Un jour nous parviendrons à ne plus penser à tout ça avec tristesse. C’est difficile de devoir gérer ces émotions. Mais j’ai l’impression d’être à ma place. Sans l’avoir voler à quelqu’un. Ni même sans la forcer. C’est tordu comme situation. On devrait se fuir, s’éviter. Je suis certain que son psy lui dirait qu’elle fait une erreur. Mais je ne veux pas y penser. Encore moins la repousser. J’aime ce moment, même si il est encore douloureux. J’aime croire qu’on pourra parler comme ça quand on le veut. Ça me fait oublier presque ce qui m’a poussé à venir ici. A sortir aujourd’hui… je ne veux pas y penser. Pas tout de suite en tout cas. Est-ce que je pourrais les appeler ? Leur reparler plus tard ? Je ne sais pas. Pour une fois j’aimerais qu’ils fassent le premier pas. Mais en cet instant, je mets ça de côté. Pour me concentrer sur Ye Won. Je suis un peu surpris par ce qu’elle me dit. Min Young l’a inscrite à un concours ? Je trouve l’idée bien mais… je suis un peu déçu. Juste pour moi je crois. Parce-que j’aurais aimé être celui avec qui elle partageait ça. Je lui souris, bien qu’un peu triste d’être loin de sa vie. Je sais que ce genre de choses pouvait avoir son importance. Elle qui se forçait à faire des études pour les autres. Elle qui laissait toujours ses passions de côtés. « Oh c’est super ! » lui dis-je en le pensant vraiment. « Il a eu raison. » de la pousser à réaliser un peu ses rêves. A penser à elle pour une fois. C’est ce dont elle le plus besoin en ce moment. Et je suis désolé que ça ne soit pas moi qui aie eu l’occasion de le faire. « Tu as déjà envoyé tes modèles ? Ou tu es en train de les préparer ? » Je me souvenais qu’elle dessinait souvent avant. Même si elle n’avait jamais cru en elle. C’était pour son plaisir plus que pour réaliser quelque chose après. Mais je pensais que c’était peut-être un gâchis. Bien que je n’étais pas vraiment doué pour avoir un jugement. Je bois une nouvelle gorgée de mon café, me réchauffant un peu plus le cœur et l’esprit. Finalement, elle arrive à me faire oublier toute cette peine. Cette chose qui pèse à nouveau sur moi. Je suis content qu’elle soit venue, j’aurais eu du mal à affronter ça tout seul. « Tu me les montreras ? J’aimerais vraiment les voir. » C’est presque une supplique. Parce-que je veux faire partie encore de ta vie Ye Won. C’est bête, mais j’aimerais pouvoir participer à cet évènement qui t’arrive. Malgré moi, je la regarde avec insistance avant de détourner mon attention. Je suis certain que ça lui fera du bien. De focaliser son esprit sur autre chose et sur ses passions. Je suis le premier à l’avoir fait avec la musique… « Je crois qu’il est temps que tu vives enfin pour toi. » et je suis certains que Min lui a dit à peu près la même chose. Et je n’émets aucun jugement. Je tente juste de l’encourager aussi comme je peux. Je suis bien placé pour en parler. Je crois… Je lui souris à nouveau. Et tandis que je l’observe, je remarque soudainement un peu de mousse sur le coin de ses lèvres. Je sais que c’est idiot, mais je m’arrête en chemin  « Oh attends ! » et je tends déjà ma main pour venir lui essayer du bout des doigts. Je ne devrais pas… la toucher c’est presque interdit désormais. Et je me rends compte à quel point ce contact me manque.

Son meilleur ami arrive à l’aider même en étant à l’autre bout du monde. Il tente de lui trouver des occupations, des moyens nouveaux de se libérer l’esprit. C’est sûrement ça qui la pousse à dessiner, enfin. A tenter de faire quelque chose de ces idées, longtemps restées dans sa tête, pour participer à ce concours. C’est une façon pour elle de le remercier, même si elle sait d’avance qu’elle n’obtiendra pas la première place. Qu’elle est bien loin d’avoir le niveau nécessaire pour y parvenir. Elle pourra au moins dire qu’elle aura tenté, et elle sait que c’est tout ce qu’attend Min Young de sa part. Elle est surprise quelque part de la réaction d’Il Kyang, ne s’attendait pas à le voir aussi… enthousiaste ? Elle n’est pas sûre, trouve ça peut-être trop irréel pour le croire. Alors elle hausse simplement les épaules en l’observant du coin de l’œil. « Disons qu’il m’a pas trop laissé le choix. » réplique-t-elle dans un léger sourire. « Je bosse encore dessus, mais le thème est pas évident pour moi. » Une excuse qu’elle se donne, un moyen de justifier un travail qui ne sera jamais à la hauteur de ceux qui étudient dans le domaine. Étonnée de sa demande, Ye Won se pince les lèvres nerveusement, ne sait pas quoi en penser. Elle reporte son attention sur lui, ses yeux écarquillés. « Tu … veux les voir ? » Elle ne s’y attendait pas, ça se lit clairement sur son visage. Est-ce réellement une bonne idée ? Elle en doute, et pourtant… « Je … je t’en enverrais alors. » Un sourire timide s’était glissé sur ses lèvres, nerveuse à cette idée. Elle n’a pas vraiment l’habitude de montrer ce qu’elle fait, encore moins à Il Kyang. Sa dernière remarque pourtant, lui fait du bien. Ca fait écho aux paroles de Min Young pendant son séjour. Il n’a pas arrêté de lui dire qu’elle devait penser à elle, avant les autres. Qu’elle devait prendre soin d’elle désormais, qu’elle prenne des décisions pour elle et non pour les autres. Aussi difficile que ça puisse être. Mais elle n’est pas tout à fait prête à le faire. « T’as sûrement raison. » répond-elle alors simplement, replaçant une mèche de ses cheveux avant de boire un peu plus de sa boisson. Elle se stoppe dans ses mouvements en le voyant aussi proche d’elle, croit sentir son cœur exploser dans sa poitrine lorsqu’elle sent la pulpe de ses doigts essuyer cette mousse au coin de ses lèvres. Elle n’ose plus bouger, ni même parler, et reste seulement figée là, à l’observer. Son sang pulse en elle, à tel point qu’elle a le sentiment de le sentir jusque dans ses mains, sa tête. Incrédule, ses lèvres qui s'entrouvrent sans laisser passer aucun son pendant de longues secondes, jusqu’à ce qu’elle n’arrive à bredouiller un « merci » tout juste audible. Un contact si simple, qui pourtant semblait être proscrit entre eux. Une proximité à laquelle ils n’ont plus droit, et qui pourtant la fait toujours autant frissonner. Elle tente déjà de s’en cacher, se remet en route rapidement pour qu’il n’ai pas à voir à quel point un simple geste de sa part peut encore la mettre dans tous ses états. « Et sinon, t’as … rencontré des gens, à l’agence ? » Changer de sujet une nouvelle fois, pour qu’il ne remarque pas à quel point tout est encore douloureux pour elle. Pour qu’il ne remarque pas à quel point elle est faible face à lui, et face à tous ces gestes qu’il peut encore avoir à son égard.

Je veux faire partie de cette vie. De cette nouvelle voie qu’elle prend. Si ça ne tenait qu’à moi j’aurais appelé Min depuis longtemps. On aurait même pu en parler ensembles. Mais je sais que ce dernier m’en veut encore. Jae aussi était en colère, mais Min c’est différent… il était ami avec Ye Won depuis tellement longtemps. Je crois même que s’il m’avait eu devant lui il m’aurait tué. Il tient trop à elle. Et me tient responsable de ce qui lui ait arrivé. Je ne lui en veux pas. Mais j’aimerais avoir le cran de lui parler. Jae parfois me donne de ses nouvelles, me parle aussi de moi et de lui… et je sais qu’il n’est pas encore prêt à l’accepter. Mais j’aimerais qu’il sache tous les efforts que je fais. Que moi aussi je n’ai pas voulu ce qui est arrivé. Est-ce que Ye Won a parlé de nous quand elle était là-bas ? Je ne sais pas surement… mais lui a-t-elle parlé de l’hôpital ? De ce que j’ai osé lui avouer ? Je n’en sais rien non plus. De toute façon ça n’y changerait rien. Mais je n’ai pas envie d’être exclu de ça. De cette passion qui pourrai l’aider. Je ne ferais pas la  même erreur cela dit. Je n’insisterais pas. Si elle veut garder ça pour elle ou pour eux. Alors je l’accepterais ! Il faut que je grandisse, que j’arrête d’être… aussi possessif je crois. Ye Won ne m’appartient pas. Elle doit vivre sa vie… sans moi. « C’est quoi le thème ? » je voulais savoir. Même si peut-être que ça ne me parlerait pas. Mais je voulais voir ces modèles. Ça faisait tellement longtemps que je n’avais pas vu ses dessins… Puis vint ce geste, celui que je ne devrais pas avoir. Juste un effleurement sur sa peau, ses lèvres. Elles me manquent… je me surprends à vouloir les embrasser. Tandis que je pince les miennes. Ce simple contact me rend fébrile. J’ai envie de tout envoyer valser. Ces conneries avec lesquelles je tente de me persuader depuis des jours. Bien sûr que non, je ne peux pas vivre sans elle mais… je suis qu’un con. Je ne peux pas y croire. Je ne peux plus m’y accrocher. Et je m’en veux soudainement, de me laisser aller mentalement. Alors j’esquisse un pas en arrière et la regarde sans oser rien dire. Je suis désolé Ye Won… parfois je flanche. Il faudra que j’apprenne à garder mes distances. A te voir que de loin… j’ai presque envie de m’excuser. Mais elle change de sujet, et j’en suis presque soulagé. « Non pas vraiment. C’est plutôt Kitae qui s’est mêlé aux autres jusqu’à maintenant. » J’ai été souvent absent au début. Je n’ai pris le temps de parler à personne. A part les plus  grosses têtes de l’agence, les autres artistes je ne les connais pas. Mais je ferais l’effort je pense. « On aura une soirée organisée à l’agence, pour faire connaissance tous entre nous. J’en profiterais surement à cette occasion. » Et j’aurais tellement aimé que tu sois là Ye Won. Que je puisse te demander de venir. Je bois encore, avant de la regarder « Mes parents étaient contents que j’ai réussi à signer. » c’est étrange je sais. Eux qui préféraient que je fasse des études. Mais ça concrétisait un peu le rêve. Ça leur montrait que j’en étais capable. Je dis ça en haussant les épaules, l’air détâché. Comme si je pouvais ne plus m’en soucier. Mais au fond je me mens. En repensant à eux, j’ai mal au cœur. Alors je viens jouer nerveusement avec mon gobelet avant de lui dire « Tu sais… je crois que nos psys respectifs diraient qu’on est fou d’être là. Mais… je crois que tu es la seule à pouvoir me comprendre réellement Ye Won. Et je trouve pas ça… malsain que tu sois là pour moi… tout comme je veux être là pour toi. » je nous crois assez fort, assez mature pour passer au-dessus. Je pense que nous pouvons y arriver. J’ai confiance en nous… et sur le fait que aujourd’hui nous prenons les bonnes décisions. 

« Il faut que je dessine des tenues dans les tons rouges, avec un tissus à motifs imposé. » réplique-t-elle à sa question, l’air de rien. Mais un thème ne laisse pas toujours toute la liberté qu’on souhaite, et c’est l’une des raisons qui la pousse à croire qu’elle n’a pas sa place dans ces concours. Que d’autres ont infiniment plus de talent qu’elle, et que ce rêve n’a aucune raison de se réaliser un jour. Une pensée qui s’échappe bien rapidement à ce simple contact sur sa peau, à cette proximité engagée entre eux. Ils n’y avaient pas droit, plus droit. Tout ça devrait être proscrit. Tout ça ramène à des temps ou ils étaient heureux, incapables de se détruire. Mais ces temps là ne reviendront pas, qu’importe l’envie qu’elle pourrait avoir d’y goûter à nouveau. Tout est terminé. Elle se le répète sans cesse, sans pour autant réussir à l’assimiler complètement. Peut-être que si tout cette peine reste là, si cette acceptation ne vient pas, c’est parce qu’elle n’est pas prête, tout simplement. Elle aimerait l’être, pourtant. Avoir assez de force pour reprendre réellement sa vie en main, mais ce n’est pas encore le cas. Alors elle reprend sa route, écoute la réponse à sa question. Ses lèvres se pincent nerveusement, alors qu’elle a encore le sentiment de sentir la pulpe de ses doigts contre elles. « Tu devrais oui… » Rencontrer d’autres personnes, m’oublier. Peut-être que ça m’aidera à me sentir prête à le faire moi aussi. « Tu devrais l’être toi aussi. T’as travaillé dur pour ça. » Et elle le pense, réellement. Elle n’a jamais douté du fait qu’il puisse réussir un jour. Même si désormais, elle ne sera plus à ses côtés pour le voir grandir, évoluer dans cet univers. Même si elle ne sera plus vraiment là pour le soutenir, l’encourager encore, le suivre à ses concerts. Elle n’est pas sûre de pouvoir le faire, de loin, même si elle le voudrait. Elle n’est pas sûre de pouvoir tourner définitivement la page si elle continue ainsi. Sa boisson qu’elle termine, alors que les mots d’Il Kyang la ferait frissonner. Elle aimerait tellement pouvoir y croire, mais se rend compte peu à peu que plus elle passe de temps à ses côtés, plus il est difficile pour elle de tirer un trait. Malgré ces images qui continuent de la réveiller en pleine nuit. Malgré ces vérités qui éclatent encore en son coeur lorsqu’elle pense à lui. Quelques secondes, elle reste silencieuse, avant de s’arrêter, relevant son regard vers lui. Elle ne saurait quoi répondre à ça, doute encore de tant de choses qu’il lui est difficile de penser que pour une fois, ils font bien les choses. « Tu le penses vraiment ? » demande-t-elle dans un soupire. Une supplique certaine, une façon de lui montrer que son corps entier lui crie qu’il a besoin de lui, alors que son esprit embué ne sait plus quoi penser. « Je sais pas… Avec tout ce qu’il s’est passé… » Sawan, ce bébé, cette overdose. « Tu trouves pas ça malsain ? » Elle l’aurait pensé sans aucun problème. A se dire qu’ils continuent de jouer avec leurs propres sentiments, qu’ils n’arriveront jamais à se séparer totalement de l’autre comme ça. Qu’importe le besoin qu’elle peut ressenti de l’avoir si près de lui. « Pourquoi … Pourquoi tu veux encore être là pour moi ? » finit-elle par demander fébrilement. Pourquoi continuer à se faire du mal, à rester dans la vie de l’autre alors qu’ils savent que plus rien ne sera jamais comme avant. Bien sûr qu’elle espère lui montrer qu’il n’a plus à avoir peur de revivre cette terrible nuit, mais la vérité blesse. Elle se rend compte à chaque fois qu’elle faiblit toujours plus pour lui, alors qu’elle ne devrait pas. Pas maintenant qu’il se construit une famille.

Si je le pense vraiment ? Bien sûr que je le pense. Pourquoi doute-t-elle ? Je suis sûr oui, je trouve ça… saint qu’on se parle. Qu’on apprenne à se redécouvrir, qu’on sache se soutenir. Je ne sais pas, je ne pourrais pas vivre cette épreuve loin d’elle. Je n’aurais pas dut lui confier cette idée je le sais. Mais… c’est plus fort que moi. Je le pense, je le crois. Je m’en persuade aussi quelque part. Que c’est bon pour nous. Les autres diraient qu’on est fou, mais il faut apprendre à se rapprivoiser. A se concentrer sur nous. Je ne presse rien, je ne lui impose pas. Et elle sait aussi que c’est plus fort qu’elle. Sinon pourquoi elle serait venue ? Même si elle le regrette j’aime à croire qu’elle ne doute pas de ça. De cette sincérité dont on fait preuve l’un pour l’autre. J’hausse les épaules, détourne les yeux. Je n’aime pas quand elle évoque ce qui s’est passé. Parce-que j’essaie d’avancer, sans oublier mais juste en mettant ça de côté. Je sais que c’est surement impossible pour elle. Malgré tout on sait, tout ce que nous avons vécu. Et je sais aussi ce qui reste dans un coin de nos têtes tandis qu’on est là tous les deux. Mais je ne pense pas que l’un et l’autre faisons semblant. « Non. Pourquoi je devrais ? » C’est peut-être un peu brusque. Mais non je ne crois pas que ça soit malsain. Si ça l’était je serais dérange ? Je me poserais un tas de questions. Et ce n’est pas le cas. Je me sens à ma place. Sans personne pour nous juger. J’aime croire que personne ne peut savoir. Qu’à nous voir on aurait l’air de de deux personnes qui n’ont rien vécu ensembles. Enfin rien d’aussi destructeur. Je fronce les sourcils à sa question. Un peu surprit, mais à la fois mal à l’aise. Ne me pose pas cette question Ye Won… je veux être avec toi, parce-que tu me comprends. « Tu sais très bien pourquoi… » Et je parle sans réfléchir. Sans ajouter quelque chose de superficiel. Je lui ai dit. Je me suis confié à elle… je l’aime. Et le fait qu’on traverse ça ne changera rien. Elle espère peut-être qu’un jour je saurais tourner la page. Mais là maintenant, aujourd’hui je suis amoureux d’elle. Que ça lui aille ou non, je ne peux pas aller contre ça. Alors oui ça me tue un peu qu’elle ose me demander. C’est une évidence, mais je ne veux pas être dur. Ni avoir l’air de me fermer. « On ne fait rien de mal… » Je souffle cette phrase, presque comme un aveu. Presque comme si je tentais de nous convaincre. J’attraperais bien sa main, pour lui tenir, pour la garder pour moi… « Si… si tu trouves que c’est pas bien. Alors dis-le moi…. » Je suis prêt à l’entendre Ye Won. Si tu veux qu’on arrête ça alors ok. Je le ferais parce-que c’est toi. Je le ferais parce-que je veux que tu ailles mieux. Je veux revoir ton ce sourire, je veux te revoir heureuse. « Je ferais tout ce que tu veux… » Même si ça me blesse. Même si je suis un crétin amoureux, alors je le ferais. C’est ça aussi aimé non ? Savoir s’effacer quand l’autre à besoin d’espace. « Si t’as besoin d’espace, je te le laisserais… mais… c’est toi qui est venue aujourd’hui. Me dis pas que tu regrettes. » C’est un peu bête comme remarque. Je me rends compte que j’ai l’air triste. Presque apeuré qu’elle me réponde. Mais ce n’est pas un reproche. « On peut être là l’un pour l’autre. Sans que ça soit étrange… et tu sais mieux que moi que j’ai raison. Je ne te demande pas d’être là tout le temps. Mais… on peut se soutenir, comme on le fait là… sans aucune arrière-pensée. » Je nous en crois capable Ye Won. Je m’approche d’elle, me retenant pour ne pas la toucher. Je sais ce que je ressens, je sais où sont mes limites maintenant. « Ye Won, arrête de te torturer l’esprit. » s’il te plait, ne réfléchis pas. Regarde-nous, on peut se parler, sans rien tenter, sans céder. Sans se déchirer… « Laisse-toi aller… si tu veux me voir, tu as le droit… fais-toi confiance. » parce-que envers moi tu n’en as plus. Je me recule un peu « J’ai été franc avec toi. Je n’attends plus rien… alors n’ait pas peur d’être avec moi… » je veux la rassurer. J’ai peur qu’elle pense qu’un jour je pourrais essayer quelque chose à nouveau. J’ai été con. J’ai compris aujourd’hui. Alors je ne sais pas, si elle peut me croire. Elle qui ne sait plus où elle en est. J’ai l’air solide, de savoir… d’être sûr de moi. Mais si elle savait… en réalité je fais ça pour nous deux. Pour qu’elle se projette plus facilement, dans l’avenir.

Elle repense bien trop souvent à ces mots échangés, dans cette chambre d’hôpital. La première fois qu’il a osé lui dire qu’il l’aimait. Mais tout est allé bien trop loin pour qu’elle arrive à y croire sincèrement. Il aura fallu d’autres disputes pour qu’elle comprenne qu’il l’a gardé pour lui tant de temps, que ce n’était pas une excuse de plus pour se racheter. Parce qu’au fond d’elle, depuis le départ, elle savait qu’il n’était pas le genre d’homme à exprimer ses sentiments. Du moins, pas de la même manière. Elle s’y était accommodée pendant près de trois ans, même si elle aurait voulu entendre ces trois mots bien avant. Mais aujourd’hui, tout reste trop confus dans son esprit. Elle aurait voulu y croire mais voit qu’il s’éloigne, parfois, d’une certaine manière et depuis cette lettre, et qu’il est grand temps qu’elle fasse de même. Mais son amour pour lui est encore intact, trop puissant pour pouvoir le mettre de côté. Trop omniprésent pour réussir à avancer correctement, même de quelques pas. « C’est pas que je regrette d’être venue aujourd’hui mais… » Un soupire, son regard qui se perd sur le sol. « J’arrive pas à savoir si c’était vraiment une bonne idée. » S’ils ont encore droit à ça, quelques discussions au coin d’une rue lorsque tout semble mal tourner. Quelques mots échangés pour reprendre sa route quelques instants après. Sont-ils réellement voués à ça ? Difficile à croire pour elle, alors qu’elle sait qu’il n’est plus celui qu’elle doit appeler quand elle a le sentiment que tout s’effondre autour d’elle. « Comment voudrais-tu que je te soutienne si je n’arrive pas à le faire pour moi-même ? » Il n’y a aucun reproche dans sa voix, aucun jugement. Juste cette peine qui reste ancrée, qui montre à quel point elle est encore fragile, prête à succomber à n’importe quel instant. Elle se mord les lèvres, incapable de le regarder pendant un instant. Elle se trouve simplement folle d’être encore là, de se raccrocher à lui quelque part. Comment est-ce possible alors qu’ils n’ont fait que se détruire tout au long de ces derniers mois ? Alors elle l’écoute simplement, se demande si réellement, elle peut encore aller le voir quand elle en ressent le besoin. Parce que c’est plus fort qu’elle, qu’elle pourrait encore passer des heures à ses côtés, même sans rien se dire, si elle le pouvait. Elle s’en empêche, parce que ce n’est pas ça qui l’aidera. Ce n’est pas ça qui fera qu’un jour, ils pourront réellement être heureux, chacun de leur côté. Des mots qui résonnent en elle, dont elle n’est pas tout à fait sûre de comprendre le sens. ‘Je n’attend plus rien.’ Doit-elle faire de même ? Est-elle en train d’attendre quelque chose elle-même ? Sûrement, sans savoir quoi. A-t-il déjà tourné la page pour agir ainsi avec elle ? Certainement, et il est grand temps qu’elle fasse de même. « C’est dur Il Kyang… » Difficile de te voir si proche et si loin à la fois. Difficile d’arrêter de t’aimer. « Je … Je peux pas me faire confiance comme ça, avec toi. » Une autre preuve de faiblesse qu’elle lui offre sur un plateau d’argent. Sa manière de lui faire comprendre qu’elle l’aime encore trop pour réussir à surmonter cette étape, avec ou sans lui. Qu’il faudrait qu’elle se débarrasse de ses sentiments sans savoir comment faire. Son bras qui se lève avant que sa main ne claque sa cuisse, et qu’elle ose relever son regard vers lui. « Aujourd’hui, j’avais envie de croire que je pourrais t’aider, ou … je sais pas, que tu puisses encore avoir besoin de moi. Mais c’est tellement stupide ! Comment tu pourrais avoir besoin de moi après ça ? » Comment ça se fait que moi, j’ai encore autant besoin de toi ? « Est-ce que tu crois vraiment qu’on arrivera à tourner la page comme ça ? » Une supplique dans son regard, elle attend qu’on lui dise quoi faire, incapable de croire qu’elle pourra prendre les bonnes décisions, qu’elle pourrait faire les meilleurs choix. Peut-être est-ce ce qu’elle attend de lui, finalement.

Pour beaucoup ça serait une mauvaise idée. Nous le savons tous les deux, mais je le vois à sa façon de le dire, qu’elle aimerait que la rassure. Que je lui dise que c’est bien, qu’on ne fait rien de mal. Pourtant j’essaie, j’aimerais lui faire comprendre. Mais elle semble douter, de ne pas être sure d’elle. Comment puis-je lui en vouloir ? Après tout ce que nous avons traversé, n’importe quel idiot lui dirait de fuir. Je suis celui qui l’a fait le plus souffrir. Et… je suis là, face à elle. Comme si de rien n’était. Quelque part je m’en veux de lui imposer ça. Finalement encore une fois ais-je été trop égoïste ? Je serre les dents, la regarde sans oser rien dire. Ce n’est pas vraiment contre moi ce qu’elle dit. Je le vois bien, dans sa façon de me le dire, de se poser la question presque à elle-même. Mais elle me perd. Avec ses craintes, elle finit par me les communiquer. A la voir autant être sur la réserve, je me dis qu’elle a peut-être raison. Ye Won est perdue. Elle n’arrive pas à s’accrocher à quelque chose, à se faire confiance à elle-même. Moi non plus… si elle savait comme j’ai peur de moi. De ce que j’ai pu être ou ce que je cache. Mes addictions m’ont fait devenir quelqu’un d’autre. Cette rage, ce dégout des autres… jamais je ne me pardonnerais jamais toute ces choses. Mais je dois faire avec. Je dois les accepter, pour avancer. Et je ne sais pas vraiment ce qu’elle se reproche. Elle se sentait égoïste… mais à part ça ? Quel mal la ronge vraiment ? Le fait d’avoir céder ? De s’être laisser aller ? D’y avoir cru ? Mais j’en suis le seul responsable. C’est moi qui ne l’ai pas lâché. C’est moi qui suis toujours venu la réclamer… je ne sais pas comment lui faire comprendre qu’elle est trop dure avec elle-même. Et ce qu’elle me confie, me le prouve… elle a peur. Peur de revenir vers moi. Peur de craquer n’est-ce pas ? Si je n’étais pas raisonnable, je lui dirais de le faire. De ne plus penser à rien. Si j’étais encore cet idiot que j’étais, je l’obligerais à ne plus se freiner. Mais je dois rester lucide. A chaque fois que nous avons cédé nous nous sommes fait souffrir. Nous nous sommes détruits l’un et l’autre. Et je sais désormais que je ne veux plus ça. Que je dois écouter ma raison même si mon cœur me crie l’inverse. Pour elle je dois rester lucide. Mais j’ai l’impression que tout ça la rend mal à l’aise. Qu’elle se sent encore plus perdue et coupable. Alors je me renferme un peu « Mais bien sur que tu peux m’aider Ye Won. C’est évident non ? » Mais pour elle ça ne l’est pas. Ce que je crois, elle ne le croit plus. Pourtant c’est clair dans mon esprit. Je me détache, à mesure que les secondes passent. Je me force à m’éloigner, à tourner cette page. Elle est lourde, compliquée à déplacer, mais je veux le faire. Pour elle… c’est elle. Juste elle qui me donne cette force. Comment ne peut-elle pas le comprendre ? Je l’aime assez pour faire ça pour nous, pour son bonheur. C’est ma seule motivation. Ce n’est pas pour moi que je le fais. Je m’en fous ! Mais la savoir malheureuse c’est ça le pire. Après cette nuit-là j’ai compris. Que je ne voulais plus la voir aussi triste, plus jamais au bord du gouffre. J’ai compris que je préférais qu’elle me quitte, fasse sa vie avec un autre, plutôt que de n’être plus là… « Ecoute… si c’est aussi dur pour toi. Alors vaut mieux qu’on arrête ça. » Je pensais que tu avais choisi d’être là. Que tu comprenais ce que ça voulait dire. Mais je me suis trompé… « Si c’est pour ton bien. C’est préférable qu’on reste loin de l’autre. Si toi t’as besoin de ça. Alors ok. » Mais au fond ça me blesse. Je me braque sans le vouloir. Et je me sens prit au dépourvu. Presque coupable d’être là tout à coup. « J’ai… j’ai pleins de trucs à faire. Je dois passer au studio Kitae m’attend et… je dois y aller. » Et je mens. Je suis désolé Ye Won… car cette fois ci c’est moi qui fuis.

Ye Won est désemparée, ne sait plus quoi faire. Elle a besoin qu’on la guide, alors qu’elle garde en elle cette peur immense de faire un autre mauvais choix. Être face à lui est encore trop difficile, pourtant elle sait, elle sent, que quelque part ça lui fait du bien. Que malgré tout ce qu’ils ont enduré, sa présence arrive encore à la réconforter. Et ça parait si insensé, si fou, qu’elle-même doute de tout. De sa simple présence aujourd’hui, au fait qu’elle puisse l’aider ou même l’appeler quand elle, elle en aura besoin. Même s’ils ont vécu trois années fabuleuses ensemble, tout a changé, depuis qu’il est revenu. Et s’ils ont tenté de renouer, ils n’ont fait que se détruire, jusqu’à vivre le pire. Pourrait-elle supporter de revivre un tel calvaire ? De se sentir sombrer davantage, une fois de plus ? Elle a peur du futur, de ses propres sentiments, et ne fait que l’exprimer maladroitement. Elle qui n’arrive pas à se détacher de lui, malgré tout. Peut-être qu’à se voir réussir à ne plus se déchirer, elle a retrouvé une forme d’espoir, mais que celui-ci est malsain. Et peut-être que son erreur vient de là, oser exprimer ce qu’elle a sur le coeur, ou tout du moins, tenter. Parce qu’elle peut le voir se braquer, trop rapidement à son coeur. Ses yeux s’écarquillent sans qu’elle ne sache quoi répondre à sa question. Est-ce si évident que ça ? Qu’elle arrive à l’aider ? Pas pour elle. Elle qui pense qu’elle ne fait rien de bon pour lui, pour elle, mais surtout pour eux. Elle ne trouve rien à dire, aimerait avoir les mots pour dire exactement ce qu’elle a sur le coeur, mais rien ne lui vient. Alors elle l’écoute, déglutit. Elle sent son coeur se serrer dans sa poitrine et ne peut rien y faire. Voilà qu’ils arrivent à se blesser mutuellement, une fois de plus. Sans cris cette fois, mais la douleur renait en elle, comme une habitude qui s’ancre en eux, et qu’ils n’arrivent pas à arrêter. « Il Kyang… » murmure-t-elle, sans être certaine qu’il arrive à l’entendre. Ne pars pas, s’il te plait. Ne me laisse pas seule avec mes peurs. Je suis trop effrayée d’avancer, et c’est encore pire en sachant que tu ne seras plus là. Et si elle a fuit de nombreuses fois face à lui, si elle a réussi à poser des mots sur ce qu’il se passait en elle à ces instants-là, cette fois, elle en est incapable. Cette fois, elle reste figée, les mots bloqués en elle, sans vouloir sortir. Ses yeux finissent par s’embuer lentement, alors qu’il cherche d’autres excuses, avant de partir, de la laisser seule dans cette rue. Et elle voudrait le rattraper, lui dire qu’elle est désolée. Qu’elle aimerait tant être présente pour lui, mais son corps refuse de bouger. Peut-être qu’elle le laisse prendre cette décision pour eux, finalement. Peut-être que finalement, il serait plus sage de le laisser faire ce choix qu’elle-même, n’arrive pas à faire. Aussi douloureux que cela puisse être, il a sûrement raison, il faut qu’ils arrêtent ça. Pourtant, au moment même ou il quitte son champ de vision, sa vue se brouille, son coeur s’affole. Et si c’était ça, le mauvais choix ? Ne pas réussir à le retenir. Mais il est déjà trop tard pour y penser, en fin de compte.