oh, happy day

ou tout du moins, c'est ce qu'on aurait tant aimé que ça soit. mes yeux noirs se sont posés sur toi. toi qui voit le monde avec ton regard d'enfant. je ne voulais pas que tu vois ça. ces gestes violents, répétitifs, de notre père à l'égard de notre mère. un jour il a voulu te frapper toi, sol ah. la perle de ma vie, la personne la plus précieuse à mon coeur. et il croyait naïvement que j'allais le laisser faire. comme c'est mignon.

pourtant, tout n'avait pas si mal commencé. né un treize mars 1994, au coeur de la capitale coréenne, j'étais parti pour ne manquer de rien. mon père était d'origine américaine, et il avait réussi dans l'industrie de la télévision, du divertissement. il possédait plusieurs chaînes, qui lui rapportaient de l'argent, beaucoup d'argent. nous vivions de manière aisée, et notre mère d'origine coréenne était au tout début de sa carrière de mannequinat. tout ne pouvait que bien aller.
nous faisions souvent des séjours aux états-unis, pour dire vrai nous y allions lors de chaque vacances scolaires, et même si j'étais un peu perdu à chaque fois, ça me rendait curieux. c'était tellement différent de la corée. nous faisions des repas de famille, avec la famille de mon père qui vivait toujours là-bas. sol ah était née et elle venait aussi avec nous. mais soudainement, tout s'est arrêté. les voyages, la famille, le bonheur, la richesse. la richesse, oui. c'était ce qui avait permit au loup de se tenir correctement, de ne pas sortir sa fureur et ses griffes. quand il se fit prendre sa place par quelqu'un de plus influent, mon père perdit la tête. il trouva refuge dans l'alcool, et la descente aux enfers commença. ma mère abandonna sa carrière de mannequin, et elle goûta aux prémices des mains sulfureuses de ahn jae in. une fois par semaine et puis ensuite, tous les jours. lentement, brutalement, longuement. une torture indéfinissable, des cris de haine et de douleurs qui hantaient la maison jour et nuit. un cauchemar éveillé.

la roue tourne, comme on dit

et ça, tu l'as bien compris, n'est-ce pas ahn jae in ? tu sentais que ta fin était proche. alors ta colère était encore plus grande. je ne t'appelle plus papa, ni mon père. je t'appelle par ton identité, et sois en fier que je daigne m'en souvenir. il y a des moments où je hais porter ton nom. tu es un monstre, tu ne méritais pas de vivre. pendant ces derniers mois avant que tu ne parte définitivement, tu étais frivole, tu dépensais trop, beaucoup trop, tu trompais notre mère. sans pitié, tu la battais ensuite en rentrant. alors, j'ai décidé de précipiter ta chute. ce soir, où tu as voulu lever la main sur sol ah, était ton dernier soir. tu as commencé à t'approcher de manière menaçante devant ta propre fille, tu étais si répugnant. ahn jae in, comment pouvais-tu encore vivre ? elle pleurait et t'implorait. tu puais l'alcool. tu m'as toujours dégoûté. et avant que tu ne lève la main sur sol ah, j'ai pris le chandelier dans la cuisine et t'ai frappé la tête, une fois, violemment mais ça a suffit. tu es mort sur le coup.

elle continuait d'être dans ses rêves, continuellement

elle n'en finissait pas. ahn so hyun était devenue folle. elle avait été tellement battue, qu'elle ne reconnaissait même plus ses propres enfants. après une enquête, la justice lui retira notre garde. finalement, après avoir voyagé de famille en famille d'accueil, j'ai finis par prendre les choses en main, sol ah sous le bras et nous sommes partis. j'avais trouvé une guitare dans les poubelles, et ayant pris des cours de musique, je jouais dans la rue, sol ah emmitouflée sous quelques couvertures bien chaudes. qu'il neige, qu'il vente, qu'il pleuve, qu'il tonne. nous étions là, comme les misérables de victor hugo à chiner le moindre centimes. la rue, comme le luxe, nous avons tout connus. et c'est là, que ma vie a prit un meilleur tournant, le jour où j'ai rencontré byung hee. cet allumé fumait des trucs complètement venus d'un autre univers, il vivait seul, pas de famille, et faisait parti d'une bande de gars paumés, qui se rejoignaient dans une vieille cave qu'un des gars possédait. mais le plus important, c'est qu'ils jouaient de la musique, tout comme moi. sol ah s'était assise sur un fauteuil un peu défoncé de la cave, toujours sous ses couvertures. byung hee et ha jin s'étaient approchés d'elle et lui sortaient des blagues pour la détendre. et su ah qui n'avait pas montré d'expressions différentes depuis le départ de la maison, pour la première fois, a souri. j'ai observé les autres membres de cette bande pote, ji hyuk, do il et kyung jong, un peu en retrait qui discutaient et se taquinaient comme des enfants. c'est là que j'ai compris, à l'aube de mes 16 ans, que ma vie serait ici.

un pour tous, tous pour..

nous. ces gars, j'ai finis par ne plus les lâcher. avec leur aide, j'ai commencé à enchaîner les petits boulots, c'était galère car ahn jae in nous avait laissé d'affreuses dettes que notre mère ne pouvait pas payer. tout nous étaient donc retombés dessus mais j'ai réussi. j'ai réussi à nous trouver un petit logement, à sol ah et à moi. parfois, ils nous arrivaient de squatter, les uns chez les autres. cette bande, devenait toute ma vie. au lycée, j'avais commencé le basket. je m'étais trouvé une nouvelle passion. ma vie devenait de plus en plus chargée. entre les cours, m'occuper de sol ah, les minis concerts improvisés avec les gars, et le club de basket dont j'étais devenu capitaine, sans compter mon boulot dans un convenience store, la nuit. j'étais fatigué, mais il arrivait que parfois les gars me remplace, pour m'aider. eux aussi, niveau fric, ils étaient dans la sauce. pourtant, dans ce monde initial si différent de celui d'où je venais, entre bagarres de rue, et loi du plus fort entre les gangs, j'ai vite trouvé ma place. là où pour la première fois de ma vie, j'avais l'impression d'avoir, une vraie famille.

seoul samsung thunders

ma main poussa avec rapidité la porte des vestiaires de l'équipe professionnelle des seoul samsung thunders. min seok, un de mes plus fidèles amis, m'offrit un sourire chaleureux suivit d'une forte accolade. « frérot, toujours un des premiers arrivés, comme d'hab. » pour aller à un match comme celui-ci, un des derniers du championnat actuel de cette saison, je n'étais jamais en retard. min et moi, étions souvent là avant tout le monde. on était habitués. mais ce sport nous donnait tous des frissons. pendant que nous nous changions, un à un sont arrivés les autres membres de l'équipe, dans un brouhaha sonore équivalent à une salle de classe rempli d'ados en pleine puberté. un petit sourire s'est affiché sur mon visage lorsque j'ai aperçu le coach tout plein de sérieux faire un signe de la main pour que le silence règne. Tous réunis et assis sur le banc en forme de U face à lui, c'était comme le grand sage de l'équipe. il savait quand parler et quand sortir les bons mots. tout le monde l'écoutait avec attention pendant qu'il adressait les dernières instructions et derniers conseils avant le fameux match tant attendu. il distribua les numéros de chacun, en citant les noms et prénoms des joueurs. quand il vint au mien, mon regard croisa le sien. et dans ses yeux fut clairement affiché ce message, gagne et fais monter l'équipe, je crois en toi. j'étais un des éléments clés, un des meilleurs joueurs, et je le savais. alors quand nous nous sommes tous levés après un cri d'encouragement et que nous sommes sortis sur le terrain, j'ai observé tout autour. su ah était venue me voir, accompagnée des gars qui agitaient leurs banderoles comme des idiots. un énorme eren t'es une saleté mais fighting ! était inscrit sur celle tenue par byung hee et ha jin. un doux sourire s'est affiché sur mon visage pendant que kyung jong se faisait bousculer par les deux imbéciles. do il et ji hyuk, sereins, me faisaient des signes de victoire et sol ah m'adressait des signes agités. aussi loin que je m'en souvenais, à vingt-cinq ans maintenant, j'en avais fais du chemin. j'en étais à ma septième année à l'université de yonsei, en doctorat double cursus staps option basketball et sciences de l'astronomie. les autres s'étaient aussi inscrits et sol ah avait suivit. j'étais si loin de l'enfer de mon enfance.
mon cerveau fit ensuite le vide, au coup de sifflet. que le match commence.