20h25… les aiguilles indiquaient le moment où je pourrais enlever mes gants et rentrer chez moi. Mon dernier client avait été des plus cons. Pardon pour le vocabulaire ! Je ne savais pas comment exprimer autrement son comportement. Il a passé la séance en critiquant la moindre de mes décisions, il a même changé le croquis pendant que je tatouais car cela ne lui convenait plus. Il avait pourtant validé le dessin avant que nous commencions. Il m’a rendu fou !! Heureusement mon boss est venu à plusieurs reprises pour prendre la température car je me voyais bien abandonner le client. Il me connait mais surtout il sait la réputation du type. Il craignait des représailles si je ne me montrais pas docile. Pffffff… il n’a pas confiance en mon professionnalisme ? Vexant. Je soufflais en y repensant alors que je range mon matériel. Pas grave. Mon patron est comme un père pour moi alors peu importe si son attitude démontre une certaine tendance à ne pas me croire. Je souhaitais une bonne soirée aux collègues encore présents puis me dirigeai vers mon appartement. Dans le métro, mon estomac se fit entendre. Il réclamait de la nourriture. Il me fallait faire un tour au combini du coin car je n’avais pas eu le temps de faire des courses. Mon frigo était donc vide. Merde ! Bordel ! Je soupirai alors que je marchais depuis la station jusqu’au petit magasin. Ce détour me coûterait des heures de sommeil. « Bonsoir » Je saluai la caissière avant de prendre un panier pour mes quelques emplettes. Son contenu ne fut pas des plus raisonnables car il se composait principalement de chips, bières, bonbons, aspirine, pansement. Pas de quoi nourrir un homme ! Je passais devant les plats préparés par un restaurant local. Les bento me faisaient de l’œil et mon estomac approuva. Je tendis la main pour en prendre un…

Des heures qu’il n’a pas bougé de son bureau. Encore une journée ou Kyu a préféré rester devant son ordinateur, plutôt que d’aller en cours, ou bosser - si on peut appeler ça bosser. Il a simplement passé son temps à coder, comme il aime tant le faire. Mais le temps passe bien rapidement, et son corps finit par le lui rappeler. Son ventre gargouille, et il réclame plus que quelques boissons sucrées. Pourtant, il faudra encore un moment à Kyu pour se décider à lever le nez de son ordinateur, enfilant les premières fringues qu’il trouve pour partir en direction du combini le plus proche de chez lui. Son casque n’a pas quitté ses oreilles depuis qu’il s’est levé ce matin, à tel point qu’il ne le sent même plus sur sa tête, moins encore lorsqu’il entre dans le magasin, un sourire sur les lèvres. « Yo l’artiste ! » qu’il crie sans même s’en rendre compte. Il ne lui en faut pas plus pour commencer à attraper quelques paquets de chips, des biscuits. Rien de très nutritif, au contraire. Mais Kyu n’est pas un très bon cuisinier, et c’est toujours plus simple pour lui de grignoter devant son pc plutôt que de savourer un vrai plat. Pourtant, en passant devant le rayon des plats préparés, l’un d’entre eux attire immédiatement son attention. Son sourire s’agrandit sur ses lèvres, près à succomber à l’appel du dernier japchae disponible. Jusqu’à ce qu’une autre main ne tente elle aussi d’attraper ce sésame. « Hé ! Japchae ! Pour wam ! » qu’il crie une fois de plus, n’entendant rien de ce qu’il se passe autour de lui. La musique est si forte dans ses oreilles que les gens autour pourraient l’entendre. Il finit par relever le regard vers celui qui semble tout autant tenté que lui par ce dernier plat, écarquillant des yeux. « T’as sûr t’as envie d’un japchae ?! » Sa voix résonne dans tout le combini, mais Kyu s’en fout, il ne s’entend même pas. Un sourire charmeur sur les oreilles, il regarde son vis-à-vis. Il n'est pas prêt de lâcher le plat des mains.

La cuisine n’a jamais été mon point fort… puis je ne suis pas un homme au foyer. Je me faisais pas entretenir par mon copain, cela ne commencera pas voire carrément jamais. Il y a longtemps maintenant que j’ai abandonné ma classe sociale pour entrer dans la vraie vie. Ce n’est pas drôle tous les jours. J’ai même fais des choses que je regrette comme ses photos osées mais il fallait bien payer le loyer et les factures. Je suis loin de mon monde originel mais une partie de moi est bien plus heureuse en étant libre. Je me sens telle la petite sirène qui rêve de partir là-bas. Je pourrais même chanter sauf que je risque de me prendre une douche alors je retiens mes performances vocales pour ma salle de bain. Je traverse en courant avant de pousser la porte du combini du coin. Un endroit vital ! Comment je pourrais survivre sans lui ? Je salue la caissière puis prends un panier pour le remplir de trucs absolument pas nutritifs. Je grimace quand une voix tonitruante résonne dans le petit magasin. Il est sourd ou quoi ? Il parle hyper fort ! Gonflant mes joues, je m’éloigne pour poursuivre mes achats. Passant dans le rayon des plats préparés, je me précipite sur le dernier japchae. Un pur bonheur ! Ce plat est une gourmandise. Malheureusement je ne suis pas le seul qui convoite cette préparation. Le mec me beugle dans les oreilles. Ouvrant les yeux tels des soucoupes, je lui demande sans me rendre compte qu’il ne comprend peut-être pas. « euuuuh… tu fais un AVC ? » J’ai strictement rien compris à ses paroles. Mes yeux rencontrent les siens alors qu’il parle encore super fort. Il est dingue ?! Dommage parce qu’il est mignon. Je prends une moue boudeuse puis retire un de ses écouteurs pour répondre. « Ouais je suis certain que mon estomac a envie de japchae. » Un sourire provocateur pendant que je tire sur le plat. « Mais toi, tu peux trouver autre chose. Il y a de quoi faire ici ?! » Pas terrible comme réponse mais je ne peux pas me priver de ce repas. Cela me fait beaucoup trop envie. Mon estomac gronde même pour appuyer mes paroles. « Ou fais-toi livrer ! »

Kyu ne pense qu'à une chose en entrant dans ce combini : tout ce qui finira dans son estomac. De la nourriture loin d'être saine, mais qui le comblera de gourmandise. Et ça lui suffit, finalement. Il s'en contentera une fois de plus. Il ne prend pas la peine de prendre un panier, et préfère coincer les sachets de chips et autres bonbons entre son bras et son ventre. Pas besoin de perdre du temps quand il s'agit de bouffe, c'est ce qu'il se dit au moment d'attraper ce japchae. Cette denrée est bien trop rare ici pour s'en priver. Mais il n'est pas le seul à avoir eu cette idée, relève bien rapidement son regard vers celui qui tente de le lui voler. Ses sourcils se froncent, il n'entend rien de ce que ce dernier lui dit. Et bien entendu, Kyu ne pense pas au fait que cela peut être du à son casque encore sur ses oreilles. Il faut que son vis-à-vis le lui retire pour comprendre, alors qu'il écarquille des yeux, amusé. « Tu déconnes ? J'l'ai vu en premier ! » qu'il s'exclame rapidement, toujours ce sourire sur les lèvres. Il ose même une mine faussement outrée aux dires de ce dernier. « Me faire livrer ? T'es fou, j'donne pas mon adresse à un inconnu moi ! » Et il en rit, de sa connerie, alors que son appartement est bien trop souvent squatté, parfois même par des gens qu'il n'a jamais vu. Un instant, il regarde les autres plats autour, voit un dernier bibimbap bien loin de le tenter autant que ce japchae. « T'as pas envie d'un bibimbap ? » Dans un geste brusque, il tend son autre main vers ce dernier, laissant tomber tout ce qu'il tenait. « Regarde il te fait les yeux doux, c'est trop mignon ! Moi à ta place, j'le choisirai. C'est clair qu'il a envie que tu le bouffes. » Kyu dans toute sa splendeur, comme à chaque fois. « Mais moi, c'est le japchae qui m'fait les yeux doux ce soir. » Et il hausse les épaules, fier de sa remarque.

Mon panier dans la main… tout de suite, on a la sensation de lire une variation du Chaperon Rouge sauf que la grand-mère est mon estomac grondant famine. Le loup serait incarné par ce jeune homme braillant dans le combini avec ses courses coincées entre ses bras. Je me fais la réflexion que ma veste en cuir noire et rouge concorde au cadre de cette rencontre. Je dois sauver mon repas des mains avides de cet être bruyant. Est-ce que je pourrais me transformer en sailor moon mais version vorace ? Je devrais faire sortir mon alter ego : Goinfrex. Ne jamais retirer des mains de ce pokemon son menu. La même mise en garde s’applique à moi. Je ne me laisserai pas faire. Ce japchae sera pour moi. Il peut toujours rêver pour remporter le repas. Dommage que ce type odieux soit mignon ! Je lui lance un regard, accompagné d’un haussement de sourcil. « Pardon ?! Tu t’es cogné dans la porte en rentrant ? » Comment peut-il croire qu’il est le premier ? « Je me trouvais dans le combini avant toi. » Argument pas franchement convaincant ? Il faut que je trouve les mots exacts afin de lui faire comprendre qui est le propriétaire des japchae. « Tu feras une exception ! » Je lui adresse un grand sourire tout en tirant le plat dans ma direction. On dirait presque des maternelles se disputant pour un jouet. Il me propose un plat de substitution : un bibimbap. Heureusement que cet inconnu ne me connait pas car il saurait pour ma faiblesse culinaire. Le bibimbap est un de mes plats favoris. Je m’en lasse jamais… mais dans un élan de fierté, je dénigre sa proposition « Prends-le toi ! » Mon estomac gargouille toujours alors que cette situation devient ridicule. « Ecoute ! T’es mignon mais j’en veux pas de ton bibimbap. Je suis venu exprès pour ce japchae et je me trouvais là avant toi. Tu ne faisais peut-être pas attention parce que tu es coupé du monde avec ton casque. Peu importe. » Je hausse les épaules tirant toujours le japchae vers moi. « Lâche mon plat ! » Ma voix montait dans les aigus tout laissant échapper des gargouillis. « Je meurs de faim ! J’ai bossé moi ! »

Il n’a pas envie de faire d’exception, Kyu. Il a vu ce japchae, et compte bien pouvoir le manger ce soir. Qu’importe les épreuves qu’il faudra endurer pour ça ! Il fait la moue, presque déçu de voir que ses arguments - qu’il pense assez convainquant pour obtenir gain de cause - ne sont pas suffisant. Le jeune homme en face de lui ne semble pas être du même avis que lui. Il aurait pu s’agacer, s’énerver et lui arracher le plat littéralement des mains. Mais Kyu s’amuserait presque de la situation, ce sourire sur les lèvres. « Moi ? Faire une exception ? Désolé, j’sais pas c’que ça veut dire. » Il hausse ses épaules, garde pourtant son emprise sur le plat, sans pour autant forcer davantage encore. Et bien sûr, qu’il aurait pu se contenter du bibimbap qui restait, mais Kyu est si faible face à l’un de ses plats préférés qu’il préfère chercher de nouveaux arguments pour réussir à avoir ce qu’il veut. Son sourire s’agrandit sur ses lèvres à entendre son vis-à-vis, il le laisse tirer sur la barquette, avant de la tirer vers lui à nouveau, comme un jeu auquel il ne doit pas perdre. « Comment tu as su qu’il y avait un japchae ? Y’en a jamais en plus. Moi je le sais parce que j’habite juste à côté et que j’arrive à en avoir dès qu’il y en a. » Fausse excuse, alors qu’habituellement, il se contente de tout ce qui lui passe sous la main. « Puis moi aussi j’ai bossé toute la journée ! » Nouvelle moue, sur son visage, il garde à l’esprit un simple mot que ce dernier a eu à son intention, et se demande s’il doit en jouer, ou non. Mais Kyu, il est du genre à peu réfléchir, de toute façon. « Mais si tu m’trouves vraiment mignon, on peut s’arranger. T’es pas mal non plus en vrai. » Sourire qui se fait plus large sur son visage, alors qu’il s’approche d’un pas de lui. « Si tu veux, on peut partager le japchae. » Un sourcil qu’il hausse, presque aguicheur. « Moi ça m’dérange pas de partager avec toi. Et tu devrais te sentir honoré, parce que je fais jamais ça d’habitude ! La bouffe c'est sacré ! » Sa main libre qu’il tend en l’air, comme pour appuyer ses propos. A croire qu’il ne restait plus que cette carte à jouer, finalement. « Même que si t’acceptes, j’pourrais même envisager de t’offrir un dessert ! »

Japchae… est-ce que l’on peut imaginer meilleure douceur pour mon estomac criant famine après cette longue journée ? Personnellement je ne peux pas envisager une seconde de plus sans ce plat entre mes mains en attendant de l’avaler. Malheureusement, sur le chemin de mon bonheur, il y a cet inconnu qui se dresse devant moi. Lui aussi convoite mon repas. Il ne comprend pas que son combat est peine perdue ? Il a besoin que je lui fasse un dessin ? Il est certain que son attitude m’horripile. Son petit sourire me donne envie de passer mes doigts autour de son cou. Un peu violent comme réaction. Je voudrais qu’il efface de son visage cet étirement labial. Cela lui donne une expression débile en plus. Je lui lance un regard tout en poussant un soupir agacé. « Tu as loupé la primaire pour ne pas comprendre le sens du mot « exception » ? » Pourquoi il ne lâche pas ce plat ? Mon estomac se fait entendre en gargouillant furieusement. Purée ! Je meurs de faim. Cela me rend ronchon et pleurnichard. Il faut manger dans la vie !! « Parce que mes super pouvoirs m’ont prévenu de la présence du japchae ce soir ! » Ouais je suis pathétique mais chuuuuut… « Moi aussi je vis dans le quartier, et je t’ai jamais vu avant ! » Quand je vous dis que le niveau de la conversation est digne de la maternelle. On est dans le hight level. On ne peut pas faire mieux ? « Mon boulot est sûrement plus épuisant que le tien. Je me casse le dos toute la journée pour faire plaisir aux autres alors laisse-moi mon japchae. » Je me rends même pas compte que je laisse croire que mon travail est le plus vieux métier du monde. Il me déstabilise en pensant que mes propos pouvaient indiquer une quelconque ouverture. Mes yeux s’arrondissent comme des soucoupes alors que ma prise sur le plat se fait moins forte. « Quoi ?! T’es sérieux ? Tu crois que… nooooooon je disais ça… comme ça… » Ouais mon explication manque de conviction mais pas grave. Je suis surpris par son aplomb. Il me prend encore au dépourvu en proposant de partager. Je reste interdit, affichant presque une expression ahurie sur le visage. Je cligne plusieurs fois des yeux pour essayer de remettre mes esprits en ordre. « J’ai sauté la maternelle alors le partage ce n’est pas ma spécialité ! » Mon premier réflexe serait de prendre le plat puis de courir mais une petite voix me dit que ce n’est pas une solution. Je lâche un gros soupir puis prends le japchae « Merci » Je me dirige vers la caisse, abandonnant le jeune homme dans le rayon. La caissière hausse un sourcil tout en me regardant me mordiller la lèvre inférieure. Je dois bien avouer qu’il est mignon, pas trop mon style mais au moins il a de la répartie et il se laisse pas démonter. J’aime beaucoup les personnes qui ne craignent pas me rentrer dedans et qui sont obstinées. Je me retourne puis lance fort dans l’intention de me faire entendre. « Choisis bien le dessert sinon je mange tout seul le japchae. »

Quelque part, il s’amuse de la situation Kyu. Et même s’il veut réellement pouvoir manger ce japchae, il a ce regard malicieux qui reste posé sur son vis-à-vis, en voyant à quel point il arrive à le dérouter. Est-ce en bien ou en mal ? Il n’en sait rien, mais continue malgré tout. Une sorte de jeu qu’on lui offre sur un plateau, avec à la clé, son repas préféré. Mais peut-être qu’en observant un peu mieux le jeune homme, d’autres idées lui viennent en tête. Il ne dit rien à ce sujet, pour l’instant, garde ses yeux rivés sur lui. « Faut croire. » répond-t-il à sa question dans un haussement d’épaules. Son sourire ne le quitte pas, se fait parfois plus enjoué, plus aguicheur. Il rit parfois de ce qu’il peut entendre, ne prend rien au sérieux. Mais il a toujours été comme ça, à ne rien avoir à faire de ce que les autres pourraient bien penser de lui - sauf s’il y trouve un intérêt. Mais peut-être qu’il y en a un, autre que ce plat, qui commence déjà à lui trotter dans la tête. Malice sur ses lèvres, il joue, évitant malgré tout d’arriver au point ou il fera tout foirer - s’il y arrive. « Tu te casses le dos hein ? Hmm, intéressant... » Il joue sur les mots, sans rien laisser sous entendre, et encore… La réaction de son vis-à-vis le faire rire davantage encore. « Moi je crois que ce que j’entend… » glisse-t-il dans un murmure, avant de finalement lâcher le plat. « Dommage que tu connaisses mal le partage, c’est sympa en bonne compagnie. » un clin d'oeil pour souligner sa phrase. De quoi parle-t-il ? Même lui ne le sait pas vraiment. Pourtant, il n’a pas le sentiment d’être perdant dans l’histoire, pas encore, alors qu’il récupère les articles qu’il a laissé tomber au sol. Avisant le rayon des desserts, Kyu récupère les trois qu’il reste, et se dirige à son tour vers la caisse. Il a un sourire vainqueur sur le visage, lorsqu’il s’approche, lui donne un léger coup d’épaule pour qu’il se retourne vers lui. « J’ai choisi tous les desserts qui restaient rien que pour toi. Tu peux pas me refuser la moitié du japchae comme ça. » Kyu semble si sûr de lui, façade qu’il aborde sans pour autant le forcer. Il finit par payer ses achats, récupère ses sacs, et se plante devant son voleur de repas, ce rictus qui ne semble pas vouloir le quitter. « Alors ? J’te suis ou tu m’suis ? » qu’il lance comme si de rien n’était, clairement prêt à pouvoir goûter au délice de son plat préféré.

Le jeune homme est une vraie énigme ! Il est ultra bruyant, casse-pied. Il cherche sans arrêt à avoir le dernier mot… mais il a un beau sourire, des yeux sombres à faire chavirer les cœurs. Sa répartie me tombe sur le système, il faut quand même avouer que cet échange est stimulant. Il ponctue ma journée par une touche agréable. Evidemment mon estomac réclame le japchae. Une gourmandise pour mes papilles. Ma langue perce entre mes lèvres pour les humidifier. Ils seraient appétissants dans un autre contexte. Cherchant un moyen de récupérer le plat, je balance des propos qui me font froncer les sourcils quand je ne lève pas les yeux au ciel. Il est épuisant ! Il y a un bouton « mute » quelque part ? Je ne serai pas contre un peu de silence afin d’avoir les idées beaucoup plus claires. Actuellement il me prend le chou en débitant des provocations qui ne me laissent pas indifférent. Fichue imagination ! Je ne veux surtout pas imaginer des choses avec lui. Je maudis mon corps pour les vagues de frissons qui assaillent ma colonne vertébrale. « Jamais on t’a dit que tu étais casse pied ? » Attrapant le japchae, je me dirige vers la caisse tout en lui ordonnant au passage de prendre un dessert. Une connerie ? Possible ! J’avais juste besoin de distraction. En le voyant arrivé avec trois desserts, j’esquissais un sourire. Il avait réellement très faim ou il espérait gagner de la gratitude ainsi ? Il n’avait pas tort pour le dernier point ! Je haussais les épaules tout en secouant la tête. « Tu veux une médaille aussi ? » Je souris tout en baissant la tête puis le bouscule aussi. « Je dois encore réfléchir… tu sais que le partage n’est pas mon point fort. » Je tire la langue tout en payant mes courses. Hmmmm… est-ce que je me sens capable d’aller chez un inconnu ? Possible mais pas ce soir ! Je tends alors la main pour attraper le haut de son pantalon avant de prendre la direction vers ma tanière. « Allez ! Suis-moi ! » Je me sens plutôt taquin maintenant que nous sommes dehors. « Si tu te perds, je mangerai seul ce japchae. » Je souris puis indique une rue, puis une autre. Nous arrivons devant mon immeuble. « Tu ne comptes pas m’assassiner pour voler le repas quand même ? » Je hausse un sourcil tout en montant les escaliers pour diriger devant chez moi. « Attention ! Je crois que mon voisin est nouveau… en faites je l’ai encore jamais croisé… je ne sais pas s’il ne gueulera pas si nous faisons trop de bruit. » J’ouvre la porte, allume la pièce qui me sert de cocon puis me fige. Merde ! Il y a des feuilles partout de croquis et des restes de mes précédents repas débordant de la poubelle. Pas franchement glamour comme lieu pour recevoir. Je retire mes chaussures que je balance dans un coin de l’entrée avant de courir remettre de l’ordre non sans avoir fourrer dans les mains de l’inconnu mes sacs de courses. Mauvaise idée ! Il pourrait se tirer avec ! Réalisant mon erreur, je me stoppe puis me tourne vers lui espérant qu’il soit assez gentleman pour ne pas me faire ce coup-là.

« Non, jamais. » Ou du moins, il n’y croit pas. Kyu garde son sourire, prend un instant pour observer le jeune homme se diriger vers les caisses. Un sourcil haussé, l’air encore aguicheur, il ne peut cacher le fait d’être ravi de cette victoire. Même s’il n’aura pas le japchae pour lui tout seul, il le partage avec cet inconnu. Et cette idée lui plait finalement, bien plus que s’il n’avait réussi à gagner le plat. Arrivant à sa hauteur, il lui lance un regard amusé, pas peu fier de ce qu’il a réussi à négocier. Payant les desserts, et les quelques friandises initialement prévues pour ses longues heures sur son ordinateur, les plans ont changé ce soir, et ce n’est pas pour lui déplaire. « J’veux bien, mais seulement si elle vient de toi. » Voilà qu’il continue, qu’il s’amuse quelque part, à lancer ces quelques piques, à son intention. Mais Kyu a toujours été un éternel joueur, finalement. Il aime voir les réactions qu’il arrive à provoquer chez les autres, s’en délecte, souvent sans arrière pensée. Mais à voir comment cet inconnu réagit, il n’est pas sûr de vouloir en rester là, à quelques banalités. Secouant sa tête pour ne pas y penser, il lâche un rire malicieux à le sentir l’attraper par le haut de son pantalon pour qu’il lui suive. Et il s’exécute, trottine à côté de lui un instant, jusqu’à arriver jusqu’à son immeuble, qu’il reconnait bien. Il cache ce rire qui lui vient, et préfère ne rien dire pour le moment. Arrivés dans l’appartement, il est surpris de la réaction de son hôte, récupère simplement les sacs. « J’suis pas de ce genre là. » qu’il réplique tout en retirant ses chaussures, les lançant dans un coin de l’entrée, comme s’il était chez lui finalement. Appuyant son épaule sur le mur à côté de lui, il ne peut empêcher un sourire de se dessiner sur ses lèvres. « Crois-moi, ton voisin t’en tiendra pas rigueur ce soir. » Un instant, il disparait dans la cuisine, en sort le japchae et les desserts. Faisant encore comme s’il était chez lui, il met le plat au micro ondes pour le chauffer, et met le reste au frigo, avant de retourner dans l’entrée, posant son regard sur son vis-à-vis. « En tout cas, j’suis content de rencontrer mon voisin de palier. J’dois avouer, j’pensais pas tomber sur un beau mec comme toi, mais ça m’fait plaisir. » Il ponctue sa phrase d’un clin d’oeil, avant de se mettre à rire, amusé de la situation. S’il s’attendait à ça… Rencontrer son voisin par hasard au combini, et se retrouvant à partager un repas avec lui. Ca paraîtrait presque irréaliste, et pourtant.