L’ennui était épuisant. C’était comme un vide qui mettait une journée, une soirée, en pause. C’était un poids que la jeune étudiante devait traîner derrière elle jusqu’à ce qu’elle retrouve une idée pour s’occuper. Personne de ses contacts n’était disponible ou avait envie de la rencontrer pour la suivre dans son idiotie et folie. Elle ne leur en voulait pas, elle allait simplement leur faire payer cependant. Lorsqu’elle le pourrait et si elle y pensait. Avançant dans la digital city, shootant dans le moindre obstacle qui se trouvait sur son chemin, son expression fermée et la capuche sur la tête étaient suffisants pour prouver sa mauvaise humeur. Le seul message qu’elle avait reçu de la journée provenait du secrétaire de ses parents, pour lui demander de se calmer sur ses arrestations car la presse allait finir par découvrir son mauvais caractère et ça risquait de tacher la réputation de l’entreprise. Ce n’était pas le problème de Bokhee. Tant qu’ils continuaient de payer pour garder son casier vierge, elle continuerait d’en profiter. Ils n’avaient qu’à venir le lui dire en face après tout. Elle, qui les attendait depuis tellement d’années. Elle, qui n’attendait qu’une chose : les rencontrer pour discuter sérieusement avec et leur dire tout ce qu’elle pensait et comment cette solitude constante la détruisait à petit feu. Très lentement, mais sûrement. Seulement, jamais elle n’avouerait une telle chose. Elle préférait jouer à la jeune femme délinquante, celle qui n’avait peur de rien et vendait des photos et vidéos de son corps pour les adultes.

Elle arriva non loin de l’université. Qu’est-ce qu’elle pouvait détester ce lieu. Comme une prison pour elle qui étudiait une matière qui ne l’intéressait pas. Pourquoi devrait-elle reprendre une entreprise dont elle ne connaissait pas les patrons ? Pourquoi continuaient-ils même de parler d’entreprise familiale alors qu’ils savaient tous que les Ma étaient tout sauf une famille. C’était frustrant, décevant et surtout très douloureux. Mais il était préférable de ne rien laisser passer et ne rien montrer. A force de prétendre que tout allait bien, Bokhee pouvait finir par y croire.
Son pied rencontra une canette qui traînait sur son chemin, la colère montante elle avait peut-être shooté un peu plus fort et l’avait peut-être envoyé devant elle, arrivant dans les jambes de quelqu’un. Son regard suivant l’objet métallique, ses yeux se levèrent jusqu’à arriver au visage de cette silhouette qui s’était retournée au contact. « Ah, c’est toi. » Une connaissance, plutôt qu’un ami. Du moins, c’était ce qu’elle préférait penser. Cependant, elle ne pouvait nier que le temps passé en sa présence l’aidait beaucoup. Encore une fois, cela faisait partie de ses pensées qu’elle ne révélerait jamais. Aussitôt, comme si une idée venait de germer dans son esprit, elle afficha un grand sourire qui se voulait innocent et s’approcher du garçon en sautillant comme l’enfant qu’elle était encore. « Oppa ! » Dit-elle d’une voix qu’elle voulait mignonne, loin du ton qu’elle avait d’habitude. « Oppa, viens on va quelque part, Bokhee s’ennuie. » Imitant ces jeunes femmes qu’elle voyait dans la rue essayait d’être aussi gamines au possible avec leur petit amie, Bokhee attrapa le bras de Yoohim pour ne pas lui laisser le choix.

OOTRP + Depuis ce début d’année scolaire, le coréen ruminait. Il ruminait parce qu’il avait redoublé mais surtout parce qu’il ne vivait plus sous le même toit que sa petite-amie et, il devait l’avouer, la vie en communauté en était rendue difficile. Cela n’avait jamais été facile pour lui, que ce soit la vie sur le campus ou étudier d’ailleurs, mais c’était devenu encore plus complexe pour Yoo Him. Il prenait peut-être les choses trop au sérieux, il était peut-être une vraie drama queen comme Hye Sun l’avait taquiné mais il ne pouvait nier que tout lui pesait ces derniers temps. Ses seuls moments de répit, il les passait dans les bras de la femme qui partageait sa vie ou sur le ring, pour le reste, il avait du mal à évoluer dans sa vie chamboulée. Son psychologue le lui avait bien dit, à trop se fier à ses habitudes et sa routine, il prenait le risque de basculer de nouveau lorsque tout serait chambouler. S’il n’était pas terriblement instable, il était plus taciturne (si c’était possible) et plus anxieux. Et à le voir marcher sur le campus, les épaules voutées, ce n’était pas l’envie de l’aborder qu’il inspirait.

Alors qu’il avançait comme une âme en peine, il sentit quelque chose heurter ses pieds, il marcha dessus ce qui manqua de le faire trébucher. Il s’arrêta donc et se retourna, avisant un visage connu, peut-être aussi blasé que le sien. « Mmh, c’est moi. » Répondit-il d’une voix morne, ce n’était pas qu’il n’était pas content de voir Bok Hee... Il n’avait aucune animosité envers elle, elle le laissait juste perplexe par son comportement, sans qu’il ne se permette de la juger puisqu’il n’était personne pour se le permettre. Comme elle n’ajoutait rien de plus et qu’il n’avait, dans l’immédiat, pas envie d’ajouter quoique ce soit non plus, il allait juste ramasser la canette et la mettre à la poubelle avant de vaquer à ses occupations. Plan mis à mal par la jeune femme qui s’accrocha à son bras, prenant une voix aigüe des plus dérangeantes. Il se tendit au contact inattendu et non désiré, il essaya d’ailleurs d’enlever son bras, mais la prise de Bok Hee était tenace. Il poussa un soupir, fermant les yeux, sentant déjà son énergie diminuer au contact de l’étudiante. « Bok Hee, lâche-moi et ramasse ta canette. » Il la regarda d’un air réprobateur. « Et si tu t’ennuies tu peux étudier. » Ce n’était pas nouveau, si vous comptiez vous amuser, ce n’était pas avec Yoo Him qu’il fallait traîner. Si elle s’ennuyait, peut-être qu’à exprimer son caractère habituel, elle le laisserait tranquille. Ce n’était pas qu’il voulait se débarrasser d’elle, mais si elle était là pour le show, il n’en avait pas la force. Le coréen avait beaucoup de mal avec la vie estudiantine ces derniers temps. « Si t’es sage, on peut aller boire un café, sinon, à la prochaine Ma Bok Hee. » Il avait parfois la fâcheuse tendance à lui parler comme à une enfant, c’était qu’elle en avait parfois le comportement, il ne pouvait pas le lui reprocher, c’était ainsi qu’elle était et qu’elle avait grandi, il n’était juste pas obligé de l’accepter à chaque fois qu’ils se voyaient.

Yoohim n’était clairement pas l’ami le plus joyeux et intéressant pour la jeune femme. Elle aimait le torturer cependant et prendre de son temps, voire ainsi quelles réactions elle arriverait à tirer sur ses traits, ou alors le manque de réponse qui ne faisait que l’énerver plus. Il n’était pas du genre à la suivre dans ses bêtises et continuait de la réprimander comme si elle avait encore cinq ans. Cette fois-ci avait été le fruit du destin. Par le plus grand des hasards, la canette dans laquelle elle s’amusait à tirer s’était retrouvée sous le pied de l’étudiant en question.
Rien qu’au ton avec lequel il lui répondait, Bokhee roula des yeux. Il la fatiguait déjà avec ses airs de garçon malheureux qui le suivait partout. Lui donnant presque l’envie de faire demi-tour pour prétendre ne l’avoir jamais croisé. Sûrement qu’il en serait rassuré, content de ne pas avoir à se coltiner la jeune femme insolente. Seulement, elle n’allait pas le laisser filer. L’ennui qu’elle ressentait était tel qu’elle ne pouvait perdre une telle chance. Alors, c’était accrochée à son bras qu’elle prit une voix des plus dérangeantes, imitant une de ces femmes qui cherchaient à profiter de la faiblesse des hommes. Ce fut aussi le premier échec alors qu’il lui parlait comme à une enfant. Un regard hautain, voire haineux, se posa sur l’objet en acier encore posé au sol avant de se replonger dans celui de Yoohim. « C’est qu’une canette, on s’en fout. » La politesse et le raffinement étaient deux choses que Bokhee utilisait très peu dans son langage. « C’est même pas la mienne, j’ai pas à ramasser les déchets des autres. »

Ce qu’elle pouvait détester la façon dont il lui parlait. Aussitôt, elle se décrocha de son bras pour lui taper l’épaule du poing. « Arrête ça. » D’un côté, elle ne souhaitait pas lui donner raison, ni même lui laisser l’impression de prendre le dessus mais de l’autre, elle ne pouvait ignorer ses entrailles se serrer lorsqu’il lui dit qu’il allait simplement la laisser là. Ce n’était pas si différent des autres au final et c’était bien pour cette raison que la jeune femme ne s’attachait à personne. Ses parents avaient été le parfait exemple et les êtres humains étaient tous les mêmes. Elle-même ne pouvait s’attacher à quiconque car des choses comme l’amitié ou des sentiments de loyauté et de bienveillance étaient faux. « Quoi, tu vas me dire que t’as quelque chose de mieux à faire ? Tu fais que traîner et te lamenter sur ton sort. » Son œil défectueux commençait à la piquer, comme si elle l’avait gardé ouvert trop longtemps, le laissant s’assécher ainsi. Ça arrivait souvent lorsque Bokhee s’énervait ou ressentait de fortes émotions, pour une raison qui lui était totalement inconnue. Elle le couvrit de sa main avant de se retourner et le frotter. C’était un picotement assez dérangeant mais qui allait très rapidement lui passer. Elle n’attendit cependant pas que son organe aille mieux avant de refaire fasse à l’étudiant. « Qui voudrait d’un café en plus, je veux au moins une bière ou du soju ! » Elle buvait beaucoup trop, elle le savait mais seulement dans l’ivresse, elle retrouvait ce sentiment de liberté, auquel elle n’avait jamais goûté par le passé. Elle ne voulait donc pas laisser passer cette opportunité et agrippa Yoohim par le poignet pour le tirer derrière elle et le forcer à la suivre. Seulement, c’était sans compter sur la force du garçon qui était bien au-delà de la sienne. « Toi aussi, tu vas me laisser seule ? » Elle jouait sur la culpabilité, tentait de le faire craquer à sa manière tout en cachant ses insécurités qui étaient si vraies derrière.