Il l’écoute, attentivement, pour comprendre ce qu’il voulait lui dire. Tentant de ne pas prendre peur, ni de se braquer. Il voulait des choses que le garçon ne pouvait lui donner et c’était bien normal. Il savait qu’il avait dépassé les limites ce soir, qu’il lui avait sauté dessus car il était le seul qui pouvait le comprendre, à qui il pouvait se confier, mais Alexander avait laissé parler la passion et le besoin, avant de réfléchir. Il humidifie ses lèvres et pose son regard sur lui, il acquiesce, comprend que Samran a besoin de temps … il pose ses yeux désolés sur ce visage qu’il détail longuement, ne voulant pas le perdre, ne voulant pas l’oublier, comme s’il n’allait plus jamais le voir. Beaucoup de choses s’étaient terminés ce soir pour Alexander, n’était-ce pas légitime qu’il craigne de perdre la seule chose qu’il aimait encore sur cette terre … ? Il déglutit et acquiesce à nouveau comme pour faire comprendre à Alexander caresse cette main qui l’attrape et mordille sa lèvre. « J’comprends … » même si c’est dur pour lui de l’accepter. Il lève son regard vers Samran et murmure « C’est juste que tu … que tu me manques … » et c’est égoïste je sais … « est-ce que je peux te prendre dans mes bras … ? » dit-il en pinçant ses lèvres timidement.

Les limites devront lui être expliquées, car le garçon est troublé par tout ce qui se passe. Pour la première fois Alexander n’arrive pas à garder l’esprit clair. Il acquiesce comme un enfant qui ne saurait à quoi il a droit. C’était le souci principal de cet homme, son éternel fardeau : trop réfléchir, tout analyser pour tout comprendre … Mais tout lui échappait. Surtout lorsque ça concernait son ancien petit ami. Il soupire d’aise en le sentant contre lui et déglutit en caressant son dos. Il le serre contre lui et inspire son parfum doucement en fermant les yeux. Il avait tellement besoin de lui, était-ce possible d’aimer autant ? A sa proposition de sortir se promener le garçon se tend légèrement, sait qu’il est interdit pour lui d’être vu en compagnie de quelqu’un dehors. Mais il se ravise. De toute façon tout a volé en éclat dehors et personne ne devinerait que Samran est l’amour de sa vie. Les gens sont bien loin de se douter de son homosexualité. Clairement. Il se redresse et acquiesce, après tout, tout était déjà fini, sa carrière, ses rêves. Il aurait alors tout le temps pour s’occuper de Samran mais devra apprendre à … lui laisser de l’espace et du temps. Le garçon se redresse attrape sa main qu’il embrasse tendrement avant de souffler. « Ouais … allons-nous promener. » et ce n’est qu’une fois dehors, après qu’ils aient fait quelques pas dans la rue qu’Alexander lui lâcha enfin « Mon groupe se sépare et mon agence nous … vire on va dire. » et personne ne dehors de Samran ne pourrait comprendre à quel point cette information est déchirante pour le plus vieux qui aimait la musique comme on aime respirer : c’était vital.

Ça se passait bien ? Autant que la vie d’alexander. Tout était bancale, fugace. Tout n’était qu’un amas de décisions qu’il avait fait tenir de façon branlantes. Rien qui ne puisse efficacement fonctionner, de toute évidence. Pourtant ce soir la tristesse dans le cœur, il se sentait malgré tout plus serein à l’idée de dire la vérité. Etait-ce parce qu’il avait retrouvé l’homme qu’il aimait pendant un court instant, ou bien peut-être parce qu’il pouvait se confier à lui, serré contre son bras … Il secoua la tête et murmura « Rien qui ne puisse réellement tenir … » avoue-t-il. « J’ai tout sacrifié pour la musique. » murmure-t-il tristement et Samran savait plus quiconque le prix qu’avait payé Alexander pour ne pas sombrer. Il s’était raccroché à la musique comme on se raccrochait à la vie. « Le groupe n’a pas résisté face au scandale … » ceux du père de leur ancien membre, qui les rattachait à des histoires sombres de prostitution. Bien sûr ça n’avait rien à voir avec eux, mais leur nom avait été cité et cela suffisait pour entacher leur réputation. Les garçons avaient travaillé alors plus dur pour se sortir de ces histoires, pour faire un début remarqué. Alexander brillait sur scène, réellement. Mais tout était fini. Et vu son âge, il avait manqué sa chance. Finalement il avait pris la place de son jumeau pour rien. Même ça il n’avait pas réussi à le mener à bien. Il avait tout perdu. Tout. Et la seule chose qui le faisait tenir ce soir c’était l’idée que cette maigre amitié que lui accordait Samran puisse se changer en un amour sincère et profond, qui aura surmonter tous les tourments pour vivre pleinement. Il baissait un peu plus la visière de sa casquette sur son visage pour masquer à son ami les larmes qui s’étaient mise à couler. Ce n’était pas juste un homme qui voyait se rêve se briser ce soir, c’était un homme fatigué de s’être battu en vain. Il était certain que si Samran n’avait pas fait partie de sa vie, Yoon Jae aurait sûrement envisagé l’idée de rejoindre son jumeau. Juste pour faire en sorte que tout s’arrête. Mais était-ce possible ?

C’était certain. Ce n’était pas ce qu’il aurait voulu mais ce n’était pas non plus ce qu’il aurait fait. Tout semblait bien plus facile et évident pour lui. Son frère savait toujours quoi dire. Quoi faire. Optait pour le meilleur choix. Même jeune il avait cette force de leader né. Alexander avait appris, lui. Il avait dû redoubler d’efforts et même plus. Il ne s’en plaignait pas mais aujourd’hui il était épuisé. Alors même si Samran se voulait confiant, Alexander n’était pas certain de devoir tout recommencé à 0. Devoir passée des années et des années à travailler pour voir ses efforts réduits à néant pour des choses qu’il ne pouvait contrôler. Dieu que c’était rageant. N’avait-il pas vécu assez de malheur ? Il serre cette main que lui offre Samran mais le garçon n’en peut plus. Il n’a plus de courage, finalement il réalise qu’après tout ce chemin il est seul, retour à la case départ. Peut-être même que dans le fond les mots de Samran, ses réticences, qu’il comprenait parfaitement, avait fini de l’achever. Egoïstement il avait besoin de tellement plus et il devenait fou de cette situation. Pas que vis-à-vis de Samran. Mais Alexander étouffait, rien ne lui convenait dans cette vie. Peut-être que s’il arrêtait de forcer, il pourrait profiter dans sa prochaine vie ? Il secoua la tête à cette pensée. Tout ce qu’il voulait réellement à cet instant c’était que Samran l’embrasse et lui souffle que tout irait bien. Mais ils étaient amis. Ils seraient amis aussi longtemps que Samran en aurait besoin. Peut-être pour toujours ? Finalement tout ce dont avait besoin Alexander c’était de rentrer chez lui, de boire ses bières et s’enfoncer dans son lit. Il n’avait plus envie de se battre. Pas ce soir. Ce n’était pas un cadeau qu’il faisait à Samran. Il n’avait rien d’agréable et son amour pour Samran décuplait ce sentiment de frustration. Quel fardeau il était là.

Toute la vie hein ? Alexander acquiesça silencieusement et continua de fouler le sol de cette ville trop bruyante pour lui. Il s’accrochait à cette main en s’enfonçant dans les rues de la ville. Au moins il avait retrouvé Samran, et c’était un fait qu’il chérissait malgré tout. Sa détresse de ce soir l’empêchait de réfléchir correctement, de penser sereinement, il ne voyait que son mal être et ses échecs. Sans réaliser qu’il avait à ses côtés la plus belle des lumières. Il déglutit et serra la main du garçon plus encore comme le gosse qu’il était. Le chien de Samran ouvrait la marche, les protégeant, et eux suivaient le mouvement. Arrivé à un feu rouge peu fréquenté Alexander se tourna vers lui et mordilla sa lèvre avant de l’attirer contre lui. Une étreinte, juste une étreinte amicale, dont il avait besoin. Il enlace le jeune thaïlandais et déglutit en nichant son visage dans son cou. « Merci … » souffle-t-il tout bas. D’être toi, d’être patient, d’envisager un jour de me laisser une chance … simplement merci.