« Je suis perdu… » Il me jetait un regard, peu convaincu. Sans savoir si je voulais en dire plus. Il savait, je lui avais tout raconté. Cette soirée. Cette prise de drogue… encore une. J’ai un problème ! Voilà ce que je me disais sans cesse. Ça ne finira jamais… et j’étais triste. « Je sais plus quoi faire… » Mon médecin était encore distant. Sans aucune parole à mon égard. Il attendait que je choisisse moi. Comme souvent, je me retrouvais là  à lui parler de mes addictions. A vouloir m’en sortir. Parfois il me rassurait. « Ce n’est pas grave, tant que vous restez conscient… » Mais cette fois c’était celle de trop. De la cocaïne. Celle que j’avais trop souvent ignorée. Que j’avais su oublier pendant trois ans. Trois années… pour rien. Et je me sentais faible. Etrange depuis cette soirée. J’en avais parlé autour de moi évidement. Je n’avais pas pu cacher ça plus longtemps. Mais là…. J’étais paumé. Soupirant plus fort, j’avais envie de craquer. Mes mains tremblaient. Mon cœur palpitait… quoi faire ? M’enfermer. Voilà  ce que je pensais. Il fallait que je parte en cure. Encore une fois pour m’en sortir. « Aidez-moi. » avais-je lâché, le regard rempli de larmes. Car j’étais incapable de décider par moi-même. Alors cette fois mon psy s’était mis à sourire. Sans que je ne comprenne pourquoi. Il avait ce regard compatissant. Celui que je détestais… « C’est à vous de prendre la décision. » « Non ! Vous ne comprenez pas. C’est vous qui devez le faire. » Mais à quoi bon lutter ? Cette addiction me rongeait. Depuis des années. Je devais m’en sortir. Pour moi, pour le groupe. Pour Ye Won aussi… notre avenir. « Vous attendez que je vous oblige à vous enfermer. Mais ce n’est pas à moi de décider Il Kyang. Vous devez réfléchir par vous-même. » Mais j’en étais incapable. Comment pouvait-il me dire ça ? Alors que quelques jours en arrière j’étais encore dans un sale état ? J’avais râlé et j’avais finis par quitter ma séance pour m’enfuir. Loin… ailleurs. Sans vraiment savoir ce que je cherchais. Une solution à mes problèmes. A ces vices qui me rongeaient encore. Je voulais juste… m’en sortir putain. Comme Yohan avait réussi à le faire. Il était le seul qui pouvait me comprendre. Mais j’avais trop honte… honte de lui dire que je n’étais pas le frère qu’il pensait. Que je lui mentais trop souvent. Que je n’étais pas capable de lui avouer mes défauts… je voulais être parfait pour lui. Mais au fond… nous étions pareils tous les deux. Trop similaires… et j’avais beau l’admirer lui. Moi je me détestais… J’avais finis par m’isoler, dans ce parc. Pour réfléchir, voir la vie autrement. Mais rien n’avait de sens finalement… quoi faire. Quoi décider… m’enfermer c’était avouer que j’étais trop faible. Mais ne pas le faire c’était prendre le risque de replonger. J’étais mal… encore trop conscient de ce qui m’était arrivé. Je me foutais de savoir à cause de qui… tout ce je voulais c’est que tout s’arrête.

 

Perdu dans mes pensées je ne l’avais pas vu arrivé. Pourtant il y avait cette soudaine présence à côté de moi. Que voulait-il ? Parler je n’étais pas d’humeur. Je n’avais envie de rien. Je ne voulais que le silence, que mes troubles pour me réconforter. Tout ira bien. Je m’en convainquais encore quand sa voix s’était élevée. Je n’avais pas vraiment envie de le regarder. Je pensais même partir avant d’oser lever les yeux vers lui à sa proposition. Mes yeux se plissaient, il faisait sombre dehors mais la lumière du parc éclairait assez. Pour que je distingue ce visage qui me semblait avoir déjà vu. Mais j’avais passé mon temps à croiser des gens, sans jamais nouer de lien. Quand j’étais ivre ou défoncé. Je baisais les yeux « Des trucs hein ? » disais-je comme si je connaissais déjà ce discours. Je l’avais déjà vu j’en étais certains. Mais avec tout ce que j’avais à l’esprit j’étais perdu. Je fronçais les yeux, me reculant un peu pour mieux l’observer. « Laisse-moi deviner c’est petit et ça se cache dans ta poche. » Je savais que c’était ça. Il n’allait pas me proposer de faire un jeu de carte au milieu d’un parc la nuit. Inspirant doucement, je me redressais un peu « Je suis pas intéressé. » alors pourquoi cette petite voix me criait que oui ? Celle qui me hantait toujours. Yohan aurait honte de moi si je sombrais… « Emmerde quelqu’un d’autre. » disais-je avant de me reculer davantage. Je n’allais pas changer de banc. J’étais là où je voulais être. Je lui jetais un regard, un plus sombre mais… sa tête me disait quelque chose. « Attends ! » finissais-je par dire. Comme si finalement je changeais d’avis. « On se connait non ? » et j’étais sûr de ce que je disais.

Je le savais lui et moi on se connaissait. Je me souvenais plus mais son visage m’était familier. J’avais côtoyé tellement de gens à une époque. Dans les bars, les soirées… et d’ailleurs il semblait le dire lui-même. Aurais-je du le laisser partir sans rien dire ? Surement, mais j’étais trop intrigué pour ça. L’observant, je restais malgré tout à distance. Ça ne me paraissait pas si lointain en fait. Je me souvenais même l’avoir déjà vu quand j’étais étudiant alors… j’avais rapidement fait le rapprochement. Si je me souvenais de lui ça ne pouvait être que pour la crimson. Pour la cocaïne j’étais bien trop dans un sale état. « Tu deals de la crimson pas vrai ? » je le savais. Son visage me revenait. C’était le type à qui j’en achetais pour ma consommation personnelle. J’avais lâché un rire désabusé. « je vois que tu changes pas alors. » mais on était pas ami. Je n’avais pas à émettre de jugement particulier. Mais je le faisais, parce-que si j’avais essayé de m’en sortir, je voyais que ce type n’avait rien changé à sa vie. Et je trouvais ça triste finalement. En un an il s’en était passé des choses. Et aujourd’hui j’étais plutôt fier de dire que j’arrivais à dire non. Parce-que j’en étais encore persuadé. J’allais arrêter tout ça ! Je faisais tout pour. Et la preuve ce soir. Je n’en voulais pas malgré les doutes, les choses qui n’allaient pas dans ma vie. Je ne plongerais pas. Enfin… j’espérais surtout. Car la soirée passée avec Azriel n’avait rien arrangé à ma situation. Je crevais d’envie d’y retoucher. Mais c’était mon avenir entier qui était en jeu. « T’en as pas marre de mener cette vie-là ? » et voilà que je sortais les grands mots. J’allais le juger, le condamner même sans rien savoir de lui. « Tu veux pas te faire du fric autrement qu’en pourrissant la vie des autres ? » comme si c’était sa faute. Les consommateurs savaient ce qu’ils faisaient. J’étais con de lui dire ça. Mais il fallait que je joue les moralisateurs. Pour montrer que moi je voulais changer. Ce genre de conneries que j’étais le seul à croire. Je voulais surtout me persuadé que cette soirée n’avait rien changer pour moi. Mais j’étais idiot ! ça se voyait sur mon visage, que j’étais le genre de type qui en avait besoin. Il l’avait dit lui-même… je me détestais.