{ first chance } ✰ @bae so jin

ootd
toute la journée à courir sur tes talons, une journée typique. c'est ton rôle, tu passes plus de temps en rendez-vous qu'au magasin, sûrement pour le plus grand bonheur de ton équipe de bras cassés. que des abrutis, incapables d'être performants, même dans la simple tâche de ranger par ordre alphabétique des dossiers. un jeu d'enfant pourtant, même pour des gens fini à la pisse, mais pour eux, non. désespérant. pas étonnant que ton niveau de stress ne cesse de grimper, pas aidée. c'est ta vie, pourrir à t'en ronger les ongles pour un job que tu n'aimes même pas. venir d'une famille riche a des avantages, mais aussi un paquet d'inconvénients qui n'en valent pas la peine. si t'avais le temps de stopper ta course, tu te demanderais sûrement pourquoi tu fais encore tout ça.
m'enfin, le temps n'est pas aux questions, mais aux meetings qui se suivent. longs, peu attrayants, avec des vieux bonhommes qui veulent tout contrôler, croyant qu'une femme se laisse forcément marcher sur les pieds. c'est mal te connaître, mais t'aimes pouvoir montrer qui domine, que ça éclabousse dans leurs tronches de sales misogynes.
cette fois, c'est un autre type de rendez-vous. tu presses le pas dans ton tailleur noir cintré et élégant d'un grand couturier français, claquant le sol avec tes talons couleur sang. dossier dans une main, sac à l'épaule, téléphone dans l'autre et tu t'enfonces dans le coffee shop. parmi tous les espèces d'hipster à la con, tu reconnais vite celle que tu dois rencontrer, sans hésitation. sixième sens. tu t'installes sans prévenir en face d'elle, déposant ton armure sur la table et remettant élégamment une mèche derrière ton oreille.
"okay, j'ai très peu de temps donc faisons ça vite si tu le veux bien." tu parles vite, sortant quelques papiers du dossier rouge déposé sur la table. "ren boa, la directrice- j'te sers pas la main, les germes me dégoûtent-." toujours très vite, tu élances ton bras pour attirer l'attention d'un serveur. "café noir, serré. et... reservez-lui ce qu'elle a commandé, peu importe." commande passée, tu peux enfin t'installer sans gigoter sur ton siège, un premier contact visuel avec cette jeune fille. très jeune, l'air presque trop innocent. "okay. donc je cherche une assistante, surtout pour m'aider avec les tâches administratives, parce que je déteste ça. j'suis pas très exigente, je veux juste que les dossiers soient rangé de sorte à ce que je puisse les trouver facilement et logiquement. ce qui apparemment dépasse l'entendement pour-" déjà partie dans tes grands gestes et la mine fatiguée, tu stoppes ton monologue pour la regarder plus longtemps, avant de tiquer. "t'es la sourde c'est ça ?" dis-tu en appuyant tes paroles, les doigts montrant la direction de tes oreilles. t'avoues que t'as très peu de temps pour lire les candidatures de tous, mais t'as bien lu une note sur un handicap chez quelqu'un. vu son air de chiot perdu sur l'autoroute, ça doit être elle. du coup tu sors un carnet de note, écrivant en gros, au feutre noir
est-ce que tu sais lire sur les lèvres ? juste par pure curiosité, pour nourrir ton imagination.

{ first chance } ✰ @bae so jin

tes manières ont toujours été un peu à la limite, pas le temps pour faire des courbettes ou des politesses quand on vit une vie aussi remplie que la tienne. fort heureusement, ça te frappe, elle n'a qu'un petit soucis d'audition, elle n'est donc pas entièrement retardée, ce qui aurait été un point totalement éliminatoire, t'en as déjà assez autour de toi. alors tu t'armes de ton carnet, seule manière de communiquer, ce qui est plutôt amusant à ton goût. t'as perdu l'habitude d'écrire manuellement depuis fort longtemps, l'école peut-être, avant d'avoir quelqu'un pour le faire à ta place. ça te permettra de reposer un peu ta voix, dieu merci.
tu écris alors, et viens une voix robotisée qui te répond, à la manière stephen hawking version féminine. ça te surprend un peu, c'est un peu high pitched ça te fait plisser les yeux, en plus de la tonalité un peu... comment dire... agaçante. pire que celle de ton gps. mais aussi étonnant que ça puisse paraître, ça te fait rire, rire très étouffé tout de même d'un léger pouffement. tu reprends ton carnet, entre temps la commande arrive.
le plus important est : que tu saches compter au moins jusqu'à 1000, que tu connaisses ton alphabet et que tu ne fasses pas de crise d'épilepsie parce que tu dois utiliser un ordinateur, et parce que j'ai pas envie que tu casses tout. ou que tu meurs, ça donne un mauvais genre à la boîte. tu tentes de faire un peu attention à ton écriture, aussi rapide que ton débit de parole habituel. tu glisses le carnet pour qu'elle puisse lire à son rythme, profitant une pause pour boire ton espresso, l'observant bien plus en détails. et tu souris, tu sais pas, tu décernes quelque chose que t'aimes bien, peut-être un bon moyen d'emmerder ton père, lui qui déteste les homo, les femmes et les handicapés, tu comptes bien les lui servir sur un plateau.
après un temps, tu récupères ton carnet.
parles-moi de toi, qui es-tu ? qu'est-ce que tu veux dans la vie ? tu le lui redonnes, t'enfonçant par la suite dans ton siège. t'as besoin d'en savoir plus, sa personnalité, parce que malgré tout tu as besoin de t'entourer d'une équipe caractérielle, assez forts pour te supporter. même si tu ne cesses de les traiter d'abrutis.

{ first chance } ✰ @bae so jin

c'est peut-être mal venu, mais t'es contente qu'elle ait éteint sa boîte à parler. sans avoir voulu la vexer, vraiment, mais dieu que c'est plus agréable ainsi. pour tous. quitte à passer cet entretien, autant le faire d'une manière moins traditionnelle et carrément plus reposante. tu ne sais même plus à quand remonte ton dernier moment de calme, tout est juste une accumulation d'emmerdes depuis quelques semaines. quelques mois. quelques années. bordel tu sais même plus. quand tu n'es pas au magasin, tu es au siège, quand tu n'es pas au siège, tu es chez ton père et quand tu es chez ton père, tu cherches toutes les excuses pour te tirer au magasin. cercle vicieux. le seul moment de paix est quand tu peux te dégager le temps d'aller écouter une lecture, à la fac. te foutre dans un coin et simplement écouter la voix portante du micro qui déblatère sur des choses qui te passionnent et que t'as complétement laissé de côté. c'est un moment à part. avant que la réalité ne te frappe et que tu doives filer régler un problème, car c'est toujours ainsi. une merde incessante.
tu peux alors souffler un moment, boire ton café d'une gorgée, appréciant le goût amer qui glisse dans ta tranchée. certains diront que seuls les potentiels psychopathes apprécient cette sensation dégueulasse. parce que, c'est dégueulasse, mais c'est ça qui est agréable. peut-être que t'en es une, en vrai. la regardant écrire, d'un oeil plutôt bienveillant, brillant d'une idée qui s'éclaircit dans ta tête, sa réponse te fait arquer un sourcil. l'audition est-il un critère d'intelligence ? pas à ta connaissance. il y a des crétins qui entendent parfaitement bien.
j'adore les artistes, ils ont l'esprit aventureux et aussi libre qu'un oiseau. t'écris simplement, tournant fièrement ton carnet pour qu'elle puisse lire. les oiseaux sont ta passion, nul doute que ça te fait toujours un truc d'en parler, ça te rend presque enfantine à nouveau quand tu lisais tous ces livres, le soir, sous ta couette.
tu n'as pas besoin d'expérience, le travail est simple, t'as juste besoin d'être organisée, ponctuelle et rigoureuse. j'ai besoin que tu me facilites la vie, pas que tu la compliques. parce que t'en as besoin, d'un peu plus de légerté avant de complétement couler. alors sur le papier ça ne se voit pas, mais t'es autoritaire, malgré tout. malgré ton jeune âge, parce que tu sais ce que tu ne veux pas et tu mets un point d'honneur à toujours le dire, haut et fort. ou sur le papier, peu importe.
est-ce que tu sais ce que tu veux faire plus tard ? demandes-tu par curiosité, par envie de la connaître et la cerner un peu mieux. son air jeune peut aussi la trahir, peut-être qu'elle est encore trop jeune pour savoir vers quoi s'orienter, l'art c'est vaste.

{ first chance } ✰ @bae so jin

malgré l'aspect femme d'affaire débordée, les attentes sont claires et simples, t'as besoin d'une assistante de confiance, qui puisse comprendre ta manière de voir les choses et apprendre à les voir de la même manière. tu n'as pas besoin d'une copine, tu n'as clairement pas de temps à perdre dans le social, mais d'une personne qui ne te fera pas perdre de temps. temps que tu n'as pas, tu jongles déjà entre études, officiellement, et travail. heureusement que ta vie privée est au niveau 0, pas besoin de gérer ces conneries. pendant qu'elle écrit, tu prends la peine de bien la détailler, imaginant déjà quelques scénarios, des situations difficiles auxquelles elle pourrait être confrontée. elle paraît tellement jeune, t'as été, toi aussi, jeune un jour avec des rêves pleins la tête et peut-être que dans l'fond, très profond, t'as pas envie de lui voler son âme à elle aussi. pourtant, à la fois, l'opportunité est trop belle pour toi. putain t'entends déjà ce que ton père va dire et c'est jouissif. malheureusement pour elle, au jeu du coeur et de la vengeance, c'est toujours la vengeance qui gagne.

"ce serait l'idéal, je trouverais un interprète pour faciliter les débuts, afin que tu puisses communiquer avec les autres aussi, que tu puisses discuter avec eux, faire copains-copains, ou peu importe parce que le travail d'équipe est important, même si pour la plupart ce sont des crétins. par contre, interdit de faire quoi que ce soit dans la salle de pause. il y a des caméras et je ne rends pas les petites culottes perdues." ça peut passer comme une blague, si seulement tu ne tirais pas cette expression sérieux sur ton visage. certains ont essayé, les étudiants sont vraiment des petits lapins, c'est insupportable. si tu pouvais les asperger d'holy water pour les calmer, tu le ferais.

ton expression se craque dans un léger sourire alors qu'elle s'ouvre sur ses rêves. illustratrice, c'est un beau métier. tu dessinais beaucoup quand tu étais enfant, sur des oiseaux, ceux que tu voyais dans les livres ou par la fenêtre, maintenant tu n'as clairement plus le temps de t'adonner à des passions ridicules comme le dirait si bien ton père.
"je te souhaite d'y arriver." une si jeune fille a encore le droit de rêver d'un tel avenir, que tu lui souhaites, même si t'es bien plus cynique dans ce que tu penses. elle a surtout plus de chance de se retrouver dans un taf qu'elle déteste le restant de sa vie, mais autant qu'elle le découvre par elle-même. "est-ce que tu as des question de ton côté ?" tu demandes, tout de même, la motivation est une bonne chose, mais ça ne fait pas tout sans curiosité.