Depuis combien de temps avais-je pas vu mon colocataire ? Il me semblait que son absence durait depuis une éternité, pourtant seulement quelques jours venaient de s’écouler depuis la dernière fois que nous nous sommes vus. Je ne comprenais pas pourquoi il avait disparu de la surface de la terre. Il me fallut quelque temps pour retrouver sa trace. Mon enquête avait pris du temps parce que je ne savais pas qui interroger pendant encore peu… mon chemin avait fini par croiser celui de mon inspiration. Sur ce dernier, mes souvenirs me rappellent que Il Kyang faisait plusieurs petits boulots alors il fallait juste découvrir le lieu exact pour aller questionner tout le monde. Il ne fut pas aisé de retrouver les endroits où il travaillait car mon cerveau n’avait pas enregistré ce genre d’informations, probablement inutiles pour lui. Quelle erreur ! Je devrais noter quelque part ce type de détails parce que cela faisait de moi un mauvais camarade ? Ouais ?! On ne pouvait pas attendre que je me souvienne de ça plus de mes cours, plus de mes tactiques. Il y aurait une surchauffe importante sinon… Mes neurones n’y survivent pas.

Quand même une petite voix me souffla que Il Kyang pouvait être absent à cause de cette fameuse fouille des dortoirs. Je m’en suis sorti assez un extremis mais j’avais entendu que d’autres avaient eu beaucoup moins de chance. Est-ce que monsieur avait eu la poisse ? Je devrais lui offrir du sel pour le jeter par-dessus son épaule ou encore une patte de lapin. Le mauvais œil semblait s’abattre sur lui dans ce cas. Non je ne pouvais pas croire qu’il soit tombé aussi bas…… enfin contre sa volonté… Je devais apprendre la vérité de sa bouche sinon jamais je ne pourrais croire… Quoi ? Mes pensées deviennent embrouillées. Suis-je en manque ? L’inquiétude gagnerait-elle un peu trop des zones reculées de mon cerveau ? Je suis confus.

Heureusement ma petite enquête me pousse enfin vers cet endroit où mon colocataire travaille. Je le cherche des yeux puis demande à ses collègues “Il Kyang ?” On m'indique sa silhouette. Je me retourne pour hurler "HEY ! TOI !"

Comme il est amusant de sentir les regards de ses collègues sur mes 1m82 !! Je suis un géant pour beaucoup de personne même si la nouvelle génération commence se montrer beaucoup plus grande. Je suis toujours amusé par la réaction des gens quand leurs yeux se posent sur moi. Je peux y lire de la surprise puis l’admiration. Je me sens comme une vedette posant les pieds sur le tapis rouge. Je pourrais presque faire un coucou digne des princesses pour avoir des réactions encore plus choquées. Heureusement je ne suis pas un cas unique. On est de plus en plus nombreux à atteindre les 1m80. Je remarque juste que ma carrure de basketteur ne passe pas inaperçu. Je me sens moins quelconque dans un sens. Je salue poliment les collègues de mon colocataire.

Pourquoi ce type avait disparu de la surface de la terre ? Un vrai casse-tête pour retrouver sa trace. Je comptais bien sortir ma super pokéball pour le capturer ainsi il m’échapperait plus jamais. Plus sérieusement je me suis beaucoup inquiété pour lui MAIS JAMAIS DE LA VIE JE LUI DIRAI. Lorsque ses collègues m’indiquent le lieu où je pourrais retrouver Il Kyang, je pousserai bien tout le monde afin d’avaler la distance qui nous sépare. Il manque plus que la chanson des scènes romantiques dans les films pour filles. Celle qui fait « shababada » quand ils courent l’un vers l’autre. Alors on imagine ça en fond pour nos retrouvailles. Hey ?! Je ne suis pas amoureux de mon colocataire. Ma vie est trop compliquée pour avoir une relation amoureuse. Lorsque nous sommes non loin l’un de l’autre, il me demande ce que je fous ici. De vilains mots dans une si jolie bouche. Heureusement je ne prends pas ombrage de son vocabulaire parce que ses paroles ne sont pas méchantes ou destinées à m’envoyer sur les roses. Il cause comme les jeunes d’aujourd’hui. Je suis tellement vieux… Sa remarque m’arrache un sourire au coin en même temps que je fourrais mes mains dans mes poches. « Tu oses ne pas me rappeler ? Je ne te pensais pas ainsi ?! Moi qui croyais que nous deux ça comptait à tes yeux. Tu me fais de la peine. » Je me marre tout en racontant mes conneries. Cette désinvolture cache en faites mon inquiétude. Evidemment que Il Kyang fait partie des personnes qui comptaient pour moi. Je ne pourrais jamais lui dire parce que je ne suis pas douée pour ça. En plus notre relation est faussée avec cette histoire de crimson. Il m’en fallait encore une dose. « Je ne dirai pas non pour un café » Nous prenons place à une table. Je commande un américano glacé tout allongeant mes jambes interminables. « Comment tu vas ? » Je regarde autour de nous, ne connaissant pas cet endroit. Je joue avec mes mains parce que comment amener la conversation vers ce qui m’intéresse principalement. Je pousse un soupir en me demandant pourquoi les choses sont aussi compliquées. Ne puis-je pas me comporter comme une personne normale ? « Tu as disparu… pourquoi ? » Avais-je trop insisté pour les séances de sport matinales ? Je suis bordélique ? Il ne me semblait pas ! Je suis au contraire hyper organisé. « C’est ma faute ? » Ouais je suis émotif quand je souffre. Mon genou me lance. La douleur remonte le long de ma cuisse et descend aussi vers mon pied. Quelle horreur !

Il y a certaines personnes que nous croisons tous les jours qui deviennent importantes sans que nous n’en ayons conscience. Elles se font doucement une place dans nos existences comme si elles avaient toujours été présentes. On ne ferait même plus attention à elles… mais un jour, elles disparaissent. Cette absence nous fait soudain prendre conscience de leur valeur ! Nous ne sommes pas des amis proches avec Il Kyang mais il appartient à cette catégorie de personnes qui sont présentes au quotidien. Les réveils matinaux qui finissaient avec mon camarade me balançant un oreiller parce que monsieur est trop fainéant pour lever ses fesses et venir courir avec moi. Ce manège est amusant. Il ne me décourage pas une seconde parce que je sais que je l’aurai un jour… c’est la MAAF ! Sa disparition avait eu un impact sur mon existence : plus personne ne pouvait me fournir des cachets calmant mes douleurs. En plus je ne pouvais pas emmerder mon colocataire quand je me préparais pour mon jogging matinal. Quelle plaie ! Je ne comprenais pas pourquoi Il Kyang n’avait pas donné signe de vie.

Heureusement mes recherches avaient fini par porter leurs fruits parce que je me posais des questions qui ternissaient mon moral déjà mal engagé… attendant que mon camarade prenne sa pause, mes lèvres semblaient être possédées parce qu’elles articulaient des sons qui donnaient des mots puis des phrases assez débiles. Pourquoi mon corps choisit parfois de me jouer des tours de la sorte ? Je prends une grande inspiration mais nous passons commande alors mon attention est immédiatement dévié sur mon besoin vital de caféine. Attendant mon americano glacé, nous reprenons notre conversation enfin un semblant de discussion. Les réponses de Il Kyang sont rassurantes parce qu’elles délestent mes épaules de ce fardeau que je porte sans m’en rendre compte. Il n’avait pas disparu par ma faute ? Ouf ! Je ne souhaite pas causer la perte de mes proches. Je me mordille les lèvres pendant qu’il poursuit. Je suis nerveux ! Ses conneries de truc ? Il ne se rend pas compte que ce sont des choses addictives ? Je commence seulement mais mon corps me réclame sa dose. Le soulagement que je ressens lorsque j’en prends est immense. Il n’y a plus de douleurs ! Il ne comprend pas ? Il ne doit même pas percevoir la dangerosité de cette connerie de crimson et moi je suis assez con pour y plonger. Hors de question d’appeler au secours parce que je suis encore loin de me trouver dans une situation délicate. Je souris quand il évoque une grande maison pour lui tout seul. « Tu me rassures ou tu as fumé la moquette ? » Je ne me souviens pas que Il Kyang ait été riche. Avais-je loupé des choses pendant nos conversations ? Je fronce des sourcils « Tu es logé ? Par qui ? » Je cherche des informations rassurantes pour moi. Je joue avec mes doigts puis remercie la serveuse qui me donne ma dose de caféine. « Tu dois réellement être ébranlé pour avoir envie de courir ! » Je souris puis avale une gorgée de ma boisson. « Un mois ? Cela me parait bien long. Pourquoi tu n’as pas dit que tu la cachais pour une autre personne ? » Je suis un peu curieux sur les bords. « Comment vais-je faire sans toi ? Tu sais bien que ces trucs me soulagent. Je ne connais personne qui peut m’en fournir ! »

Je souris, il cherche toujours à détendre un peu l’atmosphère avec ses remarques. J’hausse les épaules et balance « J’ai gagné une grosse somme d’argent ». Puis en voyant sa tête je me ravise « Mais non ! Je dors chez Sawan… elle a de la famille pas trop loin… » Et Young Min a beau ne pas me connaitre, il sait pertinemment qu’entre Sawan et moi il y a quelque chose. Je ne m’en suis jamais caché. Elle et moi c’est une addiction. J’ai besoin d’elle, autant qu’elle a besoin de moi. Nous ne sommes pas en couple, à vrai dire j’ai même eut la place de l’amant pendant longtemps mais nous avons cette relation. Simple et saine ! Alors oui, Young Min le sait parce-que je lui ai souvent dit qu’elle venait et qu’elle et moi on ne se contentait pas de jouer aux cartes… Il n’a jamais cherché à comprendre et je crois que personne ne pourrait saisir la relation que nous avons. Ce n’est pas que du sexe, c’est bien plus que ça ! Une confidente, mon médoc contre les choses qui me blessent… Buvant une gorgée de mon café je détourne les yeux. Je ne sais pas si je peux lui dire de qui il s’agit. Oui, j’ai gardé ces pilules pour quelqu’un… Je n’ai pas envie de mentir à Young Min, tout comme je n’ai pas envie de dire des noms. Mais mon coloc est si innocent… je veux dire, c’est le genre de type à qui on peut tout confier. Il est loyal, jamais il n’ira balancer qui que ce soit encore moins quelqu’un qui lui fait confiance. « C’est pour Sawan… » Et parce-que moi aussi j’en consommais. C’était notre truc, en prendre une petite pilule pour tenir le coup. C’est d’ailleurs elle qui m’en a fourni la première. Je ne lui en veux pas, elle pensait m’aider et ce qu’elle a fait. Après le reste, je l’ai assumé complètement « Je préfère que ça soit moi, plutôt qu’elle… » Je suis attaché à cette fille. Je ne lui veux que du bien, alors oui je m’en fous d’être exclu finalement. Ce qui compte c’est que ça ne soit pas elle qui trinque. Je fronce les sourcils, intrigué par ses propos sur la crimson. A-t-il autant besoin de ces trucs qu’il le dit ? « Young Min… je sais que c’est compliqué pour toi, mais… » Quoi ? Tu sais que ce n’est pas très bon pour toi. C’est un sportif, qui passe un mauvais moment mais ces pilules ne sont pas une solution. Je ne sais pas… j’ai peur qu’il ne puisse s’en passer… A moins que je me fasse des idées ? « Hum, laisse tomber. Pour être honnête j’en ai plus vraiment, on m’a tout confisqué lors de la perquisition. » Je fais la moue, avant de boire à nouveau mon café. 

Gagner une grosse somme d’argent ? Il Kyang n’est pas une seule seconde crédible. Sa petite taquinerie reçoit en réponse juste un haussement de sourcils. Il ne change pas ! Il prend les choses à la légère. Pourquoi chaque fois que nous discutons il me semble tout prendre avec une certaine insouciance ? Il ne me parait pas assez stupide pour croire que la vie est juste un long fleuve tranquille. Je ne le comprends pas. C’est probablement pour cette raison que nous ne sommes pas des amis proches. Cependant je le connais assez pour savoir qui est Sawan même si la nature de leur relation m’échappe. Leur histoire est des plus étranges à mes yeux. Je peux seulement afficher mon soulagement d’apprendre que mon colocataire ne vivait pas dans la rue. Il avait au moins un toit au-dessus de sa tête mais pourquoi ? La chambre ne lui convenait plus ? Il s’est passé quelque chose ? Mes méninges fumaient lentement tandis que mon café me réchauffait les doigts. Les choses sont toujours compliquées. Je souhaitais seulement oublier pendant quelques heures mes souffrances mais il semblerait que Il Kyang ne pourrait pas subvenir à mes besoins. Comment allais-je faire ? Je ne connaissais pas beaucoup de monde dans cette université. On est loin de mon succès au collège ou au lycée aux USA. Avalant une gorgée de mon café, je ne fus pas spécialement étonné en apprendre pour la demoiselle. Ils font tout ensemble ou quoi ? Je ne comprends pas… remarque nous étions toujours collés, Elio et moi avant. On sortait ensemble surtout. Eux c’est amitié avec extra ? « Pourquoi prendre autant de risque pour elle ? » J’aimerai bien comprendre leur lien. En attendant d’avoir peut-être un jour une vraie explication, je lui avoue avoir besoin de crimson. Cette merde fait disparaitre pendant quelques heures mes souffrances. Celles-ci sont de plus en plus violentes. Je les supporte moins mais personne n’ait au courant. J’affiche une expression neutre ou joyeuse pour les induire en erreur ! Personne ne doit se soucier de moi. Il Kyang commença une phrase qu’il laissa en suspens. Pourquoi ? « Mais quoi ? » Je ne crois pas que mon colocataire lâche aussi facilement l’affaire. Je sous-estime peut-être notre relation. Je hausse les épaules puis me gratte la nuque. « Tu en as encore ? Je te prends la fin ! » Je me suis un peu précipité pour lui demander ça. Mes paroles sont presque des ordres. Ma voix trahit mon empressement, mon besoin de cette drogue. « Me laisse pas comme ça, s’il te plait ! » Je me sens démuni. « Dis-moi comment en avoir ! » Je passe par différents stades sans agresser Il Kyang aussi. Je sais encore me contrôler !

J’hausse les épaules, l’air presque insolent en l’observant. Sawan et moi c’est simple… enfin pour nous ça l’est. Mais je n’ai pas envie d’étaler ma relation avec elle. Young Min ne comprendrait pas… je ne l’imagine pas romantique à rêver de trouver l’amour. Mais a-t-il besoin de savoir pourquoi j’aime autant la compagnie de Sawan ? Il y a du sexe entre nous, oui c’est vrai, mais ce n’est pas que ça. Et je déteste devoir me justifier ! Les gens me diraient juste « ouais vous coucher ensembles », mais non ! C’est bien plus alors j’ignore sa question. Me focalisant sur mon café. Je suis surprit de ses remarques, encore plus de ses réactions. En a-t-il autant besoin ? Je ne sais pas… cette discussion me dérange subitement. J’ai l’impression d’être face à… à un drogué ? Non bordel ! Je ne peux pas croire ça de Young Min. Il n’est pas comme ça, il est juste démuni en ce moment. Je lui trouve toutes les excuses possibles pour m’éviter d’aller plus loin. Pourtant, il insiste encore… je regarde autour de nous, presque apeuré que quelqu’un l’entende me demander ces choses-là. A quoi il joue bon sang ? Il croit que je vais lui en fournir comme un dealer ? « Je… Young Min, tu crois que t’en as besoin mais je t’assure que non. » En fait si… je le vois dans son regard, il en a besoin et ça me tue de l’admettre. Je n’ai pas envie de croire qu’il est accro, je veux juste me convaincre qu’il souffre. « Je… j’en ai que deux sur moi. » mais merde, pourquoi est-ce que je lui ai dit ? Parce-que j’ai une grosse journée, que je dois enchainer deux petits boulots aujourd’hui et étudier pour un examen à la con. Alors ouais, je les avais prises sur moi au cas où je sois en train de m’endormir dans un coin de la boutique. Mais je regrette subitement de lui avoir dit, pourtant une part de moi se refuse à croire à sa dépendance. Je l’aide… c’est tout ce que je me dis. Me laissant retomber sur le dossier de ma chaise, je jette un coup d’œil à Young Min, hésitant un instant avant de lui dire « Je reviens. » et je me lève pour aller fouiller mon sac. Je ne tarde pas à revenir, les deux pilules cachées dans ma main. Je lui tends discrètement, un peu nerveux mais surtout embêter. « C’est tout ce que j’ai sur moi… » Et je me rassois l’air de rien. J’ai le cœur lourd subitement, j’ai peur de faire une connerie. « Je te dirais pas où en trouver… » Désolé, je ne peux pas. Parce-que j’ai peur qu’il fasse une bêtise. Qu’il ne se contrôle pas. Ces trucs là… moi je sais où en avoir. Même si je ne devrais pas, avoir à faire à des dealers ne m’a jamais effrayé. Je me souviens d’une époque où je devais trouver moi-même mes doses. J’hausse les épaules, fixant mon café quelques bonnes minutes. « Si tu veux, j’irais t’en acheter… » Mais pourquoi j’ai dit ça ? Pourquoi je suis aussi con que ça ? C’est ce que font les amis pas vrai ? S’aider je veux dire… j’aime bien ce gars, il est sympa et juste un peu perdu. Alors oui, j’y crois, je me dis que quelques pilules ce n’est rien tout compte fait.