« Ye Won. J’ai besoin de te parler. S’il te plait, c’est important. Accepte de me voir. » Je lui proposais une date, un horaire et un endroit, la main tremblante. Je ne savais pas quoi faire, encore moins comment lui annoncer. Mais je ne pouvais pas attendre que quelqu’un d’autre le fasse. J’hésitais, me torturais l’esprit, encore plus mal que je ne l’étais déjà. Je soupire, le cœur lourd en relevant les yeux vers Kitae. « Tu l’as fait ? » je déglutis… « Ouais. Je… je sais pas si elle va vouloir me voir. » Mais je n’avais pas le choix, n’est-ce pas ? Je ne pouvais pas prendre le risque qu’elle l’apprenne dans un bruit de couloir. Ces derniers temps, je passais toutes mes soirées chez Kitae. C’était plus facile ainsi, moins douloureux. Je ne pouvais pas la croiser, ni dans les couloirs ni à la frat. Mon meilleur ami était déçu, encore plus que ces derniers jours, mais il me soutenait. Il ne m’avait pas jugé, il avait juste soupiré et m’avait lâché un « T’as fait vraiment de la merde. » et il avait raison. J’avais enchainé les conneries les unes après les autres. Installé sur le canapé, je soupire encore, ne cesse de regarder mon téléphone en attendant une réponse de sa part. Si ça se trouve elle avait changé de numéro ? Mais pendant que je réfléchis, je reçois brusquement un papier en pleine figure. Je grimace, attrape la brochure « Centre de désintox ». Celui où j’avais été. Relevant les yeux vers Kitae, je me referme aussitôt. « Va falloir que tu mettes le hola sur tes addictions. » je ne me droguais plus, enfin un joint de temps en temps, mais ça n’avait rien d’important pas vrai ? « Drogue ou alcool c’est pareil Il Kyang ! » à croire qu’il lisait dans mon esprit. Je baisse les yeux, agacé par ses remarques. Mais je sais qu’il a raison. « Tu vas devenir père je te rappelle. Alors si t’as envie d’offrir à ce gosse un avenir convenable reprends toi. Je vais pas jouer les papas pour toi. » Son ton est dur, un poil agressif, mais je ne lui en veux pas. Je sais… je ne peux pas continuer à faire le con comme je le fais. « Ils… ils vont me juger. » et c’était surement ce qui me faisait le plus peur. « Ils vont surtout t’aider. » « Mais j’ai replongé Kitae. » « T’as jamais arrêté. » ses mots me font l’effet d’une bombe. Je le regarde, bouche bée, les yeux brillants. « Te cache pas derrière des excuses à la con. Prendre de la crimson c’est aussi consommer. Alors à moins que tu sois con, tu le sais autant que moi que t’as jamais su arrêter complètement. » Ses paroles sont dures, trop franches. Je ne m’attendais pas à ça. Pas maintenant… « J’en ai marre de prendre des pincettes avec toi. Soit tu comprends et tu fais quelque chose pour te soigner. Soit tu te démerdes tout seul à partir de maintenant. » « Kitae… » Je suis vexé, perdu tout à coup. S’il n’est pas là pour moi, je n’ai plus personne… et je le sais. Je pince mes lèvres, baisse les yeux sur la brochure le cœur battant. Je me sens mal, peut-être encore pire qu’avant mais je ne peux rien lui reprocher. Il a été là durant tous ces mois pour moi. Je me redresse « Je suis désolé. » « Je m’en fous de tes excuses Il Kyang. J’en peux plus de toi. Vraiment. Alors si tu tiens un peu à notre amitié, fais-le pour moi. »… je crois qu’il venait de m’achever. Je baisse les yeux, les épaules affaissées… j’ai envie de chialer je crois, mais tout est ma faute. J’ai tout foiré… mon couple, ma famille… et mon meilleur ami… il me restait plus grand-chose à quoi m’accrocher. A part peut-être cet enfant qui allait arriver…


Le jour du rendez-vous, j’étais encore nerveux. Je regrettais de ne pas lui avoir donné une heure plus matinale. Pour passer rapidement à autre chose. Toute la journée, je n’avais cessé d’y penser. Pendant les cours, même au studio. J’avais l’esprit occupé. Je tournais en rond et surtout les mots. Comment lui dire de la bonne façon ? Face à l’entrée du café, je jette un coup d’œil rapide à mon reflet. L’image que je renvois me débecte. J’ai l’air épuisé… j’inspire doucement, passe la porte et observe les lieux pour la voir. Heureusement pour moi elle n’est pas encore là. C’est presque soulagé, que je trouve une place à une table. Aussitôt un serveur vient me demander ce que je prends. « Un café, bien noir s’il vous plait. » quelque chose de soft pour une fois. J’ai laissé la bière pour aujourd’hui. Je retire ma veste, la met sur ma chaise et souffle sur mes mains pour calmer mes nerfs. Je suis tellement angoissé. J’ai peur de la voir arriver. Peur de l’avoir en face de moi. Pour une fois j’avais choisis un café, un terrain neutre je me disais. Je ne voulais pas qu’on se dispute. J’avais trop de choses à lui dire pour ça. Posant mon téléphone sur la table, je regarde de nouveau son message, pour être certain qu’elle viendra. Mais elle pourrait très bien changer d’avis. Après tout, elle ne me doit rien… nouvelle angoisse qui me prend à la gorge, tandis que mon café arrive. Je remercie le serveur, attends à peine avant d’en boire une gorgée et tenter de faire redescendre la pression.

Un soupire, face à ce message qu’elle reçoit. Une lance en plein coeur, qui la ramène à la réalité. Sans même le voir, elle peut déjà sentir le regard interrogateur de Ji Ho posé sur elle, mais elle ne dit rien, fixe l’écran de son téléphone pendant quelques secondes supplémentaires. Dans un geste mesuré, elle verrouille son portable, et reporte son attention sur celui qui l’accompagne. « C’est rien, j’y répondrais plus tard. » souffle-t-elle, alors qu’elle se sent si peu sûre d’elle. Une caresse dans ses cheveux, à laquelle elle se raccroche pour effacer un instant le nom d’Il Kyang de ses pensées. Mais Ji Ho devine bien vite à son silence ce qu’il se passe, il le comprend à la voir se blottir un peu plus contre lui. « Un message de ton ex ? » ose-t-il demander, d’une voix calme et posée. Ye Won répond d’un simple geste de la tête, coince une mêche de cheveux derrière son oreille, signe d’une nervosité certaine. « Il veut me parler. » avoue-t-elle, cette franchise qui la caractérise tant. « Ecoute, je ne sais pas grand chose de ce qu’il s’est passé entre vous, mais peut-être qu’il faudrait que vous discutiez plus calmement que la dernière fois ? Que vous mettiez une bonne fois pour toutes les choses à plat. Et après ça, je pourrais profiter pleinement d’être avec toi. » Un sourire qu’il lui offre, la confiance qu’il peut avoir en elle qu’il lui prouve comme il le peut. Il sait, qu’elle n’a pas totalement réussi à tourner la page, mais il la croit quand elle lui dit qu’elle veut être avec lui, et Ji Ho s’en contente. Lui se trouve chanceux de pouvoir désormais marcher aux côtés de celle qui l’a longtemps attiré, et comprend aussi qu’elle puisse avoir ses propres démons du passé, lui même en a encore. « Que dirais-tu de partir en week end après ça ? Juste tous les deux. » Une fois de plus, elle accepte sans un mot, attrape finalement son téléphone pour accepter ce rendez-vous qu’elle redoute déjà. Mais elle sait au fond d’elle que Ji Ho a raison, qu’il est grand temps d’avoir une vraie discussion. Il est temps qu’elle lui annonce son départ, son souhait de tirer un trait définitif sur eux, une bonne fois pour toute.

Son appréhension est palpable, alors que l’heure du rendez-vous approche à grand pas. Depuis ce matin, elle a les mains moites, sent son coeur s’emballer plus que de raison. Elle sait qu’elle devra rester calme cette fois, doute pourtant y arriver. Elle se demande ce qu’il pourrait bien avoir à lui annoncer, mais s’est aussi décidée à lui expliquer son départ. Malgré ces derniers échanges, elle a toujours le sentiment qu’elle le lui doit, malgré ce que d’autres peuvent bien lui dire. Une main qui passe dans ses cheveux, ce mégot de cigarette qu’elle écrase dans le cendrier de sa voiture, elle s’apprête finalement à rejoindre ce café. Elle a bien du mal à enfiler cette carapace, tente déjà de calmer les tensions qu’elle peut sentir au fond d’elle. Elle ose espérer que cette fois, ils ne se disputeront plus, que tout ça se terminera sans trop d’encombres, même si elle a du mal à y croire. Un dernier regard dans son rétroviseur, et la voilà sortant de sa voiture, s'avançant déjà vers ce café. A travers la porte, elle peut déjà voir Il Kyang, sent son coeur se serrer dans sa poitrine. D’un air assuré, sous ses traits impassibles, elle s’approche et s’installe rapidement, sans prendre le temps de retirer sa veste. « Salut. » ose-t-elle à peine murmurer, ayant du mal à le regarder. Mais elle se force à poser ses yeux sur lui, se mordillant l’intérieur des joues. « Ca tombe bien que tu m’ais demandé de venir. Faut aussi que je te parle de quelque chose. » Il n’y a aucune émotion dans sa voix, aucun moyen de deviner ce qu’elle ressent encore au fond d’elle. Elle agit comme si elle n’était qu’un coeur de pierre, alors qu’au fond d’elle, le simple fait d’être à nouveau en face de lui la fait souffrir une fois de plus.

J’avais pensé à toutes les façons de lui dire. Par message en bon lâche que j’étais. Par lettre glissée sous sa porte. Mais la meilleur était de la voir, n’est-ce pas ? D’assumer ce qui se passait dans ma vie et ce qui allait changer. J’aurais pu garder ça pour moi après tout nous n’étions plus rien tous les deux. A part des exs mai j’avais l’impression de lui devoir. De rester honnête avec elle. Après tout ce que nous avions partagé, c’était la moindre des choses. Je n’attendais rien d’elle, je voulais juste la mettre au courant. Lorsque je la vois entrer mon cœur s’emballe, il me trahit, une fois de plus. Je rêve d’un monde où tout serait différent. D’une vie parallèle où elle me retrouvait Pour un café, un rendez-vous qu’on aurait voulu tous les deux. Elle s’approcherait, me sourirait et je n’aurais plus peur de l’embrasser… mais au lieu de ça, son air est impassible, sa voix sans émotion. Je suis nerveux, j’ai esquissé un geste pour me relever, mais je me rassois très vite. Reste devant elle, en joignant les mains. Elle est belle… comme toujours, et encore plus inatteignable qu’avant. Je déglutis, arque un sourcil curieux… elle a quelque chose à me dire ? Je n’avais pas prévu un tel scénario. En réalité je pensais que c’était moi qui devais parler aujourd’hui. Je suis pris au dépourvu, grimace et me recule sur ma chaise. « Euh… » je suis déjà déstabilisé mais il ne faut pas. Alors je me racle la gorge, l’observe le cœur battant. Qu’est-ce qu’elle pourrait me dire ? J’ai tout qui me vient en tête. Un départ, une annonce concernant son… petit ami. Et si elle m’apprenait la même chose que moi ? Oh non ! Jamais. Impossible. Pas déjà, pas comme ça. Je suis triste, inquiet aussi. Elle ne prend le temps de rien, n’a pas retiré sa veste et on dirait qu’elle s’apprête déjà à me laisser. Ye Won… c’est si dur. Tout s’est précipité ces derniers jours. Je ne l’ai pas vu depuis longtemps, du moins trop pour moi. Est-ce qu’elle est déjà heureuse aux bras de Ji Ho ? Elle n’a surement pas envie d’échanger des banalités. Alors j’hausse les épaules « Je ne m’attendais pas à ça. Euh, c’est important ? » Non pas que je m’en fiche, mais ce que j’avais  lui dire était important. Alors je ne savais pas quoi privilégier. Je me sentais démuni tout à coup. Je n’aime pas son air si fermé. Sommes-nous devenus de simples étrangers ? « Tu veux rien boire avant ? » je ne joue pas, je veux juste qu’on soit à l’aise tous les deux. Qu’on arrête de se disputer, d’être toujours en conflit avec l’autre. Je la tendue, alors j’essaie de lui montrer qu’on peut être adulte. Plus mature que toutes ces gamineries que nous avons échangées jusque-là. « Avant toute chose, j’aimerais te dire que je ne veux pas qu’on se dispute. Je ne t’ai pas fait venir ici pour qu’on s’engueule ou s’insulte. Je voudrais qu’on ait une vraie discussion. J’ai des choses importantes à te dire. Alors… » Assis-toi, mets-toi à l’aise, tu vas être heureuse de ce que je vais te dire. C’est idiot je le sais ! Mais j’avais besoin d’un peu de courage aussi. Alors si je la voyais déjà prête à partir, c’était une pression supplémentaire. « Je ferais des efforts, alors s’il te plait, fais-en aussi. » car je me doutais qu’elle n’allait pas sourire. J’allais surement m’en prendre pleins la figure encore une fois. Je n’étais pas prêt à ça, mais je devais le faire. « Je t’en prie commence… je préfère que ça soit toi avant. » parce-que je n’étais pas sur de ce qu’elle allait me dire. J’avais peur de tout. Mais plus de la perdre, car c’était déjà fait… 

Elle est froide, impassible. Elle n’a plus le coeur à se disputer, ni même à le voir. Il faut qu’elle reprenne sa vie en main, elle le sait. Pourtant, elle se doute qu’elle n’y arrivera pas tant qu’elle restera si proche de lui. Dans un lieu ou elle continuera de le croiser chaque jour, ou chaque pièce regorge d’un souvenir d’eux. Elle n’en aura pas la force, et ne donnera aucune chance à son histoire avec Ji Ho. Elle a besoin de sortir la tête de l’eau, et arrive enfin à trouver des solutions qui pourraient l’aider. Aujourd’hui, elle tente de garder son calme, même si la douleur est omniprésente, même si sa colère reste toujours ancrée en elle. D’un geste nerveux, elle replace une mèche de cheveux, observe furtivement autour d’elle. Elle peut comprendre sa surprise mais ne montre rien, tant qu’elle le peut. « Oui c’est important. » lance-t-elle en guise de réponse. Assez pour qu’elle soit à nouveau en face de lui, alors qu’elle n’attend plus qu’une chose, que tout se termine enfin. Elle n’a pas l’intention de rester trop longtemps, écoutera simplement ce qu’il aura à lui dire. Elle appréhende, plus encore à chaque seconde qui passe, mais elle aussi, a des choses à dire. Et elle sait que ce sera maintenant ou jamais. « J’ai pas soif. » qu’elle ajoute, indifférente. Depuis des semaines, elle est incapable de manger et de boire correctement. Elle n’arrive plus à prendre soin d’elle comme elle savait si bien faire, et ça se voit. « J’suis pas là pour me disputer Il Kyang, j’suis fatiguée de tout ça. On a des choses à se dire, ça s’arrête là. Mais me demande pas d’être souriante et amicale, c’est impossible. » Une franchise à toute épreuve, comme à son habitude. D’un geste rapide au serveur, elle lui fait comprendre qu’elle ne veut rien commander, et se reconcentre sur Il Kyang. Elle repense aux mots de Ji Ho, à ce qu’elle s’est dit en venant ici. Elle se doit de garder son calme, qu’importe ce qui arrivera. Alors qu’il l’invite à se lancer, Ye Won se laisse retomber sur le dossier de sa chaise. Pendant un instant, elle chercher ses mots, mais ne trouve pas de façon correcte de lui dire exactement ce qu’elle s’apprête à faire. « Je vais quitter le dortoir. » commence-t-elle, alors que son regard divague. « J’ai trouvé un appartement, je vais emménager bientôt. Je vais disparaître de ta vie une bonne fois pour toute. » Elle n’a pas encore signé de documents, attend une dernière visite de celui-ci pour se décider une bonne fois pour toute. Mais dans son esprit, tout est clair, d’ici la fin du mois, elle quittera cette maison qui l’a vue grandir au fur et à mesure de ses années étudiantes. D’ici quelques semaines, elle prendra enfin ce nouveau départ, et elle espère y voir un autre chemin se dessiner devant elle, avec moins d'embûches, un peu plus de bonheur à la clé. Elle n’est sûre de rien, mais se raccroche désormais à cette idée, maintenant que tout le reste est parti en fumée.

Son air toujours aussi sec, je garde pour moi mes rancœurs et une remarque que j’aurais eue envie de lui faire. Je dois me détendre, ne pas prendre trop à cœur ce qu’elle me dira. Je suis déçu évidement, j’espérais qu’on puisse se parler tranquillement. Je ravale le peu d’orgueil qui peut me rester, baisse les yeux. Elle me fatigue en vrai. A toujours être aussi franche et tranchante. Mais est-ce que je peux lui reprocher ? Après tout ce que j’ai fait, je le mérite. Je pousse un soupir, me recule aussi sur ma chaise en la voyant faire. Je tente de rester calme, plus détendu mais c’est difficile. Alors j’écoute, je ne bronche pas et je suis surprit. Je ne pensais pas qu’elle m’annoncerait ça en réalité. « Tu… quoi ? » malgré moi, je suis étonné, presque embêté de l’apprendre. Je me redresse, passe une main dans mes cheveux « Ye Won tu… » Tu ne peux pas me faire ça. Même si on ne se parle plus, même si je l’évite, je pensais…. Je ne sais pas à quoi je pensais en vrai. Mais je ne voulais pas ça. Pas qu’elle s’éloigne vraiment. Qu’elle décide de faire sa vie ailleurs. « Pourquoi tu fais ça ? » au final, c’est peut-être à moi de partir. C’est à cause de moi que tout ça est arrivé. Je suis triste, un peu déçu aussi. « Tu… tu n’es pas obligée. C’est… » Je suis nerveux, et je refais ce geste systématique. Main qui se perd à nouveau dans mes cheveux, regard baissé « C’est ma faute. » elle aura surement plus les moyens que moi de partir. Oui c’est vrai, mais s’il le fallait, je pouvais lui faciliter la vie aussi. « Je… je peux aller vivre chez Kitae, le temps que… » Je n’arrête pas de me couper. Je ne sais pas ce que je veux lui dire. Je n’arrive plus à me projeter. Qu’est-ce qu’on sera dans quelques mois ? « Enfin, le temps que ça se tasse… » Je suis maladroit. Pardonne-moi de ne pas savoir m’exprimer. De me perdre toujours dans ces paroles indécises. Je soupire, passe mes doigts sur le bord de ma tasse, sans oser relever la tête. Je suis perdu, encore plus. Est-ce possible ? Je suis tellement épuisé, c’est un nouveau coup de poignard. « Tu étais là avant. » la fratrie l’avait accueilli avant, elle s’était fait des amis là-bas avant moi. Alors ouais, j’étais capable de partir pour elle si elle voulait. J’inspire doucement, avant de lâcher un long soupir lourd de signification. Je me laisse tomber en arrière, claque mon dos contre la chaise. « Je… je m’attendais pas à ce que tu me dises ça maintenant. » j’étais pas préparé. Je sais qu’elle me déteste, qu’elle veut refaire sa vie. C’est soudain… « C’est Ji Ho qui t’as convaincu de le faire ? » évidement j’étais obligé de parler de lui. Ça ne pouvait être que lui. Il avait dut lui dire qu’il voulait qu’elle s’éloigne de moi. Je serre les dents, agacé, et crispe mes doigts. Je ne dois pas m’énerver je le sais. « Non laisse tomber. Je veux pas savoir. » Ma voix est lasse. De toute façon qu’est-ce que ça changerait ? Elle et moi on est plus rien. Et aujourd’hui elle tourne vraiment la page. Comme je devrais le faire… 

Elle lâche l’information comme si de rien n’était, ne saurait faire autrement. Elle avoue enfin ce qu’elle garde pour elle depuis cette autre soirée, ou Kitae l’a suppliée de l’aider à s’occuper de lui. D’un côté, elle est rassurée de voir qu’il n’a pas lâché le morceau, que malgré cette amitié en dents de scie qu’elle partage avec lui, quand ça l’arrange, il n’a rien dit à Il Kyang. Sa tête qu’elle secoue face à ses questions, elle ne saurait pas par ou commencer, se demande même si elle doit réellement se justifier. Un soupire qu’elle retient, alors que son regard se pose sur lui. « Pourquoi ? » Elle marque un temps, aurait ironiquement envie de rire mais se retient. « Parce que ça peut plus durer comme ça. Parce que c’est nécessaire pour tourner la page. » Elle hausse ses épaules dans un geste las, ne saurait pas quoi rajouter à ça, à part le fait que le croiser avec Sawan devient de plus en plus insupportable à son coeur. Si elle s’éloigne de lui, elle s’éloigne aussi d’eux, et de leur histoire, et c’est certainement mieux comme ça. « Ca se tassera pas Il Kyang, tu le sais aussi bien que moi. A quoi ça sert de revenir dans quelques semaines si c’est pour que ça recommence ? » Ca ne servirait à rien, à part se donner un temps de répit, avant que la tempête ne reprenne. Mais elle n’en veut plus de cette tempête. Elle aspire à une vie plus simple, avec moins de souffrances. Elle doute encore que ce soit réellement possible, mais essaie de se donner les moyens d’y croire, petit à petit. « J’ai pris cette décision le soir ou on a du te ramasser avec Kitae. Je n’étais même pas avec lui quand j’ai fait ce choix. C’était ce que j’étais venue t’annoncer quand je t’ai retrouvé avec Sawan. » Il y a une pointe de reproche dans sa voix, une façon de lui dire que ce qu’elle a vu ce soir là n’a fait que la conforter dans cette idée. Dans les mots qu’il a osé lui adresser ces dernières semaines. Cette façon qu’il a eu de lui montrer que Sawan a depuis longtemps désormais plus de valeur à ses yeux qu’elle. Ye Won doit maintenant se faire à l’idée qu’il a su trouver un moyen de passer à autre chose depuis plusieurs années, et qu’il est temps qu’elle fasse de même. « De toute façon, mon choix est fait, je reviendrais pas en arrière. C’est pas pour toi que je le fais, mais pour moi. Je me doute que t’arriveras sans problème à passer à autre chose. Au moins, ça sera plus facile pour tout le monde. » Elle ne saurait cacher sa haine envers celle qui a tout détruit entre eux, celle qui a pris sa place il y a bien longtemps. Celle qu’elle a détesté en voyant ce qu’elle avait été capable de lui faire par “amour” pour lui. Mais elle a fini par comprendre que tout ce qu’ils ont pu être a disparu au moment même ou Sawan est apparue dans sa vie, et elle ne peut plus rien faire contre ça.

Je n’y croyais pas, en vérité je pensais bêtement qu’elle serait resté au dortoir. Ça ne changerait rien pourtant. Elle et moi c’est fini. Alors qu’elle soit ou pas, qu’est-ce que ça change ? Je reste interdit, prostré dans ma culpabilité. « Tourner la page. » elle n’a que ça en bouche. Et je sais que je dois l’accepter. Me dire aussi la même chose, mais je me raccroche toujours à ces vieux souvenirs. Je soupire discrètement, me redresse sans oser la regarder. Elle me fera un autre reproche comme toujours. Ça peut ne pas recommencer, je peux changer. Je peux être quelqu’un de mieux. De plus responsable. J’en sais rien. J’ai l’impression d’être un gosse à qui on vient d’interdire de faire ce qu’il veut. C’est compliqué. Tout se noie dans ma tête. Et pour le coup je n’étais pas certains d’avoir envie d’entendre ça. Entre Sawan et ce gosse, et maintenant le départ de Ye Won. Il fallait que j’encaisse. Soit adulte putain Il Kyang ! Tu ne peux pas toujours te réfugier dans l’alcool pour te sauver. Je grimace, détourne le regard, repasse une main nerveuse dans mes cheveux. Je suis dépité ! Et encore plus lorsqu’elle me reparle de ce moment. Cette nuit étrange où j’avais bien faillit… enfin, j’avais trouvé Kitae bizarre surtout le lendemain en retrouvant ma chambre complètement rangée. Est-ce qu’il était au courant ? Subitement je lui en veux. Si c’était le cas il aurait dût m’en parler. Putain, j’aurais eu l’air moins con aujourd’hui. Je me serais préparé peut-être. A encore devoir supporter une nouvelle défaite dans ma vie. Je soupire, je ne suis pas très bien je l’avoue, et je n’arrête pas de bouger. Alors je prends mon café, boit une grande gorgée. C’est mieux de l’alcool pas vrai ? Et entendre encore le nom de Sawan me glace, encore plus après ce que je viens d’apprendre. Elle va avoir un gosse putain… et c’est peut-être le mien. Fais chier ! Tout est ma faute. J’ai tout gâché. Sa voix est pleine de reproche, et moi encore plus nerveux. J’ai envie de lui dire des tas de choses qui ne sortiront jamais. Je ne veux pas me disputer avec elle, alors je souffle, hausse les épaules. « Ok. » c’est tout ce que j’arrive à articuler. C’est stupide mais je suis mal à l’aise. Parce-que je ne peux pas lui demander de rester. Je n’ai aucune bonne raison de le faire. Ça ne me servira à rien et à elle non plus. Pour qu’on se déchire encore ? Pour que ça me fasse souffrir de la voir avec ce type ? Non, c’est idiot. Je ne suis pas bien et je crois que malgré tout ce que je tenterais de faire ça se voit. Je relève la tête vers elle, la regarde quelques secondes qui me paraissent interminable. Et si je t’avais dit que je t’aimais, est-ce que ça aurait changé quelque chose ? Est-ce que tu aurais pu me pardonner les erreurs que j’ai faites ? Je n’en sais rien… c’est trop tard maintenant. « De toute façon quand t’as une idée en tête… » C’est presque un reproche. Mais je sais qu’elle a raison. « Ça servirait à rien que j’insiste… c’est mieux pour tout le monde. » pour qu’on passe à autre chose. A moins que je ne change d’université. Que j’abandonne ces études qui me font chier. Pourquoi j’ai dit que je voulais finir mon diplôme ? Pour rendre fier mes parents. Qu’est-ce que j’ai été con. Je regrette maintenant d’en avoir parlé au producteur, d’avoir joué à l’élève modèle. Je devrais tout arrêter. Me concentrer sur la musique. C’est la seule chose que je sais faire de bien. Je gagnerais assez d’argent peut-être, et je pourrais avoir un petit boulot à la con. Pour ce bébé… j’inspire doucement. Me frotte le visage nerveux. « En vrai… avec ce que je vais te dire, ça va te réconforter dans ton choix de partir. » j’ai lâché ça comme ça. Sans réfléchir. De toute façon ça ne change pas grand-chose. Mais même si je tentais de la raisonner avec ce je lui annoncerais elle allait être sûre de vouloir s’en aller. « Je… » Je sais pas comment te le dire Ye Won. En réalité, j’ai perdu toute confiance en la voyant passer le pas de cette porte. Alors je lâche « Sawan est enceinte. » mon ton est neutre. Presque sans émotion. Mais je n’ai pas envie qu’elle croit que je suis heureux. Est-ce que je dois lui laisser le temps de réaliser ? « Il n’est peut-être pas de moi. » ça la réconfortera dans l’idée qu’elle se fait déjà de Sawan et ses mœurs. Je le sais, elle va surement la lyncher. « Mais, j’ai décidé d’assumer ce bébé et de l’aider. » qu’importe au final qu’il soit de moi ou pas. Le plus important c’est d’être là pour elle. Je ne veux pas la laisser seule, même si Seo Joon se chargera très bien d’elle. Je veux avoir mon rôle aussi à jouer. Je n’ai même pas pensé au test de paternité à la naissance. Je ne vois déjà pas encore ce bébé naitre alors. Je me concentre sur le présent. Et aujourd’hui Sawan est peut-être enceinte de moi, alors oui… je ne peux pas l’abandonner une nouvelle fois.

Il Kyang a raison sur un point, Ye Won peut parfois se montrer assez têtue. Assez confortée dans ses idées pour les mener à leur terme. C’est certainement ça qui l’a poussée à chercher un appartement aussi vite, pour ne pas avoir à y réfléchir davantage encore. Pour se conforter chaque jour un peu plus dans cette simple pensée : elle a fait le meilleur choix, celui qu’elle aurait du faire il y a longtemps déjà. Elle met un terme à cette douleur qui lui transperce le coeur lorsque son regard se pose sur lui, elle trouve enfin un moyen d’avancer, et de laisser derrière toutes ces disputes, tous ces conflits qui ne mènent qu’à leur perte. Un soupire, teinté d’un certain soulagement alors qu’elle comprend qu’il n’insistera pas. Quelque part, ça lui fait du bien, de savoir qu’il ne la retiendra pas, pas cette fois. Peut-être a-t-il fini par comprendre que tout ça ne sert plus à rien, en fin de compte. Que si cette histoire était vouée à l’échec, elle prend fin, comme ça aurait du être le cas il y a longtemps déjà. Elle reste appuyée sur le dossier de sa chaise, se redresse légèrement alors qu’aux mots d’Il Kyang, elle hausse un sourcil interrogateur. Elle a tenté de ne pas y penser tout au long de la journée, même si le stress n’a fait que grandir en elle. Et elle y est, à ce moment ou elle va devoir encore faire face à une vérité qui risque de lui faire du mal. Elle s’attend à tout, sauf à ces mots qui s’échappent dans les airs. ‘Sawan est enceinte.’ Un coup de massue en pleine tête. Un choc auquel elle n’était pas préparée. Elle aurait pu tout entendre, s’en était persuadée, mais cette révélation va au delà de ce qu’elle a pu imaginer. Elle déglutit, baisse le regard. Elle sent une envie de vomir l’envahir entièrement alors que la voix d’Il Kyang continue de parvenir à ses oreilles. « Mais il est peut être de toi. » lâche-t-elle sèchement en guise de réponse. Elle n’arrive pas à y croire, écarquille des yeux plusieurs fois alors que sa gorge se noue bien malgré elle. Il assumera, il aidera à l’éducation de ce gosse, qu’il soit le sien ou non. Et cette simple idée la tue de l’intérieur, alors qu’elle n’ose plus bouger. « Je vois … » ajoute-t-elle simplement, avant de relever son regard vers lui. Un regard rempli de dégoût et de haine, qu’elle ne saurait cacher. « Pas besoin de dire que c’est une surprise… Heureuse de voir que tu fais pour elle ce que t’aurais été incapable de faire pour qui que ce soit d’autre. » Sa voix est plus froide encore, plus tranchante, mais se brise au fur et à mesure des mots qu’elle prononce. Devant elle, une vision d’horreur qui se dessine. Il Kyang, Sawan, cet enfant. Un portrait de famille qu’elle n’aurait jamais cru possible, qui la débecte. Un rire nerveux la prend alors qu’elle baisse la tête une nouvelle fois, passe une main dans ses cheveux. « Une pute qui te drogue de force, et t’assume son gosse… Quel beau tableau. Mes félicitations. » Elle ne sait plus ce qu’elle ressent, se sent finalement vide de toute émotion. Plus rien n’a de sens autour d’elle, alors qu’elle sent déjà ses jambes trembler. « T’avais raison, ça me conforte dans mon choix. » Cette révélation ne la fera que partir plus vite, finalement. Fuir désormais le plus loin possible d’eux. Elle sent ses yeux s’humidifier mais refuse de craquer une nouvelle fois devant lui. Pas après ça. « J’crois qu’on a plus rien à se dire. » Une main qu’elle passe sur son visage pour tenter de garder un peu de contenance, et elle se lève de sa chaise. Obligée de se maintenir à la table, elle pose son regard sur lui. « T’as bien changé Il Kyang, mais j’pensais pas que tu tomberais aussi bas. Fonder une famille avec une salope dans son genre... Finalement, c’est peut-être tout ce que tu mérites. Mais moi, j’mérite mieux que ça. J’mérite mieux que tout ce que tu m’as fait subir. » Elle n’a même plus la force de s’énerver, même si elle sait qu’elle a cette méchanceté en elle qui se ressent dans sa voix, dans les mots qu’elle prononce, auxquels elle ne réfléchit pas. Mais c’est plus fort qu’elle, encore une fois. Et à ces mots, elle se retourne, et quitte le café, aussi vite qu’elle le peut. Des larmes viennent déjà capturer ses joues, elle a besoin d’air. A tel point qu’une fois dans la rue, elle laisse ce sanglot secouer son corps. De longues secondes à rester là, laissant ces perles d’eau s’échapper, pour trouver le courage de retourner jusqu’à sa voiture, et quitter ce lieu, une bonne fois pour toute.

Je ne voulais pas être père, je n’avais jamais été ce genre d’homme à se projeter aussi loin avec une femme. A part ces derniers-mois en compagnie de Ye Won. L’idée m’avait traversé l’esprit. Je m’étais souvent dit pourquoi pas finalement. On aurait pu être heureux. Dans des années, si ça nous arrivait, j’aurais été heureux. Mais aujourd’hui je ne suis pas prêt. Surtout pas avec une femme que je n’aime pas. J’ai beau tenir à Sawan, ça ne sera jamais pareil qu’avec Ye Won. Ces rêves je les avais avec elle. Et ça me tue de m’en rendre compte. J’aurais aimé que les choses soient différentes. Comment j’allais faire avec un gamin sur les bras ? J’avais encore des rêves pleins la tête, même si je n’y croyais plus vraiment. J’avais envie de réussir dans la musique. C’est bien la seule chose qui me restait. Alors avoir un enfant c’était avoir déjà des contraintes. Et comment se passerait les choses ? Elle vivrait de son côté, moi du miens ? Je viendrais le voir de temps en temps ? Et quand il me posera la question fatidique « Pourquoi tu n’es pas avec maman. » je lui répondrais que j’ai toujours aimé une autre femme qu’elle ? Putain, ça ne veut rien dire. Je vais devenir un monstre… et les mots de Ye Won ne m’aident en rien. Je n’attendais pas un soutien de sa part, mais ce qu’elle me dit me blesse. Elle vient de me tuer… et je reste pourtant là, à la regarder. Blessé, triste… si elle voulait me faire du mal alors elle  a réussi. Oui, je sais Ye Won. Je suis égoïste. Je n’ai toujours pensé qu’à moi. Et oui elle avait raison, je n’aurais jamais fait ça pour quelqu’un d’autre. Je soupire, garde pour moi mes réflexions. J’en ai marre. J’ai envie de tout foutre en l’air. Mais rien ne se passe… je l’écoute. J’encaisse. Je la regarde… j’entends ses insultes, ses paroles durent et agressives. Elle me fatigue ! J’en ai marre de l’entendre toujours être aussi brutale avec Sawan. Qu’est-ce qu’elle sait d’elle à part cette nuit-là ? Je serre le poing. Je n’ai pas la force de la contredire. Encore moins de prendre la défense de Sawan. Alors je l’observe se lever. Me rabaisser, être odieuse avec moi… j’ai tellement subit, que je ne sais même plus si ça me touche encore. J’en deviendrais insensible. Je me renferme, lui offre un regard dédaigneux. Mais tu crois quoi Ye Won ? Moi aussi je mérite mieux que tout ce que tu me dis. J’ai merdé oui, mais je ne mérite pas tes insultes, tes mots méprisables. Moi aussi, j’ai un cœur. Moi aussi tu m’as blessé. Tu penses encore être la seule à avoir souffert dans tout ça ? J’en ai marre. Je serais prêt à lui dire de dégager, lui balancer toute ma rage. Mais je reste assit, déçu… triste. Parce-que j’ai beau la détester en cet instant, la voir me tourner le dos, me brise. Je l’aimais… si fort… et cette page se tourne enfin. Elle s’évapore avec elle. Quand elle franchit le pas de la porte, je sens ce gout amer entre mes lèvres. Je porte mon poing à mes lèvres, retient quelque chose de trop fort pour moi. J’ai peur bordel… elle me laisse. Une bonne fois pour toute. Il n’y aura plus de retour en arrière cette fois. Plus rien qui ne nous liera si ce n’est ce passé. Je n’ai pas la force… ça me brise… je resterais de longues minutes, des heures assit dans ce café. A remuer ces souvenirs, à repenser à nous. A revoir toutes ces erreurs que j’ai faites. Elles font désormais parties de moi. Et je le sais… j’en prends conscience à mesure que je retourne chez Kitae. J’ai fait des conneries… et je dois laisser tout ça derrière moi. Pour cet enfant… et pour Sawan.