Il est temps de vous présenter le deuxième enfant de la famille Yeo. Une petite fille toujours sûre d’elle, qui même à l’école savait régler les problèmes des autres enfants. Quels problèmes peuvent bien avoir les enfants, me diriez-vous. Nous avons tous été des enfants, pêchez donc vos plus beaux souvenirs d’enfance pour les déceler.
Si cette enfant a toujours su gérer les problèmes qu’elle pensait plus importants que ceux des grandes personnes, ce n’est pas même à ses sept ans qu’elle apprend le décès de sa mère. En mettant la petite dernière au monde, cette femme au grand cœur a poussé son dernier souffle sans que Rian ne puisse réellement comprendre la gravité de la situation. Protégée par leur père et Raon, leur grand-frère, la jeune enfant a grandi en comprenant ce que l’absence d’une mère causait : un manque d’une présence féminine, le manque d’une femme compréhensive, aucun échappatoire. Elle a grandit en gardant ses doutes, ses peurs, celle face à ses premières règles, et ses chagrins d’amour. Voilà qui forge une jeune femme qui commence à se forger seule, qui comprend les choses sans l’aide maternelle dont elle avait terriblement besoin. C’est donc après s’être vue grandir en la présence d’elle-même qu’elle devient cette femme pour ses sœurs : le pilier que leur mère n’a pas pu être pour elles trois.
Un deuxième choc : la mort de leur père. C’est à ses dix-neuf ans qu’elle se retrouve désemparée, éveillée dans un cauchemar douloureux. Au téléphone elle sanglote, sa bouche laissant glisser la douleur, annonce la déchirante nouvelle à son frère parti pour servir leur pays. Ils n’ont plus de famille, se retrouvent soudés plus que jamais, et Rian a du mal à supporter l’absence de ce père qui l’avait tant aidée à grandir. La petite fratrie déménage chez leur grand-mère, la jeune femme en veut à son frère pour la laisser désemparée s'occuper du chagrin de ses sœurs seules, elle est emparée par une certaine rancœur malgré l’amour qu’il lui porte. Rian dédie sa vie à ses deux petites sœurs pendant de longs mois avant de pouvoir vivre pleinement la sienne au retour de leur aîné. Elle se dédie à ses rêves qu’elle voit à travers ses études, se dédie à la partie de sa vie qu’elle semble avoir perdue à vouloir occuper le rôle de mère et de grande-sœur pour ses cadettes. Elle se permet de faire des rencontres, elle se permet d’aimer d’autres personnes que sa famille qu’elle désire tenir soudée malgré toutes ces mauvaises passes qui s'abattent sur eux.
Rian développe une anxiété face à sa famille : et si elle la perdait, elle aussi ? Ses piliers. Inutile de s'inquiéter se dit-elle, elle désire être le pilier de cette femme, l’espoir qui pourrait leur donner de la joie lorsque les moments difficiles reviendraient se moquer d’eux. Elle se concentre sur ses études tout en essayant de boucler les fins de mois comme elle le peut, essayant de trouver un emploi dans le dos de son frère aîné.
Comment vivre sa vie autrement ? Cette question qu’elle pose continuellement en gardant le soleil sur ses lèvres. Vivre comme les parents l’ont toujours voulu : être heureux et profiter de ce que la vie pourrait lui offrir.