Enfant née sous le soleil de la belle Californie, un 25 décembre. T’étais le miracle de Noël. Miracle au sale caractère, certes, mais miracle quand même. Tu faisais le bonheur de tes parents. Bien que ta mère ait accepté ce mariage pour l’argent que ton paternel lui procurait, elle était bien heureuse de pouvoir te serrer dans ses bras. Même ton père, d’ordinaire si froid et distant, ne pouvait s’empêcher de sourire en te voyant. Tu étais leur miracle, leur rayon de soleil, leur petit diamant. Tu étais la pierre précieuse à protéger par-dessus  tout.

C'est d'ailleurs ce qu'ils ont fait, à outrance. Grandissant, tu n'avais que très peu de liberté. Ton père gérait une entreprise internationale d'import-export et n'était que très peu à la maison. Quant à mère, elle consacrait son temps de femme au foyer à prendre soin de toi, à te faire découvrir le monde et à te surcharger d'activités. Ainsi, à l'âge de six ans, tu faisais déjà du chant, de la guitare, du piano, de la danse, du cheval et de la natation, tout en trouvant aussi le temps pour des cours à la maison de russe, espagnol et français. T'osais rien dire. Ta maman décidait pour toi et tu n'avais pas vraiment ton mot à dire, non pas que tu cherchais à le donner d'ailleurs.

C'est sans doute ce qui a provoqué ta rébellion, plus tard, mais à l'aube de ton adolescence, t'étais l'archétype de la gamine de famille riche, pourrie gâtée, prétentieuse sans le vouloir, qui avait tout, tout de suite, sans avoir à travailler pour l'avoir. T'étais la leader du groupe populaire de son lycée, celle que tous les mecs convoitaient et que les filles jalousaient sans pouvoir vraiment te haïr car ton comportement était irréprochable. Tu sortais avec le top 1 de l'équipe de natation et vous étiez très amoureux. Des amoureux de lycée, bien sûr, rien de bien sérieux. T'avais une vie parfaite.

Mais c'était trop.

Du jour au lendemain, t'as explosé. Tu connaissais très bien la vraie nature des activités de papa. Tu savais très bien que maman n'était pas vraiment heureuse avec lui mais qu'en bonne russe arriviste faisant partie de la catégorie des nouveaux riches, elle se contentait parfaitement de son argent foisonnant. T'as exigé de pouvoir partir seule à l'étranger, n'importe où tant que tu pouvais t'éloigner de cette vie qui finissait par t'étouffer. Ta mère a immédiatement refusé, pas de discussion possible, mais tu savais comment la faire céder. Ton père n'a jamais rien pu te refuser et te cédait tout. Ainsi, c'est lui qui a convaincu - ou bien forcé - ta mère de te laisser partir.

Pourquoi la Corée ? T'en sais rien. Pas que tu sois particulièrement attirée par l'Asie de manière générale. Quand tu es arrivée en septembre, tu parlais pas un mot de coréen. Tu l'as appris depuis mais c'est toujours hasardeux et parrfois, tu te contentes d'inventer des mots et d'espérer que ça passe. Tu te contentes d'utiliser tes talents de chanteuse parfois, dans des pianos-bars. Tu ne gagnes pas assez pour en vivre mais tu n'en as pas besoin, papa finance absolument tout ce dont tu pourrais avoir besoin.

Tu te contentes de ce que t'as, en te demandant quel but donner à ta vie car t'as jamais eu autant d'opportunités de faire des choses qu'à présent. Alors est-ce que t'es heureuse pour autant ? Non.