Je rangeais mes affaires dans mon placard en me disant que l’on avait peut-être abusé avec Yewon en faisant les magasins. Cela faisait longtemps que je n’avais pas possédé autant de vêtements. J’allais être beau pour séduire Nam Kyu. Un sourire se dessina sur mon visage en songeant au jeune homme qui se trouvait être aussi un camarade Pyobeom. On pouvait se voir tous les jours si on le voulait. Cette perspective mettait mon cœur en joie. Il en était de même avec ma frangine mais nous avions une relation encore tendue malgré les derniers évènements. Je poussais la porte de mon placard puis quittais la chambre pour aller dessiner dans un coin du dortoir. Le beau temps me tira dehors finalement. Je peaufinais un dessin sur le thème des fleurs. Je trouvais les fleurs fascinantes. Elles étaient délicates, colorées. Leur langage pouvait exprimer des choses subtiles que les mots ne pouvaient pas rendre. Comment ne pas être en admiration devant elles ? Le dortoir des Pyobeoms possédait de très belles plantations. J’en profitais pour esquisser des dessins qui serviront aussi à mon book de tatoueurs. Mes clients connaissaient mon obsession pour la minutie et la délicatesse. Mes fleurs avaient beaucoup de succès dans le milieu. On verra si plus tard ma carrière fera de moi une référence dans le domaine des fleurs. Cette perspective me fit sourire pendant que je rangeais mes affaires. Le soleil avait eu raison de moi. Il faisait beaucoup trop chaud. Je retournais alors dans la chambre où Junho se trouvait. « Salut ! » Ma voix est toute joyeuse. Mon colocataire ne paraissait pas présent. Son esprit était comme ailleurs. « Ca va pas ? » Je penchais la tête avant qu’il ne me réponde. « WAOUH ! Sérieux ? Ils ont répondu ? » Je sautillais de joie en frappant dans mes mains. Ce mec dessinait super bien. « Je pensais qu’ils ne répondraient pas tout de suite. Ils ont dû être charmés par tes dessins. Ils te disent quoi ? »

Il ne s’attendait pas à ce que cette lettre arrive. Parce qu’il n’avait rien fait pour qu’on le contacte. En arrivant dans la chambre son coloc avait l’air heureux. Chose souvent appréciable chez Ye Jun. Il apportait de la bonne humeur. Au contraire de lui. Junho n’était pas mélancolique, juste un peu trop secret. Il avait souvent ses airs de gamins insolents, mais en réalité il cachait des choses. A tous… la réponse de Ye Jun le surprit. Il ne comprenait pas comment son ainé pouvait dire ça. Ils avaient mis du temps ? Pourquoi lui donnait-il l’air d’être au courant ? Non impossible. Du moins il l’espérait. « Comment ça ils ont répondus ? » il n’avait pas l’air en colère. Juste intrigué. Il faut dire qu’il ne s’attendait pas vraiment à ce genre de réponse. Ye Jun avait l’air de savoir de quoi il s’agissait. Alors il lui tendit la lettre l’air de rien « Regarde… je ne vois pas d’où ça vient. Je n’ai rien envoyé du tout. » Il ne l’aurait jamais fait. Parce-que Junho n’avait pas confiance en lui. Il n’était qu’un gamin qui dessinait pour se vider la tête. Observant son ami, il se demanda ce qu’il pouvait bien dire par tout ça. « Charmé par mes dessins ? Mais lesquels ? Tu crois qu’ils ont vu mes sites ? » Il ne postait que des choses dont il pouvait être fier. Certains suivaient avec attention les aventures de son personnage inspiré de Ko. Mais le reste… il restait secret. Il s’était essayé à quelques illustrations différentes. Mais tout ça restait secret… et il ne postait rien de tel. « Ça me stresse un peu… j’ai peur de les appeler. Il doit y avoir une erreur. » Pourtant c’était bien son nom inscrit sur le papier. Junho avait-il si peu confiance en lui ? Bien sur. Même si son histoire plaisait, il voulait garder ça pour lui. Pour son plaisir. Il n’était pas prêt à se lancer en indépendant. Il se trouvait trop jeune et n’avait aucune idée de ce qu’il voulait faire plus tard. Tout ça était bien trop flou pour lui. Il vivait au jour le jour. Sans projet d’avenir. Et depuis que Sunan était parti, il était encore moins courageux. Alors évidemment, il se sentait un peu prit au dépourvu. Qu’est-ce que cette lettre pouvait-elle bien faire ici ? Une belle opportunité. Mais il devait y avoir une erreur.

Comme je suis heureux que la maison d’édition à laquelle les dessins de Junho avaient été envoyés lui réponde… qui avait pris cette initiative ? Moi évidemment. Mon camarade a un talent fou. Il se dénigre tout le temps, ayant peu confiance en son art. Je me suis alors transformé en bonne fée marraine pour lui donner un coup de pouce. C’est fantastique qu’il ait un retour aussi rapide !! Il allait pouvoir commencer à prendre confiance en lui maintenant que des professionnels reconnaissaient ses compétences. Cette nouvelle me donne le sourire. Elles me mettent en joie… alors qu’il ressemble à une poule ayant trouvé quelque chose. Pourquoi il est ainsi ? Oooooh ! Il ne réalise pas encore. Je balaie de la main sa première question parce que je dois ménager mon effet pour lui annoncer que je suis le responsable de cet envoi. Il me remerciera plus tard. La lettre paraissait énigmatique mais encourageante. « Impressionnant ! Ils y en auraient qui tueraient pour recevoir une telle lettre. Tu as la chance inouïe ! Réjouis-toi. » Ils avaient dû être terriblement impressionnés par ses œuvres. Elles étaient puissantes. Il devait en prendre conscience. « Ils sont superbes mais ceux que tu ne montres pas dessus le sont encore plus. » Mes joues prirent un coup de chaud pendant que je détournais les yeux. « Il se… » Je n’eus pas besoin de terminer ma phrase parce qu’il évoqua le faites de les appeler. Cela me permit de me sauver les fesses encore un peu. « Appelle-les ! C’est une opportunité qui ne se reproduira peut-être pas avant longtemps. » Je pris mon téléphone que je lui tendis pour appuyer mes paroles. « Ils attendent un signe de ta part. » Il fallait que je le pousse à faire ce grand pas dans sa carrière. Il m’en sera reconnaissant. « Ils connaissent tes œuvres. Je me suis permis de leur envoyer ton travail. Celui que tu montres jamais… » Ouais c’était pas la meilleure façon de lui avouer mon geste. « Je rangeais… et je suis tombé dessus. Tes dessins sont puissants. Ton coup de crayon est fabuleux. Il fallait que je les montre… Regarde j’ai eu raison parce qu’ils veulent avoir contact avec toi ! »

Il restait un peu hébété. Sans savoir quoi dire ni quoi faire. Il se posait de nombreuses questions. Lui qui n’avait jamais rien envoyé. Son coloc était content. Plus que lui d’ailleurs. Junho n’était pas très expressif. Son esprit était trop embué, et puis d’ordinaire, il était incapable d’être réellement heureux. Depuis quand cela ne lui était-il pas arrivé ? Il n’en savait rien. Ne savait même pas s’il l’avait été. Quoiqu’il en soit, il restait perplexe face aux mots de son ami. Il devrait être content, mais il ne l’était pas. Parce qu’il ne savait pas pourquoi il devrait l’être. C’était une blague. Une erreur selon lui Mais c’était son nom d’inscrit dessus. Alors il grimace, a peur soudainement quand il lui tend le téléphone. « Non non. » parce qu’il n’est qu’un gosse. Junho ne sait pas se débrouiller seul. Mais tandis qu’il se recule, il est soudainement interloqué. Par les propos de Ye Jun. Il les a envoyés ? C’est lui qui l’a fait ? « Quoi ?! » il reste surprit. Etonné que son ami ait pu faire ça. Bien qu’il se doute que le geste n’était pas méchant. Mais il a peur brusquement, en entendant le garçon parler des dessins qu’il cachait. « Les dessins que je montre pas ? » dit-il pour se convaincre lui-même. Il avait du mal à comprendre. A mettre ses idées au clair, mais subitement c’est l’effroi. Il se redresse, le cœur battant. « Quels dessins ? » il est apeuré tout à coup. Se met à bouger dans la pièce nerveusement. « Oh non non non non non. » se dit-il à lui-même. Se prenant la tête dans ses mains il craint que Ye Jun ait fait une connerie. La pire de toute. Les dessins dont il parle d’où viennent-t-ils ? Il s’agite. Va brusquement dans ses affaires, sous ce lit où il cache ses carnets. Il y en a plusieurs d’histoires de comics. Des sombres qu’il n’aime pas montrer… mais surtout ceux de sa sœur. Et ça… ça le fait vriller. Il prend le premier carnet, le fout devant Ye Jun « Ceux-là ? Dis-moi que c’est ceux-là. » Il crie plus fort. Trop. Les sombres il peut accepter. Mais les autres… ceux qu’il n’ose pas montrer. Et il a peur parce qu’il voit au visage de Ye Jun. Qu’il se trompe… que ce sont les autres justes dans son autre main. « Non putain. » et là il a peur. Se recule d’un pas avec ce regard totalement effrayé. Une angoisse lui monte à la gorge. Alors qu’il s’était toujours entêté à les cacher. Seul Mok et Ko les connaissaient. Le reste… c’était un secret. « Ye Jun… » Sa voix se casse. Alors que des larmes lui viennent aux yeux. Il est trop fragile le gosse. Ye Jun ne savait pas, mais ces dessins c’était ceux de sa sœur. Ceux qui reflètent son obsession pour elle. Il en a honte. Ne les montre jamais. Il en a peur aussi… parce qu’ils sont le témoin de ce qu’il ressent. Il se sent dévasté tout à coup. Mais par-dessus tout c’est la colère qui le gagne. Emotion certaine qu’il ne peut retenir. Avant de brusquement lâcher « Mais t’es qu’un con putain ! Pourquoi t’as fait ça ? » Il n’était jamais violent. Les disputes il s’en fichait. Mais son ami avait touché à la seule chose qu’il ne fallait pas. Ye Jun ne connaissait pas Sunan. Junho était assez discret dans la chambre. Aucune photo d’elle… pourtant il parlait sans cesse d’elle. Sans s’en rendre compte. Mais les gens pouvaient prendre ça pour de l’admiration. De la fierté… « Mais bordel ! tu t’es pas dit que si je les cachais c’était pour une bonne raison ?! » il est fou de rage Junho. Balançant brusquement ses carnets à travers la pièce. Il n’avait pas conscience de ce qu’il venait de faire. Il l’avait fait pour l’aider. Mais son esprit lui, prenait ça pour une attaque. Un moyen de le détruire ! « Fallait pas faire ça. »

Pourquoi cette lettre ne lui donne pas le sourire ? C’est une excellente nouvelle que son travail soit assez intéressant pour nécessité une rencontre. Il ne comprend pas la belle opportunité qui lui tend les bras ? Ses réactions me laissent assez perplexe. Junho possède un coup de crayon vivant, vibrant, profond. Malheureusement les œuvres postées sur son site ne reflètent pas toutes ses capacités. Je suis heureux d’avoir envoyé ses créations cachées parce qu’il faut rendre justice à son investissement, son talent. Il risque de me faire la tronche ? Pas grave ! C’est pour son bien ! Il le comprendra plus tard. En cette seconde, mon colocataire me parait surtout paniqué en comprenant que ses œuvres avaient été exposées contre son gré. Il a bug pour répéter ainsi en boucle « non » ? Je le regarde de plus en plus inquiet. Cela partait d’une bonne intention. Je ne souhaitais pas créer des ennuis ou des inquiétudes. Junho se cache derrière ses pseudos dessins plats alors que cet artiste a du talent. Impossible de le laisser pourrir dans l’ombre ! Il me fera la gueule tant pis !! Il me montre divers travaux pour connaitre ceux que j’avais envoyés mais mes mouvements de tête sont pour le moment rester négatifs. Cependant quand il me met enfin entre les mains les pépites trouvées par hasard, je me stoppe puis esquisse un sourire avant de confirmer ses craintes. « Ce sont des pépites ! » Ma justification semble mourir dans un murmure. Est-ce que Junho va pleurer ? Ce sont juste des dessins. Certes ils sont sublimes mais pas la peine de se mettre dans un tel état parce que j’ai choisi ceux-là. Sa réaction est disproportionnée. Je sursaute quand sa voix devient brutale. Pourquoi ? Je ne comprends pas ce revirement de situation. Il balance ses carnets, et il me semble en prendre un au passage. Il semble réellement en colère contre moi. Je fronce des sourcils pendant que les muscles de ma mâchoire se contractaient. « Hey ! Je te permets pas ! » J’en ai un peu marre que tout le monde se défoule sur moi parce que je veux faire des choses biens. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. « NON ! Je me suis dit que tu ne voulais pas les montrer parce que tu n’avais pas confiance en toi. » Je ne comprends réellement pas ses réactions. Je lui veux aucun mal. « ET POURQUOI DONC ? CE SONT JUSTE DES DESSINS ! ILS SONT EXCELLENTS… et je ne suis pas le seul à le penser sinon tu n’aurais jamais reçu de lettre. » Je serre les poings d’énervement. « Je voulais juste te donner un coup de main… que tu comprennes que tu as du talent ! Tu dois cesser de douter de tes capacités ! » Je fais les cent pas.

Pourquoi mon colocataire me colle sous le nez une photo de celle dessinée sur les œuvres que j’avais envoyée ? Son geste est un peu violent. Je ne comprends pas moins où il veut en venir avec ça. Il se passe quoi dans sa tête ? JunHo n’a jamais été ainsi. Il me fout les jetons. Que dois-je faire ? Prendre mes jambes à mon cou ? Je suis toujours mitigé concernant ma réaction quand il me crie dessus. Vas-y ! Je suis pas un maternelle que l’on dispute pour une bêtise. Ses dessins sont des beautés. Ils ne pouvaient pas rester dans l’ombre ainsi. On gâche un talent ?! Cela lui convenait peut-être mais je trouvais qu’il passait à côté d’une opportunité fantastique. Il n’est pas content ? Pas grave ! Je vais assumer pour lui. Il me prend au dépourvu en me collant dans les mains un carnet. Je feuillette ce dernier en me demandant pourquoi il planque tous ses dessins. « Ils sont beaux. Ils sont bien meilleurs que les autres. » Mon commentaire est déplacé ? Non je ne connais rien encore de son histoire. Je hausse les épaules quand il évoque sa sœur. Je ne comprends pas pourquoi cela pose un problème. « Et alors ? » J’avais aussi dessiné Yewon… enfin surtout pour une question de stylisme. Je trouvais sa silhouette gracieuse, féminine. Parfaite pour les robes longues, vaporeuses, drapées. Elle me rappelait les déesses grecques. Pourquoi JunHo se mettait dans tous ses états pour quelques dessins ? Je sursaute, pousse même un cri de surprise quand il hurle. Waouh ?! Il ne va pas bien ? Je pose le carnet puis une main sur mon cœur qui galopait dans mon torse. Je vais avoir une crise cardiaque à la fin. « Ecoute, JunHo ! Nous avons tous des obsessions. Ta sœur en est devenue une parce qu’elle a des traits parfaits pour les dessins. C’est difficile de se laisser emporter par son art. Assumer les encore plus ! » Il y a pas de lien qui se tisse entre sa confession et ses créations. Il me faut du temps pour comprendre le sens de ses mots. Je ne comprends pas la situation. Il me manque encore des informations qui cimenteront les prémices de mon imagination. Je pose une main sur son épaule. « Je ne voudrais pas te dire des paroles vides de sens. Je ne suis pas certain de comprendre tes tourments. Je sens bien que certains détails m’échappent encore. Eclaire-moi que je puisse t’apporter mon soutien. »