Mes larmes coulent le long de mes joues. Je n’arrivais plus à les arrêter. Depuis une heure, je pleurais continuellement. Serrant mon oreiller fort contre ma poitrine. Je ne faisais que me souvenir. Souvenir de ce que j’avais fait. Cette horreur que j’avais fait. J’étais immonde. Inhumain. Je me détestais d’avoir fait ça. Mais je n’avais pas eu le choix. C’était pour lui que je l’avais fait. C’était le mieux. Je continuais de serrer mon oreiller, il avait encore son odeur dessus. Comme si tout ça n’était qu’un horrible cauchemar. Si je fermais les yeux, j’arrivais presque à oublier tous les évènements des derniers jours. Comme si tout ça n’existait. Comme si nous étions encore ensemble. Son nom était encore gravé sur mes lèvres et tatouer au plus profond de mon être.  Je l’aimais. Comme je l’aimais. Et pourtant je l’avais repoussé. C’était moi qui l’avais quitté. Il m’avait suivi. Il voulait des explications. Je ne voulais pas le quitter, je l’aimais moi. J’aimais mon ex plus que tout. J’aurais pu tout lui donner. Même cette première fois, cette première fois que pour laquelle je n’avais jamais été prêt, dû à mon mal-être avec mon corps. Mais voilà, je ne devais pas être égoïste. Je ne devais pas me faire passer avant lui. Maintenant les choses étaient différentes. Je n’étais plus une fille. Et je savais que tout risquait de changer au collège. Et je ne voulais pas qu’il ait à subir ça. Pas à cause de moi. Alors cette fois-ci, je lui avais fait du mal. Je l’avais blessé consciemment. Je lui avais gueulé que je ne l’aimais pas. Et pourtant, c’était faux et je me détestais du plus profond de mon âme. Je me redressais, me levant de mon lit et délaissant l’oreiller. Dans un état second, les joues complètement humide, je sentais le monde vaciller autour de moi. Le sol tanguait sous mes pieds alors que je tentais d’avancer jusqu’à ma salle de bain. J’essuyais grossièrement mes larmes sur mes joues d’un revers du poignet, mais le geste était bien inutile vu les chutes qui s’échappaient de mes yeux. Je rentrais la salle d’eau et fis face à mon reflet dans le miroir. Je ne me supportais pas. Je ne me supportais de me voir comme ça. Ces cheveux long, ce corps féminin. Je les détestais. Je n’étais pas une fille. J’étais un garçon. Un garçon dans le corps. Alors sans réfléchir, dans excès de colère incontrôlé, je balançais mes avants-bras sur le miroir qui se brisa après plusieurs coups. Je ne sentis pas la douleurs, j’étais engourdi, bien loin de mon corps. Je ne réagis même pas au sang qui coula de mes avant-bras. Je ne me maîtrisais plus. Dans un geste brutal j'attrapais une paire de ciseaux et je vins couper brutalement ma longue chevelure. Plusieurs coups de ciseaux, faisant tomber une à une les mèches de mes cheveux. Je ne sentis même pas quand j’entamais la peau de cou aussi par la même occasion. C’est après quelques minutes que ma mère débarqua en trombe dans la pièce. Je gisais là, entre les éclats de miroir, le sang et les cheveux. Elle cria et je vis son visage empli d’inquiétude.  Je suis un garçon maman, je veux plus être une fille. Je sentis ses mains sur mes joues et se fut la dernière chose qui sortis de ma bouche. Je me sentis m’échapper juste après. Sombrant dans l’inconscience. Stupidement j’avais perdu trop de sang et je m’étais épuisé à trop pleurer. C’était trop. Trop pour moi et mon corps frêle. Et le pire serait que ça n’était que le début.


Je pris une grande inspiration avant de rentrer dans le pub. J’avais accepté de sortir avec des Gumiho. Je m’étais forcé pour sortir, me sociabiliser et m’habituer à cette fraternité. Il fallait dire que j’avais spécialement pour me rapprocher à nouveau de mon frère. Sian. Notre situation était compliquée et je la vivais mal. D’un côté je ne pouvais pas lui en vouloir. Il avait vécu quinze année avec une petite soeur et aujourd’hui il avait un petit frère. Il avait même changé d’établissement pour ne pas être avec moi. Et c’était tant mieux, parce qu’il n’avait pas vu tout ce que mes camarades m’avaient fait subir. C’était mieux comme ça. J’avais préféré y garder pour moi, en tout cas jusqu’à ce que mes parents me déscolarisent. Sian n’avait jamais entendu parlé de ça. Il était parti à Yonsei. Puis on l’avait rejoint pour me permettre de recommencer ma vie. Ma vie garçon. Là où personne ne connaissait Siyeon la fille. Mais aujourd’hui, j’essayais de me rapprocher de lui à nouveau. Même s’il n’était pas très…. expressif. Il y avait beaucoup de monde et c’était compliqué. Je m’étais légèrement ridiculisé en prenant un soda, mais je m’en fichais un peu. Je ne buvais pas d’alcool et je n’allais pas commencer aujourd’hui. Je restais collé vers mes camarades de fraternité, pas bien rassuré. Je ne m’étais jamais vraiment senti à mon aise dans les endroits trop peuplés. Et tout le monde me semblaient démesurément grands, ce qui était assez évidement vu ma toute petite taille. Mes bras étaient proches de mon corps alors que je tenais mon verre près de mon visage. Mes yeux regardaient un peu tout le monde dans le pub, sans vraiment se fixer quelques part. A côtés les autres renards discutaient, mais je ne les écoutais pas vraiment. Parce que je sentais déjà une boule naître au fond de ma gorge. J’avais déjà du mal à respirer.  Je… vais… prendre l’air, dis-je maladroitement en posant mon verre et surtout pour éviter de me couvrir un peu plus de ridicule. Précipitamment je me dirigeais vers le coin fumeur. Je ne fumais pas, je n’avais même jamais toucher à ça de ma vie. Je slalomais entre les gens, tout en gardant tous mes membres recroquevillés de peur de les toucher - ou ne serait-ce les frôler-, essoufflé, le thorax brûlant, la sortie me semblait si loin. Et quand je poussais la porte, l'air frais m'agressa le visage, mais j’avais enfin l’impression de mieux respirer. Je passais rapidement les portes et sans faire attention je percutais ce type. Outch. Je posais ma main sur mon front avant de lever la tête. Comment j’avais pu le rater ? Il était si grand ! Je restais comme un débile pendant quelques secondes, fixant l’homme devant moi. Détaillant son visage, j’en avais même oublié mes camarades dans le pub. Il était… il était si beau. Je me surpris à rougir d’un coup et quand je compris en sentant la chaleur dans mes joues je me penchais pour le cacher et m’excuser par la même occasion.  Excusez-moi j’ai été maladroit, je restais dans cette position avant de me redresser doucement, en fixant à nouveau son visage. Il avait ce sourire que je n’aurais su définir. Je restai figé et finis par sourire doucement. Comment tu t’appelles ?  Siyeon et… encore désolé. Je me sentais à nouveau rougir alors qu’il fit un geste de la main comme s’il en avait rien à faire. Luan. Luan. Je souris un peu plus en tripotant mes cheveux nerveusement. Il fallait que je trouve un truc à dire. Vite. Pense Siyeon, pense ! Mais je n’eus pas le temps d’ouvrir la bouche que je vis la porte du coin fumeur s’ouvrir pour laisser la tête d’une de mes camarades passer par là. Siyeon, on va pas tarder à rentrer à Gumi, tu viens ?  Désolé ! J’arrive. Je... Je me tournais vers Luan avant de m’incliner une nouvelle fois.  Désolé et bonne soirée à toi, je me précipitai dans le pub, non sans jeter un dernier regard au jeune homme. Pourquoi j’imaginais des trucs moi hein ? C’était qu’une rencontre fortuite. Il était plus probable que je ne le croise plus par la suite. Mais pendant quelques instants je me disais que je reviendrai dans ce pub…. peut-être que je le reverrai ? Après tout, pourquoi pas.


Je soupirais doucement en me regardant dans le miroir de ma chambre. J’étais un peu perdu et un peu en colère. Je m’étais attendu à tout sauf à ça. Le fait était que personne ne s’était vraiment attendu à ça. L’endocrinologue m’avait dit qu’il était possible que je grandisse avec le traitement, que ça pouvait varier d’une personne à l’autre et que je ne devais pas non plus être déçu si mon évolution n’était pas spectaculaire. Sauf que ça l’avait été, spectaculaire, plus de dix centimètres, en l’espace de presque cinq mois. Le changement était notable, et clairement il y avait une sacré différence entre le petit Siyeon de 1m70 et celui qui avait dépassé 1m80, des fois les gens que je revoyais après quelques mois ne me reconnaissaient même pas. Preuve que le traitement avait déjà commencé à agir n’est-ce pas ? C’était ce que je voulais et j’en étais content, j’étais un garçon, du moins je me dirigeais vers ce que je voulais. Mais le changement brute avait posé quelques soucis. Par chance je n’avais pas le vertige, non parce que clairement, je voyais le monde de plus haut. Et je peinais encore parfois avec cette taille, j’avançais un peu maladroit. Et surtout mes fringues avaient doucement été beaucoup trop petites, beaucoup plus du tout adaptée à ma morphologie. Alors que j’avais essayé toutes mes anciennes tenues et tous mes shorts m’arrivaient maintenant au ras des fesses, et si certaines personnes assumaient, moi, c’était loin d’être mon cas, j’avais tenté de tirer dessus pour le faire descendre, mais rien n’y faisait. Je soupirais longuement avant de tout retirer pour mettre des vêtements un peu plus grands que j’avais achetés récemment. C’était bizarre, mais je devais m’y faire. Je rassemblais toutes mes vieille tenues pour les mettre dans un sac. Je les regardais quelques instants, c’était un peu un page de moi-même qui se tournait. Mais aussi une autre qui se tournait. Un où j’arriverai vraiment à recommencer ma vie comme je l’entendais Siyeon, né fille, devenu garçon. Je savais que ça n’était encore que les premières étapes et que le chemin était encore long. Mais maintenant que j’avais commencé sur cette route, je n’avais qu’à la suivre et enfin faire ce que je voulais.