Lorsque Junyong se lançait dans un live il oubliait tout ce qui se passait autour de lui. Il pouvait oublier des rendez-vous, des sorties entre amis, des repas de famille. Ça lui arrivait même de ne pas s’alimenter, boire, se doucher ou même d’aller dormir quand il était pris par un jeu un peu trop passionnant. Ce n’était pas vraiment sa faute, mais il était tellement plongé dans le jeu qu’il semblait perdre la notion du temps et encore plus quand le gameplay le plaisait. Ce n’était pas rare qu’il mette également son téléphone en silencieux pour éviter de se faire couper dans son élan par quelque chose qui le frustrerait. Malheureusement pour Jaewha qu’il devait retrouver plus tard dans la journée, ce fut ce qui arriva. Yong était tellement plongé dans son jeu, à discuter avec sa communauté et à laisser de côté tout le reste qu’il ne vit pas et n’entendit pas son téléphone vibrer de nombreuses fois. Ce ne fut que lorsque certains de ses viewers lui firent remarquer qu’il s’en rendit compte. Le jeune homme attrapa son portable et vit que c’était Jae. Il haussa les épaules et lui répondit qu’il arrivait plus tard. Cependant, il ne mit aucune heure d’arrivée, reprenant son jeu comme si de rien était. Ça ne le dérangeait pas de le faire attendre parce que c’était un gameplay très prenant.

Après deux heures de live, Junyong décida qu’il avait assez joué pour aujourd’hui et qu’il devait rejoindre l’étudiant. Même si cela faisait des heures qu’il le faisait attendre, le jeune homme n’avait pas envie de se presser plus que cela. Jaehwa avait déjà attendu, ce n’étaient pas quelques minutes de plus qui allait changer son état d’esprit. Le gamer savait qu’il serait en colère d’avoir du patienter autant de temps et donc, un peu plus ou un peu moins, ça n’avait pas réellement d’importance à ses yeux. Il fait donc sa route comme si de rien était et finit par arriver au lieu de rendez-vous. Jaehwa semblait sur le point de perdre patience et de s’en aller mais il est coupé dans son élan par Yong qui s’installa en face de lui. Il savait qu’il allait prendre une réflexion et n’eut pas à attendre plus de quelques secondes avant qu’il ne se mette à râler de son retard. Un sourire amusé s’afficha sur ses lèvres alors qu’il lui répondit. « J’abuse mais t’es encore là Jae. Tu t’es pas barré donc ça veut dire que tu voulais qu’on se voit à tout prix. Et bien sûr que je me suis bien amusé… Même si j’ai pas oublié… Pas vraiment. » Pas vraiment, c’était là la nuance. Junyong n’avait pas oublié, il avait juste été absorbé par autre chose.

La suite le fit rire et son sourire amusé s’étira sur ses lèvres. « Si ça te fait plaisir et que t’arrêtes d’agir comme un papi aigri, ça me va. Je te paie toutes les tournées que tu veux. » Yong était prêt à payer si ça pouvait l’empêcher de passer la soirée avec quelqu’un qui faisait la gueule pour quelques minutes (heures) de retard. Néanmoins, son sourire s’effaça quand il commença à parler de ses choix de vie. Junyong se ferma aussitôt, serrant les poings et les dents et affichant un regard noir quand il le posa sur lui. « Je ne critique pas tes choix de vie, notamment le fait que tu suis exactement ce que papa et maman veut, alors laisse-moi faire ce dont j’ai envie. » Il détourna les yeux pour interpeller le serveur. « Tu prends quoi ? » demanda-t-il sans réelle chaleur dans sa voix. Il n’était plus aussi avenant que lorsqu’il était arrivé. Certes, il avait été en retard, mais Jaehwa savait que ce sujet était sensible pour Yong. Autour de lui, personne ne n’acceptait ses choix et tous voulaient qu’il quitte le gaming pour faire quelque chose de « mieux » de sa vie. Seulement, ils ne comprenaient pas que Junyong s’épanouissait avec les jeux vidéo, mieux, ils lui permettaient d’avoir un emploi du temps flexible et donc de faire ce qu’il souhaitait quand il le désirait. Alors qu’il remette ça sur le tapis l’emmerdait.

Le jeune homme haussa les épaules en entendant Jaehwa lui dire qu’il n’était pas le centre du monde et qu’il allait partir. Seulement il ne l’avait pas fait et il était encore là quand il était arrivé. Il lui sourit quand la suite de la phrase arriva et encore plus avec le reste. Junyong restait un gamin qui aimait sentir qu’il était aimé et qu’on voulait bien de lui. Alors, ça ne le dérangeait pas réellement de se faire engueuler si c’était pour ensuite qu’on lui dise qu’on avait envie de le voir. « Tu vois, tu m’aimes trop pour partir. Et puis, je suis pas le centre du monde, mais du tien oui. » Il le taquinait parce qu’il savait que ce n’était pas vraiment le cas non plus. Mais parfois, il aimait à penser que ça puisse être le cas et ça le faisait sourire et lui donnait envie d’être la personne numéro un dans le cœur de quelqu’un et pas seulement, le remplaçant parce que le numéro un n’était pas conforme à ce qu’on attendait. En pensant à ça, il vit sa grande sœur et son père qui souhaitait qu’il soit plus comme Soyong et qui ne voulait pas admettre que la jeune femme était bien mieux pour tout ce qu’il demandait que lui. Yong se foutait pas mal de tout ce qui était immobilier et voulait simplement jouer. Cependant, son père ne voyait pas les choses ainsi. « Bon okay, j’ai peut-être vraiment oublié. Mais je suis là maintenant. C’est le principal non ? » Junyong lui offrit son plus beau sourire, le sourire charmeur. Celui qu’il réservait seulement aux hommes avec qui il envisageait de coucher.

La suite le fit rire et il leva les yeux au ciel en entendant Jaehwa reprendre ses mots et continuer de se plaindre. « Bah quand tu te plains de la sorte oui, on dirait un vieux papi aigri. Puis bon, comme les vieux, tu n’as aucune répartie. » Parce qu’il fallait l’avouer ce n’était pas top ce qu’il disait et il ne pouvait pas s’empêcher de rire en le voyant essayer de se débattre pour avoir une joute verbale avec Junyong. Sans dire qu’il était imbattable à ce jeu, il se défendait plutôt bien et en face d’une personne comme le sango, il se débrouillait mieux que bien. Jaehwa ne semblait pas avoir beaucoup de répartie et ce n’était pas quelque chose qui déplaisait à Yong. Ainsi, il pouvait se faire la main encore un peu pour quand son père commençait à être bien trop chiant avec lui. Cependant, comme il n’avait pas de répartie, il attaquait là où ça faisait mal et Junyong le fusilla du regard quand il se mit à critiquer ses choix de vie. Certes, ce n’était pas quelque chose que tout le monde voulait faire ou même aurait aimé faire, mais il était heureux dans son métier et s’en sortait financièrement parlant. Le jeune homme avait conscience de ne pas entrer dans les cases que la société avait préétablies, mais il n’était pas malheureux, au contraire. Yong s’épanouissait bien plus que lorsqu’il était à l’école ou même pendant son service militaire.

Il fit donc comprendre à Jaehwa qu’il n’avait pas aimé ses commentaires et aussitôt, il se confondit en excuses. Seulement, ce n’était pas assez, clairement pas. Junyong n’aimait pas qu’on s’en prenne à la façon dont il avait décidé de vivre parce que ça voulait dire qu’on ne le soutenait pas et il voyait ces personnes-là comme ses parents. Ça lui était donc encore plus difficile à accepter quand la personne en face de lui était quelqu’un qu’il considérait comme un ami. « Ouais t’y es allé fort. A chaque fois qu’on se voit, tu me rabâches un truc sur mon métier et la façon dont je vis ma vie. J’ai compris qu’elle ne plaisait pas et je le conçois totalement. Seulement, personnellement, je n’émets pas de jugement sur ce que toi ou les autres font de leurs vies. Alors, j’aimerai un peu de considération et qu’on me fiche la paix sur ça. » Il l’avait encore amère que son ami ait parlé de ça de cette façon. « Puis même si t’as eu une journée éprouvante, ça te dispense pas de te comporter décemment et pas comme un connard. » Yong faisait encore la gueule quand il finit et lui proposa néanmoins de boire quelque chose. Si ça avait été quelqu’un d’autre et pas Jaehwa, le gamer aurait très certainement pris ses affaires et se serait barré. Il avait donc de la chance d’être son ami. Réellement de la chance.

Junyong commanda alors leurs boissons, une bière pour chacun et il prit également du soju pour accompagner le tout avant de simplement hocher la tête quand il le remercia. Pour le moment, il avait besoin de décolérer. Le silence était donc son meilleur ami pour ça. Leurs verres arrivèrent et ils trinquèrent avant d’en boire quelques gorgées. Le rire de Jaehwa fit froncer les sourcils au jeune homme en face de lui et il attendit qu’il prenne la parole. Il se doutait bien qu’il n’avait pas fini et quand ce fut le cas, il l’écouta en haussant les épaules. Qu’allait-il lui dire encore ? Il le regarda tristement, sa colère s’envola au fur et à mesure qu’il lui parlait. C’était affligeant de voir qu’il se rendait compte lui-même que dans sa tour d’argent, alors qu’il avait tout l’argent et le pouvoir qu’il voulait, il n’était pas heureux alors que Yong l’était. Certes, ce n’était pas quelque chose de stable et il pouvait se casser la gueule à chaque instant, mais n’était-ce pas le cas de n’importe quel boulot ? Même si on était salarié d’une entreprise ou CEO, il suffisait d’un événement qui niquait les plans pour que la faillite et la vente de l’entreprise ne soit plus que le dernier recours. Alors, ils étaient tous au même point, qu’importe le métier qu’ils faisaient. Junyong le laissa prendre une nouvelle gorgée, se disant qu’il n’avait pas fini de parler, et il n’eut pas tort. Il fit comme lui et en but une autre, finissant presque son verre. Il avait l’habitude de boire et tenait bien plus que son acolyte.

« C’est pitoyable, parce que tu n’aimes pas réellement ce que tu fais et que tu en as conscience. Ce serait pathétique si tu te voilais la face. Mais comme tu le sais ! Et tu pourrais changer si tu le voulais réellement. Justement avec tout cet argent, fais quelque chose qui te plait et que tu aimes. » Yong ne comprenait pas qu’il n’y ait jamais pensé. Si ça avait été lui, il l’aurait fait depuis longtemps. Mais chacun réagissait différemment suivant comment leur caractère était. Il haussa une nouvelle fois des épaules avant d’ouvrir la bouteille de soju et leur servir des verres. il mordit dans la lèvre nerveusement avant de répondre à sa question. « Rien de spécial. Juste mon paternel qui veut absolument que je devienne agent immobilier comme lui. Mais ça ne m’intéresse pas. Puis Soyong est bien plus douée que moi et elle, ça lui plait. Sauf qu’il veut absolument un homme à sa suite… Et ma sœur, n’en est pas un. » Si elle avait eu un pénis entre les jambes, peut-être que leur père aurait arrêté de faire chier Junyong. Mais ce n’était pas le cas et ça ne le serait jamais. Junyong était voué à devoir subir les remarques de son paternel. « Et toi ? Quoi de beau ? »

Je ne pourrais pas vraiment expliquer la relation que j’ai avec Jun Yong. Ce n’est pas quelque chose de plat, ni de linéaire. Pas quelque chose de vraiment établi tellement ça varie avec le temps et les humeurs. Un coup on s’entend bien, on parle autour d’un bon verre, on refait la vie, et ça me permet de lâcher un peu de lest. Mais un coup nos différences de point de vue nous rattrapent et on passe notre temps à nous engueuler. Surtout à cause de moi généralement. Il faut dire que je suis un peu rigide sur sa façon de vivre sa vie. Mais quelque part il a raison, je tenais vraiment à le revoir. A passer ce moment avec lui et oublier un peu. C’est bien pour ça que je l’ai attendu pendant deux heures et que je ne suis pas parti. Chose que je n’aurai fais pour personne d’autre. A part pour mon cousin bien entendu. J’ai un petit rire alors que je lui répond.

“Ça doit être ça oui, je t’aime trop ! Pour ce qui est d'être le centre de mon monde je pense que tu te fais un peu des films.”

Pourtant, Jun Yong marque un autre point. A ce moment-là, il est le centre de mon attention. De mon monde je ne sais pas. Mais à ce moment-là, c’est lui qui est là pour moi, c’est lui qui a fait le déplacement. Alors quelque part, il est le centre de quelque chose pour moi. Mais je ne lui dirai jamais et je ne sais pas s’il me croirait si je venais à lui dire. Donc autant ne pas tenter le diable. Un autre petit rire avec un air un peu hautain suit sa déclaration. “Aaah tu vois tu avoues !” je dis en rigolant. “Mais oui tu es là, je passe l’éponge pour cette fois” je fini en souriant pour répondre par un sourire. Un sourire qui pourrait me faire craquer si je n’étais pas encore passablement énervé. “Comment ça je n’ai aucune répartie ? Demande à mes employés si je n’ai pas de répartie on en reparlera. Toi c’est spécial, peut-être que tu me troubles beaucoup” je rajoute en rigolant doucement.

Je ne vais pas nier que Jun Yong est beau. Dire le contraire ça serait mentir. Il est très séduisant et typiquement le style d’homme que j’aimerai séduire. Je n’ai jamais vraiment fait d’avance à Jun, peut-être un jour, mais il n’y jamais vraiment eu de bonnes occasions. Et puis est-ce que je veux casser cette fragile relation ? On verra bien. De toute façon ce n’est pas vraiment le sujet. Parce qu’une nouvelle fois j’ai mis les deux pieds dans le plats et j’ai décidé de l’emmerder à cause de sa carrière. Oh le fait que j’ai passé une journée horrible joue beaucoup, mais je n’ai pas à lui faire subir ça. Mais c’est plus fort que moi. Et encore une fois je vais loin. Beaucoup trop loin. Ça ne lui plaît pas et c’est bien normal. Est-ce qu’il critique ma façon de vivre ? De diriger mon entreprise ? De traiter mes employés ? Comme il me le dit: non, il ne le fait pas. Ce n’est que moi. Oui je suis con. Oui je suis imbu de ma personne et je ne manque pas de rappeler cette supériorité aux gens. Y comprit à Jun Yong, à un ami. C’est comme si je n’avais pas de pitié sur le moment. Je ne le vois que trop tard. Et il ne me reste plus qu’à m’excuser. Oui moi Jeong Jae Hwa ça m’arrive de m’excuser. C’est rare. Mais ça arrive. J’attends qu’il finisse de parler. Je me sens mal. Parce que ça me renvoie à qui je suis. A ma vie. Ce que je fais tous les jours et ce que j’aurais aimé faire si je n’avais pas suivi aveuglément la voie de mes parents. J’y pense de temps en temps. Et c’est généralement avec Jun Yong que j’y pense, parce que malgré les piques, je l’envie beaucoup. Même si maintenant, je ne changerai pas de vie, pour rien au monde. J’ai une vie confortable et ça me va. Tout du moins en apparence. “Je ne vois pas vraiment ce que je peux rajouter, tu as bien résumé la chose, je me suis comporté comme un connard. Je ne peux pas vraiment dire le contraire. Mais je ne vais pas passer la soirée à m’excuser non plus. C’est vrai que tu ne me fais pas de remarques sur ma vie, alors je vais arrêter de le faire pour toi. Tu sais bien ce que j’en pense de toute façon.”

Je baisse la tête, je me sens honteux. Je sais que j’aurai du mal à lui faire cette promesse. Mais je peux bien essayer pour lui. Je lui dois bien ça. Il commande les boissons puis nous tombons dans un lourd silence. Chacun dans ses pensées. C’est un silence lourd. Je le sens peser sur mes épaules. Je n’aime pas ça. Je n’aime pas ne pas avoir le contrôle. Et là je sens que tout me glisse des mains. Parce que j’ai beau lui faire remarquer qu’il gâche ses opportunités, mais moi… Moi je lui avoue que je ne suis pas vraiment heureux. Que j’aimerai faire d’autres choses, avoir une liberté que je n’ai plus. Qu’il a lui. Et que si je n’approuve pas sa voie, j’envie la liberté qu’il a décidé de prendre. Je bois en l’écoutant. Ça fait mal ce qu’il me dit, ça fait mal mais il a raison. Dans certains moments je suis pitoyable. Un pitoyable pantin. Je ris amèrement, la brûlure de l’alcool me donnant un peu de courage pour m’exprimer. Ou de l’amertume, je ne sais pas.

“Pitoyable… Tu trouves décidément les mots justes mon ami. L’argent je l’ai, la célébrité ? Peut mieux faire mais je ne suis pas vraiment à plaindre. J’aimerai bien faire ce que je veux. Mais tu vois… Ce qui me manque ce n’est pas l’argent, mais le temps. J’ai pas le temps. J’ai plus le temps Jun-ah… Je travaille, j’étudie, et je perds mon temps ahaha. Et parfois je sors, je trouve quelqu’un sur qui passer tout ça. Tu peux rire, tu as le droit.”

Mon visage se relève vers le sien, je finis mon verre. Trop vite à mon goût, je fais un signe au serveur de nous resservir avant d’écouter ce que me dis mon vis à vis. C’est ça le comportement de son père ? C’est triste mais j’ai l’impression de voir le mien. Sauf que moi je n’ai jamais vraiment résisté à la tentation. J’ai dis oui. Et maintenant je dois assumer. “J’imagine bien que ce n’est pas ce que tu veux oui. Ton père ne changera pas d’avis ? Il va bien finir par voir que tu ne veux pas et peut-être qu’il finira par vraiment céder les rênes à ta soeur ? Quelque chose me dis que tu as les moyens de lui prouver ce que tu veux non ?”

C’est naïf, parce que les gens comme son père. Les gens comme mon père. Ne changent pas d’avis comme ça. S’il veut que Jun Yong soit l’héritier des An il fera tout ce qui est en son pouvoir pour que ça se passe comme ça. Même si ça doit blesser son fils au passage. Mais tant que Jun Yong conserve sa liberté ça devrait aller. Même s’il va devoir se battre pour la garder et j’en sais quelque chose.

“Moi ? Tu veux vraiment entendre parler de livres de comptes ? Nan mais sans plaisanter, je pars bientôt en vacances. Oui tu peux marquer ça sur un calendrier, je vais prendre deux semaines de vacances à Jeju. Tu me parlais de faire ce que je veux et bien voilà. Je laisse même mon téléphone du boulot à mon cousin c’est pour te dire. Je prévois de me prendre une petite baraque, parcourir les flancs de la montagne. Me ressourcer quoi. Seul ou accompagné ça je sais pas encore. Mais voilà les nouvelles.” je dis, mes yeux se perdant un peu dans le vide. “Au fait oublie ce que j’ai dis, c’est moi qui paie, je te dois bien ça. Et oublie tout ce que je t’ai dis, je ne ferais plus la morale, c’est … promis, voilà c’est promis…”

Junyong le taquinait quand il parlait d’être le centre de son monde et pourtant, ce n’était pas forcément faux. Si avec toute autre personne il se serait barré en voyant que le jeune homme ne venait pas, Jaehwa était resté et avait même attendu plus qu’il ne l’aurait du le gamer. Un sourire malicieux s’afficha sur les lèvres de Yong alors qu’il lui répondit. « C’est ce que tu essaies de te convaincre. Mais on sait tous les deux que c’est faux. » Il jouait encore un peu avec lui parce que ça l’amusait de le voir si détendu. Il avait toujours l’air d’avoir un balai dans le cul alors, le voir rire à cause de ses conneries, le faisait encore plus sourire en coin. Mais puisqu’il rentrait dans son jeu, Junyong décida d’avouer qu’il avait réellement oublié leur rendez-vous et que maintenant qu’il était là, c’était le principal. Il ne put s’empêcher de rire face à la réaction du plus vieux. Il passait l’éponge et c’était tout ce qui importait à Yong. C’était quelque chose de moins à se faire reprocher, alors qu’il l’attaquait cette fois sur le fait qu’il n’avait pas de répartie et qu’il ressemblait à un papi aigri. Sa réponse lui fit froncer les sourcils. « Je sais que je te trouble ! Mais c’est pas la peine d’agir comme si tu ne savais plus quoi dire… Puis bon, j’espère bien que t’as de la répartie avec tes employés… Sinon, je les plains d’avoir un patron si fébrile qui se laisse marcher sur les pieds. » Parce que s’il n’avait pas de réparti, c’était le cas non ?

Si le début de la conversation avait un ton de détente et de taquinerie, la suite ne le fut pas autant. En effet, Jaehwa émit une nouvelle fois un jugement sur la façon dont Junyong vivait sa vie. ce dernier avait décidé de ne pas poursuivre la voie que son père avait tracé pour lui, laissant Soyong faire ce qu’elle savait faire mieux que lui. L’univers de l’immobilier ne lui plaisait pas du tout et sa grande sœur s’en sortait bien mieux que lui. La seule chose que leur paternel lui reprochait était qu’elle était une femme et dans son esprit archaïque, une femme ne pouvait pas prendre la tête de l’empire familial. Pourtant, c’était le meilleur choix. Ce n’était pas Yong et son envie de jouer aux jeux vidéo h24 qui allait faire avancer l’entreprise des An. Alors, ça ne lui plut pas qu’il fasse des remarques sur sa vie et ce qu’il en faisait. Junyong n’eut donc pas sa langue dans sa poche lorsqu’il le reprit, expliquant qu’il comprenait très bien qu’il n’approuvait pas son style de vie et son métier et que même s’il avait eu une journée compliquée, ça ne le dispensait pas de bien se comporter avec lui. Jamais il n’oserait dire quelque chose à son ami sur son entreprise et son choix de suivre comme un brave toutou le choix de ses parents et pourtant, il pourrait. Parce que Jaehwa était clairement ce que ses parents voulaient qu’il soit et ça, Yong ne le concevait pas. Cependant, jamais il n’aurait dit quelque chose et ce même si cela lui brûlait la langue. « Si t’en as conscience, c’est le principal. Oui je sais ce que tu en penses… Et l’incident est clos. » Junyong n’allait pas resté cinquante ans sur ce qui venait de se passer et ce qui l’avait blessé. Il n’était pas vraiment un adulte pour énormément de choses, mais pour ça, il l’était.

La suite resta dans le même ton et cette fois-ci, Yong osa dire ce qu’il pensait de la vie de Jaehwa, disant que c’était pitoyable parce qu’il se rendait compte qu’il n’aimait pas ce qu’il faisait et Yong voyait une solution simple dans ce qu’il faisait. Il n’avait qu’à utiliser l’argent qu’il avait pour faire en sorte de sortir de cette spirale infernale et faire ce dont il avait envie. Ce n’était pas difficile et pourtant, Junyong avait le sentiment que son ami ne souhaitait pas se défaire de l’emprise de ses parents. Ce qu’il fallait avouer, lui passait totalement au-dessus de la tête. Yong ne comprenait pas pourquoi il s’obstinait dans cette voie qu’il n’avait pas choisi et dont il ne voulait pas. « Tu n’as pas le temps, parce que tu ne veux pas le prendre. Si tu choisissais pour toi et non pas pour correspondre à ce que tes parents veulent, crois-moi que t’aurais le temps ! Mais bon après tout… Si ça te plait comme ça. » Junyong haussa les épaules, finissant son verre avant que le serveur ne vienne les resservir. Il se mit alors à parler de sa famille et de l’idéal dans lequel son père voulait qu’il se trouve. Seulement, contrairement à Soyong, Yong n’avait aucune idée de ce que c’était de travailler dans l’immobilier et il n’avait clairement pas envie de le faire. Ce n’était pas son projet de vie, mais celui de sa grande sœur. Le seul défaut de Soyong était qu’elle n’était pas née avec un pénis entre les jambes pour satisfaire leur paternel. « J’ai effectivement les moyens de lui prouver que je ne suis pas celui qui lui faut à la tête de l’empire. Seulement, il est tellement buté que tant qu’il n’aura pas tout fait pour que je me mette à travailler pour lui, qu’il n’acceptera jamais que Soyong prenne les rênes. C’est pour ça que je lui dis de partir à son compte… Mais elle est frileuse parce qu’elle se doute que notre père va lui mettre des bâtons dans les roues. » Et ce n’était pas faux. Le père An n’accepterait jamais que sa fille lui fasse de l’ombre, donc il ferait tout pour l’empêcher d’achever son but de faire une autre agence immobilière.

Yong demanda ensuite ses nouvelles à lui et un air de surprise s’afficha sur ses lèvres alors qu’il ouvrit la bouche pour le regarder comme s’il était fou. « T’es sûr que t’es pas malade ? Genre tu vas vraiment prendre des vacances sans penser au boulot ? Mais il t’arrive quoi ? » Un rire s’échappa de ses lèvres tellement il était complètement abasourdi par la bombe qu’il venait de lancer en plein milieu de la conversation. « Seul ? Ça te ressemble pas vraiment. Tu trouveras sûrement quelqu’un sur place, je me fais pas de souci pour toi sur ce point-là. » C’était même sûr qu’il aurait quelqu’un à Jeju parce qu’il n’était pas le genre de personne à rester seule. Junyong hocha ensuite la tête et il haussa les épaules. « Le sujet est clos non ? Donc pas besoin de revenir dessus. » Il plongea alors son regard dans le liquide alcoolisé qu’il avait entre les mains. « Et je croyais que c’était moi qui devait payer parce que j’étais en retard… » Il releva ensuite le regard vers lui et un sourire en coin s’afficha sur ses lèvres tandis qu’il reprenait la parole pour changer de sujet. « Sinon, tu prévois de rentrer seul ce soir ? Parce qu’il y a un beau jeune homme qui te regarde depuis tout à l’heure au comptoir. »