-« Joyeux anniversaire… petit connard… » murmura-t-il avec un brin d’affection, avant de souffler sur les bougies.

-« Ça fait combien d’années, maintenant ? » demanda son ami, coude contre la table et menton dans la paume de la main, les yeux rivés sur le petit gâteau.

-« Huit ans. » répondit-il froidement, en prenant le couteau.

-« Ah ouais, quand-même… ça passe si vite… » commenta-t-il, impressionné par le fait que Thiên ne continue de souligner son anniversaire après tout ce temps.

Le vietnamien se contenta de hocher la tête, leur servant chacun une part de gâteau. Il se demandait ce que pouvait bien être devenu ce frère cadet qu’il n’avait plus revu depuis le divorce de leurs parents… Adopté à deux ans, par un couple qui ne pensait jamais pouvoir avoir d’enfants… Il n’avait cependant pas été enfant unique très longtemps. Un miracle avait bien voulu voir le jour et ils l’avaient nommé Chang Kyun. Thiên Duyên était vite tombé sous son charme baveux et avait été réjoui par l’idée d’avoir un petit frère. Faut dire qu’il était mignon ce bambin… et c’était cool de ne pas être le seul gamin, d’avoir quelqu’un à qui montrer l’exemple…

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-« C’est mignon ça… » commenta-t-il, intrigué et surpris en prenant délicatement la petite poupée dans ses mains. « En plus, on dirait qu’elle me ressemble ! » ajouta-t-il avec un grand sourire ravi, venant mettre le visage du jouet à côté du sien.

-« Ah ? Tu te reconnais alors ? C’est cool ! » répondit son créateur, tout fier.

-« Hein ? C’est censé être moi, ça ?! Enfin… Min… » s’exclama-t-il, ahuri, en éloignant la poupée de son visage.

-« Hmmmm… Disons que c’était mon inspiration ? Surprise ? Ça te plaît ? » répliqua-t-il, avec un sourire embarrassé, craignant un peu la réaction du vietnamien.

-« Whaaaaaaat ? Mais je croyais que tu faisais des jouets… pour les enfants ? Je les aime les gamins, hein, mais… Min n’est pas G pour Général… » commenta-t-il, en coiffant précieusement la poupée avec ses longs ongles manucurés.

-« Je sais bien, c’est pour ça qu’elle est inspirée de… mais sa personnalité… ce serait plus la jumelle innocente de Min ? Tu sais, c’est ton côté softie que tu n’oses pas montrer ! » balança son ami, un sourire taquin aux lèvres.

Thiên Duyên pinça les lèvres, lui lançant un regard qui oscillait entre être blasé et outré. Tu parles d’un ami, ce petit con ! Enfin, il n’avait pas tort non plus… Même qu’ils se connaissaient depuis assez longtemps pour que le vietnamien n’est pas besoin de le souligner. Il concentra plutôt son attention sur la petite poupée qu’il avait inspiré. Une esquisse s’étira sur son visage, trahissant qu’il en était touché et fier. En plus, elle était jolie comme tout.

-« Tu comptes en faire quoi ? Si tu dis qu’elle est basée sur une pute de drag queen… ce ne sera pas vraiment vendeur… On n’est pas aux États-Unis… » finit par dire Thiên Duyên, déçu de se montrer réaliste.

Son ami lui répliqua que Barbie avait bien été une copie d’une poupée allemande aux mœurs légères, donc qu’il n’allait pas se décourager ! La drag queen admira les espoirs de son ami et lui tapota doucement l’épaule, lui disant que s’il avait besoin de la version humaine pour aider à vendre son projet, il pourrait toujours compter sur lui ! Évidemment, Thiên ne pensait pas réellement que quelqu’un souhaiterait investir dans ce projet ambitieux et un brin provocant, mais c’est beau de rêver. Ils devraient trouver un nom, aussi, à cette poupée…

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Le jeune homme soupira d’aise, puis passa une main sur son visage. Le souffle encore court, le cœur battant à cent à l’heure et le corps toujours bouillant, il se dit que ce n’était pas le meilleur des amants, mais c’était un bon moment. Ses traits sont harmonieux, même si son nez est un peu trop gros et ses cheveux livrent une bataille sans merci à la gravité, maintenant. Son mini-lui était sympathique aussi, pas trop gros, pas trop petit. Le fait qu’il n’ait une petite courbe vers la droite s’est montré agréablement utile ! Thiên ne se rappelle toutefois pas de son nom et cela ne lui importe que très peu. Il est même probable qu’il ne se rappelle pas avoir passé quarante-cinq minutes en sa compagnie, plus tard dans la semaine ! Le vietnamien se redresse, tapote doucement l’épaule de son amant – une manière comme une autre de lui dire « t’as bien fait ton boulot, monsieur ! » - et ne perd pas plus de temps avant de sortir du lit. C’est qu’il a d’autres choses à faire que de rester là à dormir en cuiller. Il a une vie à vivre ! Il doit se laver les cheveux, faire sa lessive ou juste glander à remplir ses tableaux pinterest, comme tout le monde ! En moins de dix minutes, Thiên Duyên est tout rhabillé et passe déjà la porte de l’appartement de l’inconnu. Non, il n’a pas besoin de le rappeler. Le vietnamien ne lui a pas laissé son numéro, de toutes manières.

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-« Le lycée…? Urg… c’était l’horreur ! Surtout la fin ! J’ai détesté ! » grommela Thiên Duyên, affichant clairement son dégoût.

-« Ah ouais ? J’aurais cru que tu étais la reine de ton établissement ! » lança joyeusement son amie.

-« C’était… le cas, dans mon premier lycée… mais, mon père et moi avons déménagé. J’ai changé d’école, je ne connaissais personne… Je commençais à découvrir un peu plus mon corps… et celui des autres. Les athlètes de l’équipe de soccer étaient beaux et assez aventureux, quand personne ne le savait… » expliqua-t-il, roulant les yeux en se décourageant de sa naïveté de l’époque. « Puis, on m’a surpris avec le gardien de but… sous les gradins et évidemment… je me suis tout pris dans la gueule. Dans tous les sens du terme et l’enfer a alors commencé… » admit-il en soupirant, avant de prendre une gorgée de son verre.

Thiên Duyên était le petit nouveau, celui que personne ne connaissait. Il avait été facile de tout lui mettre sur le dos, tandis que l’autre garçon s’en sortait indemne et faisait partie de ceux qui lui faisaient la vie dure. Tous les jours avaient leur lot d’emmerdes, il rentrait souvent avec des ecchymoses ou autres blessures du genre. Il faisait toutefois au mieux pour les cacher, ne pas inquiéter son père avec tout ça. L’homme souffrait déjà assez de son divorce et il semblait être le seul adulte qui l’aimait. Parce que même les professeurs faisaient comme s’ils ne voyaient rien ou comme si tout était de la faute de la victime des moqueries.

-« Non, c’est vraiment instagram qui a été mon premier royaume, qui m’a aidé à me faire de nouveaux amis… de vrais amis… » reprit-il avec un sourire plus doux.

Il leva d’ailleurs son verre, venant le cogner contre celui de son amie, l’ayant rencontré sur ce réseau social, quelques années auparavant. La jeune femme lui rendit son esquisse et lui fit un clin d’œil, avant de prendre une gorgée.