les jeux vidéos rendent violent. c'est ce qu'on dit, c'est ce que les parents épuisés par la crise d'adolescence de leurs enfants lisent dans les médias et répètent quand ça les arrangent. toi, tu n'y crois pas, les médias mentent, tout le monde te mens (c'est pourtant toi qui te plais à raconter des conneries à qui veut l'entendre pour te rendre plus intéressant). les jeux vidéos ils te détendent.
tu es persuadé que sans eux, tu aurais déjà cassé la gueule du premier venu pour la simple raison que le soleil ne brille pas assez à ton goût. c'est peut-être aussi parce que ton militaire de père a fait de toi un homme un peu trop bagarreur mais tu ne voudras jamais l'entendre.
les jeux de réflexion et de tir te stimulent, tu ferais un bon espion ou un bon tueur en série.
mais le problème, c'est que tu aimes les gens -et ils ont du mal à le croire. et si tu aimes passer tes journées sur ton ordinateur, tu déteste te retrouver seul trop longtemps. alors quand tu te sens trop longtemps privé de tout contact humain, tu décides d'aller jouer ailleurs.

t'es peut-être un peu vieux et un peu trop seul pour tout ça, autour de toi que des enfants, des adolescents et des hommes qui pensent que toutes les femmes ressemblent à lara croft et autre personnages-objets trop sexualisés. t'es pas comme ces types là toi, t'es pas un loser. alors parfois, pour te faire bien voir, tu prétends avoir travaillé sur tel ou tel jeu, même ici tu te sens obligé d'épater la galerie.

aujourd'hui, tu t'ennuies. la salle est bondée et des mômes bruyants s'excitent devant tes écrans (tu n'as pas le sens du partage). tu n'as pas envie de passer ton après-midi à jouer à tetris et tu seras prêt à expulser toute une bande d'amis pour avoir ton quart d'heure de plaisir sur une borne. alors c'est un paquet de chips à la main que tu sillonnes les couloirs à la recherche de ta prochaine victime.

ce fut plus rapide que tu ne le pensais. un adolescent se tenait à quelques pas de toi, seul devant son arcade, comme si c'était votre destin.
tu n'attends pas une seconde de plus et te voilà assit sur le dossier du siège libre, tendant au garçon ton paquet ouvert. « salut, des chips ? » tu proposes en souriant, feignant l'innocence. « tu joues à quoi ? on joue ensemble. » le ton ne trompe pas, ce n'est pas une question mais un ordre. « j'ai plus de jetons par contre... » grimace, mensonge. « tu m'les avance ? » tu t'installes convenablement à côté du garçon et parce que tu ne veux pas lui laisser le temps de refuser, lui arrache la manette des mains pour porter ton attention sur l'écran. « wouah, ça a l'air super stylé ! dépêche toi ou je joue tout seul ! »