pas muette. Eiji était un enfant très turbulent et accaparait toute l'attention des parents qui n'étaient déjà pas très présent. Aussi, Mio fut pratiquement élevée par sa grand-mère maternelle. Elle l'aimait de tout son cœur de jeune enfant, lui vouait une admiration sans limites. Elle apprit à l'enfant à avoir confiance en elle, à ne pas se laisser marcher sur les pieds. Elle lui disait : "si tu souris au monde, le monde te sourira en retour". Et puis elle mourut. Laissant Mio seule. Ayant caché un immense héritage jusqu'à son dernier souffle, les Watanabe se réjouirent de cette mort qui venait enfin apporter le confort dans leur quotidien. Ils crachaient sur le dos de la défunte, ne pleurèrent pas une larme pour elle. Mio se mit à les détester, à vouloir leur mort à eux aussi et à leur foutu argent.

Le drame survint un jour d'octobre. Dehors, tout était gris. La capitale puait l'essence et l'avidité. En passant la porte de la banque, Mio eut envie de vomir. Ils étaient venus pour transférer l'argent de feu grand-mère à leur propre compte et ceux de leurs deux enfants. Bien que délaissé, Mio était aimée de ses parents pour son intelligence et sa beauté. Cependant, après cet incident, ils commencèrent à réellement se soucier d'elle. Trop tard. Une prise d'otage. Des armes à feu. Une armée de policier. Les preneurs d'otage se servait des deux plus jeunes comme moyen de pression, canon de flingue sur leur tendre tempe. Bien sûr qu'il s'agissait de Mio et son frère, menacés sous les pleurs incontrôlables de leur mère. Eiji prit peur et tenta de s'échapper, se prenant une balle dans la jambe et risquant la vie de sa jeune sœur. Mais alors que le braqueur s'apprêtait à lui loger une balle dans le crâne, il fut abattu par la police et mourut dans les bras d'une petite Mio ensanglantée et désormais traumatisée. C'est alors que le changement de personnalité opéra. Eiji devint un enfant calme, silencieux, se réfugiant dans sa musique pour extérioriser ses démons intérieurs. Il traversait les couloirs comme une ombre, boitant légèrement. Quant à Mio, elle devint une enfant très sociable et souriante. Miracle de ses nombreuses séances chez le psychiatre ? Bien sûr que non. Ce fut le début de son jeu. Elle allait détruire les gens et ce monde, tout comme ils l'avaient détruit elle. Plus rien à faire de rien. Seule sa haine incommensurable mènerait ses pas et guiderait son esprit. Toujours plus loin, elle chercherait un moyen de la satisfaire.

Très vite, elle prit des cours de théâtre et se retrouva sur la sellette. A l'école, elle était très populaire, première de classe. La fille adorable à qui personne n'aurait osé faire de mal. Elle commença le mannequinat à ses quinze ans. Pas qu'elle ai eu besoin d'argent, elle avait celui de ses chères parents qu'elle escroquait avec un joli sourire et la pensée secrète qu'ils la faisaient gerber. Seulement gagner son propre argent était plus satisfaisant, moins "sale", et puis ça lui apportait une certaine popularité qu'elle ne refusait pas. Lycéenne, elle entra dans un prestigieux pensionnat pour artistes et sportifs à la future carrière déjà prometteuse. En ressortir diplômé lui apporta un succès immédiat dont elle ne se satisfit pas. Enfin ! Elle pouvait partir pour la Corée, nouvel eldorado pour beaucoup de jeunes japonais, débarrassée de ses géniteurs et de son pathétique frère. La voilà entrant à la Yonsei, secouant ses cheveux d'un geste très professionnel, retournant toutes les têtes sur son passage. "Enchantée, je m'appelle Watanabe Mio. Veuillez excuser mon coréen, je viens d'arriver, je suis japonaise. J'espère qu'on s'entendra bien !" . Sourire carnassier. Rideau.