Honnêtement quand j’ai reçu la notification de la directrice m’invitant grandement à participer aux missions civiles, je me suis dit que ce n’était pas pour moi. Faire des trucs qui ne m’intéressent pas avec des gens que je ne connais pas, très peu pour moi. Quand j’ai reçu la deuxième notification m’insistant sur ma participation, j’ai compris que je n’avais pas vraiment le choix. Je ne sais pas si c’est à cause de mon absentéisme en classe ou bien parce que quelqu’un de l’administration se doute de mes consommations pas toujours très légales en soirée, mais en tout cas, la directrice de yonsei semble avoir quelque chose à me reprocher. Je ne suis pas vraiment étonné mais j’aurais presque préféré une solution plus radicale… Au moins, si je me fais suspendre quelques jours ou à jamais, je n’aurais plus à subir la torture de suivre ses cours dont je n’ai rien à faire. Mais encore un fois, personne ne semble vouloir abréger mes souffrances. Heureusement, il y a du positif dans tout ça : la mission en elle-même. Aider dans un refuge pour animaux ? C’est clairement ce qui aurait pu m’arriver de mieux. J’adore les animaux. Je suis allergique, mais j’adore les animaux. La journée ne sera peut-être pas si terrible. Faut juste que je trouve mes antihistaminiques et tout ira bien. Je fouille dans mon sac alors qu’on nous donne les conseils sur le déroulement de la journée. Pas d’antihistaminiques dans mon sac. Super. Génial. Merveilleux. Parfait. En plus, je ne connais vraiment personne, je me vois mal demander à quelqu’un je ne connais pas. Et puis, il y a combien de pourcentage de chose pour que quelqu’un est des anti-allergènes sur lui, honnêtement ? Non mais je vais faire sans. Je vais ignorer mon nez qui me gratte déjà alors qu’on n’a pas encore été en contact direct avec les animaux du refuge. Oui, voilà, ignorer mon allergie. Sauf que j’ai beau me concentrer sur autre chose, mon nez me démange de plus en plus. Je finis par éternuer bruyamment coupant net le responsable de la mission dans ses explications. Mon visage vire instantanément au rouge écarlate et je me dépêche de m’excuser. « Pardon, monsieur. Je suis allergique aux chiens… Je n’ai pas antihistaminiques sur moi… » j’explique d’une petite voix, je n’aime pas vraiment m’afficher que je l’ai fait. Je baisse ensuite la tête espérant sincèrement me faire oublier mais mes éternuements continuent. Je suis maudit.

C'était juste parce qu'elle s'était rendue dans sa classe de sculpture en planche à roulettes. Bon, léger détail, ce n'est pas permis de se promener dans les couloirs en skateboard, mais c'était vraiment plus rapide pour éviter d'être en retard. Et ce n'était arrivé juste qu'une seule fois! Olivia la rebelle avait tourné un coin, et, là au mauvais moment, au mauvais endroit... Elle avait croisé la directrice. Shit fuck, qu'elle s'était dit dans sa tête.

Au final, elle était quand même arrivée en retard.

Et aujourd'hui, on l'avait envoyé en mission civique. Juste pour ça. Olivia était un peu insultée, mais, grande enfant, elle savait que ce ne serait pas vraiment une grosse conséquence. Elle était capable d'avoir du plaisir dans toutes les circonstances. Le hasard avait même bien fait les choses! La Québécoise se retrouva dans un refuge pour animaux. Dans l'un de ses nombreux éléments!

Et évidemment, elle s'était rendue là sur son skateboard. Et avec son sourire en coin bien à elle.

Olivia, confiante, rejoint un étudiant de son équipe de mission sans gêne.

Salut! commença-t-elle. Lorsqu'elle s'approcha un peu plus, elle se rendit compte qu'il ne semblait pas tout à fait en forme. Ohhh my Gooood, attends!! J'ai quelque chose pour ça! s'exclama-t-elle.

Sans perdre plus d'une seconde, elle retira une bretelle de son sac sur son dos pour fouiller dedans. Elle en sorti un petit flacon où elle mettait des médicaments en vente libre, pour les maux de tête, etc.. Ayant elle aussi parfois des symptômes d'allergies saisonnières, elle avait aussi des antihistaminiques. Elle tendit au jeune homme son flacon en lui pointant les gelules bleues. Pauvre lui. Olivia avait beaucoup d'empathie, mais elle n'avait pas agi de façon très discrète. Au moins, son geste était bon!

C’était même pas une surprise ; je suis à la bourre. Il faut dire que ça m’enchantait pas vraiment de devoir faire cette foutue mission civique à la noix alors que j’avais rien demandé. Je dois avouer avoir usé de moyens particulièrement dilatoires pour gagner le plus de temps possible et garder du temps pour moi tant que je pouvais encore. Changer de chemin, acheter un truc à manger en chemin, penser à cette satrape de directrice de merde qui nous force à faire perdre notre temps pour redorer le blason de la Yonsei. Foutus drogués.

Enfin arrivé au refuge, je vois notre petit groupe en ostracisme, les exclus, les forçats de la fac, prêts à faire du nettoyage pour quelques bonnes heures. « Yah, désolé du retard, je crois que je me suis paumé en chemin. » C’est pas vrai, mais je fais comme si. Je crois pas être le seul à avoir retardé un maximum mon arrivée, de toute manière. Un bénévole me tend une paire de gants et un masque, et je le remercie d’un signe de tête, enfilant le masque dans les secondes qui suivent pour éviter les odeurs infectes qui me pourrissaient déjà les narines. Déjà que j’allais avoir le dos en capilotade à la fin de la journée à force de me baisser, si en plus mon odorat était mis à rude épreuve, je me demandais réellement si j’allais sortir vivant d’ici.

« Bon, j’espère que vous êtes prêts à nettoyer et donner à manger à la main, parce que j’vais vous refiler tout le boulot, j’ferais certainement pas un boulot pareil. » Et c’est là que ça va être l’abstrusion, parce qu’ils s’attendaient probablement à ce qu’un grand gaillard comme moi leur file un coup de main.

Dans vos rêves, les gars.

Je continue à éternuer de façon pas très sexy, le nez qui coulent, les yeux rouges qui piquent et par extension les yeux qui grattent, je me dis que la journée commence mal et que j’aurais mieux fait de rester coucher à rien faire. Mais maintenant que je suis ici, je n’ai pas le choix que de rester. Quelque chose me dit que si j’essaie de m’enfuir, il y a que de grandes chances pour que la directrice me passe personnellement un savon, un vrai dictateur celle-là. Après… Est-ce que je ne préférerais pas ça plutôt que de rester ici à mourir à petit feu à cause de mes allergies ? Parce qu’après tout, je m’en bats l’œil avec un tibia de langoustine de me faire engueuler par la directrice. À étudier, je pourrais aller me planquer dans le café à côté du kiosque pas très loin. Alors que je me lamente un peu plus sur mon sort, j’entends les roues qu’un skateboard m’approcher et bientôt, une jeune fille me salue avec un grand sourire. Au moins, les gens ont l’air sympathiques. Je relève les yeux vers elle pour la saluer à mon tour mais je suis pris d’un nouvel éternument puissant, un éternument qui parait presque artificiel. Les yeux désolés, je m’excuse vaguement en essayant de contrôler mon nez qui me gratte plus que de raison. La demoiselle s’exclame qu’elle a ce qu’il me faut et je ne peux m’empêcher de soupirer de soulagement. La regardant fouiller dans son sac les yeux pétillants, je la remercie milles fois. « Merci, merci, merci… Tu me sauves ! Sans ça, la journée aurait été une torture ! Merci ». J’attrape le flacon de cachets sans plus de cérémonie pour me servir avant de lui rendre. Je fouille à mon tour dans mon sac pour en sortir ma bouteille d’eau grâce à laquelle j’avale les antihistaminiques. Dans cinq minutes tous les symptômes iront mieux grâce à ma sauveuse. « Oh en fait… Joo Wonhee, enchanté de te rencontrer. » je me présente en tentant la main vers elle avec un sourire reconnaissant sur les lèvres. Elle a l’air d’être le genre de personne très dynamique, le genre qui me donne des pics d’énergie. Je trouve qu’ils ont un effet positif sur ma personnalité, ils me rendent naturellement plus ouverts. Alors pourquoi pas sympathiser avec la demoiselle ?