Je quitte le terrain sur un 3 - 0 éloquent, drop the mic et laisse les adversaires à leur défaite cuisante. Le plastique du terrain gonflable est brûlant sous ce soleil qui tape depuis le début de l'après-midi mais je l'enjambe quand même, les lèvres pincées et ignorant les cris derrière moi, quelque chose qui ressemble à mon prénom mais je l'ignore pour aller récupérer une bouteille d'eau au stand des boissons. Mais le barman semble décidé à vouloir me refiler de son punch, vraiment léger, dit-il. Je le regarde de travers, curieuse de savoir là où j'ai péché en lui demandant une bouteille d'eau, vu qu'il ne semble pas m'avoir comprise. "Uh... peu importe." Un punch ce sera alors.

Je suis encore sonnée par ces trois buts d'affilée que j'ai marqué mais déjà, un sourire retrace le contour de mes lèvres lorsque j'y repense. Le visage dépité de Théo dans les cages et les exclamations joyeuses de Athena derrière moi. Hoon et son sourire idiot. Et le gars sur la ligne d'en face, muet comme une tombe, les dents plantées dans sa lèvre comme s'il était sur le point de commettre un crime atroce.

Je m'étais enfin extirpée de tout ce monde, les tapes dans le dos désagréables de pseudo-amis qui n'en étaient pas et les ouaaaahh émerveillés de ceux qui avaient vu le match sans y croire. ACE LUNA, pas vrai ? Au final, j'étais deux fois plus stressée de ne pas être capable de tenir la route pour un second, let alone un troisième match. Mais je rumine en silence, rangeant mon téléphone dans mon sac et fermant mon casier à clef avant de rejoindre à nouveau l'euphorie du stade de sport, gobelet en main, à la recherche de ma meilleure amie.

Immobile, les dents plantés dans sa lèvre pour ne pas hurler, Jae Sik essayait de comprendre où il avait pêcher. Qu'avait-il put se passer pour que ce massacre arrive ? 3 - 0, score sans équivoque dont sa fierté ne se remettait pas. La colère, elle grondait dans les entrailles du sportif, certains qu'il y avait eu tricheries. À part ça, comment expliquer une telle taulée ? Tous les buts marqués par cette fille… Le talent et la chance n'y était pour rien, il en était certain !

Rageur, avec un mot pour ses coéquipiers pour les prévenir qu'il allait se promener, il quitta la structure gonflable, se lançant aussitôt à la recherche de la jeune femme qui avait marqué tous ces buts. Il tourna en rond, cherchant le maillot rose sur la petite mais elle était introuvable. Jusqu'à ce moment ou il la vit et qu'il fondit sur elle, tel un oiseau sur sa proie, la tirant vers le dessous des gradins. Les yeux du garçon était noirs d'incompréhension, un peu de colère aussi, de s'être fait avoir par une mouflette.

" Comment tu as fais ? T'as triché, c'est ça ?"

Accusateur, il toisait la jeune femme pour comprendre. Il n’était pas nul, ses camarades non plus alors comment ça se fait qu'ils avaient à peine toucher la balle pendant tout le match ? Qu'elle avait marqué ces trois buts comme si c’était la chose la plus simple du monde ?

Du bout des lèvres, le punch avait un goût d'alcool vraiment prononcé et j'avais failli le recracher sur la pelouse du stade. "Ew" l'expression trouble, glissant ma main sous mon menton pour essuyer les gouttes je grimaçais lorsque je sentis mon bras pris en grippe par une poigne si forte qu'elle ne me laissa pas le choix de la suivre à l'abris des regards.

J'étais complètement paniquée. "Lâche-moi !" Je tirais sur mon bras jusqu'à le reconnaître : le gars sur la ligne d'en face, son regard sombre encore plus sombre que sur le terrain et ses doigts laissant leur trace sur ma peau, signalant qu'il n'était pas près de me lâcher. "Va te faire foutre" je me dérobais d'un coup sec à sa force, trébuchant quelques pas en arrière sous les gradins du terrain de foot. J'étais seule avec lui, incapable de prévoir ce qu'il était capable de faire pour une histoire aussi ridicule et je resserrais mes doigts autour du gobelet, hors de moi. "Quoi ? Rien à voir. T'es seulement mauvais, aucune histoire de triche alors t'es gentil et tu vas pleurer ta défaite dans les jupons de quelqu'un d'autre." Je cache le malaise qui me paralyse derrière un regain d'assurance, le regard noir avant de chercher à m'échapper de là en le contournant par la gauche.

Ses mains se posent sur mes épaules et les agrippent fermement ; subitement, tous les voyants lumineux s'allument, je vois rouge et ma panique monte d'un cran. "J'ai dit ne me touche pas !" Les poings serrés contre mon corps tellement plus frêle et minuscule que le sien, je me dégage de son emprise d'un mouvement brusque vers l'arrière et ne m'arrête que quelques pas plus tard, à une distance raisonnable de son air fou, négligé et quasi obsessionnel. Maintenant, c'est moi qui ai l'air d'une folle parce qu'en même temps que ma voix hurle ces mots, je réalise qu'il n'y a pas de vrai danger et que tout ça, c'est encore juste une histoire de compétition qui rend dingue.

Je suis soulagée lorsque une groupe d'étudiants prend place sur les marches et font trembler les gradins au-dessus de nos têtes ; l'idée de ne pas être seule face à lui permettant de me relaxer malgré la poussière que génèrent les trémolos de la structure à chaque fois que quelqu'un force un pas dessus. "Je m'en fiche ! Va  les voir et dis leur dire que j'ai triché sur ça te fait plaisir mais j'ai pas triché !" La gorge nouée, je trouve malgré ça le moyen de protéger ma fierté derrière une expression agacée, blasée et quelques commentaires sarcastiques. "Et t'es vraiment un idiot si t'es pas capable de comprendre que la trajectoire d'un ballon ça n'a rien de magique." Je fais remarquer dans un souffle moqueur. Je veux dire, j'en suis pas à chuchoter des directives à l'oreille des ballons de foot, qu'est-ce qu'il croit ?!