Épuisé et pourtant satisfait, je passais enfin la porte du dortoir et empruntais les couloirs dont j’avais presque oublié les couleurs tant la garde que je venais de quitté avait été intense. Les muscles endoloris, je m’étirais en traînant des pieds jusqu’à la cuisine impeccable. Plus aucun verre ne traînait depuis qu’Evan et moi avions transformé la pièce en véritable laboratoire improvisé. L’air absent et les gestes lents, j’attrapais de quoi contenter mon estomac rugissant, du moins juste le temps de faire le chemin et de retrouver mon lit. Et ce fut toujours aussi peu connecté avec la réalité que je fis un détour par la chambre de Sawan, fermée et pour cause, au beau milieu de la journée elle ne pouvait être ailleurs qu’en cours. Las, je fis rebroussais chemin pour errer avant de devoir me retrouver avec la solitude qui n’attendait que de m’engloutir une fois la porte de ma chambre passée. L’agitation de l’hôpital résonnait encore dans mes oreilles bourdonnante, j’avais même toujours l’impression d’être ébloui par les néons aux reflets bleutés des couloirs immaculés, si bien que je ne fis pas attention au groupe d’étudiants qui, apparemment pressés par le temps, courraient dans les escaliers et manquèrent de me bousculer. De justesse, je me confondis presque avec le mur pour les éviter, mais une pauvre âme innocente n’eut pas ce temps. Sans faire plus attention, ils la bousculèrent sauvagement pour qu’elle ne s’effondre et dégringole les quelques marches qu’il lui restait. « Faites attention ! » lançais-je alors qu’ils étaient déjà bien trop loin pour m’entendre pester contre eux. Et sans plus attendre, je me précipitais vers celle qui tentait de se relever péniblement. « Est-ce que ça va ? Tu as mal quelque part ? » Les yeux rivés sur la cheville à laquelle elle avait enroulé ses doigts, j’attendais qu’elle ne m’énonce ses symptômes, mais rien ne vint, aucun son ne fut émis. Ce ne fut que lorsque je relevais le regard que je compris. « Oh… excuses moi. Je…   » Suis indélicat… Décidément, je n’avais pas mon pareil pour mettre les deux pieds dans le plat. « Est-ce que tu peux me montrer exactement où tu as mal ? Mais n’essaie pas de te relever, tu…   » Je m’interrompis un instant en réalisant. « Tu ne m’entends peut être pas non plus…   »

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« Only Human »

But I'm only human, And I bleed when I fall down, I'm only human, And I crash and I break down, Your words in my head, knives in my heart, You build me up and then I fall apart, Cause i'm only human...

©️crackintime

Lyvan avait les yeux rivés sur son téléphone et ne faisait pas attention à ce qu’elle faisait. Elle était tout aussi responsable que les deux garçons qui dévalèrent les marches sans faire attention à elle. Tout se passe trop vite pour qu’elle ait le temps de se raccrocher à quoique ce soit. Elle lâche son téléphone par réflexe et ses bras moulinent dans les airs avant qu’elle ne sente son corps basculer dans le vide impuissant. Elle ne chute pas beaucoup, mais suffisamment pour dévaler quelques marches. Son cri est silencieux mais son corps tombe dans un bruit sourd. Elle grimace en sentant sa cheville céder sous son poids. Le souffle coupé elle mets de longues secondes avant de réaliser qu’elle venait de tomber. Bon sang qu’elle avait envie d’insulter les idiots qui l’avaient bousculé sans même le voir. Crétin. C’est alors que rapidement un garçon vient à sa hauteur pour s’assurer qu’elle allait bien. Lyvan devrait le remercier ou tout du moins se sentir reconnaissante, mais elle était craintive. Elle détestait parler aux autres parce que la plupart ne la comprenait pas. Non, à vrai dire c’était parce que la plupart était mal à l’aise de ne pas la comprendre et la fuyait. Elle se sentait suffisamment à l’écart et étrange pour ne pas avoir à supporter la bêtise des gens … Il n’y avait qu’in In Ho et sa sœur que tout lui paraissait naturel. Le garçon bafouille, semble si gentil et maladroit … une vraie douceur. Mais Lyvan est sauvage, elle est renfermée. Agacée elle le repousse, ne cherche pas à lui faire comprendre qu’elle l’entend mais le regard noir qu’elle lui lance ne laisse aucune place au doute. Elle se relève précipitamment craignant qu’il ne veuille s’occuper d’elle mais à la seconde pour elle prend appuie sur sa cheville elle pousse un cri silencieux. Elle trébuche et se rattrape à Seo Joon de justesse en grimaçant tant sa cheville lui était douloureuse.

 

Chevaleresque comme à mon habitude, je lui portais assistance. Incapable de rester ignorant face à sa détresse soudaine et bien silencieuse. Il me fallut une minute pour comprendre qu’aucun son ne sortait de sa gorge et qu’aucun n’en sortirait plus tard. Habitué à prêter main forte, à secourir quiconque le voulait, je m’attendais là encore à obtenir toute sa coopération de la part de la victime, mais contre toute attente, elle me repoussa vivement, les yeux froncés et le regard obscurcit par une colère certaine. J’ignorais d’où elle venait, étais-je responsable de son courroux ? Interdit face à sa réaction, je la laissais tenter de se redresser. Une erreur alors qu’elle manqua de chuter à nouveau en s’appuyant sur une cheville abîmée. Sa bouche s’était arrondie sous le choc, mais là encore, aucun son n’en sortait. Stupéfait, je la rattrapais de justesse avant qu’elle ne s’échoue une nouvelle fois sur le sol. « Tout va bien ? » Une question qui n’appelait aucune réponse. J’ignorais si elle m’entendait ou non, aussi fis-je mon possible pour lui offrir mon aide… si elle la voulait. Alors face à elle, j’articulais chaque mot. « Je ne connais pas le langage des signes mais… je pense qu’il faut faire examiner ta cheville. Une simple entorse peut très rapidement s’aggraver, surtout lorsque l’on s’appuie dessus trop tôt. » Loin de lui faire la morale, je tentais simplement de lui expliquer qu’une simple blessure pouvait se transformer en réel problème si on ne le prenait pas à temps. L’air compatissant et bienveillant, il me fallait la convaincre avant de lui imposer quoique ce soit. « Est-ce que quelqu’un peut venir t’aider ? Si tu préfères que ce soit un ami ou un membre de ta famille… mais si tu veux bien me laisser faire, je suis étudiant en médecine. » D’une main je la retenais quand de l’autre je partais en quête de mon badge d’interne pour le lui montrer. « Tu n’es pas obligée de me faire confiance. » ajoutais-je. « Mais je suis en mesure de t’aider. »

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Elle n’a pas envie de lui faire confiance. Elle n’a pas envie qu’il l’examine, mais Sori n’est pas là, et In Ho bosse au Kurss. Elle s’en veut de ne pas avoir fait attention. Elle déteste les hôpitaux. Elle ne veut pas aller se faire examiner. Pas toute seule. Pas sans la présence d’un de ses proches. Elle grimace de douleur, s’appuie à contre cœur contre le garçon et détourne le regard. Elle n’est pas méchante, elle ne cherche pas à le blesser ou lui paraitre sauvage, mais Lyvan a peur des gens. Elle a peur dès qu’on la touche et qu’on l’approche. Elle ne supporte pas l’attention qu’un homme peut lui porter, quand bien même elle était bienveillante et attentionné. Elle avait peur d’eux. Peur que tout recommence. Elle le repousse alors, plus doucement cette fois pour lui faire comprendre que sa proximité la gêne. Elle commence à avoir les joues rouges et elle se cache derrière ses cheveux. Elle lorgne sur son badge. Elle le croit, ce n’est pas la question. Elle l’a déjà vu, sait qu’il est en médecine, comme Jonah. Mais … elle ne peut faire face à ses craintes et ses peurs. Elle pince ses lèvres se tenant à la rambarde de l’escalier elle se laisse glisser doucement pour s’asseoir sur la première marche. Elle attrape son téléphone et décide de lui écrire rapidement sur son bloc note « Je ne veux pas aller me faire examiner à l’hôpital. Mais si tu veux regarder ma cheville, on peut le faire ici. Mais ne me touche plus s’il te plait. Seulement ma cheville si cela t’es nécessaire. » elle attend qu’il ait fini de lire avant de reprendre son téléphone pour ajouter « Et je m’appelle Lyvan. Et je suis muette, pas sourde. » parce qu’il ne le savait peut-être pas et qu’elle trouvait ça judicieux qu’il le sache. Elle n’avait pas envie qu’il lui pose la question plus tard. Elle ne voulait pas faire la discussion. « Salon. » signe-t-elle avant de lui indiquer la pièce car il ne devait pas la comprendre. Elle se redresse, lui fait signe de rester à distance en tendant la main vers lui pour l’éloigner. Son visage était adouci, et semblait plus craintif qu’arrogant. Il n’avait qu’à aller chercher ce qu’il fallait, elle irait à cloche pied jusqu’au canapé. Elle était débrouillarde. Têtue aussi. Et quand bien même elle souffrait, elle ne voulait pas d’aide. Une fois assise dans le canapé pour se rassurer, Lyvan ne put s’empêcher d’envoyer un sms à In Ho. Elle ne voulait pas l’inquiéter, la blessure semblait de toute façon bénigne. Mais elle voulait qu’il soit là avec elle par sms, car elle n’aimait pas se sentir seule face à une personne qu’elle ne connaissait pas vraiment.