t’as du mal à te passer de ces séances d’entraînement. ça te suit depuis tant d’années maintenant. enchaîner les coups, devenir toujours plus précis dans tes gestes. comme si chaque fois que tu venais ici, t’avais un nouveau challenge. ça te plait, quelque part. tu ne sais jamais ce qui va t’arriver dans cette salle de boxe, sur qui tu vas tomber. t’arrives parfois à te faire de nouveaux adversaires. certains soirs il n’est question que de taper dans un sac. et puis, parfois, il t’arrive de tomber sur miso. t’apprécies sa compagnie ici, même si tu sais au fond de toi que cette sorte d’amitié qui vous lie ne serait bien vue par personne dans vos entourages respectifs. mais qui doit savoir, finalement ? tu changes pas tes habitudes avec elle, t’es le même brute qu’avec les autres, le même gars stupide qui lance des pics sans trop réfléchir. mais elle a un certain répondant, miso. et c’est surement ça qui fait que t’es content parfois de pouvoir t’entrainer avec elle. un léger rire qui te prend alors que tu contiens ses coups dans ce sac de sable. tu peut sentir qu’elle force un peu plus, aussi. « quoi ? t’aimes pas que des chiens portent l’attention sur toi ? étonnant. » une pointe d’ironie dans ta voix. tu recules d’un pas quand elle finit par te pousser pour que tu prennes sa place, un léger sourire qui se glisse sur tes lèvres. t’aurais envie de rire à sa remarque, mais tu te contiens, observant le sac devant toi. « fais gaffe à c’que tu dis, j’pourrais te faire tomber. » rictus amusé, tranchant avec son air insolent. et tu te mets à frapper, enchaîner les coups du droit avant de lancer quelques crochets du gauche. t’y mets pas toute ta force, t’es pas là pour l’impressionner. de toute façon, elle sait de quoi t’es capable. tu redresses ton regard vers elle tout en continuant de frapper, tes traits qui deviennent un peu plus dur. « ouais, c’est ce qui arrive quand j’passe trop d’temps à jouer les caïds. » ça n’a rien à voir, mais t’aimes pas parler de tes affaires, ni même de ce qui te met dans un tel état à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. tes insomnies ne t’ont jamais aidées, et sont de plus en plus nombreuses depuis que t’es sorti du trou. sûrement parce que t’as encore du mal à te faire à cette nouvelle liberté. à cette vie que t’as perdu et que tu retrouves, différente.

« Mon rêve. » ironise-t-elle en lançant un regard aux alentours. Ouais des chiens, c’est bien le mot. Miso ne passait pas inaperçu. Si pour certains elle avait une beauté classique, pour d’autre elle dénotait tellement avec ce contraste enfantin et femme fatale qu’elle était plus qu’attirante. Il lui était souvent arrivés de remettre à sa place des hommes un peu trop entreprenant. Elle détestait ça d’ailleurs mais avait bien vite compris que l’homme prenait quand il le souhaitait et que la femme n’était pour eux qu’un objet. Dieu qu’elle détestait ça. Elle l’apercevait la plupart du temps dans son clan. Certains se pliaient à ses ordres sans broncher en lui montrant du respect d’autres jurais dans son dos et crachait parfois sur son passage. Plus ils étaient bas sur l’échelle et plus ils avaient la stupidité de ne pas lui montrer le respect que son rang imposait. Elle se chargeait alors que leur rappeler leur place et augmentait ainsi la haine qu’ils éprouvaient envers elle. Son jeune âge n’aidait en rien mais il était hors de question qu’elle se laisse marcher dessus. Elle avait laissé bien trop souvent les hommes lui faire du mal, plus jamais elle ne laisserait un homme l’approcher. Elle frappe dans le sac avec un sourire moqueur aux lèvres à sa remarque. « Essaye pour voir. » c’est qu’il était plus pour le taquiner qu’une réellement provocation. Elle savait, à lui dire ça, qu’elle risquait de se retrouver sur le tapis. Mais elle préférait taper dans le sac et le plus fort possible pour tenter de le faire reculer. Si on parlait d’un rapport de force Miso serait très largement perdante. Mais si elle utilisait un peu de logique et d’équilibre elle était certaine de pouvoir lui faire mal. Taper là où ça faisait mal et s’en sortir avec peu de force. Mais ce n’était pas ce soir qu’elle voudrait essayer. Elle tape, tape, puis relève le visage vers lui surprise de ses propos déguisé sous le ton de l’humour. « Toi un caïd ? » sa voix contient une pointe d’ironie, il faut l’admettre mais rare était les personnes qui se définissaient ainsi dans le milieu. « Mais je comprends, tu n’as pas envie d’en parler, surtout pas à moi pas vrai ? » elle esquisse un sourire et tape une dernière fois dans le sac avant de se reculer. Elle est à bout de souffle, et de la sueur perle sur sa peau. Pourtant rien ne pouvait gâcher la beauté porcelaine de cette poupée d’acier. « A toi ! » lance-t-elle en prenant sa place. « Et ne te retiens pas cette fois. » sourit-elle taquine pour le provoquer. Ils avaient l’air de deux meilleurs amis complices et taquin, une fratrie amusée et amusante. C’est assez déroutant ce que peut cacher l’évidence.

tu gardes ce léger sourire en coin, ce côté taquin que tu n’offres pas à n’importe qui. tout ça est bien plus rare depuis que t’as fini par sortir, mais ça te fait du bien, dans le fond, de retrouver un peu celui que tu étais, de reprendre certaines de tes habitudes. ça t’aide à voir que tu peux toujours faire partie de ce monde, que t’en es pas totalement exclus. de toute façon, dans ton univers, tu n’es pas le seul à être passé par là, au contraire. t’as retrouvé certains ennemis en prison, d’anciens clients aussi. c’était étrange au début, pourtant, t’as su t’y faire. t’as su t’habituer à ce nouveau mode de fonctionnement. alors, ça devrait aller, maintenant que t’as retrouvé ta liberté. c’est ce que t’essaies de te dire en tout cas, notamment quand tu viens ici tard le soir, pour te retrouver seul face à un sac de sable. mais ce soir, il y a cette jeune femme en face de toi, qui te fait reprendre conscience de tout ce qui faisait ton quotidien, avant. elle parmi tant d’autres personnes qui t’entourent. mais ça te fait du bien, sans que tu ne veuilles l’admettre. tu finis par lâcher le sac, lassant ta place à miso. ton regard se focalise sur le rondin en face de toi, lançant ta première frappe. « j’en parle pas tout court. » lances-tu en même temps qu’une droite puissante. « les gens ont pas besoin d’savoir ce qui se passe. toi non plus, tant que ça t’concernes pas. » t’es sincère dans tes mots. t’as ce côté protecteur qui ressort aussi. ce désir de montrer que t’es plus fort que ça, que rien ne t’a atteints, là-bas. mais tu sais que c’est faux, que tu sors pas indemne de ce séjour. pourtant, c’est ce que tu montres aux autres. malgré tes insomnies. malgré ces nuits à continuer de frapper, comme tu le fais maintenant. tu mets un peu plus de force dans tes coups, sautille un peu plus sur tes jambes pour prendre plus d’élan. tu continues malgré tout de mesurer ta force, ne voulant pas mettre au tapis la demoiselle devant toi. « et toi alors ? » comme pour changer de sujet, la laisser parler de ce qu’elle aurait sur le coeur. c’est toujours plus facile d’écouter que de parler, surtout lorsqu’il s’agit de toi.

Ne pas savoir c’est se sauver. Moins on en sait mieux on se porte. Pourtant Miso aimait savoir à qui elle avait à faire, ce à quoi elle devait faire face. Savoir c’était anticiper, ignorer c’était se protéger. Deux poids deux mesures. Miso était jeune mais avait connu suffisamment d’horreur et de coups bas pour savoir s’en protéger maintenant. Elle jouait avec le feu quand il s’agissait d’Il Kwon, il était comme un secret interdit. Il était un interdit. Elle risquait sa vie à lui parler, à jouer ainsi avec lui. Elle était suffisamment bien placée dans le clan pour qu’on ne lui en tienne pas rigueur mais des hommes de mains étaient morts pour moins que ça. Elle ancre ses pieds dans le sol pour mieux contenir ses coups et bien qu’ils soient déjà brusques pour la jeune femme elle savait dans le fond qu’il se retenait encore. Elle lève un regard vers lui à ses mots et sourit en coin. Il a raison. Elle acquiesce pour montrer qu’elle comprenait, que dans le fond elle partageait le même point de vu. Elle esquisse même un sourire entendu et maintient le sac avec un plus de force. « Tape. » lâche-t-elle comme une provocation. « Tu n’as pas que ça dans le ventre. » et c’était une évidence, elle lui assurait. « Montre-moi ! » et qu’importe qu’un coup soit trop fort, elle n’était pas aussi fragile et faible qu’elle ne le laissait paraitre. Elle insiste, l’encourage autant qu’elle le provoque. Elle ancre son regard carnassier au sien et le fixe, sans en démordre, voulant qu’il libère enfin sa colère. Qu’il frappe fort, jusqu’à s’en faire mal. Elle pouvait le sentir d’ici qu’il contenait une rage et une colère en lui qu’il aurait été difficile de ne pas voir. Peut-être que dans le fond ils étaient pareil. Remplie d’une noirceur qu’ils contenaient depuis bien trop longtemps. Alors qu’elle s’apprêtait à ajouter quelque chose l’un de ses hommes de main se présente, dénotant avec son costume noir et son air sérieux. Il se penche à son oreille et lui souffle une situation qui lui fait pincer des lèvres. Elle n’a pas envie de gérer ces conneries ce soir. Elle acquiesce et lance simplement « Va-t-en occuper. Je reste ici. Avec JiHwan s’il faut. » elle se détourne lui faisant comprendre qu’elle ne voulait pas poursuivre leur conversation. L’homme s’incline respectueusement et tourne les talons aussi discrètement qu’il n’était arrivé. N’était-ce pas étrange de voir ce jeune petit bout de femme mener ces hommes à la baguette ? inédit et déroutant, à ne pas en douter.

tu continues de frapper, inlassablement. sans y mettre toute ta force. ça, tu le gardes pour des combats, face à une réelle personne. tout ce qui te reste de cette incarcération. une violence bien plus accrue, le sang qui a beaucoup trop coulé derrière ces barreaux. parce qu'il a bien fallu que tu te sauves, quelque part. que tu montres qu'on allait pas t'avoir comme ça, que tu ne faisais pas partie de ces êtres faibles, incapables de se défendre. t'as du faire tes preuves, y découvrant un monde bien plus vicieux, bien plus sanglant. alors, quand elle te provoque, te demande de frapper, tu t’exécutes. tu lances un coup assez fort pour la faire reculer, bien que ta rage ne s’échappe pas, qu’elle reste là, bien ancrée en toi. tu sais que la demoiselle pourrait encaisser bien plus qu’elle ne le montre, mais tu n’es pas prêt à redevenir ce monstre que t’étais derrière les barreaux. tu refuses cette idée là, alors que ces scènes tournent encore dans ton esprit, provoquent parfois des cauchemars qui te réveillent en pleine nuit. t’aimerais arriver à y faire face, l’oublier une bonne fois pour toute. mais ça ne marche pas comme ça, il faut se rendre à l’évidence. et tu la suis du regard, quand tu vois un de ses hommes de main arriver près de vous. tu continues de frapper dans ce sac, moins fort, ton attention portée sur eux. t’es sur tes gardes, parce que dans le fond, tu le sais, vous avez rien à faire ensemble, ici, ce soir. alors tu gardes tes pieds bien ancrés sur le sol. peu d’appréhension, tu te protèges juste, à ta manière. mais cette interlude ne dure que quelques secondes, avant que l’autre homme reparte, et que miso vienne reprendre sa place en face de toi. « tout va bien ? » oses-tu demander, plus pour la forme. t’as pas envie de savoir derrière quelles affaires elle travaille, ça ne te regarde pas. t’as déjà bien assez à faire avec tes propres histoires pour te mêler de celle des autres, surtout.

Si tout allait bien ? Des histoires qui ne savent pas se gérer sans qu’elle y mette le bout de son nez. Miso n’était pas certaine de savoir si elle voulait faire ça toute sa vie, mais c’était la seule chose dans laquelle elle s’épanouissait et qu’elle aimait faire. A vrai dire c’était la seule chose qu’elle savait faire. Que pouvait-elle faire d’autre ? Elle n’avait ni papier, ni qualification. Elle ne se voyait pas reprendre ses études et changer de vie. L’argent elle en avait besoin, elle ne pourrait jamais se faire autant avec un travail classique … surtout pas une jeune refugié comme elle. Son avenir résidait en ce clan et elle le savait. Elle l’avait accepté mais parfois … parfois elle se demandait ce qu’aurait été sa vie si elle avait réussi à sauver son père et sa mère. Elle l’avait su, dès l’instant où elle avait pris conscience de leur mort, que leur vie à Hwan et Elle serait chamboulé à jamais. Le monde était devenu alors une vaste place effrayante. Elle ne sait pas si elle aurait survécu sans Hwan. Il était devenu toute sa vie, plus qu’il ne pouvait l’être en étant son jumeau. Elle se savait vulnérable sans lui et pourtant ne le montrait jamais. Une fois ses hommes partis elle se tourna vers Il Kwon avec un petit sourire en coin et s’approcha de lui. « Comme toujours. » Elle leva son minois vers lui et lança « Vous avez l’air d’aimer les défis Monsieur … » elle laisse glisser sa main sur son torse et tourne autour de lui. « J’aimerais voir ce que tu donnes en combat. » amorce-t-elle avant de poser son regard sur son homme de main à l’entrée de la salle. « Contre lui. » ce n’était pas souvent qu’une femme devait lui demander de se battre pour la divertir. Elle affichait un petit air espiègle, joueur avant de lui murmurer tout bas « Le gagnant aura le droit de faire … tout ce qu’il veut de moi. » c’était un pari risqué de lui dire ça, car il pourrait ignorer le sous-entendu et en faire qu’à sa tête, mais Miso était joueuse. Davantage avec Il Kwon qui représentait l’interdit. « Alors j’espère que vous gagnerez. » dit-elle d’une voix enjôleuse tout en caressant une fesse du garçon avant de s’éloigner « Ji Hwan. » dit-elle presque sèche. « Tu vas te battre avec lui. » l’homme surpris les regarda et s’inclina pour commencer à se mettre torse nu. Il obéissait, comme toujours.